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lundi, 12 février 2024

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J’ai retrouvé aujourd’hui, en cherchant autre chose dans un de mes comptes d’archivage gmail, un vieux tapuscrit de 2014, Le Moine qui arrouméguait, livre qu’il faudrait continuer à mettre en forme et compléter mais qui, même en le reparcourant dix ans plus tard, tient la route.

 

Traduit 14 pages (27 depuis samedi). —— Quelques coriacités.

 

vendredi, 26 janvier 2024

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Depuis bientôt deux semaines je me suis remis à l’écriture de sonnets, toujours sur Facebook car la fenêtre de publication Facebook est ce qui libère mes doigts ou mon cerveau ou les deux bien sûr.

 

Et je me demande – j’ai commencé à les archiver dans un document Word – si je devrais les proposer à une revue, ou à une maison d’édition, car ces nouveaux sonnets ont un principe commun : ils se servent de, voire abusent des, parenthèses. D’où leur titre (provisoire) : Sonnets braqués.

 

dimanche, 21 janvier 2024

sans son stylo avec mon stylo

D’emblée en librairie c’est un volume tête-bêche.

˙ǝɹʌıן ǝן ʇıɐןqɯǝssǝɹ ıonb à ɹǝɹébbns ɹnod sǝɔnʇsɐ’p éןqnopǝɹ ʇuɐʎɐ ɹnǝʇıpé’ן 'xnɐıɔos xnɐǝɹ sǝן ɹns sɐd sıɐɯ ǝɥɔêq-ǝʇêʇ ǝɯnןoʌ un ʇsǝɔ ǝıɹıɐɹן uǝ

Le mot tête-bêche est parfait : un circonflexe de chaque côté du trait d’union. Un peu comme ce volume, ou ce livre ou cet ouvrage : dans un sens, on lit sans son stylo et dans l’autre avec mon stylo.

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Il n’y a pas de pagination, mais sans son stylo « fait » 80 pages, tandis qu’avec mon stylo n’en fait « que » 72.

Le nom de l’auteur n’apparaît nulle part mais il paraît – merci le paraîtexte – que c’est Philippe Annocque. Ce serait bien son genre. Avec son genre.

 

On ne va pas vous raconter ce que racontent ces deux récits qui n’en forment qu’un seul ; Enfin, on va peut-être vous le raconter. Comptez pas sur moi.

Si : c’est un livre répétitif. C’est un livre un peu répétitif. C’est un livre répétitif. C’est un livre à peine répétitif. C’est un livre répétitif. C’est un livre passablement répétitif. Il paraît que c’est un livre répétitif. Un jazzman allemand — mais il est mort — m'a suggéré que c'était un livre répétitititititititititif.

C’est un livre répétitif. Et en même temps c’est un livre diffracté. Je, il, on, son, mon. Un livre de pronoms et de prépositions.

 

Il paraît que je pourrais multiplier les paragraphes à faire le malin comme ça mais ça n’a aucun intérêt donc je vais plutôt vous dire comment j’ai lu ce livre. J’ai commencé par lire un petit tiers de avec mon stylo, puis j’ai lu les 8 ou 10 premières pages de sans son stylo. Puis, j’ai alterné un peu avant de finir avec mon stylo d’une traite – ce n’est pas « d’une traite » puisque tu es en train d’expliquer que tu l’as lu en plusieurs fois – puis de lire sans son stylo jusqu’au dénouement.

Peut-on dénouer les pronoms ?

Pourrai-je dénouer cette absence de stylo – vu qu’on j’écrits au clavier.

 

Qu'importe. Allez lire, avec vos yeux et sans mes yeux. Si vous choisissez de lire à tour de rôle une page de chacun des deux textes, prenez d'ores et déjà rendez-vous avec votre médecin, car la tendinite vous guette.

 

samedi, 29 avril 2023

29042023 (#DMWM)

Ce matin j’ai presque fini de (re)lire Wittgenstein’s Mistress. Mon avis n’a pas varié : c’est une œuvre fondamentale. Par contre je pense que certains aspects plus « problématiques » m’avaient moins frappé lors de ma première lecture.

J’ai très envie de tenir un carnet, non pas de relecture – il est déjà trop tard, à moins de le faire pour une troisième lecture – mais d’analyses, un peu comme j’avais autrefois créé mon premier blog pour accompagner la préparation de mon cours de CAPES et d’agrégation sur The Good Soldier.

 

Ce carnet pourrait prendre la forme d’un hashtag récurrent sur mon compte Twitter, par exemple et sans originalité : #DMWM. Si j’écrivais, en parallèle du carnet d’analyse, un pastiche – ou fiction dérivative – ce texte pourrait commencer ainsi :

 

Is it before or after I decided to write a series of analytical texts on Markson’s Wittgenstein’s Mistress that I realized that the first-name Artémise in Nino Ferrer’s famous song Le téléfon must have come from his Italian origins, I cannot fathom.

Though this happened on this very day, on this very Saturday.

Saturday being the day I am writing these lines, and I have decided to write down what I think about Markson’s Wittgenstein’s Mistress.

That phones were never mobile then, and that mainstream technology was mostly cassette decks and typewriters. Back then too.

Now I come to think about it the connection between the first-name Artémise and typewriters is itself unfathomable.

 

vendredi, 04 décembre 2020

Poème prédictif en 4 dizains

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vendredi, 27 novembre 2020

« Pourquoi écrivez-vous ? »

en réponse à la vidéo de François Bon postée ce matin

 

Au tout début il y eut la fascination de composer des cahiers, même en sachant à peine à écrire, varier la taille des lettres, la disposition sur la page, de façon totalement cochonne car jamais eu de talent graphique, puis la Lettera 32 que mon père nous prêtait car lui utilisait une machine à écrire plus solide, plus massive aussi (sur laquelle j'ai recopié pas mal de cours, plus tard, l'été, quand j'étais en prépa).

Je me rappelle ma fascination pour deux modèles : l'alexandrin théâtral (Molière, Corneille, que j'avais essayé de lire sans rien comprendre, sans doute) et le journal régional lu chez mes grands-parents maternels le dimanche, de sorte que, avec la Lettera 32, je composais des pages de journal avec des faits divers, et vers 8 ans un acte en alexandrins rimés : mon seul souvenir est qu'un des personnages se nommait Deffailles car j'adorais le verbe défaillir ; si on retrouvait ça on verrait qu'il n'y a pas un vers de juste, sans doute.

Curieusement chez mes grands-parents j'étais aussi fasciné par la lecture du supplément de l'Encyclopédie Quillet, mais jamais essayé de faire un dictionnaire ou une encyclopédie avec la machine à écrire (la machine à taper, on disait).

 

Depuis 2005 je réécris beaucoup plus systématiquement, pour ne rien laisser échapper, pour y aller quand même, pour faire monument ; textes et vidéos sont pour la postérité. Vers les débuts du second blog, une commentatrice m'avait qualifié de polygraphe. Pourtant, en tout ce temps, je n'ai rassemblé qu'un mince recueil. J'écris pour le quotidien, non pour le fixer mais pour en archiver quelque chose, un lambeau.

 

mardi, 24 novembre 2020

Farces foutraques

Tenir ce journal chaque jour de l'année 2020 (il y a dû y avoir deux ou trois anicroches, mais enfin...) n'aura pas été tellement difficile. Quand on voit la difficulté que j'éprouve à terminer quelque chose. Je ne me tiens, au fond, qu'à l'informe et l'infini, l'inachevable*. Dès que s'épelle le mot FIN quelque part dans le lointain, c'en est fini de moi.

Bien entendu l'année 2020 porte en elle, dès le principe... portait une feuille de calendrier avec le mot FIN. Mais ce n'est pas pareil : cette fin est inéluctable ; il suffit de se laisser porter.

 

En lisant le livre de Guillaume Métayer, je me dis que j'aurais pu écrire vingt livres comme celui-là, ne serait-ce qu'au cours des dix dernières années. Voilà, seulement, que je ne l'ai pas fait, et que le conditionnel n'est pas la réalité. Je parle bien de l'essai de Métayer, pas de n'importe quel livre. Diffus, foutraque, ensemble de chapitres simplement reliés par une couverture, mais avec un fil conducteur puissant qui permet de nourrir la réflexion  de manière plus continue (comme si c'était le lectorat, réellement, qui faisait le livre), c'est exactement le genre de livre dont je pourrais tirer, sans exagération, vingt volumes en puisant seulement dans mes archives. Quel sens cela aurait-il ? Aucun, certainement, les sujets n'intéressant personne.

 

Pour en revenir à l'année 2020, il y a une forme d'ironie à ce que ce soit justement cette année étrange, désastreuse, qui me permette d'achever quelque chose. (Il reste 37 jours ; je ne pense pas me porter la poisse en écrivant cela.) Outre la reprise (et l'achèvement ?) du Projet Pinget, que pourrais-je manigancer pour 2021 ?

 

 

* La question de l'enthousiasme qui retombe, c'est-à-dire de l'énergie que je peux mettre pendant quelques semaines ou quelques mois à un texte, à une série de vidéos, à un cours, avant que cet enthousiasme ne s'effiloche, est intimement liée, je pense, à l'intérêt très modéré de mes initiatives : j'en veux pour preuve que les personnes avec qui j'échange sur les réseaux sociaux se passionnent toujours quelque temps pour mes vidéos, par exemple, m'en disant le plus grand bien, engageant même un dialogue constructif etc., avant de ne plus jamais intervenir. Tout cela n'a aucune gravité, vu qu'au fur et à mesure je construis tout de même quelque chose, et un fil conducteur se tisse, à défaut de me guider.

 

jeudi, 19 novembre 2020

Coincé sous un beau préau

J’ai lu le mot Beaupréau dans un livre, donc me voici dans la cour de récréation de mon école primaire, une fois qu’elle a été rénovée, donc quand j’étais en CM2. Sous le préau nous jouons aux billes, selon des règles un peu plus subtiles que celles des gamins d’aujourd’hui, les consoles vidéo les abrutissent. Stéphane Bégu s’exclame que c’est un beau préau, et il se fout de moi.

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Il se fout tout le temps de moi, alors dans la cour de récréation de l’année d’avant, en CM1, je lui casse la gueule, ou plus exactement pour la seule fois de ma vie je fous mon poing le plus fort que je peux dans la gueule de quelqu’un, et ce quelqu’un saigne du nez. Ce quelqu’un c’est Stéphane Bégu. On reprend la partie de billes, mais cette fois-ci c’est dans la cour de récréation du collège Ronsard, et mon fils a honte de voir que je joue aux billes alors que j’ai passé depuis plus de trente ans l’âge d’être au collège.

 

Mais pas celui de jouer aux billes, alors bon.

 

Sous le préau de mon école primaire nous jouons aux billes, mais Stéphane Bégu désormais a la tête et les cheveux de Yaël Bidon, les jambes d’Olivier Saint-Geours, et il parle intelligemment comme Sébastien Raoulas. Le surveillant du collège Ronsard vient nous dire qu’on n’a rien à faire là, on n’est pas de ce collège, et d’abord où sont nos masques.

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Le surveillant, qui est celui des sosies de François Berléand qui ne ressemble pas du tout à François Berléand, a un livre à la main, et ce livre c’est Catastrophes de Pierre Barrault. Sébastien Raoulas me glisse à l’oreille que nous devons nous trouver dans un chapitre inédit du livre de Pierre Barrault. Je lui dis que je ne comprends rien et il m’engueule parce que ce n’est pas parce que nous vivons en 1983 que nous ne devons pas porter notre masque comme la loi nous y oblige en 2020.

 

Je lui dis de laisser tomber, et la cour se remplit de billes. Le sosie de François Berléand qui ressemble à présent à Stéphane Bégu se casse la gueule en glissant sur les billes. Il saigne du nez. Tant mieux. En plus il va choper le Covid19 car les billes se sont toutes transformées en petits avatars de Covid19. Tant mieux. C’est ce que je me dis même si je me rends compte qu’il saigne du nez mais avec les visages des autres personnages du roman de Pierre Barrault.

 

D’ailleurs la partie de billes se poursuit au collège Pierre-Barrault et le surveillant n’est autre que Pierre de Ronsard. Il commence à brailler Mignonne, allons voir si la rose. Je lui pète la gueule, mais bien. J’y prends goût, ma parole. Et puis il n’avait qu’à chanter une de ses antistrophes, car j’aurais pu répondre avec l’épode. Et fusionner François Berléand et Yaël Bidon dans le télépode. Nous voulons des personnages non-binaires. Et des pronoms fuyants. Les il des deux paragraphes précédents ne désignent jamais qui ils semblent désigner.

 

Je m’acharne sur Ronsard ; je lui pète les dents, et je lui colle le seul point-virgule du texte dans l’œil droit.

 

Claire me dit que ce n’est pas charitable, et pas malin, qu’elle avait besoin de poser des questions à Ronsard pour son cours de demain.

Je lui réponds que son cours est sur Les Contemplations de Hugo.

Ça ne te regarde pas, me dit-elle.

Il  n'avait qu'à pas me dire d'arrêter de singer bêtement et sans talent l'écriture de Pierre Barrault.

Mais il ne t'a pas dit ça, me dit Claire.

 

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J’ai l’impression que Claire est en fait la Claire du roman de Pierre Barrault et ça m’effraie car je n’ai pas lu le roman et je ne connais pas tous les couplets de What shall we do with a drunken sailor. Pierre Barrault me dit que ce n’est pas grave, mais je ne l’écoute pas car c’est lui le sosie de François Berléand et si je n’avais pas lu le mot Beaupréau nous n’en serions pas là.

Le narrateur n’avait qu’à passer sa jeunesse à Saint-Genouph, et nous n’en serions pas là.

 

Sébastien Raoulas me dit que ça se voit que je n’ai pas lu Catastrophes car ce n’est pas un roman, mais des fragments.

Je lui dis qu’il faut qu’il arrête de se contenter de lire les quatrièmes de couverture car c’est bien un roman, et d’ailleurs il y a un début et une fin.

Yaël Bidon hoche la tête.

Et entre le début et la fin il y a les péripéties.

Yaël Bidon hoche la tête. C’est elle qui a pris la photo de l’agent immobilier dans l’appartement, juchée qu’elle était sur l’éléphant de François Delarozière. Elle est prête à faire cours sur Ronsard, mais elle croit que ça veut dire qu’il faut être juchée sur le Ronsard-machine de François Delarozière.

 

Je reprends mes billes, car il est évident que j’ai pris un des mauvais chemins pour aller à Beaupréau. Sans ça je ne passerais pas mon temps à m’égarer dans la cour de mon école et dans celle du collège Ronsard.

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Je sors du collège qui est mon école de quand j’étais en CM2 mais avant qu’elle ne soit construite, j’ouvre Google Maps qui s’ouvre sur la page 142 de Catastrophes et me dirige vers Saint-Genouph. Claire me tend le nez sanguinolent de Stéphane Bégu. Claire chante This Is No Mine Ain House, dont je ne connais pas les couplets non plus mais que je chante en entier.

Au milieu de la rue Puspök, nous nous arrêtons, figés. Plus moyen de nous bouger.

Chut, me dit Claire, Pierre Barrault est en train de se raser, et il suffit d’attendre qu’il ait terminé.

 

De toute façon, me souffle Sébastien Raoulas, dont je me demande ce qu’il fout dans mon aéroplane blindé, de toute façon c’est un fragment inédit de Catastrophes, nous n’en sortirons jamais.

Et nous n’arriverons jamais à Saint-Genouph non plus.

Désespéré, j’avale une bille pour que Sébastien Raoulas se transforme en Stéphane Bégu et que je puisse lui casser la gueule.

 

vendredi, 16 octobre 2020

Mon trajet pour aller au travail (#infraPerec 38)

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Le plus souvent je m’y rendais en voiture, tant que les enfants étaient très jeunes et qu’il fallait les emmener dans des lieux différents (nounou et école puis école et collège) et aussi avant que les transports en commun ne s’améliorent, en 2013, avec la mise en service d’une ligne de tramway et d’une ligne de bus rapide. Dorénavant, il m’arrive encore de m’y rendre en voiture – et de me garer dans le lugubre second sous-sol du site Tanneurs – mais c’est souvent aussi en tram (alors, je rêvasse, je pianote sur mon smartphone ou j’écris des textes à contraintes, comme jadis les Quatramways) et désormais, depuis juin, à vélo, avec le VTT que nous avons acheté pour mon fils aîné mais que je peux utiliser quand il est à Rennes. Comme je mets en général un peu moins de vingt minutes, c’est le vélo qui est le plus rapide (contre 25 à 30 minutes de porte à porte avec bus 2 et tram A), mais faut-il décompter le temps passé à se désaper tous volets fermés dans mon bureau, à sécher ma sueur à la serviette et à remettre du déodorant ?

Au retour, je ne parviens pas toujours – ni souvent – à gravir la Tranchée sans mettre pied à terre. Avant-hier j’ai enfin tenté de passer le premier plateau et je crois qu’à l’avenir je parviendrai en haut de cette côte pentue de 750 mètres sans mettre pied à terre.

Quand je me rends au travail en voiture, c’est l’occasion de rapporter les livres empruntés à la B.U., d’en rapporter plus facilement et sans me déboiter l’épaule, d’écouter des disques ou de me brancher sur France info, ce qui a, en général, l’inconvénient de me déprimer ou de me stresser. Dans le tram, à l’occasion, les réseaux sociaux consultés via smartphone ont le même effet.

À pied, entre l’arrêt du tram et la maison, souvent je chantonne à tue-tête (et je sais que cette formule est contradictoire).

 

samedi, 10 octobre 2020

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vendredi, 02 octobre 2020

Luzillé, sans Luzillé

Hier, je m'étais réveillé à 7 h, presque frustré d'avoir perdu les 2 premières heures de la journée, en général si dynamiques.

Rien de tel aujourd'hui ; j'ai pu avancer dans le texte que j'essaie d'écrire et dont le titre provisoire est Luzillé dans l'œuf. Mais ce titre est mauvais, je n'arrive à rien faire avec "Luzillé" ; il va falloir virer "Luzillé" du titre. Ce qui est dommage : je voulais "faire" régionaliste.

Espérons que je m'accroche.

En avril, j'ai abandonné d'un coup le long projet lactations : déSastres dont j'avais pourtant écrit la moitié en trois mois. Si je m'y remettais d'arrache-pied maintenant, j'aurais le temps de le finir pour le 31 décembre (c'était l'idée de départ).

L'an dernier, j'ai laissé en plan Les valeurs de l'ovalie, dont l'écriture m'avait beaucoup amusé pendant un mois.

Heureusement que je ne suis pas velléitaire et saute-ruisseau pour tout comme pour l'écriture.

 

Ce soir, Hugo Gaston, jeune tennisman français, a vaincu en cinq sets Stanislas Wavrinka, très largement favori. C'est étrange de regarder un set par-ci par là de Roland-Garros, par les journées froides, grises et pluvieuses de ce début octobre.

 

Après un passage par la FNAC et la rue Nationale (peu fréquentée, et où d'ailleurs moins d'une personne sur deux portait le masque), j'ai pu enfin aller saluer Chloé, mon ancienne étudiante, qui tient désormais la librairie Les Saisons, rue Lavoisier. Je ne l'avais pas revue depuis deux ans et quelque, et comme j'étais pressé par le temps, il faudra que je revienne bientôt continuer notre petite conversation.

La librairie est vraiment très jolie, bien tenue, avec de vraies tables et un vrai fonds. Comme il s'agit d'une librairie-cave, j'avais craint que ce soit surtout une cave. Eh bien, pas du tout. Je suis d'ailleurs reparti avec une bouteille de Baudry Vieilles Vignes 2018... et quatre livres, dont L'eau mate de Bernard Manciet.

 

(EDIT du 4 octobre : la bouteille était bonne ; je repasserai en prendre une caisse.)

 

vendredi, 26 juin 2020

Demain dès l'aube...

Quelques distiques inachevés, suite à un jeu sur Twitter...

 

 

Demain dès l'aube, à l'heure où blanchit la beubar

Je ferai un discours.

