lundi, 08 juillet 2013
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Comme il était question de terres inondées, et comme la collusion avec les flots noyant Lourdes était tout à fait involontaire – sans quoi il faudrait songer que j’ai des dons de divination –, je songeai soudain à la joie, à l’extase qui était la mienne, enfant puis adolescent, de remonter le cours du petit ruisseau bordant le bois, chez mes parents, après de fortes pluies. Ce ruisseau, sans nom sur les cartes I.G.N., n’y figure qu’en pointillés, ce que confirment mes souvenirs : l’été, son lit était de boue craquelée, sans même une flaque, près de la clôture faite de pieux de robinier et de fil de fer où je m’imaginais que je trouverais un jour des insectes piqués, le lardoir d’une pie-grièche. Mais jamais vu de pie-grièche près de la maison d’enfance. L’hiver, donc, et déjà l’automne, je remontais, en bottes, le cours dru d’onde pure, l’eau s’étant pourtant brunie sous l’effet des pluies et de l’argile que remuaient tant le passage de l’eau que mes enjambées à contre-courant. Souvent, le bois se trouvait en partie inondé, et je pouvais comparer, par l’engloutissement de tel ou tel boqueteau, de tel ou tel lit de fougères, le millésime d’alors à d’autres plus anciens.
L’écriture, elle, n’a pas encore trouvé son lardoir, ni observé d’étangs au-dessus des racines.
05:55 Publié dans À neuf les terres inondées | Lien permanent | Commentaires (0)
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