Victor Vitiligo.

 

 

 

Demain dès l'aube, à l'heure où jaunit le montagne,

Je rongerai.

Victor Mulot

 

 

Demain dès l'aube, à l'heure où blanchit la campagne,

Tu repiocheras 4 cartes.

Victor Uno.

 

 

Demain dès l'aube, à l'heure où blanchit la campagne,

Je démazouterai.

Victor Cargo.

 

 

Demain, dès l'aube, à l'heure où blanchit la campagne,

Je communierai.

Victor Bigot.

 

 

Demain, dès l'aube, à l'heure où blanchit la campagne,

Je me mettrai au point mort.

Victor Stop'N'Go

 

 

Demain, dès l'aube, à l'heure où blanchit la campagne,

Je composterai.

Victor Diligo.

 

 

Demain, dès l'aube, à l'heure où blanchit la campagne,

Je te collerai aux dents.

Victor Berlingot

 

 

Demain, dès l'aube, à l'heure où blanchit la campagne,

Dis, tu vas la pousser ta poubelle, eh connard ?

Victor Parigot

 

 

Demain, dès l'aube, à l'heure où blanchit la campagne,

Je pèterai.

Victor Fayot.

 

 

Demain, dès l'aube, à l'heure où blanchit la campagne,

J'écrirai une merde.

Victor Musso

 

 

Demain, dès l'aube, à l'heure où blanchit la campagne,

Je lècherai.

Victor Miko

 

 

Demain, dès l'aube, à l'heure où blanchit la campagne,

Ça caillera.

Victor Frigo

 

 

Demain, dès l'aube, à l'heure où blanchit la campagne,

Tu les aimes, mes seins ?

Victor Bardot

 

 

Demain, dès l'aube, à l'heure où blanchit la campagne,

Remets-moi la même !

Victor Poivrot

 

 

Demain, dès l'aube, à l'heure où blanchit la campagne,

Je partirai pour le Tourmalet.

Victor Hinault

 

 

Demain, dès l'aube, à l'heure où blanchit la campagne,

On verra bien.

Victor Impro

 

 

Demain, dès l'aube, à l'heure où blanchit la campagne,

Je pâtirai.

Victor Parano

 

 

Demain, dès l'aube, à l'heure où blanchit la campagne,

Fuck the fuckin' shit.

Victor De Niro

 

lundi, 15 juin 2020

Cadavres exquis du 12 juin

en famille, à Rennes

 

Le gros Nekfeu quémande une bouche de poisson dans la mare aux canards.

 

Le rouquin Jean-Patrick, rose, calfeutre Jean-Michel L.-B. tout autour de l'Australie.

 

Le logiciel Genially, jaune, excitait un pottok et une biquette dans la jungle.

 

Mme R., qui souffre d'encoprésie, empeste le thermostat électronique aux grottes de Rocamadour.

 

La passoire claire trépane des prunes dans la poubelle de la voisine.

 

Le chalutier débile refoule une pizza à l'ananas afin de gagner la course.

 

Le rhinocéros maigrelet dévorait des merdes de chien chez mon grand-père.

 

Le barman grisonnant devient les chaussettes mouillées dans le garage.

 

La blogueuse beauté pétomane dévore de l'emmental pouce en l'air dans la merde.

 

Madame la Vouivre, boiteuse, dévore un manteau avec Benjamin Griveaux.

 

Le beau suidé citronné a acheté quelques carottes par un matin d'hiver.

 

Quatre ragondins bipèdes grandiloquents ont réparé un corniflard Marque Repère au fond du lavabo sale.

 

Burokratz le vampire, jaunâtre, a boudigué mon cagoince avec des sacoches de vélo fleuries.

 

Le masque chirurgical goguenard a payé un bidon d'essence comme une vieille infecte.

 

Ninog affolée poignardera mon jus de chaussettes sur une Harley Davidson.

 

Le redoutable Gilles Le Gendre remarque de la pralinoise au lycée Vaucanson.

 

Le professeur de maths taquin démembre un blindeur chauffant dans un coffre-fort.

 

La raie pastenague, toute nue, déloge une tronche de faf dans le cartable de mon frère.

 

Les Bretons fort poilus urinaient du linge de maison au fond de la fosse à purin.

 

Le nabot rabat-joie broute une moustache ridicule chez Jean-Baptiste Poquelin.

 

Aya Nakamura pâle comme un cul a consommé un coloriage anti-stress en crachant un glabiot.

 

La principale tuberculeuse a déféqué les maquereaux dans un bouiboui.

 

Le gigolo qui pue risque de débigoincer la statuette Baoulé dans le camping-car Chausson.

 

Le chien atrabilaire mord des merdes de chat à minuit.

 

lundi, 01 juin 2020

Lect(o)ures

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En ce premier jour de juin, je me contente, pour nourrir cette rubrique qui n'a pas connu un seul jour de jachère depuis le 1er janvier, de cette capture d'écran d'un tweet écrit hier matin.

 

Je m'en veux beaucoup de laisser en plan trois projets qui me tiennent à cœur, mais je manque de temps, et parfois d'énergie, et surtout de motivation dans la durée. Besoin d'être encouragé, peut-être. Au lieu de quoi, comme un idiot qui se disperse, j'ai créé samedi un nouveau compte Twitter dans lequel j'entreprends de transposer en anagrammes la totalité d'un grand roman moderniste.

Le verre d'eau à moitié plein, ce serait de considérer tout ce que j'ai amassé, en blogs et vlog, depuis quinze ans, en le faisant surtout pour moi-même...

 

dimanche, 10 mai 2020

La Pseudo-Phèdre, acte I, scène I



La Pseudo-Phèdre

 

tragédie à moitié racinienne

et à moitié d'inspiration blanquéro-coronavirienne

 

 

HIPPOLYTE.

Le dessein en est pris : je pars, cher Théramène,

Mais à moins de 100 bornes, bien sûr, de Trézène.

Dans le doute mortel dont je suis agité,

J'ai reçu ma convoc pour l'oral de francé.

Depuis [près de deux] mois éloigné de mon père,

Toujours paraît la face de l'affreux Blanquère.

J’ignore jusqu’aux lieux qui le peuvent cacher.

 

THÉRAMÈNE.

Vous pourriez demander au duc de Castaner.

Déjà pour satisfaire à votre juste crainte,

Sans masque suis allé jusques à Villepinte.

J’ai demandé Thésée aux peuples de ces bords

Qui m'ont vendu du gel 15 euros sans remords.

J’ai visité l’Élide, et laissant le Ténare,

Ouï la folle Bergé et la Sibeth ignare.

Sur quel espoir nouveau, dans quels heureux climats

Est l'école dont les portes n'ouvriront pas ?

Qui sait même, qui sait si le roi votre père

Avait assez d'attestations dérogatouères ?

Et si, lorsqu’avec vous nous tremblons pour ses jours,

Il fait des apéros virtuels sans détours,

Ce héros n’attend point qu’une amante abusée…

 

HIPPOLYTE.

Voyons, tout est fermé : les bistrots, les musées !

De ses jeunes erreurs désormais revenu,

Thésée n'a plus Netflix. PokémonGo n'est plus !

Et fixant de ses vœux l’inconstance fatale,

Il accorde à Raoult sa confiance totale.

Enfin, en le cherchant, je suivrai mon devoir,

Et me ferai un masque avec un vieux bavoir.

 

THÉRAMÈNE.

Eh ! depuis quand, seigneur, craignez-vous la présence

De postillons venus de Cathay ou Byzance

Et dont je vous ai vu préférer le séjour

À Animal Crossing, Auchan ou Carrefour ?

Quel péril, ou plutôt quel chagrin vous en chasse ?

 

HIPPOLYTE.

Des marcheurs mensongers toujours je crains l'audace

Depuis que sur ces bords les dieux ont envoyé

La fille de Darcos et Valérie Boyer.

 

THÉRAMÈNE.

J’entends : de vos douleurs la cause m’est connue.

Schiappa vous chagrine, et blesse votre vue.

Dangereuse marâtre, à peine elle vous vit,

Que même confiné vous fustes déconfit.

Mais sa haine, sur vous autrefois attachée,

Est comme une limace après une drachée.

Et d’ailleurs quels périls vous peut faire courir

Le coronavirus ? On n'en saurait mourir.

Phèdre, atteinte d’un mal qu’elle s’obstine à taire,

N'a pas, du pangolin, percé tout le mystère.

Peut-elle contre vous former quelques desseins ?

 

HIPPOLYTE.

Nies-tu donc, tel Blanquer, l'avis des médecins ?

Hippolyte en partant fuit une autre ennemie ;

Je fuis, je l’avouerai, cette vieille Estrosie,

Reste d’un sang fatal conjuré contre nous.

 

THÉRAMÈNE.

N'est-elle pas amie du professeur Raoult ?

Jamais l’aimable sœur des cruels Pallantides

Se sera-t-elle alliée à l'infernal Khauvide ?

Et devez-vous haïr ses innocents appas ?

 

HIPPOLYTE.

Hélas, même au McDrive il n'est point de repas.

 

THÉRAMÈNE.

Seigneur, m’est-il permis d’expliquer votre fuite ?

Sans apéro sur Zoom évitez-vous la cuite,

Implacable ennemi des amoureuses lois,

De la pistache autant que d'olive aux anchois ?

Vénus, par votre orgueil si longtemps méprisée,

Fera-t-elle plus que de Griveaux la risée ?

Et vous mettant au rang du reste des mortels,

Vous a-t-elle exilé à Yèvre-le-Châtel ?

Aimeriez-vous, seigneur ?

 

HIPPOLYTE.

Ami, qu’oses-tu dire ?

Toi qui même sur Zoom n'enseignes pas Shakespeare,

Des sentiments d’un cœur si fier, si dédaigneux,

Vois-tu donc sur Discord des hordes de khâgneux ?

C’est peu qu’avec son lait une mère Amazone

Parmi la Librairie ait essaimé la zone.

Dans un âge plus mûr moi-même parvenu,

J'ai, de Gérard Larcher, le visage charnu.

Attaché près de moi par un zèle sincère,

Tu fus mon Jean Lassalle, aussi ma Flo Lasserre.

Tu sais combien mon âme, attentive à ta voix,

S’échauffait aux récits des faits de Benalla.

Quand tu me dépeignais ce héros intrépide

Qui en maître régnait bien avant le Khauvide,

Les monstres étouffés, et les brigands punis,

Cégété, Heffessu, entre autres ennemis,

Et les os dispersés du géant d’Épidaure,

De Jean-Luc Mélenchon jusqu'à Olivier Faure.

Mais quand tu récitais des faits moins glorieux,

Citoyens éborgnés, glyphosate en tous lieux,

Hélène à ses parents dans Sparte dérobée ;

Bayrou bégayant, De Sarnez imbibée,

Tant d’autres, dont les noms lui sont même échappés,

Les lois contre les gueux et les handicapés,

Ariane aux rochers contant ses injustices,

Les fêtes de Macron aux hivernaux solstices,

Tu sais comme, à regret écoutant ce discours,

L'horreur des yeux crevés m'en éloignait toujours.

Heureux si j’avais pu ravir à la mémoire

Ces faits aussi abjects qu'une chanson de Moire !

Et moi-même, à mon tour, je me verrais lié !

Fallait-il qu'à Beauvau on m'eût domicilié...

Dans mes lâches soupirs d’autant plus méprisable,

Qu'un enfant de cinq ans reprenant son cartable,

Qu’aucuns monstres par moi domptés jusqu’aujourd’hui,

Ne me calmeront tant qu'un lave-mains Feng-Shui.

Quand même ma fierté pourrait s’être adoucie,

Ne pourrais-je trembler au doux nom d'Estrosie ?

Ne souviendrait-il plus à mes sens égarés

De ce confinement qui nous a séparés ?

Mon père la réprouve, et par des lois sévères,

M'ordonne de passer les oraux de Blanquère.

D’une tige coupable il craint un rejeton

Et non de se complaire en vers de mirliton.

Et que, jusqu’au tombeau soumise à sa tutelle,

Estrosie sans Raoult fasse dans la dentelle.

Dois-je épouser ses droits contre un père irrité ?

Et dois-je renoncer à la spé HLP ?

Et dans un fol amour ma jeunesse embarquée...

 

THÉRAMÈNE.

Surtout n'oubliez pas l'attestation marquée :

Le ciel de nos raisons ne sait point s’informer,

Le duc de Castaner risque de gendarmer.

Et sa haine irritant une flamme rebelle,

On trouve le virus dans les camions-poubelle.

Enfin d’un chaste amour pourquoi vous effrayer ?

Sur le monde d'après ne faut-il embrayer ?

En croirez-vous toujours un farouche scrupule ?

Faute d'FFP2, on porte un masque en tulle !

Quels courages Vénus n’a-t-elle pas domptés ?

Avant l'oral du bac faites-vous démâter.

Si toujours Antiope à ses lois opposée

Se trouve, de Schiappa vous aurez la rosée.

Mais que sert d’affecter un superbe discours ?

Même en distanciel vous séchâtes les cours.

On vous voit moins souvent, orgueilleux et sauvage,

Tantôt, tel Robinson, quémander du fromage,

Tantôt, savant dans l’art par Neptune inventé,

Harponner la baleine avecque Son-Forget.

Les forêts de nos cris moins souvent retentissent ;

Sur Animal Crossing que de bestiaux factices !

Il n’en faut point douter, vous aimez, vous brûlez ;

De vous, sans nul coiffeur, la coupe de mulet

À Estrosie enfin aurait-elle su plaire ?

 

HIPPOLYTE.

Théramène, je pars, et vais chercher mon père.

 

THÉRAMÈNE.

Ne verrez-vous point Phèdre avant que de partir ?

 

HIPPOLYTE.

Sans surblouse non plus je ne saurais sortir.

Voyons-la, puisque ainsi mon devoir me l’ordonne.

Quoi, n'est-ce pas là ce cher Daniel Labaronne ?

 

dimanche, 29 mars 2020

La lecture & le viol

La grasse matinée d'hier (réveillé à 6 h 50, levé à 8 h) n'est qu'un souvenir, d'autant plus que le changement d'heure a eu lieu cette nuit et qu'il est “en fait” 5 h.

Lu ce matin le mail d'une collègue sur la messagerie des anglicistes de l'enseignement supérieur :

The generation gap between me and my students increases every year!! Today they asked me for recommendations about novels. I tried to think of novels that might really grab them. These are students for whom under normal circumstances reading a novel is something you do under duress when you are obliged to by a teacher. Et encore. 

Of more recently published novels, I thought Solar Bones by Mike McCormack was just amazing, and that On Earth We're Briefly Gorgeous by Ocean Vuong is now the best American novel (!!). I still think that Dermot Healy's A Goat Song is brilliant. But that's me. I don't know if they would really grab these Millenials. Could anyone recommend novels in English that might really hook very-reluctant-reader Millenials? I kind of feel that the stakes are high because if I could find some novels that they could read on their own with genuine pleasure (and not as a chore) it might turn things around (for some of them). And they could move on from there. I hope this makes sense.

Je lui ai répondu ceci :

I didn't know that Vuong, whose poetry collection I've loved, had written a novel.

I would recommend Markson's Wittgenstein's Mistress but I'm sure that's just me. Otherwise, I know that my L1 classes were generally taken by McCarthy's The Road (alas) and I think Evaristo's latest Girl, Woman, Other would capture those with a keen interest in gender politics.

 

Si je n'en étais pas “rendu” à devoir donner un gros coup de collier en avril pour mes deux cours d'agrégation, et à devoir désormais pondre à peu près un quadrilatère par jour si je veux avoir fini d'ici l'été le projet Scarlatti, je me relancerais bien dans un défi quotidien de vidéo ou de traduction.

Dans le mail de la collègue, j'aime bien l'emploi des verbes grab (séduire ?) et hook (harponner ?). De la lecture comme viol(ence), aussi...

 

vendredi, 03 janvier 2020

Pour évoquer Martin Eden

Vers minuit j'ai fini de lire Martin Eden.

C'est un roman important, très beau ; rien d'étonnant, avec la complexité d'un tel personnage, qu'hypothèses et malentendus se soient multipliés. Idéologiquement, déjà, Martin Eden est difficilement situable : c'est un individualiste, certes, mais penche-t-il du côté libertaire ou du côté d'une forme de culte de soi-même qui préfigure le culte du chef fasciste ? Est-ce vraiment le côté que l'on retient le plus souvent de Herbert Spencer (survival of the fittest) qui l'a le plus marqué ? on ne dirait pas... Et puis surtout : un individualiste qui se prétend réaliste pour son oeuvre littéraire ne se sentirait pas ainsi vidé de l'intérieur car le succès l'a dédoublé et aliéné à lui-même. Une fois reconnu et couvert de gloire, rejette-t-il la société par amertume et misanthropie, ou parce que la rupture de ses fiançailles, intervenue quand il crevait la misère, a rompu son grand amour ? En cela, Martin Eden se situe tout autant dans la lignée des grands héros romantiques comme Chatterton, ou des chercheurs d'absolu monomaniaques (Achab ?) ; cela explique, à mon avis, les passions que suscite le personnage. C'est, en un sens, à la fois un roman d'apprentissage et un roman de déprise, à la fois un roman naturaliste qui s'inscrit dans les conventions narratives du 19e siècle et un roman moderniste comme en écrivirent Ford Madox Ford ou Faulkner.

Pour moi, l'essentiel n'est pas dans ce personnage, ni dans une éventuelle discussion féministe ou LGBT (nécessaire et passionnante, pourtant) du roman. L'essentiel est dans la découverte de l'écriture de London, qui est à des années-lumière de ce que j'imaginais par une simple réputation. Les discussions philosophiques qui émaillent le roman, et qui témoignent probablement de l'influence de Dostoïevski, sont ce qu'il y a de moins réussi, mais sinon l'intertextualité est très riche, l'articulation de niveaux de langue extrêmement différents est une réussite totale, et la façon dont London entremêle les références poétiques et l'influence de prosateurs essentiels du 19e siècle (Poe, Kipling, Stevenson, Balzac) donne une réelle profondeur à l'intrigue. Du point de vue du lexique comme de la syntaxe et du rythme narratif, London multiplie les variations. Le seul regret est que le roman soit aussi long, plutôt inutilement : de nombreuses scènes sont triplées, quadruplées, et, quoiqu'on comprenne que ces répétitions ont pour fonction de montrer la difficulté des galères autant que la diversité des expériences du protagoniste, elles s'essoufflent parfois et allongent le récit.

Je n'ai encore lu aucun article de critique ou d'analyse du roman, mais ce qui m'a frappé dès les premières pages est la manière dont London semble insister sur le fait que Martin Eden est capable de visualiser avec une très grande acuité un certain nombre de scènes du passé ou d'un présent alternatif tout en continuant d'échanger avec son entourage comme si de rien n'était. S'agit-il d'hyperesthésie visuelle ? Est-ce là une clé pour comprendre ce que London apporte au genre du Künstlerroman ?

 

dimanche, 04 novembre 2018

« Et les paons fastueux crieront sur les ardoises »

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Partir vider

le verre à recycler

(bocaux, bouteilles)

 

d'un geste sûr

(cageot tenu contre la poitrine, les deux mains libres)

 

et au milieu de l'immensité

minuscule de la banlieue

où j'habite,

 

ces quelques framboises écrasées

dont rien alentour

ne me dira l'histoire.

 

jeudi, 11 octobre 2018

LA RIXE À LA FLOTTILLE

LA RIXE À LA FLOTTILLE

poème ultra-contemporain

 

Pour C.F.-D.

________________________________

 

Sans prévenir, il lui a asséné

quatre violents coups de bâton

au visage. Ses lunet-

tes se casseront.

 

L’épouse de la victime

est entrée dans la partie.

Elle est parvenue à s’emparer du bâton. 

Et à son tour, elle a 

frappé l’agresseur 

en plein ventre.

 

Problème, il a 

une poche gastrique.

 

Il devra donc être évacué

en urgence à l’hôpital 

André-Mignot du Chesnay.

 

Le motif de la rixe entre ces trois-là, 

âgés de 51, 63 et 68 ans 

et originaires

de Versailles et d’Orgeval,

est bien banal. 

 

L’un avait pris la place 

de l’autre sur le par

-king de la place d’Armes. 

 

Aucun n’a pour le moment

été placé en garde à vue.

 

dimanche, 01 avril 2018

Sonnet irrégulier quoique anagrammatique

le poissond 'avril.PNG

jeudi, 07 décembre 2017

Centon sur un nom rebattu

Centon.PNG

lundi, 23 octobre 2017

Glyphosate

Make Our Planet Great Again ?

Oui, mais sauf dans les tomates —

Car Macron, tes p'tits copains

Nous gavent de glyphosate.

dimanche, 15 octobre 2017

d'un palimpseste de blues (tercets)

tercets improvisés sur la dernière vidéo bluesy de F.B.

 

chariots abandonnés

gros blocs de béton tagués

chaque mercredi longés

 

l'horloge sur l'esplanade

avant chaque nouveau cadrage

de l'aiguille en blues malade

 

deux étages : c'est la rame

 

les petits pavés rouges

véhicules et piétons comme accélérés

après le bleu fluo d'un granizado

 

au médian des rails : les phrases

 

blues de penser à la retraite

la vitre où défilent secs

immeubles & lignes (vieillir tes os)

 

à la bottleneck : come on in my kitchen

 

la fatigue avec Beckett

défile dans la nuit refaite

des mots apparus disparaissent

 

dans le ciel gris pétrole

le blues est-il un jeu de rôle

à coups de cutter dans la tôle

 

à l'arrivage : dédicace

 

& encore des murs

encore des murmures

le poème en vidéo perdure

 

samedi, 10 juin 2017

juin 3+7

chien

qui furète, court en zig-zags & sans plan établi

d'un banc à l'autre, d'une poubelle à l'autre

sans laisse, cherchant quoi, l'odeur de pisse d'un autre chien à recouvrir de sa propre pisse, ou tel relief de sandwich au jambon, à s'en goinfrer précipitamment

& qui vient, approximatif épagneul, renifler brièvement le bout de la chaussure gauche du type alors affairé à éplucher la troisième des cinq (5) bananes de sa main

cela n'aura duré que trois ou quatre secondes, le chien ne s'attarde pas près de ce banc, l'épagneul approximatif

(je n'y connais vraiment rien en chiens et suis-je même sûr qu'un chien...)

s'éloigna sans demander son reste,

non que le type lui ait donné un coup de pied, ce n'est pas son genre, là encore il a eu cette espèce d'élégance supérieure de ne pas même paraître voir ce chien, de ne pas s'en soucier, de continuer à éplucher cette troisième banane et de commencer à mordre dedans,

mordre dans une banane ne demande pas une grande énergie,

il aurait pu faire ça tout en se souciant du chien,

& d'ailleurs la question se pose, au fond s'impose : a-t-on besoin de dents pour manger une banane ? ce n'est pas ce jour-là, en observant cet étrange déjeuner

et ce chien furetant en zig-zags imprécis et ivres près du banc,

qu'on y répondra, que j'ai pu me mettre en tête d'y répondre,

le chien lui n'avait pas non plus l'air très soucieux ni affamé, un chien qui n'a pas les crocs quelle blague, enfin à ce moment-là jamais je n'aurais songé à ces facéties pathétiques dignes de l'almanach Vermot,

j'observe (j'observais) le chien,

je ne détachais (détache) pas mon regard du type, du quasi dandy mangeant sans affectation et avec une forme d'élégance absolue cette troisième banane sans paraître même remarquer qu'un chien lui renifle furtivement (lui reniflait subrepticement) la chaussure gauche

(ou était-ce la droite)

& ce quasi dandy qui sans dévier de son plan MANGE cette troisième banane

existe-t-il (existait-il) plus ou moins, sous mon regard, que le chien,

où le chien est-il allé ensuite, je ne saurais le dire, je sais qu'il est descendu vers le pont Napoléon, je dis descendu, j'écris descendu car c'est le sens du courant, d'amont en aval le fleuve va vers le pont Napoléon, et de même le chien, je crois, à ce qu'il me semble, poursuivit (poursuit) son chemin tout en zig-zags et furetages vers ce pont Napoléon,

tout comme le fleuve d'amont en aval,

& je ne sais pas plus où s'est rendu ensuite le type,

il faudra que je raconte ça,

j'ai beaucoup parlé d'épluchage & de posture, j'ai beaucoup (trop) parlé de banc & de bananes, mais j'en suis resté jusqu'alors, m'en suis tenu à ces moins de dix minutes d'un type mangeant à la file cinq bananes sur un banc en plein midi,

pour ne rien dire d'après, ne rien écrire de la fin de la scène, de la façon dont le rideau est retombé, en quelque sorte

(il y avait (il y a) dans tout ça quelque chose de profondément, de confusément théâtral)

& le type pour toujours ai-je pu écrire mange cette main de bananes,

le type, le quasi dandy jamais ne s'arrête de manger sans précipitation mais prestement, avec une élégance absolue de chaque geste, jusqu'à ne pas paraître apercevoir un chien

qui lui renifle (renifla) la chaussure gauche

(ou la chaussure droite),

jamais non ne s'arrête de manger sans hâte mais prestement cette main de bananes, la main gauche posée à côté de lui sur le banc,

à telle enseigne que le voilà pour toujours figé dans cette scène & qu'on ne le voit pas (l'ai-je vu) s'en aller, et même avant de s'en aller

finir son repas, jeter les peaux de bananes & le sachet de son déjeuner, partir vers l'amont ou l'aval,

ou tourner le dos au fleuve (c'est plus probable),

à jamais le voilà figé dans ces quelques minutes (moins de dix) où d'une élégance sans faille il s'enfile cinq bananes sans paraître s'apercevoir que quelques passants (des millions) l'observent, et sans voir, censément, qu'un chien furtivement lui renifle la chaussure gauche

à telle enseigne qu'on pourrait penser, une fois l'animal efflanqué mais qui n'avait (n'a) pas l'air affamé parti de sa course approximative et quasi claudiquante vers l'aval du fleuve, de banc en banc,

qu'il n'y a pas eu de chien,

et qu'il n'y a à tout jamais, qu'il n'y aura toujours eu que ce type bananivore

incapable même de se laisser perturber, tandis qu'il épluche et mange cette troisième banane, par l'approche en zig-zags et furtive d'un

chien

08:30 Publié dans Juin | Lien permanent | Commentaires (4)

vendredi, 09 juin 2017

juin 7+2

mange

sans traîner, mais sans te presser non plus, ces cinq bananes qui formaient un régime compact (une main) qui, tenant dans ta main (droite), tenu par toi avant que tu n'en détaches un à un les fruits, constitua (constitue) tout ton déjeuner

ce dont je ne sais foutre rien, à la fin des fins,

de sorte que l'injonction (mange) est une figure de style, façon de parler, ces cinq bananes déjà par toi ont été (furent) mangées, c'est-à-dire, pas dévorées

(on l'a déjà dit)

mais dégustées prestement, car de cette façon qu'on a pu qualifier de QUASI dandyesque tu les épluchas et mangeas très vite mais sans précipitation, mangeant sans trop mâcher mais sans non plus engouffrer ni engloutir,

& nous tous foule ébahie à te regarder infiniment à tout jamais manger ces cinq bananes à la file

de ne pouvoir faire autrement que de continuer à t'ordonner de manger

car sans toi mangeant cinq bananes sur ce banc il semble que le banc n'existe plus que l'air autour et même les chiens solitaires comme abandonnés baguenaudant autour des bancs et que même le fleuve d'où montent d'étranges bruits

que tout cela sans toi mangeant ce régime de cinq (5) bananes sans te presser mais à un rythme impressionnant n'existerait pas n'existerait plus

tant & si bien que nous n'avons d'autre recours que l'impératif, nous n'avons pas d'autre choix que le refus de disparaître avec armes et bagages avec peaux de bananes ou pas, nous n'avons d'autre appel que cet ordre si simple, comme une mère lassée à son enfant qui boude, comme on me dira à moi quand je serai moribond épuisé : mange

& donner l'ordre de manger fait tout exister, tout réapparaît comme par enchantement,

si tu manges pour toujours ces cinq bananes en moins de dix minutes alors rien ne se sera évanoui, rien n'aura pas eu lieu, me fais-je comprendre, même moi je pense que je ne serai jamais au bord de mourir sur un lit aux bords défaits

& mange donc, mange à tout jamais, je t'en prie, nous t'en prions,

nous tous foule ébahie de passants aux visages nus

aux visages creusés par l'inquiétude

et admiratifs du quasi dandy, du type presque anodin qui mange de la manière la moins affectée du monde un insolite déjeuner, 

cinq bananes l'une après l'autre sans marquer de pause

nous tous te regardons t'observons, il a l'air d'y avoir tout au plus cinq ou six badauds dans les parages, sans compter les chiens solitaires qui flairent les poubelles, & sans compter les sternes dont le ballet affolant survole le fleuve, mais en fait nous sommes des milliers, des centaines de milliers si ça se trouve, nous sommes plus nombreux ici & maintenant à te regarder sur ton banc qu'il n'y a d'habitants dans cette ville, et nous sommes plus nombreux (peut-être des millions) à continuer de te regarder manger

(mange !!!)

ces cinq bananes qu'il n'y a de gens en Europe à avoir

à l'instant même où je t'enjoins de manger et où obéissant tu manges à tout jamais en moins de cinq (ou dix) minutes une main de bananes

des bananes dans une corbeille à fruits chez eux

& nous tous nous te regardons nous admirons tes gestes de faux type et de parfait dandy d'admirable singulier éblouissant obéissant bananophage

nous tous qui écrivons ce texte

& qui nous écrions

en écrivant ce texte

pour qu'à tout jamais tu nous empêches de devenir autre chose que l'enfant boudeur à qui sa mère commande de manger et pour que pour toujours nous ne devenions jamais le vieillard moribond épuisé qui n'a plus la force

mange

14:20 Publié dans Juin | Lien permanent | Commentaires (0)

jeudi, 08 juin 2017

juin 1+7

quasi

dandy, ce type, ainsi l'ai-je qualifié,

& pourtant on ne s'imagine guère un dandy même moderne affairé à faire son déjeuner d'une main de cinq bananes avalées à la file en moins de dix minutes

mais est-ce l'habit qui fait le dandy

ou la posture, l'action

(handsome is as handsome does)

ce qui ne doit pas faire oublier, donc, qu'une action singulière, si vulgaire ou anodine puisse-t-elle paraître une fois qu'on y réfléchit, est à même,

par sa singularité même,

de rendre la personne qui l'effectue, et ce même si c'est le mot type qui a paru le plus approprié de prime abord pour qualifier cette personne, singulière, hors de la norme, extra-ordinaire,

de sorte que ce type, à manger à la file ces cinq (5) bananes sans les dévorer ni les déguster, à les avaler sans les mâcher exagérément mais sans non plus les engloutir, avait l'allure d'un artiste tout à fait singulier, absolument extraordinaire

dont l'œuvre aurait consisté à manger un régime de cinq bananes sur un banc en moins de dix minutes

& j'ai déjà vu, croyez-moi, des happenings ou des flash mobs moins marquants, moins inspirés,

ce qui frappe au moment de regarder ce type,

ce qui frappait le regard autant que l'esprit n'était pas tant la singularité de l'action

mais l'absence totale d'affectation ou de pose, tout cela accompli comme si ce fût la chose la plus habituelle et la plus ordinaire du monde,

y compris le fait de ne pas accorder le moindre regard aux éventuels spectateurs,

pas plus de regard pour eux que pour telle peau ou telle TIGE détachée du régime ou de la pulpe,

ça & cette main gauche qui avait tout d'une main de dandy,

ça & l'efficacité effacée de cette dévoration sans précipitation

(qui n'avait donc rien d'une dévoration)

sans omettre que peut-être on se trompe en pensant sur le coup que le personnage bananivore est un type et que sans doute on se trompait en se disant après coup que le type qui avait bouffé cinq bananes comme ça sur un banc sans marquer de pause était dandy ou que son allure, ses actions avaient quelque chose de dandyesque

et que comme on ne veut pas imposer complètement sa vision, comme on doute soi-même de la pertinence du mot dandy,

on le fait précéder

(pour suspendre toute conclusion)

de l'adverbe

quasi

12:06 Publié dans Juin | Lien permanent | Commentaires (0)

mercredi, 07 juin 2017

juin 7

tige

si c'est ainsi qu'il faut nommer la queue par laquelle chaque banane est attachée au régime ou à la main

& donc chacune des quatre tiges détachée de la main droite par le type

en s'aidant d'abord

(pour les deux premières bananes, je crois)

de la main gauche

puis, la main gauche posée délicatement sur le banc à côté de lui, détachant chaque tige d'une seule main,

geste adroit qui vint toutefois battre en brèche l'image plus globale du quasi dandy dégustant prestement cinq bananes en moins de dix minutes

car essayez de détacher une banane par la tige d'une seule main

& vous verrez : il est presque impossible de faire cela sans caler le fruit contre son buste ou contre un objet, un banc,

donc le quasi dandy se fit, sur ce coup-là, remarquer par un geste plus abrupt,

moins lié, moins lisse, moins dandyesque disons-le

& donc je ne me rappelle plus si, pour la quatrième (l'avant-dernière) banane il a réussi à conserver intacte chaque banane avec sa tige

car qui a déjà essayé cela en a souvent fait l'amère expérience

(amère d'un simple point de vue esthétique) : l'une des deux tiges s'arrache, en quelque sorte, laissant voir la pulpe, le fruit sous la tige,

& d'ailleurs quand on se trouve à faire cela et qu'on ne souhaite pas manger les deux bananes

(ce qui est fréquent,

le cas le plus répandu)

on craint que la banane restante dont la tige est aussi arrachée ne s'abîme, ne se flétrisse, ne se tale ou ne pourrisse par la tête, par la tige, par la queue, mais comment dire, comment dit-on, personne ou tout le monde dit cela et personne ne le dit, personne ne raconte ses mésaventures avec une banane, il faut croire que tout le monde a ce genre de minime mésaventure

(minor mishap)

mais que personne ne s'en soucie vraiment, personne ne formule cela, personne ne dit, ne raconte, et écrire encore moins

(quelle blague)

en tout cas vous voyez ce que je veux dire

si déjà dans votre vie vous avez détaché quelques centaines de bananes de leur régime avant de les peler, si déjà dans votre vie vous avez PELÉ des centaines ou des dizaines de bananes il vous est sûrement arrivé de laisser la dernière banane du régime

(en en détachant l'avant-dernière)

avec la tige cassée et la pulpe apparente,

ce qui s'est peut-être produit pour le type

mais enfin il n'en avait cure

il ne pouvait en avoir cure

puisque quelques minutes, pas même ça, après avoir pelé et dégusté prestement la quatrième banane il s'attaqua à la cinquième,

et alors que sa tige fût cassée laissant apparaître ou poindre franchement la pulpe ou le jaune plus doux plus crémeux du fruit, qu'en avait-il à faire,

il ne pouvait en avoir cure

puisque très bientôt il rassembla en un tas les peaux de bananes avec leurs tiges

& peu devait lui chaloir

(omg omg)

qu'il y ait une peau sans tige (celle de la dernière ou 5e banane) et deux (2) tiges attachées à une seule peau (celle de la quatrième ou avant-dernière)

puisque tout (peaux et tiges) allait partir à la benne ou au bourrier

sans queue ni tête, sans peau ni

tige

11:49 Publié dans Juin | Lien permanent | Commentaires (0)

mardi, 06 juin 2017

juin 6

pèle

cette banane et puis cette autre encore

comme tu pèlerais une orange et te mettrais du jus partout ou devrais l'éloigner de toi et de tes habits, sans assiette ni couverts, pour ne pas te tacher,

si du moins j'ose à présent m'adresser à 

(et même tutoyer) ce type qui a dégusté précipitamment cinq bananes en six ou sept minutes,

ce que jamais je n'osai faire ce midi-là où je le regardais sans le dévisager, où je l'observais de loin, comme sans y toucher

(sans toucher à son repas mais sans paraître même effleurer du regard la scène qu'il offrait pourtant aux passants ou témoins),

et l'action de peler me parut presque plus essentielle, ce midi-là, que l'engloutissement (relatif, cette question a déjà été abordée) des cinq fruits à la FILE, car à la façon dont on pèle tel fruit on peut certainement deviner bien des traits de caractère

du type, donc,

du presque dandy comme je l'ai déjà qualifié,

à qui je ne me suis pas adressé, que je n'ai pas interpellé, et que j'interpelle à présent dans ce texte, avec des mots que jamais sur le coup je n'ai pensés, des mots que je ne dis pas à voix haute, des mots que j'aligne ou que j'égrène

peut-être pour tenter donner un sens, ou à tout le moins façonner, donner tournure à cet événement sans importance

& pourtant singulier : un type mange sans marquer de pause et en moins de dix minutes cinq bananes arrachées au même régime

(je tiens au mot régime, je tiens à tant de mots, tant de mots me tiennent, et par la présente je tiens ma quatrième de couverture)

en se comportant, par ses gestes, en presque dandy

qui mange ou dévore moins qu'il ne pèle

& pour tout dire qui pèle moins qu'il ne détache les fruits & même moins qu'il ne les déguste

car dans l'acte de peler c'est la peau qui l'emporte,

la peau de chaque fruit avec la tige

& peut-être le contact des doigts avec la peau des fruits

le contact d'une peau humaine peut-être souffrante avec la peau peut-être talée ou brunie de la banane,

et c'est autant à cette peau de la main ramassée en doigts qui détachent et pèlent que je voudrais parler qu'à l'individu, le type, l'être humain,

pour autant que ses gestes de presque dandy m'ont fait considérer sa peau

& le tas de peaux de bananes que, chaque fruit mangé l'un après l'autre, il constituait sans savoir en fin de compte où les jeter,

peau de type étonnant bouffeur bananivore

dont peut-être le nom était banal, si son nom à aucun moment ne reflétait la bizarrerie du choix de ce déjeuner,

& quand bien même la banane est devenue un fruit banal, commun, vulgaire même ou familier peut-être, elle qu'on peut manger par cinq, cinq à cinq en un rien de temps

(si j'écrivais un texte sur les nèfles ou sur l'amélanche ce serait une autre affaire, une autre paire de manches)

même devenue banale la banane ne se laisse pas dévorer ni déguster souvent en mains de cinq comme ça sur un banc aux yeux des passants

pour ça qu'on voudrait pouvoir interpeller le type, ou que j'aurais dû l'interpeller et, qui sait, lui demande son nom, si ça se trouve banal, et si ça se trouve compliqué, à faire répéter sept fois, à coucher dehors

sur un banc,

nom que tandis que je l'exhorte à continuer de détacher, peler et déguster cinq bananes à la file, dans cette fiction où je l'interpelle pour ma gouverne il é-

pèle

19:24 Publié dans Juin | Lien permanent | Commentaires (0)

lundi, 05 juin 2017

juin 5

file

puisque c'est ainsi qu'en regardant le type dévorer ou plutôt déguster prestement (précipitamment) ses bananes je me disais qu'il les mangeait : à la file ou d'affilée

et comme il est curieux bien sûr d'avoir pensé ça alors que je regardais un type tout seul sur un banc

comme si les bananes lui tenaient compagnie

comme si les CINQ bananes formaient une sorte de file d'attente tenant compagnie à ce guichet humain, à ce gouffre, et j'écris gouffre alors qu'à ce moment là, en direct pour ainsi dire, je ne pensais pas gouffre,

je ne pensai pas gouffre,

je n'ai pas du tout pensé gouffre,

j'ai bel et bien pensé ou formulé la scène comme une scène de dévoration

alors que ce n'était pas le cas, je l'ai écrit plus haut, il s'agissait plutôt d déguster précipitamment ou prestement, et là encore d'ailleurs je m'en avise, prestement convient mais pas précipitamment, le type dégustait prestement mais pas à la hâte,

à la file en revanche oui, il enfilait les bananes,

il se les enfilait, comme on dit, avec ce pronominal (ou est-ce une tournure réfléchie, plutôt ? (oui, ce doit être ça)) un peu familier, j'ai du mal à écrire tout cela, à décrire tout cela avec justesse, je m'en vois pour dire ce que j'ai vu, ça me regarde d'écrire ce texte à partir de ce que je regardais,

et partir c'est mentir un peu,

le type donc enfilait les bananes plus qu'il ne les engouffrait, c'était très étrange, et pas seulement parce qu'on voit rarement (je n'avais jamais vu) qui que ce soit manger en cinq à dix minutes (et plutôt cinq que dix, il me semble) cinq fruits, et donc en l'occurrence cinq bananes, fruit qui présente la particularité, sans doute, qu'il se pèle prestement

& donc qu'on peut le manger vite, en mâchant juste ce qu'il faut,

on peut manger cinq bananes assez vite sans donner l'impression d'engouffrer, d'engloutir, de dévorer, la main gauche presque en permanence posée délicatement à côté de soi sur le banc,

et ce ne serait peut-être pas possible avec un autre fruit,

l'orange par exemple,

qui prend plus de temps à peler et qui, surtout, juteuse comme elle est, ne vous laisse pas la manger prestement sans vous forcer à de précautionneuses manœuvres afin de ne pas être éclaboussé de jus,

voilà bien un fruit, l'orange, qui ne permettrait à personne de la manger seule,

et encore moins à la file,

la main gauche délicatement posée sur le banc à côté de soi, comme un objet indépendant, là seulement pour la parade, là seulement pour l'image, là seulement pour la pose presque de dandy,

on ne peut avoir l'air d'un dandy en mangeant une orange,

et cinq, n'en parlons pas,

alors que l'orange passe, je pense, pour plus noble ou plus raffinée, ou moins ridicule, qu'en sais-je (il faudrait creuser cela), que la banane,

ce qui ne doit pas faire perdre de vue

(que je m'en vois)

que la banane, elle, a pour indéniables qualités de se peler sans simagrées et de ne pas éclabousser ni dégouliner

(c'est aussi son défaut, dira-t-on)

et donc de permettre à quelque type pressé d'en faire son déjeuner, oui, d'un régime complet, d'une main de bananes prise à même la main, cinq pelées prestement et tout aussi prestement non pas englouties mais dégustées à la

file

09:23 Publié dans Juin | Lien permanent | Commentaires (0)

dimanche, 04 juin 2017

juin 4

cinq

et au départ on ne savait pas trop si le texte parlerait surtout de minutes ou de bananes, même s'il est clair désormais que le chiffre cinq (5) se rapporte surtout au nombre de bananes du régime plutôt qu'aux minutes

dont il m'est difficile de déterminer le nombre,

le type sur le banc a-t-il mis moins ou plus (et si plus, combien) de cinq minutes à boucler son insolite déjeuner intégralement composé de bananes, donc d'un régime dont il m'a bien semblé qu'il était intact au moment où il l'a sorti du sachet,

et ce régime constitué de cinq fruits, le TYPE a entrepris d'en détacher une à une les bananes et de les manger à la file sans faire la moindre pause entre chaque fruit, et moins encore entre chaque bouchée,

voilà quelqu'un qui a l'estomac solide

et pas seulement l'estomac : l'œsophage

(tant et si bien qu'on serait tenté, dans une autre disposition d'esprit, avec d'autres principes de composition, d'intituler ce texte encore à ses balbutiements L'œsophage du bananivore)

car même si j'ai pu dire précédemment qu'on ne voit jamais qui que ce soit manger cinq oranges d'affilée il s'avère que je n'avais jamais vu non plus quiconque éplucher / avaler comme ça cinq bananes à la file

et donc ce chiffre cinq a son importance

aussi parce que j'ai évoqué la main gauche du type reposant presque tout le temps de cet insolite déjeuner sur le bois du banc

et que les cinq doigts de la main ne peuvent manquer de rappeler les cinq bananes du régime

ou de la grappe

et même de la main, puisqu'on parle parfois de mains de bananes

& si l'on en croit plusieurs dictionnaires une des étymologies possibles du mot banane le ferait remonter à l'arabe banan (doigts), sans que j'aie eu l'idée de chercher si une étymologie voisine permettrait d'y adjoindre le banyan

(mais j'en doute),

la main gauche posée sur le banc n'était donc pas seulement le pendant de celle, plus active, dont se servait le type pour éplucher et tenir les cinq bananes mâchées et avalées l'une après l'autre, mais aussi, au moins à la sortie du sachet, quand le régime

(la main)

était encore intact

(intacte),

le pendant de cette grappe formée de cinq fruits dégoulinant incurvés comme des doigts tordus ou agrippés autour du vide, avec à l'esprit tant d'expressions plus ou moins désuètes (slap-of-the-five, en serrer cinq) qui finiraient par déboucher sur un fou rire irrépressible face à d'ineptes hypothèses :

un sketch dans lequel des acteurs se tapent, non dans la main

(high five)

mais, tenant chacun un régime, dans la grappe de bananes,

c'est tellement idiot que c'est le genre de choses dont on rit de seulement les imaginer, on pique un fou rire, on se tient les côtes, ou plutôt même face à un gag aussi nul, aussi imparfait, aussi tiré par les cheveux aussi, on se tient le visage dans la main (droite), on place sur sa propre face la main de bananes de ses cinq doigts rassemblés et pliés, tordus pour épouser les contours du visage,

de même que le type dévorait l'un après l'autre les cinq doigts jaune vif de cette main arrachée au sachet qui la contenait

non sans en éplucher préalablement l'épiderme épais jaune vif

avant d'en engloutir, insolite déjeuner,

cinq

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samedi, 03 juin 2017

juin 3

type

qui a donc pour caractéristique, dans ce récit où je le prends pour sujet, de manger cinq bananes pour tout déjeuner,

et là encore qu'en sais-je,

peut-être avait-il déjà englouti, ailleurs, avant de s'asseoir sur ce BANC, un sandwich ou une barquette de coleslaw, auquel cas les calories ingérées avec ce régime de cinq (5) bananes dépasseraient amplement, très largement, la norme pour un seul repas

(et même d'ailleurs avec cinq bananes, on se demande),

toujours est-il que ce type, j'en fis l'objet de mon regard & j'en fais le sujet de ce texte,

ou plutôt je tire ce texte de ce que je lui ai vu faire,

à savoir éplucher/avaler pas moins de cinq bananes, à la file, l'une après l'autre, en se servant surtout de sa main droite, et ce en moins de dix minutes (j'avais même dit au départ que ça n'en avait pas pris cinq, mais cela, je ne pourrais le garantir), de sorte que le sujet de ce texte

ou de ce récit

(mais est-ce un récit ?)

n'est pas le type à proprement parler mais la façon dont ce type, assis sur ce banc que je n'ai pas encore décrit, dans un décor que je n'ai pas encore évoqué, a déjeuné d'un régime de cinq bananes à 2,39 €

mangeant d'abord pour 37 centimes de fruit à moins qu'on  ne compte la peau dans le calcul du prix de ce qui fut consommé, puis pour 54 centimes à moins qu'on ne compte que la partie mangeable et pas la peau dans le calcul du prix de ce qui fut consommé, et ainsi de suite, ne se servant de sa main gauche que pour détacher chaque banane de son régime ou pour en casser le coudic

(j'ai eu beau chercher, je ne suis pas sûr du terme approprié pour décrire le bout (la queue ?) de la banane, cette partie dure par laquelle un régime est accroché à la branche (la tige sans doute ?))

et donc ce type n'est pas le sujet

mais fatalement

vu que ce type a mangé ce midi-là cinq bananes d'affilée, sans faire de pause entre chaque, son repas, et le fruit au centre de son repas (ou de son dessert si on imagine qu'il avait, par exemple, mangé auparavant, avant d'atterrir sur ce banc, une barquette de coleslaw), sont le sujet, mais le sujet c'est forcément aussi ce type

sorte de héros bananier ou bananophage ou bananivore

(le mot banane n'étant ni grec ni latin je pense qu'on peut s'autoriser l'un ou l'autre de ces adjectifs)

ce type par glissement devient lui-même le sujet

et par-delà ça le mot type lui-même, car pourquoi ne pas avoir écrit homme ou monsieur ou mec ou gonze ou zigue ou quoi d'autre encore, sans doute car c'est bien d'un type qu'il s'agit :

si distingué qu'il fût, si dandy qu'il parût être, si digne qu'ait été son comportement,

il avait tout du type car quand on voit quelqu'un s'asseoir sur un banc puis sortir d'un sac un sachet contenant un régime de cinq bananes avant de les manger une à une on se trouve effectivement face à un type

& si on rentre chez soi le soir si on raconte ça on va dire j'ai vu un type qui ceci cela

de sorte que le mot type lui-même est tout autant le sujet de ce récit

(mais est-ce un récit ?)

que le personnage, la personne de ce type que j'ai vu, que je voyais alors et que je vois encore maintenant en racontant ce que je lui ai vu faire alors, manger cinq (c'est-à-dire 5) bananes d'affilée

ou à la file

en me disant sans doute en mon for intérieur tout en tentant de retenir un maximum de détails, tout en le regardant détacher éplucher porter à sa bouche mâcher mastiquer déglutir avaler, en me disant mais qu'est-ce que c'est que ce

type

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vendredi, 02 juin 2017

juin 2

banc

où le type donc passe cinq minutes, peut-être un peu davantage, à éplucher consciencieusement puis à engloutir précautionneusement, l'une après l'autre, les cinq bananes de son régime à 2, 39 €,

à moins qu'on ne puisse vraiment parler d'éplucher

car pour manger une orange, par exemple

(mais nous sommes en JUIN, et il est rare de voir quiconque manger une orange en juin, pour ne rien dire de quelqu'un qui mangerait cinq oranges à la file, mais après tout il n'est pas courant de voir quelqu'un manger cinq bananes à la file),

on l'épluche puis on la mange après l'avoir séparée en quartiers,

donc l'épluchage complet de l'orange est une phase préalable à sa dégustation, ou à sa dévoration, ou à sa mastication, bref :

on l'épluche avant de la manger

(la langue anglaise a raison, qui privilégie les verbes),

mais une banane s'épluche au fur et à mesure qu'on la mange, sauf dans le cas de certaines personnes (enfants, le plus souvent) qui ne commencent à manger leur banane qu'après lui avoir entièrement retiré sa peau, qu'après dégainage total, ou désemmaillottage, épluchage, préfère-t-on ici des termes techniques ou des métaphores

ce n'est pas le problème — le problème est

de savoir si on peut dire qu'une banane s'épluche puis s'engloutit

(s'avale)

ou si l'épluchage est nécessairement, par définition, une phase autonome, non simultanée, comme pour les oranges, alors qu'ici

(sur ce banc)

c'est bien d'un régime de bananes que j'ai vu le type détacher un à un les fruits avant de les éplucher/avaler, la main gauche reposant le plus clair du temps sur le bois du banc, à son côté, c'est-à-dire que quand il ne se servait pas de la main gauche pour détacher une banane du régime ou pour casser la queue (la tige ? comment se nomme le coudic (comme on dirait en gascon) du fruit), il n'usait jamais que de sa main droite pour éplucher et manger chacune des cinq bananes,

et donc la main gauche posée sur le bois du banc

ce type avait, malgré son activité frénétique d'épluchage et d'engloutissement d'un fruit généralement tenu pour peu aristocratique, quelque chose d'un dandy, une allure très digne

sans rien de comique ou de ridicule

alors que tout de même manger à la file cinq bananes détachées l'une après l'autre d'un régime, ça a de quoi attirer les regards

& les moqueries

puisqu'on n'est jamais à l'abri des regards sur un

banc

10:08 Publié dans Juin | Lien permanent | Commentaires (0)

jeudi, 01 juin 2017

juin 1

juin

& faute de nèfles il déjeunait de bananes

je le regardais qui mangeait, l'une après l'autre, cinq bananes arrachées l'une après l'autre à leur régime :

son déjeuner sans doute se composait de ces cinq bananes, qu'il mâchait longuement bien qu'il n'ait pas mis cinq minutes, à la fin des fins, pour venir à bout du régime,

et donc il mangeait 48 centimes de fruit,

chaque banane coûtant, on va dire, 48 centimes — mais en fait NON : à 2,39 € le régime, la moyenne précise serait de 47,8 centime d'€

et donc là, à sa troisième banane, on peut dire qu'il savourait précipitamment, qu'il engloutissait lentement 41 centimes peut-être,

41 car comment savoir si la peau compte,

si les cinq peaux de ces 5 bananes doivent être comptées :

quand on achète des bananes, évidemment on les achète avec la peau,

personne ne mange la peau des bananes mais personne, dans une épicerie ou chez un maraîcher (ou chez un marchand des quatre saisons, ou dans une supérette, ou à l'étal d'un vendeur de fruits etc.), personne n'accepterait jamais d'acheter un régime de bananes sans la peau, sans leurs peaux,

donc celui qui avait payé 2,39 € son régime de cinq bananes avait bel et bien payé pour les peaux,

pour pouvoir les dégainer, en retrousser l'épaisse peau jaune avant de commencer à croquer ou mordre dans le fruit,

jamais il n'aurait acheté ces bananes sans leurs peaux,

et donc il avait payé pour être ensuite encombrés de ces peaux qu'il aurait voulu jeter sous un arbre au lieu de les mettre dans une poubelle

(est-il normal, franchement, que le tri sélectif ne soit pas proposé, en 2017, à chaque poubelle de ville)

et dont il était embarrassé,

donc mange-t-il avec cette quatrième banane 54 ou 47 centimes de fruit (je dis 54 car il semble que ce soit la plus grosse du régime), c'est ce qu'on ne peut déterminer, encore que si, tout de même, si : il mange pour 47 centimes, car la peau il ne la mange pas, donc il consomme ou s'approprie 54 centimes de fruit, mais n'en mange que 47,

à cet instant on aimerait qu'une équipe de biologistes calcule le ratio moyen peau / fruit à partir d'un échantillon de, disons, 239 bananes, de sorte qu'on sache véritablement si cette histoire de 47 centimes de fruit pour 7 centimes de peau tient la route,

et plus je le regarde engloutir (c'est-à-dire savourer) et mâcher (c'est-à-dire avaler) cette quatrième (ou 4e) banane, plus je me dis que le ratio doit être tout autre, sur une banane lambda

(mais qu'est-ce qu'une banane lambda ?)

la peau doit occuper nettement plus de 7/54 du poids total, pour ne rien dire du volume,

il n'y a qu'à voir comment ce type qui déjeune d'un régime de bananes à 2,39 € est embarrassé des trois peaux qu'il a posées par terre devant son banc, oui, il est assis sur un banc, sans même attendre l'encombrement supplémentaire des deux peaux à venir,

à suivre, et sans aller jusqu'à dire que, comme pour les artichauts, la banane produit un volume de déchets supérieur au volume ingéré, voire même au volume avant préparation & cuisson, les cinq (ou 5) peaux de bananes

ne manqueront pas de prendre à peu près autant de place

dans sa main,

dans la main de ce type assis sur le banc que fasciné je regarde déjeuner d'un régime de bananes

à 2,39 €,

autant de place que le sachet dans lequel il tenait tout à l'heure le régime inentamé

en ce jour où faute de nèfles il déjeune

(déjeunait)

de bananes

(en un régime)

en bâclant l'affaire en moins de dix, peut-être même de cinq (ou 5), minutes, le temps d'un souffle de vent, sur un banc, en ce premier jour de

juin

21:25 Publié dans Juin | Lien permanent | Commentaires (0)

mercredi, 21 décembre 2016

Huitain retrouvé

dites-moi

ces grands réverbères

ces illuminations

les voit-on mieux les yeux fermés

 

ou s'imagine-t-on

la venue d'autres étoiles

parmi les myriades de mélancolies

murmurées

27.11.2013.

mardi, 29 novembre 2016

Ballade des drames du tens futur, de Françoys Fillon

Ballade des drames du tens futur

par Françoys Fillon, escholier françoys de souche (sarthoyse)

 

Dites-moy où, n’en quel pays,

On sucrera l'aide sociale

Aux smicards, ces sales nantis,

Leur préférant l'évasion fiscale ?

Peu me chaut en ça la cabale

Des démocrates et des perdans !

Où raflerai-je la timbale ?

C'est ès Frances, au prochainz printens.

 

Une fois gauchistes enfuis

On portera l'âge de retraite

À septante ou soixante-dix

Pour saigner la nation distraite.

Peu me chaudra l'anachorète

Qui va de la loi soulignant

Que du chomasge ça sécrète

En la France, au prochainz printens.

 

Préceptes chrétienz rétablis

On boutera hors du domaine

Mahométans & surtout laïcs

Qui n'ont foi qu'en la science humaine

Et jettera dessus la Seine

Services publics & savans.

Et invertis le mal les prenne,

Sans mariage au prochainz printens !

 

ENVOI

Françoys, la fable américaine

Ne vous distraise même un tens :

Mes sourcils de croquemitaine

Règnent France au prochainz printens.

 

lundi, 19 septembre 2016

Rien la tronche.

20.09.2014.,

peut-être sous l'influence de Frankétienne ou de Tram 83

Ribouldingue pour les fous.

Rigodon pour d'autres farcis empiffrés.

Sarabande des mutiques.

Plein la panse.

Rien la tronche.

 

Bancroche à fond la foison des fieffés menteurs roule-mécaniques.

vendredi, 08 juillet 2016

charrette à bras

ça semble un enfant au cerceau

& ce serait un charretier

pas rue du château des rentiers

où dort le mort dans son berceau

 

d'un épais trait d'encre de chine

tel pour le croquet les arceaux

dépenaille tous les pinceaux

le diable veille à sa machine

 

ton regard hautain pas altier

s'abstient d'embrasser les chantiers

pour y dénicher la bobine

 

d'un trait d'encre de chine épais

tel que sous la télécabine

on prend le forfait au rabais

samedi, 25 juin 2016

Picares

Donc le modèle absolu ce sera le picaresque. On ne fera rien sans ce modèle. Hors de ce modèle cumulatif, de l'idée de ligne brisée appliquée à l'art du récit, rien ne sera possible. D'une part l'avalanche des informations contradictoires, d'autre part l'avancée toujours plus sûre dans la forêt épaisse. D'une part la noirceur du ciel, d'autre part les pattes-de-mouche échappées à l'encrier. Ce qu'il faudra, c'est du picaresque avec des centaines de picaros. Et pas de picaros ibères, pas spécialement. Le modèle a déjà connu bien des traductions et des transpositions, ça continue, que ça continue, que ça participe de la mixtiligne et de la ligne brisée. Un peu de souffle au cœur. Des centaines de picaros pas ibères sous la nuit de l'encrier dans une forêt épaisse. Au turbin, dans la soute.

dimanche, 19 juin 2016

3900 / Fata morgana

Pour nos vingt-quatre ans de vie commune, C* m'a offert hier le dernier livre d'Yves Bonnefoy, Alechinsky, les traversées

or, c'est un ouvrage de chez Fata Morgana

(de nombreuses gravures d'Alechinsky y sont reproduites)

et les pages ne sont pas coupées, depuis que je suis levé, ne voulant pas faire de bruit dans la cuisine ni précipiter les choses, je me tâte, laguiole sans dents ou alors couteau de cuisine en céramique,

car il va falloir les couper, ces pages, comme jadis les Budé des éditions des Belles-Lettres ou les Gracq de chez Corti,

et dès hier j'ai feuilleté l'ouvrage, regardé longuement telle gravure, lu déjà, in the middle of nowhere, tel et tel paragraphe du texte de Bonnefoy

(comment peut-on feuilleter et même lire un livre aux pages non massicotées

(je vous le demande un peu) ?

c'est très facile, en fait, cela se fait d'un doigt délicat et d'un oeil expert

(vous imaginez qu'avec le netbook que je n'avais pas utilisé depuis des mois je ne peux pas accéder au raccourci clavier qui me permet de faire proprement l'e dans l'o

(est-ce si grave ?) et donc j'écris oeil au lieu du mot correctement orthographié avec l'e dans l'o

(d'ailleurs le correcteur orthographique souligne ce mot mal typographié, mal orthographié, on s'éloigne de Bonnefoy et d'Alechinsky et des pages non massicotées et de quel couteau de cuisine à manche de bois ou de corne au fond du tiroir central de la cuisine)

mais je rectifierai plus tard (même dans le netbook il aurait suffi d'écrire ce texte dans un document de traitement de texte, maintenant le texte s'est écrit comme ça, j'ai la flemme)))

comme j'ai la flemme, pour l'instant

ce n'est pas une flemme, c'est un suspens, une attente, un retrait

la flemme ou le suspens ou quoi, enfin bref j'attends et je n'ai pas encore décidé comment je couperai les pages non massicotées du dernier livre de Bonnefoy chez Fata Morgana

ça attendra

& pourtant plus haut pas la flemme de recompter le nombre de parenthèses que j'avais ouvertes afin de toutes les refermer d'un coup

(forme de flemme là aussi)

pour ça je vous l'assure, plus que pour massicoter ou couper au couteau en céramique ou pas en céramique d'ailleurs, j'ai l'oeil

(ce texte pas une gravure de mode, cette main qui hésite pas victime d'un mirage)

ou l’œil.

 

vendredi, 29 avril 2016

De la sphère à la liane

Hier soir, tard, j'ai mis en ligne la trente-septième de mes traductions sans filet, que, vu son numéro d'ordre, j'aurais pu (dû ?) consacrer à mon département d'adoption...

Cette traduction, d'un poème en apostrophe et hommage à Thelonious Sphere Monk, je ne m'en avise qu'après coup, est un clin d'œil involontaire, par le patronyme, à ma traduction, publiée sur le site Zazipo, d'un poème d'Ian Monk choisi pour l'oulipien de l'année.

Peut-être, après amélioration, l'archiverai-je dans mes Darts on a slate.

dimanche, 24 avril 2016

Hâtes de Hasenclever

Dubillard.jpgCe dimanche, la promenade — par un temps très frais, pas du tout aprilien (à moins de décider, une fois pour toutes, qu'avril est le mois le plus cruel) — aux jardins des Prébendes, pour le marché des bouquinistes, a donné sa moisson, restreinte mais curieuse :

  • un livre de Roland Dubillard en collaboration avec Philippe de Cherisey (acheté pour Dubillard, et pour sa quatrième de couverture)
  • un roman de Pirandello, Feu Mathias Pascal (je ne savais même pas qu'il avait écrit des romans, c'est vous dire mon inculture)
  • une mince plaquette de vers allemands, qui m'a intriguée, dans un bac dépenaillé de bouquins abîmés à 1 euro pièce, Der Jüngling de Walter Hasenclever, éditée à Leipzig en 1913

IMG_20160424_220316.jpgCe dernier volume s'avère sans doute le plus marquant, non seulement car trouver ce genre de rareté pour un euro à Tours n'est pas chose courante, mais surtout parce que, si j'ai choisi de l'acheter en partie pour montrer à mon fils aîné la graphie gothique et aussi en dépit du caractère plutôt académique — à ce qu'il m'avait semblé — des poèmes, j'apprends en fin de compte que son auteur est un poète et dramaturge certes du second rayon mais tout de même compté parmi les figures de l'expressionnisme allemand.

Né en 1890, il a connu un itinéraire assez proche de celui d'Apollinaire au début de la Première Guerre mondiale, avant d'enchaîner plusieurs pièces théâtres (dont une adaptation en 5 actes du Gobseck de Balzac !). Considéré comme “dégénéré” par les nazis, il fuit l'Allemagne en 1934 après avoir vu ses livres arrachés aux bibliothèques et brûlés publiquement (comme tant d'autres). Réfugié en France, du côté de Nice, il finit par se suicider en juin 1940, après la victoire de l'Allemagne sur l'armée française et l'annonce de la capitulation française.

À première vue, je l'ai dit, les poèmes brefs de la plaquette achetée aujourd'hui n'ont rien de très révolutionnaire... rien qui rappelle Trakl ou Heym, par exemple. Toutefois, il y a d'étranges poèmes de treize vers, de forme non fixe mais presque systématiquement dérivés de la forme sonnet. J'essaierai peut-être d'en traduire un ou deux, et, à coup sûr, d'écrire des sonnets-Jüngling (comme j'ai publié, ces derniers jours, trois sonnets-grands-lièvres*) : faut-il cependant les nommer sonnets ou treizains ?

Le nom de Hasenclever, aussi, est plutôt singulier, ou me semble tel. En tout cas, il pourrait donner lieu à un onzain de la série des Zézaiements.

Je me sens plutôt déprimé, en friche, ces temps-ci... On peut se raccrocher à peu, hein...

 

 

* Pas le temps d'expliquer ce qu'est la forme du sonnet-grand-lièvre. Voici en tout cas la liste des trois publiés à ce jour (seuls les deux derniers sont techniquement de véritables “grands lièvres”) :

  1. Qu'est-ce que ça veut dire 1
  2. Ta/Fou
  3. VCV

 

mardi, 12 avril 2016

Phallacieux podomètre

(J'hésite à écrire et publier ce qui suit — mais enfin, si le ridicule tuait, la moitié au moins des chroniques de ce blog et les trois-quarts de mes cours m'auraient déjà valu un foudroiement en bonne et due forme, donc autant ne pas s'arrêter en si bon chemin.)

Je signalais hier que je m'étais lancé dans un nouveau chantier d'écriture, les Élugubrations, série de textes parlécrits, c'est-à-dire dictés en marchant au smartphone (parlés en vue de les publier sous forme écrite). Comme je compte trouver un moyen de relier ces textes aux trajets qui les ont, non pas inspirés, mais encadrés, pour ainsi dire, j'ai également recours, depuis avant-hier, à un podomètre, dont j'ai voulu vérifier l'exactitude ce matin en allant acheter pains aux raisins, tresses chocolatées et palmiers à la boulangerie.

À l'aller, le smartphone était dans la poche de mon blouson, et il a calculé un trajet de 830 mètres. Au retour, j'ai dicté quelques paragraphes, sur une grosse moitié du chemin, et il en a conclu que l'itinéraire était de 1070 mètres. Or, il s'agit du même trajet, au pas près. J'en conclus que, selon que je laisse le smartphone au repos dans la poche du blouson ou que je l'agite plus ou moins en dictant un texte, l'application Pedometer ajoute ou retranche des pas. Après vérification dans Google Maps (et à supposer que ce site-là ne se trompe pas lui aussi), l'itinéraire fait 950 mètres... soit une distance exactement intermédiaire entre les deux calculées par l'application Pedometer !

Reste, le désir d'exactitude étant définitivement enterré, à régler la vraie question qui se pose à moi : comment faire aussi du podomètre un outil d'écriture ?

dimanche, 10 avril 2016

Du Panamiseur et du Singe

Un Homme panamait. On sait que cette erreur

Va souvent jusqu’à la fureur.

Celui-ci ne songeait que Suisse et Îles vierges.

Quand ces biens sont volés, je les tiens immoraux.

Pour sûreté de son auberge,

Notre filou plaçait ses fonds et ses coraux

Dans des fonds insoumis aux règlements fiscaux.

Là, d’une volupté assez cameronienne

— Ou, qui sait, cahuziste — il entassait toujours :

Il passait les nuits et les jours

À compter, exfiltrer, magouiller sans relâche,

Multipliant les boucliers comme à la tâche,

Dissimulant, carnassier, telle l'hyène.

 

Un gros Singe plus sage, à mon sens, que son maître,

Jetait quelque million toujours par la fenêtre

Pour un Euro sportif

Ou quelque présomptif

Été parisien voué à l'olympisme.

On comprend trop bien ce tropisme,

Mais un jour dom Michel (qu'on surnommait Platoche)

S'avisa de jouer double jeu : la valoche

Ajoutée au rusé panem et circenses.

L'effet s'en fit bientôt sentir, et son faciès

Se retrouve, par maints malheurs,

Avec celui d'autres fripouilles

À la une, faisant coasser les grenouilles,

Sous le nom peu glorieux de Panama Papers.

 

Dans le gouffre enrichi par notre déficit,

Que le peuple trouve relâche

Des malfrats de cet acabit

Avant que, par la nuit, debout, il ne se fâche !

 

Pour lire l'original de M. de La Fontaine

jeudi, 31 mars 2016

Rugby ○◙◘○ Rapports

La mascotte est peut-être un loup ou un chien bipède qui s'agite et se trémousse.

un instrument de cuivre très étrange, qui tient du piston, de l’ophicléide et du cor de chasse

Pas envie, depuis trois jours, d'abattre les besognes usuelles.

Les arbitres se nomment Hourquet et Castaignède.

Souvenirs des vendanges, des vignes, des vignobles, de la piquette que je ne goûtais pas (je n'avais pas onze ans).

Lann, en revenant de la carrière, rapportera une cruche toute pleine

Rabattre la balle en arrière par une passe trop appuyée, ce n'est jamais bon. On se retrouve fissa à encaisser un essai ; ça ne loupe pas.

Les envois en bout de ligne sont un peu téléphonés.

l’on commença à le regarder avec un certain épatement, comme on contemple un prestidigitateur capable de sortir des pigeons vivants d’un chapeau haut de forme ou trente petits drapeaux d’un œuf dur

La course du 10 italien en oblique a failli mal s'achever.

samedi, 12 mars 2016

Grand vingtième & terne système

Demain, cela fera un an que je commençais le projet Prison des tempos, un peu moins de deux ans après une autre série de textes visant à subvertir l'idée même de Printemps de poètes, Prime Time of Poesy. — Cette année, la manifestation officielle du Printemps des poètes célèbre « le grand XXe siècle, d'Apollinaire à Bonnefoy ». Tout dans ce titre est à côté de la plaque : l'idée de grandeur poétique ; l'idée que le vingtième siècle seul aurait agrandi l'univers poétique (que serait Apollinaire sans Baudelaire et Rimbaud ?) ; surtout, la primauté du lyrisme et de la poésie versifiée.

Qu'on ne se méprenne pas : j'admire beaucoup Apollinaire et Bonnefoy, que je lis assidument. Le problème n'est pas là, mais dans leur capture — leur embrigadement — leur embastillement par ces forcenés de la mignardise que sont, année après année, les organisateurs du Printemps des poètes.

Dès demain, je proposerai, sur l'autre blog, une série de sizains à métrique variable, antilyriques, dont le titre général sera Le terne XXIe (pour me moquer).

J'essaierai d'en écrire par jour jusqu'au 21 juin.

 

mardi, 01 mars 2016

3777 — Le point sur les chantiers

La majorité des rubriques de ce site (et de l'autre) sont un chantier perpétuel, jamais achevé. Toutefois, après soixante jours en 2016 — nulla dies sine linea, pour l'un comme pour l'autre —, je veux faire le point :

 

Il y a de nombreux projets que j'aimerais reprendre ou poursuivre, mais enfin, cela fait déjà un joli paquet.

Je propose, histoire de redynamiser la partie “Commentaires” de ce site, à tous les lecteurs (occasionnels, hein, je n'ai pas d'exigences) de voter pour les 3 chantiers sur lesquels je devrais, selon eux, me concentrer. Le vote peut être rédigé de manière télégraphique, par exemple : 1. Atlas 2. Untung 3. Farah.

jeudi, 21 janvier 2016

Illustre

Il te faudrait, m'écrit Madame de Véhesse, un dessinateur, un illustrateur. — Et d'ajouter : Un dessin par limerick et ça devrait rouler !

(Elle évoquait les Wikimericks, ou les Limericks du martyrologe.)

 

ll m'arrive de me dire, en effet, qu'on pourrait faire quelques recueils rigolos quoique passablement vains de certaines des rubriques accumulées ici (plus que , d'ailleurs, où l'activité, quoique intense, est devenue entièrement solitaire (mais pas solaire : saturnienne, presque plutonienne, même)).

 

Vains, voilà ce qui stoppe net toute velléité.

À quoi bon constituer des vanités.

Déposer ici, jour après jour, ces textes, ce n'est pas pareil. On se dit que c'est comme ça, c'est à peine publié — en général, ça n'attire ni attention ni réactions, ce qui est devenu, au fond, très reposant, très libérateur. Je continue pour moi. Et ça ne m'empêche pas, au contraire, d'écrire de plus en plus.

 

Aujourd'hui (enfin, il est une heure : hier), je me suis rendu compte, par un quasi hasard, que tout le monde était en train de rater le sesquicentennaire (dit-on ça en français ? en anglais, sesquicentennial est tout à fait banal) de la naissance de Richard Le Gallienne. Qui pense à lui ? à cet écrivain ? pas même moi, qui avais pourtant utilisé un de ses textes lors d'un séminaire de sémiotique, vers 2008. ———— Alors, qu'ai-je écrit sur Facebook ? Pénitence : traduire une page de RLG chaque semaine en 2016. Pourquoi pas ? Il y a plus idiot.

En tout cas, il naquit le 20 janvier 1866.

On a déjà raté sa célébration.

Comme le disait Breton de Saint-Pol Roux, cet illustre appartient à la caste de ceux qui « s'offrent le magnifique plaisir de se faire oublier ».

 

mardi, 12 janvier 2016

Autant de larcins

Il n’y a pas de très nette ou très bonne raison au choix du titre de cette série de textes, Larcins : paronymie du patronyme de Garcin, idée que mes petits textes sont comme des chourades à la dérobée, en lisant un écrivain à peine découvert, glissement vers une homophonie avec mon propre nom (Garcin → cin/Gar → CingaL < lar-cin).

 

Allons... c'est un beau mot... je ne peux m'y soustraire :

Allez donc ! Ce qu’ici vous perdez de moments

Sont autant de larcins à vos contentements ;

Et ce soir, destiné pour la cérémonie,

Fera voir pleinement si ma haine est finie.

(Cléopâtre, dans Rodogune, acte IV, scène III)

samedi, 05 décembre 2015

Petit poème überurbain

Ce n'est pas rien, hein, les amin-

Ches de se trim-

Baler un sapin

(Un Nordmann, je l'énonce bien)

À bout de bras 

De l'auvent sale et gla-

Cé à chez soi

Le gant droit de jardin

Oublié par ce con de Cin-

Gal à l'atelier, mâtin !

Après midi, pas le matin —

Rues grises, rongez le frein

D'appétits froids

Sur d'autres (encore) trottoi-

Rs.

 

 

mardi, 24 février 2015

Poésie du gérondif — Jean-Pierre Minaudier

Ce petit livre, publié en 2014 aux éditions du Tripode, je l'ai acheté par hasard chez mon libraire. Intrigué par la quatrième de couverture, qui indique que l'auteur – non pas linguiste mais “amateur de mots” – s'est armé de “ses quelque 1 186 grammaires concernant plus de 800 langues”, j'ai feuilleté cet essai d'un genre bien particulier, et été forcément séduit par les 137 différents proverbes ou phrases en 137 langues différentes qui ornent les marges de chacune des 137 pages de texte. Donc, je l'ai acheté, et me dois de préciser qu'après l'avoir lu, j'en ai acheté un deuxième exemplaire, à destination d'un ami, et en achèterai encore deux ou trois autres d'ici peu, car je vois tout à fait qui ce livre séduira.

 

Poésie du gérondif n'est pas un essai de linguistique ; c'est plutôt une sorte d'autoportrait d'un linguiste amateur, d'un fou de grammaires, d'un collectionneur d'exemples et d'ouvrages portant sur les langues les plus rares du monde. L'argument de Jean-Pierre Minaudier, si tant est qu'un livre aussi riche puisse se réduire à un seul argument, est qu'en côtoyant une grande multiplicité de langues on s'aperçoit que la thèse des générativistes relatives à une “grammaire universelle” ne tient pas debout, et que les particularismes grammaticaux des langues les plus éloignées de la souche indo-européenne correspondent à des “visions particulières”. Un de ses exemples, assez classique il est vrai, consiste à partir des différents sens du verbe eimi en grec et de leur importance dans la constitution de la métaphysique aristotélicienne, et à montrer comment une telle métaphysique dépend étroitement de la langue qui la fonde (ou l'a fondée) — p. 51 notamment. Autre point fort de cette démonstration, le développement sur les évidentiels en tariana (pp. 120-2). Syr la question des genres, ou sur celle des pronoms – toutes deux assez attendues à ce stade – Minaudier offre une pléthore d'exemples très parlants et très convaincants.


Ainsi, en vrac, le futunien a deux pronoms de première personne du singulier, l'acehnais n'a pas d'adjectifs, le motuni compte jusqu'à cinq genres différents qui ne distinguent pas des “genres” au sens où nous l'entendons (gender), les locuteurs murinyapata comptent dans une combinaison de base 2 et de base 5 (de sorte que leur mot pour dire “100” a soixante-dix syllabes), le kalam n'a pas d'autres voyelles que le schwa, etc.

 

Ce qui doit recommander, par-dessus tout, cet ouvrage est qu'il n'est jamais cuistre, toujours vibrant de passion, et surtout extrêmement drôle. Hyperbole, images cocasses, humour de répétition (avec le gag récurrent  au sujet des inestimables éditions De Gruyter & Mouton, qui s'achève en apothéose dans l'Épilogue et dans la note 100), la drôlerie est le signe d'une subjectivité omniprésente et délibérée. Cela signifie aussi que cet essai en forme d'autobiographie partielle n'est jamais neutre, de sorte que Minaudier s'y autorise des jugements sur l'espéranto “hideux et grotesque avec son look de patois latin dégénéré” (p. 19), non sans aboutir à des développements d'une profondeur et d'une concision admirables. Ainsi, je tiens la page 119 pour une des synthèses les plus claires et les plus abouties sur les questions de plurilinguisme et de traduction. (Je ne la cite pas – achetez le livre. Ou, si vous êtes de mes amis, attendez de voir si je vous l'offre.)

 

Pour conclure, et comme c'est aujourd'hui le 55ème jour de l'année 2015, laissez-moi citer la phrase marginale de la page 55, en fidjien (j'ai un peu triché, ou, en tout cas, ça tombe bien – la plupart des langues citées ont recours à des lettres, accents ou diacritiques que je ne saurais pas trouver sur mon clavier, même avec les raccourcis Alt) :

Au taaleita'ini i'o va'alevu ca'e ti'o mai ina veisiga.

Je t'aime chaque jour davantage.

dimanche, 04 janvier 2015

Treizain à chute (27.XII.2014)

le tanin des tristesses sur la langue 

un terreau plus friable 

dérouté par la tarentule du temps

(velue, ne tisse pas de toile)

 

le velours du sommeil dans la roue des journées 

autant de cristal que de tuf 

autant de brio que d'effroi

 

on se demande désormais 

ce que fut cette année 

engendrée au tamis de fleuves capricieux 

brassée d'azur et de grisaille 

 

grièvement désormais 

brasse

.

samedi, 03 janvier 2015

Douzain astérisqué

je n'ai pas d'âme

* rideaux de papier en volutes

lourde enclume du corps dansant *

 

dansons *** vous n'avez pas

le sens commun *** et moi

je n'ai pas d'âme

 

* -* cette légère bulle de *-* tulle

n'est que le souffle de *-* la bruine

(je n'ai)

* ce fleuve lourd qui pousse ses

marécages mais c'est mon sang *

(pa*s d'â*me)

.

mercredi, 24 décembre 2014

Onzain astérisqué (17.12.2014)

Déjà on vous nargue

*** la concierge était podagre ***

sur ton cheval fougueux

tu bectes pounti ou poutargue

& vous n'y voyez goutte 

*** enfin du picrate !!!

 

On vous nargue, sûr

déjà sur la route

came le fourbe vous la fourgue

*** sur ton destrier prendre date ***

la chute du rouble russe

 

dimanche, 30 novembre 2014

Horreur sourde...?

Ce que je veux dire, c’est que retourner sur ses pas, retrouver intacte, préservée, la vie partout ailleurs abolie, n’éveille ni joie ni gratitude mais l’horreur sourde d’être cerné, soudain, de spectres, de descendre, vivant, au tombeau. (Pierre Bergounioux. La mort de Brune, p. 63)

 

Quoique j’aie bien noté ce contraste entre la vieillerie ambiante de ma ville natale (plus encore peut-être le caractère hors du temps national ou mondial de la vie au village) et certains aspects subits de modernité traversés à Bordeaux ou à Paris, je n’en ai jamais eu cette appréhension tragique, spectrale, qui m’a sans doute sauvé de la mélancolie — je me suis contenté d’épouser les contours de ce que la vie m’offrait, sottement ou joyeusement, mais peut-être aussi ai-je manqué quelque chose, et serai-je vraiment horrifié en le comprenant, trop tard (sur mon lit de mort ?)

lundi, 10 novembre 2014

Scimitar

Samedi matin, devant l'école primaire

Un coupé sport était garé,

D'une forme inconnue —

Et son nom, Scimitar,

N'invoquait rien du tout de concret.

 

Modèle désuet

D'une série de coupés sport

Anglais (la marque, Reliant,

Ne dépliant rien de concret dans la mémoire

Une fois cherchées

Des réponses), il reste l'énigme :

 

Qui, dans ce quartier

Désert – quelques habitués

S'y égarent –, avait pu

Parquer là cette forme

À tout absente désuète ?

 

samedi, 01 novembre 2014

Uzis

donc à Uzès

un pataquès

 

à Uzel

visage rimmel

comme à Uzeste

juste un zeste

 

de soir serein

à Uzein

 

mais ton air faux-derche

à Uzerche

ou à Uzer

devait m'user

 

sans lendemain

pour Uzemain

.

vendredi, 26 septembre 2014

Such Is Life

Il y a 171 ans naissait Joseph Furphy (Seosamh Ó Foirbhilhe en gaélique), l'auteur du sublime Such Is Life, chef-d'œuvre australien trop peu connu.

Who can claim s/he is a true Australian if s/he has not read Such Is Life ?

 

C'est vendredi. Avant de recevoir plusieurs étudiants, puis d'assurer plusieurs cours, il convient d'écouter calmement Émilie Mayer et Hilding Rosenberg.

En zoom 200% je vois tout bien comme il faut, confortablement.

Je vois passer sur mon mur un poster bien cucul-la-praline dont le slogan est, je cite de mémoire, “You Have to Embrace Getting Older”, l'illustration étant une photo de Meryl Streep, qui, à 65 barreaux, a moins de rides que moi — d'ailleurs, elle n'en a pas du tout. J'en conclus que c'est un canular.

 

Puis je voulus composer un poème constitué et entrelardé de captures d'écran.

jeudi, 18 septembre 2014

3370

Dans les toilettes du rez-de-jardin, il y a une carte de l’île d’Arran, et, dans celles du premier étage, une carte du Cantal, avec Saint-Pantaléon-de-Lapleau, qui se trouve en Corrèze.

 

Dans les toilettes du sous-sol, j’ai fini par déposer, sur la caisse où sont entassés des carreaux de rechange, mon vieil exemplaire de l’Abrégé du Littré, que j’y feuillette — d’où d’abstrus “poèmes du Littré”.

vendredi, 06 juin 2014

Gnop-gnip

Il y a neuf ans, donc, je débarquai dans la blogosphère (comme on disait). Ce genre d’anniversaire est l’occasion d’un bilan.

 

Pendant quelques années, avec des hauts et des bas, mes deux blogs (Touraine sereine, fondé le 6 juin 2005, et MuMM, fondé le 8 février 2006 après un incident de type trollesque assez flippant survenu sur l’autre) m’ont permis d’échanger avec un certain nombre d’autres blogueurs, ou avec de “simples lecteurs”, on va dire.

 

 

 

Ce temps est, depuis belle lurette, révolu. D’une part, beaucoup de blogs ont cessé d’exister – je ne vais même pas en donner la liste, on n’est pas dans un cimetière. D’autre part, avec l’exceptionnelle vitalité qu’ils permettent, les réseaux sociaux semblent avoir éliminé, peu ou prou, les échanges par le biais des commentaires ou des rétroliens ; ainsi, les billets de blogs continuent de trouver des lecteurs, mais de manière plus discontinue, en dents de scie, et surtout, les rares réactions qui surviennent ne figurent jamais en-dessous des billets mais en accompagnement des statuts Facebook ou Twitter qui ont permis le “partage” du dit billet.

 

Rien à déplorer → au contraire, il est plutôt amusant de voir que ce qui semblait être le summum de l’excitation électronique créative en direct il y a moins de dix ans a désormais rejoint l’ère des brontosaures : les blogs (ou, en tout cas : les miens) sont devenus un espace de lenteur, de retenue, un lieu en marge, absolument. En fin de compte, neuf ans après la première pierre, le débarquement, le bilan est presque parfait, puisque l’objectif premier était de me forcer à écrire régulièrement, beaucoup, etc., à combattre – d’un bloc et par la publication – la page vierge et les penchants velléitaires.

Bilan chiffré : 3327 billets ici, 2159 là, soit 5486 en tout, sans compter les publications éparses, ailleurs, comme le recueil Prime Time of Poesy, dont je suis très fier. (C’est « mon » anniversaire, j’ai le droit d’être arrogant, what a pompous ass.) — Donc, même si je suis resté très feignant pour tout ce qui est sérieux (notes de lecture, comptes rendus de concerts etc.), je me suis attablé, il en reste des traces, voilà, contrat rempli, au moins vis-à-vis de moi-même.

 

║ Vous avez le droit de ne pas être d’accord, et de l’écrire ici, en commentaires, à l’ancienne, cf supra ↑ Vive le débat. ║

 

 

 

Comment célébrer alors (dignement) ce neuvième anniversaire ?

 

J’ai pensé à un petit exercice d’écriture croisée, un jeu de ping-pong entre les deux carnétoiles, justement. 248 jours séparent le 9ème anniversaire de l’un du 9ème anniversaire de l’autre.

Pendant ces 248 [un nombre qui n’est pas multiple de 9] jours, je me propose donc d’écrire, au sein de rubriques respectivement intitulées Ping-pong et Pong-ping, des textes qui se répondront. Le genre de ces textes reste à définir, et le rythme de publication n’est pas déterminé à l’avance (en effet, je me connais, sur une période aussi longue, si je fixe des publications quotidiennes, ça va tomber à l’eau).

 

▄–▄–▄–▄–▄–▄ De surcroît, je suspens, pour une seule journée, et afin de marquer le coup, la publication des limericks casse-couilles meurthois▄–▄–▄–▄–▄–

samedi, 31 mai 2014

Malgré le vent...

Malgré le vent,

malgré le vent qui tournoie

efface parfois le printemps

 

sous les pépiements des mésanges,

chats du quartier tous à l'affût

 

depuis ce matin j'arpente les rues

dans mes sandales de jésus

 

en soie grège ma peau craquèle

 

un nouveau printemps que salue

le vent tournoyant.

 

vendredi, 27 décembre 2013

Cauchemar rue Mariotte

Donc, dans la nuit du 26

au 27, deux cauchemars, dont le premier

d'une précision narrative

et d'une complexité

rarissimes chez moi,

angoissant,

film de David Lynch,

il faut croire.

 

Il faut croire

le souffle du vent dans la rue

quand il nous ramène

bouffées de souvenirs,

qu'il fait tomber les nèfles,

les laisse s'écraser

dans la boue humide de leur

putréfaction.

mercredi, 27 novembre 2013

Mercredi matin

La brosse à cheveux est tombée sur le sol carrelé de la salle de bains avec un bruit métallique, à la limite du fracas.

La difficulté, pour l'écrivain, serait de dessiner sans ambages la figure de la flèche orange courbe, puis de l'explorer — de l'insérer dans ses textes, dans un livre même, sans que cela fasse effet d'annonce.

Un jardin sur l'Oronte.

Y songer. Phobie du fatras.

dimanche, 24 novembre 2013

Lever silences

Mardi dernier, lisant, à la Bibliothèque des Lettres de mon université, un roman rare, introuvable, jamais réédité, emprunté grâce au service du PEB et qu’il était impossible de sortir de l’enceinte de ladite Bibliothèque, je commençai à prendre des notes, mais très vite je fus frappé de lire, ici et là, de loin en loin, un alexandrin. Je notai le premier, qui se trouvait à la première page. Puis il me vint l’idée de noter tous ceux qui pourraient, au moins au jugé – car le résultat final d’une telle opération est difficile à anticiper –, constituer, in fine, un sonnet.

Je me retrouvai donc à lire, à la hâte, de manière particulièrement vigilante, la première moitié de ce roman, tout en fixant une part non négligeable de mon attention sur le sonnet en cours, que j’ai pu achever après moins d’une centaine de pages lues (donc, bien avant que je m’interrompe) et dont je donne ci-dessous la version typographique définitive, qui comporte aussi, en exergue, un envoi et un sonnet de nombres.

Le fragment initialement prévu pour le vers 3 n’offrant pas une rime parfaite, il a été rebuté, au profit d’un emprunt extérieur. Le titre du sonnet est une anagramme du titre du roman

 

 

Lever silences

À mon amie la Colonelle.

 

Sa mise originale me plaît tout à fait :

Un canotier uni, comme les saints leur nimbe.

La reine de la fête nageait dans un limbe ;

Ce corps luxuriant l’étonnait, le déroutait.

 

Par une bonne humeur qui les attendrissait

Ce n’étaient que carquois et que torches flambantes

L’œuvre était d’une écriture alerte, pimpante,

Depuis que sa réputation s’élargissait.

 

Les passants, des êtres légers, ouatés de songe

Et dont les doigts de carabin, fumés sous l’ongle,

Indiquaient que l’Invisible était nul pour elle.

 

Par-dessous la voûte noire des marronniers,

J’ai rarement vu d’auscultation plus belle :

La cape de drap jaune avec le canotier.

 

Blouson, usures — 13-1-X-18-51-12-38-72-43-52-64-78-56-59

mardi, 12 novembre 2013

I'm 39, so be it

——↨—— When the sotnik entered the dača (or dætʃə, as friends would have it), the children were all gathered around their mother.

Oddly enough, she was wearing a sotana. 

‘No need to be tossy, Lordy’, she solemnly declared.

‘For fuck's sake’, he ejaculated, ‘I'm not dealing in soterology’. —▬←▬→—

lundi, 11 novembre 2013

Divas

Dix variations sur la brosse à dents.

Tel saint Thomas, je crois ce que je mords.

Mes mots à la pointe bic bleue,

ça ne sert qu'à mordre.

Toujours mordre.

Et la pâte dentifrice : un artifice.

Feu follet ; chien errant.

Variations.

dimanche, 21 juillet 2013

L'antilope / oryx d'onyx

L'antilope 

oryx d'onyx 

gazelle à qui le lion fait prendre une gamelle 

bubale de Michaux 

le souffle en cavale 

est comme un calao 

ou cet ara bicolore 

qui mâche des gingembres 

en attendant les nombres

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dimanche, 07 juillet 2013

(la bonne blague)

Perdu enfin dans la chaleur polluée de la grande ville. — Jusqu'à quand devrons-nous retarder le départ pour nos campagnes ?

(Ce n'est pas qu'elles soient belles : grêlées de hangars, salies de panneaux publicitaires aussi, creusées de mille petits néants qui les scarifient. Mais elles sont, tout de même, le havre.)

Tours, polluée, bruyante. Fenêtres ouvertes le soir — chambard des motos, heureusement les merles font du bazar. Il faudrait reprendre les poèmes en anglais du printemps (les compléter aussi). Manque l'énergie, ou l'envie, ou quoi. Difficile de dire.

Depuis que j'ai recommencé à m'échiner sur de piètres ponctuations (j'avais trente ans depuis pas longtemps), je devrais enfin enfoncer le coin de fer dans l'œil de Cyclope, je veux dire faire œuvre, tuer la vision dans l'œuf. Lire Bergounioux aide à décanter ——— et n'aide pas, en même temps, enfonce sans secours.

C'est étonnant tout ce que j'ai lu et qui n'aide à rien.

Écrire non plus, depuis si longtemps, n'aide à rien.

Dire que j'ai cru reprendre (la bonne blague). Parmi les dizaines de bouquins entassés, prêts à rejoindre, eux aussi, nos campagnes, j'aurais dû reprendre les Cahiers de Valéry (depuis le temps...)

Il y a cette servante qui plaisante, cette plaisante accorte domestique qui m'a plaqué au sol (je n'avais pas prévu de m'étaler ainsi, de m'étendre), s'est rendue maîtresse, sans bonté mais tout étant. 

mardi, 21 mai 2013

Vert

 On savait déjà que les jours passeraient, anodins peut-être – sans doute évanouis à peine nés.

Le vent souligne le vert, l'amplifie.

On se sent entouré de verdure.

Peut-être est-ce, avec le froid, l'effet des pages retrouvées de Guillevic, toute cette verdure admise, affirmée.

Ou seulement le vert.

Qu'on savait déjà.

dimanche, 19 mai 2013

Un kavalier kaki

Aéroport de Copenhague, terminal 2, 19 mai 2012 Un cavalier dans un aéroport attend que les ailes d'un oiseau au gracile fuselage lui ouvrent la voie. Un an de plus pour l'animal dont l'âme outrepasse tout zénith !

Aboo Din lashed them mercilessly and drove them into the jungle, where he followed on his hands and knees. ——— Toutefois, nous fûmes à Copenhague, à passer la nuit, trois fois déjà, notez-le bien.

Le fjord n'est même pas verdâtre, Guillevic écrit cromlech——— Sous la belle lumière dorée de cinq heures du soir, nous quittons le village enchanté, pour nous acheminer vers les montagnes du fond, en traversant le plateau paisible et pastoral que l'on dirait fermé de toutes parts.


—————————
Taa jääpi niemi kuusimetsineen
ja käki toraisine rouvineen.
(Aaro Hellaakoski)
—————————

mardi, 12 mars 2013

Je ne peins pas l'être

Autoportraits variables, lundimanche I

 

Je ne peins pas l'être, je peins le passage.

Oui, mais... peindre ?  Trafiquer, conduire dans la neige, crier au sommet des montagnes ?

Très peu pour moi.

Je veux m'endormir sous une couverture de secours,

je veux prendre la poudre d'escogriffe,

je veux je veux

terrasser les démons extérieurs. (Ceux d'ailleurs

me plaisent assez.)

vendredi, 25 janvier 2013

Aux ennuyeux mandarins

Ligué avec la musaraigne, le muscardin ne comptait pas s'en laisser conter. Tous deux se relayaient pour qu'il y en eût toujours un qui veillât, et de sorte qu'on ne pût plus les confondre avec des loirs. Dormir comme un loir, je vous en foutrai, moi — ainsi parlait le lérot, discret, mais, au printemps, tapageur dans les greniers, sorte de hooligan mal embouché, ne s'étant pas défait de ses habitudes de bûcheron rustre. Dans le froid enfin sec, au grand soleil de janvier, il hibernait encore. Un merle hivernait. Le lérot ne savait que penser, dans des rêves complexes. Ligués ensemble, la musaraigne et le muscardin, yeux grands ouverts, voyaient passer les caravanes. On patauge dans la mélasse, cela ne fait aucun doute, on patauge dans la purée, on sirote des heures etnières qui filent comme ça, tchazam !, et plus rien après. Ainsi, les lexicographes le surent, et les lexicologues ne voulurent rien entendre : la mélasse lasse. Calfeutrer les encoignures des fenêtres avec ce résidu gluant n'est peut-être pas une bonne idée. Penser à le dire aux architectes.

 

Sur la porte de l'Université, une main couleur abricot avait inscrit ces mots :

IL EST INTERDIT DE POSER DES QUESTIONS


Le lérot, piqué par une abeille, s'éveilla, commença avec trois mois d'avance son tapage dans le grenier.

Penser à déménager.

Aux ennuyeux oligarques Jean-Louis Duchet, Claire Charlot, Serge Ricard, et alii

vendredi, 11 janvier 2013

Mademoiselle Confiture

 (Pierre-Alain Goualch, 2004)

le temps qu'infuse le thé russe je ne pourrai jamais écrire aussi vite que ça que le piano pianote jamais aussi vite à peine 130 secondes pour écrire quoi d'ailleurs

ça ne s'emballe pas tout de suite

la toile de jute prend un peu le temps mais pas trop ça y est ça s'emballe

s'accrocher à quoi aux trous dans la toile

s'accrocher à ces mots dits par le sieur Dudot le ciel est amoureux amoureux de ses yeux

du plat de la main du bout des index des majeurs tapoter tandis que ça pianote gratte frotte et le balai passe repasse c'était plus facile plus posé de prendre le temps d'écrire ce tanka tout à l'heure

tant qu'à faire un peu de piano

tant qu'à s'accrocher

tant qu'à avoir mal au dos aux doigts ravauder quoi quel texte oui j'étais pris

surpris les doigts dans la confiture écrivais-je écrivis-je la main sous la ceinture

bientôt le terme sans doute fin de la joute le tournoi a noyé le chagrin la toile de jute on n'en viendra pas à bout

ça s'effondre à peine 130 secondes cette amante religieuse écrire quoi

 

jeudi, 01 novembre 2012

Valaoritides

(écrit le 27 octobre à 18 h 40, pour publication à la Toussaint)

 

Hier, 31 octobre, a été publié, dans ces carnets, le premier d'une nouvelle série de poèmes, les Valaoritides. Ce premier poème, "Une otalgie aux urgences", a été composé en direct à la Clinique de l'Alliance, et envoyé sous forme de textos, entre 9 h 50 et 10 h 29.

La forme en est régulière : tercets de 24 syllabes avec un découpage 7-6-11, 6-7-11, plus rarement 5-9-10 ou 6-6-12.

La composition sous forme de textos est optionnelle.


samedi, 06 octobre 2012

Ressentiments

C'est de la balle.

Envols dans les champs, folies de l'ouragan, sacre de la tornade, et goût amer sucré folâtre et musqué de la dorade.

Si vous ne la souhaitez pas exploratrice, épelez daurade.

Un amphithéâtre, quelques cris, des joutes de martinets dans le ciel de Corinthe.

Je me suis gouré d'endoit, je me suis gouré de carnets, je me suis gouré de vie.

Tandis que la tornade sévissait, battait son plein, mugissait dans les esgourdes, Don Juan se répétait inlassablement les mots de Samuel Beckett, la ferveur de la foirade, le détachement du gâchis.

Et, si vous avez ingéré trop de métaux lourds, appelez-la Darius.

Raisins secs, Rosinnen, le chat goinfre détale.

C'est de la baballe.

dimanche, 30 septembre 2012

Moins-orti

Je l'écris comme c'est sorti, comme ça s'est appesanti.

Focus Danse; [gravures] dernier jour de 7bre .................. danse < soprano

les 12 jardins

les 6 gravures

les 4 boissons

l'1 vieux endormi tenu par son volant sur la route de Chinon

NOMBRES

Le trio forme un serpent qui se gondole au fur et à mesure des figures. LA MONTRE BLEUE. LA BÊTE NOIRE. Mais tout de même les carottes râpées dans le cake, et la cycliste aux cheveux couleur carottes râpées chute d'épluchures sur les bords de Loire.

Le piano interrompit les envolées du trio. (Au verso je dois le préciser trois fois les 3 miens le tout sur fond noir vieil assemblage dû à la main technique de Delphine.)

 

NOMBRES                les 15 tuiles de mon fils en déveine au bout de seulement 4 coups

puis mes 9 tuiles après le 6e coup, la chance tournant définitivement en ma défaveur

 

Si je compose un texte aussi enchevêtré à chaque partie de pyramides plastiques, qu'en faire ensuite ?

 Puis j'écrivis une sorte de poème débile.

Colombe de la paix

perdue hors des lignes

(des lignes amies)

l'échéance à peine repoussée

du triple échec (cuisant :

marmite du dîner) Colombe

ton ombre on la déchiffre

 

le mot SEPTAIN compte 7 lettres

trouver pour nouvelle forme de sonnet un nom de 14 lettres

 

.

mardi, 03 juillet 2012

Une brise d'agrume à ma fenêtre éteinte

Lâchez-moi la grappa !

lâchait à haute et intelligible voix, exaspéré, le beugleur qui faisait office de beugleur. On se retrouvait à dix-sept dans cette étable, on ne savait pas pourquoi la terreur nous avait saisis si près des oreillers, et donc voilà bérézina. Tout de même, étions-nous plus rassurés d'être au bord de l'Adriatique qu'avec d'autres casse-bonbons (je ne saurai jamais mettre casse-bonbon au pluriel, à moins que ce ne soit invariable, avec déjà un s au singulier -- je penche désormais de ce côté-là), et sans siroter, à aucun moment, cette liqueur immonde et sucrée, le limoncello ? En m'insultant, Monsieur le beugleur, vous étiez à votre affaire. Il n'empêche que personne ne trouva cela drôle quand Faust, à la fin de la réunion qui avait duré au moins une heure de trop, lança "je dis ce que je veux, je pète quand je veux, je chie quand je veux". La vache ! Oui, la vache, pouvait-on réagir autrement ? Faust était à son affaire, il ne haussait jamais le ton, de sorte que ce n'était pas lui, le beugleur faisant office de beugleur.

Terrorisés, nous passâmes la nuit, et le jour d'après, à nous échanger les oreillers au fil d'une intense et insensée partie de volley-ball.

Le monde, avec ses destructions de mosquées, continuait de tourner. Pas rond, comme chacun sait.

lundi, 02 juillet 2012

Les fastes de Gargantua

Qu'à un moment donné drogue et tennis furent fastidieux, et toute cette fin de juin, pourtant, resta sans lecture. Le golf vu comme un jeu de billard sur une table immense, tout en rage anale et bérets à carreaux. [163]Garçon de guinguette, une bière ! on étouffe ici, se désosse, s'assoiffe.

Et dire aussi que quand on défèque, c'est comme si on priait – posture tendre d'amen au monde. [103]

Et les cafards volants, les cafards entre les draps et sur les murs, [45] les cafards que vous hallucinâtes, cafards tisseurs de toile et cafards au fond des placards, obscurs grouillements dans la perte sauvage des moindres repères.

Tu me demandes comment on prononce désosser et tu me demandes ce que veut dire… ce que veut dire quoi, déjà? écoute les trompes, nous réfléchirons plus tard, en posture d'acceptation.

 

 


 

 

In this dream, which every now and then still recurs, I am standing publicly at the baseline of a gargantuan tennis court. I'm in a competitive match, clearly: there are spectators, officials. The court is about the size of a football field, though, maybe, it seems. It's hard to tell. But mainly the court's complex. The lines that bound and define play are on this court as complex and convoluted as a sculpture of string. There are lines going every which way, and they run oblique or meet and form relationships and boxes and rivers and tributaries and systems inside systems: lines, corners, alleys, and angles deliquesce into a blur at the horizon of the distant net. I stand there tentatively. The whole thing is almost to involved to try to take in all at once. It's simply huge. And it's public. A silent crowd resolve's itself at what may be the court's periphery, dressed in summer's citrus colors, motionless and highly attentive. A battalion of linesmen stand blandly alert in their blazers and safari hats, hands folded over their slacks' flies. High overhead, near what might be a net-post, the umpire, blue-blazered, wired for amplification in his tall high-chair, whispers Play. The crowd is a tableau, motionless and attentive. I twirl my stick in my hand and bounce a fresh yellow ball and try to figure out where in all that mess of lines I'm supposed to direct service. I can make out in the stands' stage-left the white sun-umbrella of the Moms; her height raises the white umbrella above her neighbors; she sits in her small circle of shadow, hair white and legs crossed and a delicate fist upraised and tight in total unconditional support.

 

The umpire whispers Please Play.

 

We sort of play. But it's all hypothetical, somehow. Even the 'we' is theory: I never get quite to see the distant opponent, for all the apparatus of the game.

[...]


the deflated bladder had landed in the Marching Terriers’ sousaphone player’s sousaphone and had been handed over to Joelle after extrication by the lardy tubist, sweaty and dumb under the girl’s Actaeonizingly imploring gaze –

mercredi, 23 mai 2012

En compagnie

Pas de coup de trafalgar Détonne explosion pas de coup de Trafalgar on comprend comment le jeu des biais On comprend comment Comment comprendre le jeu des biais ? éternuements fragments d'éternité Eternuements le temps qu'on se dénude Le temps qu'on exsude quelque chose d'autre de soi que de vaines paroles Comment trouver le temps ? (éternue éternue c'est bon pour le moral) Comment damer le pion apprendre le jeu du cambouis --- ho hisse ce mot qui t'échappe tu bâtiras un cimetière autour Pourquoi les fondations persistent-elles à s'échapper ? pourquoi comment pourquoi Le jeu des biais n'est pas noirâtre ou huileux --- s'il y a une explosion S'il y a pour de bon S'il y a bel et bien une putain d'explosion alors on dira Pourquoi Comment Alors on dira Alors on dira pas de coup On dira Pas de coup de trafalgar.

vendredi, 13 avril 2012

Sell and tell

Après avoir passé une nouvelle nuit en pointillés en raison de sa rhinopharyngite, pris ses drogues et son petit déjeuner, la marquise, dépitée d'être presque aphone, se connecta à Facebook avant de corriger un travail de M1 Recherche sous .docx. 

Elle enlève sa perruque car elle a peur que le travail de M1 ne la défrise. ‎(Elle s'interrompt - déjà - dans son travail pour aller étendre une lessive.) Pourquoi ai-je lu "la maquerelle" au lieu de "la marquise" ? 

The imp is no pimp.

Ma querelle ? ta querelle ! j'ai jamais cherché querelle ! 

 

Après qu'elle eut constaté que le lave-linge s'était convenablement mis sur la position "Arrêt", la marquise, ayant humé l'atmosphère fraîchement printanière et constaté qu'il s'agissait encore d'une de ces journées - trop nombreuses à son goût - où les militaires de la base aérienne avaient décidé d'empester et de polluer tout le quartier à grands renforts de kérosène, décida d'étendre le linge propre mais humide à la buanderie et, au moyen de cintres et de pinces, au-dessus des radiateurs, et non sur la terrasse où, plutôt que de sécher, chemisiers, pantalons, mouchoirs et caleçons risquaient plus évidemment d'être salis derechef par la manne noire tombée du ciel, et qu'envoient, sur les pauvres mortels de Tours-Nord, ces salopards de dieux modernes que sont les aviateurs et leurs acolytes.

 

(Puis Rembrandt s'aperçoit qu'il ne sait pas photographier l'odeur des lilas qui bordent la cour de récréation.)

 

Interlude non strictement narratif

Occup... qu'il était à se bidonn... en lisant le livre de Corinne, Guillaume a laiss... cram... les steaks hach...

 

 

Le récit reprit. Accaparée qu'elle était par de complexes réflexions administratives, la marquise mit une bonne minute à s'apercevoir qu'elle cherchait à recharger le téléphone portable avec le câble d'alimentation de l'appareil photographique. Avant d'aller se pochtronner puis s'éclater au Petit Faucheux, la marquise devait encore écrire deux mails professionnels et trouver quelque chose à grignoter. Au retour, tard le soir, à Mégara, dans les faubourgs de Carthage, son carrosse ayant obstinément refusé de se muer en citrouille, la marquise rentra chez elle après un exceptionnel double set au Petit Faucheux, expérience qu'elle prolongea par l'écoute de ALBEIT au casque.

(Interlude. Nuit.)

(Fin provisoire.) En raison du rhume persistant qui lui défrisait la cafetière depuis déjà trois jours, la marquise passa derechef une nuit fort courte, et de merde.

mardi, 10 avril 2012

Autre sizain en -pha

 

Pour rimer avec Diarapha,

On me propose Mustapha

– Ou d'orthographier kalipha

"Califat". Dans le Nord, à Pha-

Lempin, ou en Moselle, à Pha-

Lsbourg, qu'irait faire Diarapha ?

 

vendredi, 17 février 2012

La fée talmudique se repose (5’35”)

Pas de perte de contrôle, ni de vitesse, si ce n’est le sombre éclat entre les touches. Tu tergiverses, mais non – jamais tu ne tergiverses, alors : on s’embringue, embardées, d’où d’autres embrassades, sans emberlificoter, tout se résout finalement en un brelan harmonieux. La flèche monte au ciel, c’est comme si le caméraman avait trouvé un truc pour l’y suspendre, l’y arrêter, faire en sorte qu’elle s’attache à rien, à l’air, à la chaleur d’un souffle, au butinement discret d’un insecte imperceptible. Pourtant, la caméra elle aussi fait des embardées, tout le monde s’extasie. Après une pause étonnante, on se croit en plein film d’espionnage, même pas parodique, comme si la sieste nous avait saisis, un assoupissement de fortune, ça tombait bien, on n’allait pas fort, tout d’un coup c’est tout comme si tout prenait le moelleux d’un tapis de mousse, mais tout s’étiole toujours, partout. Alors, après la pause étonnante dont l’on ne garde plus qu’un souvenir diffus, en différé on suit les embardées renouvelées d’une cacugne – pas du tout la Jaguar ou la Porsche des frimeurs, des flambeurs – au volant de laquelle s’exprime tout un imaginaire. Il a fallu que je reprenne, revienne, reprenne tel mot, telle virgule, ça n’allait pas, le lisse et le moelleux qui enflamment, dans les embardées, le souffle chaud, le lisse et le moelleux je n’ai pas su les capter dans mes phrases, quoique j’aie fini par sentir, doucement, l’accalmie, le repos, la sérénité encore – sur un lit de mousse en été, contre une cabane de planches sèches en hiver – s’enfouir dans mes phrases, s’y lover, s’y bercer, embardées encore, et embrassades, et tout un monde partout qui détoure les nuages, les angles vifs, à l’horizon, tout un monde, oui – et pas de perte de contrôle. Ni de vitesse. Effacement (moelleux).

 

Alban Darche 4tet. Brut ou demi-sec ? (Yolk, 2009)

mercredi, 08 février 2012

Un mercredi de rien

Voir seulement le soleil percer la blancheur.

Un regard vert 

s'étend jusqu'aux rayons. L'ennui

n'a rien à faire là-dedans. Voir le soleil

juste poindre, puis

éclater sur les étendues froides et cotonneuses,

apaise, rameute

les souvenirs. Voir juste percer

poindre. Le soleil

    .

lundi, 23 janvier 2012

Monday Morning Haiku

6.20 a.m.

 

this morning when I woke up

the hyacinths were sagging

with no mimsy borogoves

 

.

dimanche, 08 janvier 2012

Bast(ingag)e

Si je m'efforce d'écrire la vérité sur ce que je ressens, alors :

oui, moi aussi, je sens une part de mon corps s'en aller, voguer vers un océan lointain, tout en ayant le cerveau collé au bastingage.

.......

Mais ça ne fait pas de moi un livre à couverture verte emprunté à la B.U..

jeudi, 03 novembre 2011

Funky Fun-Key

Ça y est, à peu près toutes les horloges de la cuisine sont à l’heure, à l’heure d’hiver. Une complainte, tu ne vas tout de même pas passer tes journées à bader ce camping-car en laissant infuser ton thé à la bergamote ? Hier soir, le Château de Tiregand 2008 puis la liqueur de poire, ça faisait peut-être un peu solide sur le cassis.

Des jours, des journées comme ça, pluvieuses, grises, monotones, pas assez de jus pour se décourager en regardant les sandales détrempées sur la terrasse, ou les espadrilles en vrac dans le vestibule (notre ami tire sur la corde, je trouve). Dire que tu avais le cran de critiquer l’autre polardeux pour ses phrases nominales en cascade. Tu abuses, tu t’abuses. Avec les feuilles de néflier qui font un rideau jaune, et quand la pièce commencera-t-elle ?

Vous n’avez pas la clé, tout ça c’est juste pour s’amuser. Tu t’amuses.

Notre ami que voici se donne les gants de tout savoir, même la vie clandestine des flamants roses, et ce jusqu’au sens architectural du mot falbala, mais il est incapable de servir un thé qui n’ait pas, plus ou moins, et jusque dans les chaloupements osés de la contrebasse de Heiri Känzig, un goût de lavasse tombée d’une gouttière.

Le félin se marre, vous salue bien.

 

―――― Juste un rappel de la contrainte de ces textes, qui n’ont pas de rubrique réservée (et je crois qu’on en trouverait dans les deux blogs) : doivent être écrits, sans retouche ultérieure, pendant l’écoute du morceau qui leur donne titre.

jeudi, 15 septembre 2011

No Arizona thumbsicle (we're Ligerians)

La ville chavire, à l'état gazeux ou à l'ambiance nocturne.

 

Guingois du mercredi - 14 septembre 2011 : escalier de la Bibliothèque municipale (II)

Nous ne sommes plus grand chose. Nous nous regardons de biais, ou bien sommes enfoncés dans ce qui est devant nous boudeurs ? Le contraste a permis d'appuyer sur ce qui était gris, ou alors délavé ocre.

 

Aujourd'hui, tout de même, deux mots : thumbsicle (n'est pas dans l'OED) + bolosse (n'est pas dans le Robert).

 

dimanche, 26 juin 2011

L comme Litanie

Quelquefois l'auteur est décédé lors du choix de la mise en scène. Le metteur en scène fait le choix de mettre en scène un auteurs décédés.

(Copie de bac, série L, Français)

 

Soyons plus ambitieux que ce(tte) candidat(e), qui s'en tient à une seule redondance. Imaginons ensemble une copie entièrement redondante !

Pour commencer, je propose la troisème phrase qui suit :

Alors, comme l'auteur décédé est mort, le metteur en scène met en scène un texte dont l'auteur n'est plus en vie.

 

J'attends vos suggestions de phrases #4, #5 etc.

vendredi, 10 juin 2011

Petit exercice (oulipien, en quelque sorte)

 

Voici les trois premières phrases d’Adama ou la force des choses du Burkinabé Pierre Claver Ilboudo :

Pendant cinq bonnes minutes, Adama resta là, abasourdi, hagard. Puis il se mit à marcher droit devant lui, comme un automate. Il recouvrait progressivement ses esprits. (Présence Africaine, 1987, p. 7)

 

Voici à présent les trois dernières phrases du même roman :

Adama était là, figé, le visage en sueur et les traits décomposés. Le vélo qu’il avait garé dix minutes plus tôt devant la porte de l’atelier avait disparu. Et les tissus avec. (p. 154)

 

L’exercice que je propose consiste à écrire un récit dans lequel l’incipit et l’explicit seraient inversés. Autrement dit : le récit à écrire doit commencer par les trois dernières phrases d’Adama et s’achever par les trois premières phrases. À vos claviers.

 

vendredi, 04 mars 2011

Dimanche : troïka ou haïku

Je cuis au soleil.

L’odeur capiteuse des jacinthes d’Eric m’étourdit.

Brève est la prégnance du rêve.

 

jeudi, 09 décembre 2010

..... composer chastement mes charmes .......

9 décembre 2010.

Dans le tome 1 de l'édition Hubschmid des oeuvres de Nadar, le portrait de Caran d'Ache (avec monocle) fait face à celui de Caro-Delvaille (avec barbe en pointe et pinceau fin à la main droite). Bernard est bien heureux. Eglise des Carmes, dite aussi Saint-Saturnin, Tours, 29 janvier 2010.Bernard est bienheureux. Rien ne s'est tant perdu, ai-je chanté sur tous les tons, que la mode du gilet (blanc ou beige, notamment). Où les heures passent-elles ? Où les heures passent-elles ? Un an plus tôt, nous battions le pavé. Et ce jour-là (où sont-elles passées, les heures ?), la cité était bien déserte. On voit bien que la pierre rougeoie, et la fausse ardoise de l'autre côté. Bernard, bienheureux, mène une vie de patachon. Pourtant, vous chantiez si bien, plus jeune. Bernard mène une vie de famine. Les chants suivent la rosace.

samedi, 27 novembre 2010

Cool day in Hell (7'51")

Ni le ticket du match de handball remporté par le SCT hier soir, ni ma fiche de paie du mois de septembre d'octobre, ni le disque ouvert afin de pouvoir lire les titres des morceaux, ni le livre de Claro refermé qui se trouve en-dessous du disque, ni la télécommande de la chaîne stéréo du bureau-bibliothèque, ni le tube de Lysopaïne dans lequel il ne doit plus y avoir qu'une ou deux inefficaces pastilles, ni les cartes postales abîmées, ni le tome II des Essais de Montaigne ouvert et retourné couverture vers moi (dans l'édition du Livre de Poche (alors que je possède ces mêmes Essais en Garnier jaune et en Pléiade)), ni une carte de visite à mon nom qui traîne là allez savoir pourquoi, ni le pot à crayons où se trouvent des stylos et deux crayons à papier et qui est entouré (enveloppé ? décoré ?) d'une vieille photo plus écornée et abîmée encore que les cartes postales susdites et où vous verriez, si vous étiez près de moi, a younger version of myself, moi nourrissant une girafe en faisant une grimace pas possible, ni le DVD de Shining (pourquoi est-il là, d'abord ?), ni le solo de saxophone ténor sous-tendu par le cor de Peter Gordon et le trombone de Robin Eubanks, ni mon vieil exemplaire de Memory of Snow and of Dust et mon à peine plus reluisant exemplaire de Godhorse (pourquoi, pour quel remords stupide sont-ils là, alors que j'ai renoncé à écrire les articles correspondant à mes communications de novembre et mars dernier respectivement ?), ni l'ordinateur portable Toshiba sur lequel je pianote ces lignes (ma collègue, F., a parlé ce matin, dans un mail, de lapsus calami, alors que je jure mes grands dieux que je n'écris ni mes mails ni mes textes de carnétoile à la pointe effilée d'un roseau), ni les rayonnages de livres qui m'entourent,  ni les divers livres plus proches encore de moi, en pile sur ou dans l'espèce d'espace ouvert  -- mi-tiroir mi-étagère --  qui se situe à gauche sous la planche du bureau où j'écris ces lignes, ne pourront rivaliser avec l'ardeur des musiciens dont les dernières notes se font

entendre.

samedi, 25 septembre 2010

Super divin

Donner, d'une certaine manière, des coups de poing dans le vide -- ou fendre l'air.

Ainsi, d'une certaine manière, aura commencé ce samedi, comme s'est achevé vendredi, à la lecture des 40 puis des 100 premières pages de Saturday. Non sans avoir déliré ou pastiché Cendrars, bien sûr, l'heure était à la décompression (ce que les voisins sexagénaires ont dit de Balzac et Tolstoï.....(me faisant rater de surcroît la rencontre avec Laurent Cohen).....(mais C*** et G***, eux, méritaient la soirée).....).

Je contorte, c'est pénible. J'hyperhypotaxise, non... même pas...!... je sauts-et-gambades en fait ! comme ça... tout droit...! Sans heurts, fleur au fusil... l'épieu en bandoulière... pas déconner, non...!

On n'entend plus le percolateur. (Didascalie futile.)

 

Mois d'automne. Fresques de l'église Saint-Martin. Lignières-de-Touraine, dimanche 20 septembre 2009.Ensuite, il reste possible de diverger, de bifurquer, de prendre la tangente, sans tergiverser (ce n'est pas dit). Mois de vendanges (mais on a raté la Foire aux vins). Mois où le ciel prend des couleurs étranges (mais assommé sous le boulot que veux-tu que je m'esbaudisse ?). Mois où la flèche va moins vite que la tortue (or sumpfin' like that). Mois de fringale. Mois de jeûne pour les vieillards. Mois d'épanchements spermatiques (aussi). Mois d'élégance, à descendre d'un pas vif, la tête droite, la rue Nationale (mais personne ne te regarde, pauvre cloche). Mois où l'église Saint-Julien elle-même s'épanche (étrange vendange).

 

lundi, 14 juin 2010

Dit l'un (à l'autre)

Haie de troènes, nourritures terrestres. Le chèvrefeuille embaume, et les trous minuscules forés par mon fils ont tout de la fossoyure. Musique grandiloquente de bas de gamme (au cul les faussaires !), les fouilles archéologiques raffermissent le désir de ciel.

Eléments d'un fort romain.
Quel accent prendre, dans la nuit ? dans la fuite de tout ? est-il possible de revenir incessamment au pont du Gard ?

Vous avez des gargouillis, mauvaise martingale de rien, des hallebardes tombent et grêlent de gros galets d'eau la haie de troènes.

(Non ?!)

samedi, 28 novembre 2009

Ratatiné ?

C'est dommage, tout de même...

Bourrasques brusques de pluie froide, novembre finissant.

Ce serait dommage, tout de même...

Du lapsang souchong, et un pauvre imbécile affalé sur son canapé, à lire, à regarder le vent, la pluie, les nèfles maintenant pourries -- qu'elles choient de l'arbre, ou pas.

Dommage, tout...

Ce n'est pas la montagne brûlante l'été, pas du tout la page 133, le bain au milieu des sorghos.

C'est dommage, de même...

Et ce mal de dos à tout rompre, même ramasser la roulette du caddie de toile rouge était un supplice.

C'est dommage, tout de même...

Ce n'est pas la canicule, ni la plage, ni la longue étendue de neige blanche recouverte de milliers de fourmis, qu'on voit dans son sommeil, rien plus ne vous abuse :

Tout de même, c'est dommage !

 

samedi, 21 novembre 2009

Midlife crisis (un peu d'après Pavese mais pas dans le style)

Dans les coulisses : vous n'avez rien appris, vous avez sacré, juré vos grands dieux, votre âme est un paysage moisi - et à chaque instant de votre existence désormais vous vous sentirez comme un prisonnier dans les coulisses. À certains moments votre ventre palpitera, vous aurez des frissons de joie, mais ce seront toujours de fugitives impressions captives de certains moments. Pour la parade, frimant, humant, faisant la grande gueule, le type sûr de lui ou la femme que rien ne défrise, vous vous contraindrez facilement, jouerez double jeu, aurez la part belle, ferez noble figure, et plus vous agirez ainsi plus vos nuits deviendront noires, fragmentées, prêtes pour la parade.

Ainsi, si d'aucuns - les étrangers et même les familiers - vous prennent pour un caïd, le roi du bal, le plus éminent émondeur d'huîtres, vous saurez au tréfonds, vous savez déjà pour toujours que vous ne vivotez que dans les coulisses, de sorte qu'en aucune manière, nullement, pour rien au monde il ne faut vous regarder ainsi.

 

--------------- Autant aller vivre en Australie. (Mais c'est comme si c'était fait.)

 

mardi, 13 octobre 2009

Archets vengeurs

Du moment que rien ne se passe, il n'y a aucune raison de tirer les garnements par la peau du cou, ni de tirer une flèche vers les cibles qui cachent le soleil. L'invisible nous arrête, mais comment empêcher que dardent les yeux ? Tout de même, l'abeille doit avoir une solution, quand rien ne casse trois pattes à un canard. En tapinois, les petits vauriens dévalent la pente raide. Ils ont été aux myrtilles. Ce n'est pas une raison ! Du moment qu'il ne s'est rien passé, que vous n'avez rien de cassé, que les nids sont à leur place, les pendules solidement accrochées au mur, je vous confie l'air de rien. Et s'abîmer dans l'océan à bord d'un Cessna, ce n'est pas la mer à boire, quand bien même vous seriez engoncé dans votre soutane, ô monsieur l'abbé. Ce n'est pas du tout, mais pas du tout une raison. Lights of Lake George. Circulez...

samedi, 10 octobre 2009

Pas de répit pour les escargots

Toujours pour d'excellentes raisons (dont je vous épargne l'énumération), j'ai remis à demain la préparation de mon séminaire de lundi sur les Sonnets from the Portuguese. (Les autres cours roulent tout seuls, en quelque sorte : une fois les brochures préparées pour trois semaines, ce qui peut prendre du temps, évidemment, les notions et les contenus sont tellement connus de moi que je passe facilement en mode "improvisation". (Il n'y a pas à dire, le fait que le niveau des étudiants ne cesse de baisser finirait presque par contraindre à ce mode de semi-improvisation : sans cela, on ne peut se mettre à leur niveau et mener un cours un tant soit peu interactif. Il y a aussi que les nombreuses tâches administratives empêchent, quoi qu'il en soit, de préparer de façon approfondie les cours les plus anodins.)) Si j'ai choisi les 44 sonnets les plus connus d'Elizabeth Barrett Browning, cette "sonnet sequence" si élaborée et si belle, c'est pour de multiples raisons, mais aussi parce que, dans le coin rêveur de mon cerveau qui continue d'échafauder des projets dont une autre partie sait d'ores et déjà, au moment même de leur conception, qu'ils resteront lettre morte, j'avais envisagé la création d'un carnétoile spécifique, une sorte de S/Z quotidien (oui, S/Z : tant qu'à bâtir des châteaux en Chalosse, autant se prendre pour Barthes). Mais la barque du quotidien etc. (enfin, ce n'est pas encore le suicide, hein)

Comme je rouvre ces pages vertes, une fois tous les quatre matins, autant y noter d'autres brimborions banals et sans importance : commencé à lire Barchester Towers / terminé Passage des larmes / trouvé enfin le bon dosage pour réussir les coings au four / découvert avec intérêt que les quatorze escargots qui couraient en tous sens hier soir à onze heures were nowhere to be found ce matin à neuf.

 

(Et aussi : bien sûr, je devrais* me mettre à ce S/Z. Il n'est jamais trop tard pour bien faire. Tout de même, la prolifération des parenthèses et l'amincissement progressif de la taille des paragraphes ne sont-ils pas de cruels symptômes ?)

 

 

* Qu'attribuer, comme formule-type, au bartleby cingalien ? "Je devrais m'y mettre." (De vrais bonheurs d'écriture.)

 

lundi, 21 avril 2008

... caboodle /

Tantale avec joie regarde tomber la pluie, les averses légères comme des coups de trique, et la fleur au fusil de l'imbécile heureux. Frottant la lampe d'Aladin, il porte l'épée. Le flambeau n'est pas assez glorieux, à ses yeux ; il lui faut cesser d'urgence toute activité. Alors, saisi, comme Sisyphe, par le démon de l'ataraxie, il se prend à rêver d'un monde inactif, sans turbulences, où plus la moindre avalanche ne viendrait se mettre en travers de son chemin, comme le pêcheur de Gavarnie stupéfait d'entendre glisser derrière lui, près des gorges du gave, le monde de son enfance, tout le tremblement.

L'ardoise grise voit ployer les résolutions les plus fermes, toujours sous l'orage.

Tantale, lassé d'entendre les hurlements des suppliciés, leurs hululements, leurs vociférations en cascade, leurs cris poussés par la vésanie, se cache dans un bistrot crasseux et descend, l'un après l'autre, de petits verres de Marie Brizard en disant d'une voix féroce et douce :

 H. E. N. R. Y., Henry Ier, c'est moi, le roi !

 

Sisyphe rigole dans son absence de barbe. Fontaine, je ne boirai pas de tonneaux.

lundi, 04 février 2008

Perutz, Poitiers, saules, lentes dédicaces

Comme je voulais aborder l'écriture du (long, peut-être) texte que je veux consacrer à Petite nuit de Marianne Alphant, j'ai ouvert le document Word où j'écris certains textes avant de les publier dans l'un ou l'autre de mes carnétoiles, et j'y retrouve ces bribes, datées du 19 janvier dernier et jamais publiées / franchement oubliées :

19 janvier, déjà, minuit quinze, je ne m’endors pas du tout.

 

        Le seizième chapitre de Turlupin est parfaitement hilarant. Leo Perutz, dont le goût du roman historique – même déconstruit – me semblait un peu fade, sur les premiers chapitres, est maître dans l’art de faire dérailler progressivement, mais non sans une violence jubilatoire, un récit de prime abord anodin. (Il y a aussi la façon dont, subrepticement, « la danse de Toulouse », p. 104, me rappelle « la jambe de Poitiers », octobre 2003.)

        Autour du titre. D’emblée : Je crache des gauloiseries. Avant, il y eut turlupiner, dont je crus lire que l’expression française était « ça me turlupiline » (j’avais sept ans, mettons, ou huit). Turlupin était, nous apprennent les dictionnaires, un auteur de comédies vite populaire pour l’inanité de ses calembours en dessous de la ceinture (ou, en adaptant à la mode du dix-septième siècle, ses mots proches du haut-de-chausses). Le nom de Tirelupin, dans Gargantua, a fait couler beaucoup d’encre : les auteurs du Robert culturel y consacrent d’ailleurs un encart instructif.

        (Accessoirement, le lecteur vagabond finit par apprendre qu’en français du Québec et d’Acadie, la turlutte n’est pas ce qu’on pense. Cela dit, il n’est pas indifférent que le substantif turlupin soit encadré par turgescence et turlute.) Ça, c’était autour du titre. De pleines bouchées de mots crus...


 

Julio Gonzalez, Les saules (1925).


Pour tout compliquer, j'illustre ce billet au moyen d'une photographie de l'exposition "Julio Gonzalez en famille" [Julio Gonzalez. Les saules, 1925. (Ils n'ont pas l'air de saules, mais bon... la pâte prend l'ascendant...)].

mercredi, 16 janvier 2008

-sibirsk

eaux troubles

soleil sans cesse revenant EAUX TROUBLES ici comme à Novosibirsk

 

où les crachats gèlent en vol SOLEIL

 

sans cesse revenir au point de non-retour Dans un RÊVE cette nuit : une collègue retraitée depuis un an et demi et qui a les mêmes initiales que moi erre dans les couloirs de la fac à la recherche d'une salle de l'Extension (elle ne peut pas connaître, puisqu'elle a pris sa retraite avant l'inauguration des nouveaux bâtiments) ; je l'envoie perfidement au 4ème étage, histoire qu'elle se perde, puis je vais manger une glace achetée à un marchand ambulant, rue des Tanneurs SOLEIL

sans cesse revenant

 

eaux troubles (vu

Novo)

15:45 Publié dans Ecrit(o)ures | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : Ligérienne

mercredi, 09 janvier 2008

Grand-tante Finesse tape fesse

effet instantané des asperges

Sur la table à tréteaux rouge où se trouve, parmi quelques autres entassements, le vieil ordinateur composite et bruyant, assis sur une chaise cannée – ou faut-il, comme pour les gâteaux, dire cannelée ? – de métal rouge, ayant monté et dévalé dix fois d’affilée les seize marches de l’escalier de bois, j’écris ces quelques lignes, tandis que se téléchargent, sur le vieil ordinateur composite, bruyant et lent, les photographies fades de ces deux derniers jours. Le ronronnement de l’ordinateur couvre presque le son des touches qui claquètent.

effet instantané des asperges

Soudain, l’ordinateur – ou plutôt, son ventilateur depuis si longtemps bruyant – a cessé de ronronner bruyamment, et l’on peut de nouveau apprécier les roucoulades des tourterelles turques depuis longtemps oublieuses du Bosphore, le passage d’une charrue sur le chemin vicinal, le frottement des feuilles, les rayons de soleil brûlants contre les vitres. Dans le Magazine littéraire acheté ce matin chez Caldéra, j’ai lu ce matin même l’article consacré aux deux nouvelles parutions de Roubaud, dont – enfin ! – la nouvelle branche du ‘Projet’. Sous Word, les tirets semi-cadratins s’effectuent automatiquement du moment qu’on laisse une espace de chaque côté du mot ou du groupe de mots à placer entre tirets, mais en revanche

effet instantané des asperges

, il faut ajouter les signes de ponctuation autres, comme les points d’interrogation ou d’exclamation, après coup, sinon la saisie automatique se défile et, laissant en plan le typographe amateur, ne lui offre, pour tout potage, qu’un maigre tiret de rien du tout, à peine un trait d’union, rien de bien folichon. (Je devrais écrire, se dit-il, quelques phrases sur Stefano Bollani ou sur l’album étrange et étrangement beau du trio de Sophie Courvoisier, Ocre.)

effet instantané des asperges

Il n’en fait rien. Roucoulent les tourterelles, la caravane passe. Utrillo peignit les maisons grises délabrées de Montmagny, et moi je rature. Aujourd’hui ce serait la Sainte Famille, mais le calendrier de la banque ne suggère que la saint Roger. L’ombre du petit pot de verre, sur le coffre des vinyles, est à elle seule la chorégraphie de ce jour d’été. Je ne sais toujours pas pourquoi j’ai laissé ouvert mon exemplaire de Degrés à la page 204, près de l’ordinateur composite et bruyant, mais le Magazine littéraire est posé plus près encore, et je sais dans quel but (

effet instantané des asperges

) je l’ai déposé là : il est impossible de savoir qui rédigé les très brèves notices qui « résument », à cheval sur les pages 46 et 47 de cet exemplaire du centenaire (janvier 2008), chacun des ouvrages importants de Simone de Beauvoir, mais il est certain que ce(tte) sagouin(e) ne connaît pas le français. Voyez plutôt le résumé (très erroné également, à ce que m’en dit ma compagne, qui a lu ce roman) des Belles images, publié en 1966 : « Ce roman, dédicacé à Claude Lanzmann, décrit les sentiments d’une femme qui réalise qu’elle a été flouée par la vie. Une critique acerbe de l’hypocrisie de notre éducation. »

Peut-être le roman est-il dédié à Claude Lanzmann, mais il y a fort à parier qu’il a été « dédicacé » à beaucoup d’autres lecteurs, y compris par de tout autres personnes que Simone de Beauvoir (e.g. : à ma chère tantine suffragette, son petit Aymeric). De même, que l’on puisse collaborer à un magazine littéraire et ne pas savoir que « réaliser », au sens de « percevoir » « s’apercevoir » « se rendre compte », est un anglicisme qui sent le cuir, c’est inquiétant. (Au demeurant, cela n’a pas semblé gêner tellement les trois traducteurs d’Istanbul d’Orhan Pamuk, non plus, ni l’éditeur Gallimard : le texte français d’Istanbul est parsemé de ces réaliser laids et contresémantiques.) Enfin, on aimerait savoir à quel nous collectif peut bien renvoyer l’expression « notre éducation » : est-ce le système éducatif français qui est hypocrite, ou l’éducation d’une génération, voire, si on le prend au sens strict, l’éducation des journalistes du Magazine littéraire ? (C’est bien possible, en effet : pour écrire aussi mal, il faut que l’éducation laisse à désirer.)

Des chiens aboient sous le soleil, sans raison apparente, et comme chaque nuit aussi ; c’est la grande nouveauté

effet instantané des asperges

de ces vacances. Je me rappelle avoir lu Degrés ici un été, peut-être 2004 ou 2005, mais je ne me rappelle plus où j’avais déniché cet exemplaire aux pages non coupées, probablement d’origine : achevé d’imprimer le 8 janvier 1960, soit 4 jours après la mort accidentelle d’Albert Camus, dont j’ai rêvé cette nuit, recroquevillé sous mon manteau. (Je n’ai pas lu une ligne de Giono, ni d’Albert Camus, depuis l’adolescence.) Degrés ne m’a pas vraiment plu ; j’ai trouvé qu’il sentait un peu trop l’atelier, sans compter que le charme suranné du cadre scolaire des années 1950 nuit grandement aux prétentions du roman à une quelconque modernité. Quand on songe que Butor n’était pas loin de commencer à concevoir les volumes II et III de son Génie du lieu… Quand on songe

effet instantané des asperges

à son génie, on ne peut manquer de désirer lire le dernier volume paru du ‘Projet’ de Roubaud. Degrés se déroule au long de 380 pages. Au centre précis du récit, à la page 198, il est question de papier vert, rose et jaune. Couleurs. Au quart du parcours, un adolescent révolté retarde sa brouille avec le père haï pour une sombre histoire de timbres du Liban. Je me rappelle avoir « tiqué » – l’été 2004 ou 2005, donc – en lisant le patronyme d’un des personnages, M. Bonnini, dont l’épouse, aux trois quarts de Degrés, semble aller mieux. (Mais il n’est plus question (effet

instantané des

asperges) de papiers de couleurs variées.

jeudi, 13 décembre 2007

Flaque zircon

Bosser dur : c'est le moment même où le travail n'avance pas. Je trime en n'en foutant pas une rame. Il est vrai que, sur mes terres, il y a deux types de travail qui, intensément, effrontément, se chassent l'un l'autre, comme la limaille sur l'aimant.

Depuis lundi, les images assagissent le flot tumultueux de la vieillesse orpheline.

(Je n'avais même aucun souvenir de ce roman de Colson Whitehead, que je n'ai pas lu en entier, me semble-t-il. Le billet vaut aussi pour les deux titres qui l'encadrent. Il eut des remords de ne plus écrire de textes pour son Fouillis. Le chagrin lâche la bonde, mais l'eau stagne dans le bidet. Tout de même, en trente mois, tout ce que tu as pu débiter comme âneries... Il n'y a plus de billet vert sur ma carte bleue : je répète : il n'y a plus de bas bleu dans mon carnet vert.)

 

On se retrouve à Saint-Pierre des Corps, pour une valse. La maîtresse ne connaît pas les mules impressionnantes des corridas. La mule n'est pas l'ânon : noyer le poisson.

 

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En bonus : les pratiques débiles de la maison Gallimard.

jeudi, 06 décembre 2007

La Ruse du Professeur Maupas

L’opération ne se passait pas mal, quoique, dérangé par les va-et-vient impétueux d’une bourvonne, le professeur Maupas fût quelque peu cardilophe. Ce brave homme, issu d’une famille d’experts (il avait une sœur psychiatre et un demi-frère halgorologue), était, de toute évidence, taraudé par quelques souvenirs impromptus et indésirables : le matin même, il avait omis de jacavarer avant de quitter le foyer conjugal, non sans quelques gargodontes suscités par son étourderie légendaire. Bref, le patient avait bien de la chance d’être inconscient, car il se fût, sinon, légitimement affolé.
 
« Grégory, les ciseaux 16/18 » ordicta-t-il à son assistant. Il s’irrita en voyant que cet olibrius viliesque, qui avait dû avoir ses diplômes dans une pochette-surprise, ou une année de grèves estudiantines, lui tendait une sorte de phalancodre.
 
Plus tard, tandis qu’en salle de réveil l’opéré revenait à lui, le professeur Maupas se rendait au Petit Patrimoine, où il savait ne pas trouver ce gorsoir de novembre qu’il avait tant aimé. En manquant glisser dans une ploud, il repensa à un giclement inopportun qui  s’était produit lors de l’opération ; même ce grand expert au cœur bien accroché ne put réprimer un frisson.

vendredi, 30 novembre 2007

Même pas Johansson

Scarlett, maison de thé

Le voile s'écarte à peine, dans la brume humide de gaze ou de cretonne. Toute une cérémonie s'apprête, à laquelle personne ne vous a convié. Dans quelques mois, vous regretterez ces arômes chassés d'un regard fuyant, ces senteurs suaves de cardamome et de girofle, assez pour que la soif guette derrière les rideaux de bonne femme.

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Claude Egea n'y va pas de main morte, derrière et après Sara Lazarus, sur What is this thing called Love ?, ni Marc Ducret sur Amour à vendre.

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Laissez passer la cicatrice.

mardi, 30 octobre 2007

KP1 Isoleader

Tumbling blocks

They're just like tumbling blocks

Like stumbling steps a blindman takes

Like flocks of geese in the desert

And camels over in the clouds

They're just like melodies in the oven

Half-baked yet caked with mud and no one knows

How long those tumbling blocks will last

How long those stumbling men will fall

 

lundi, 08 octobre 2007

Incréments

François Bon signale, sur son blog, la parution imminente, dans la collection qu'il dirige au Seuil, de deux volumes, dont l'un, celui de Jérôme Mauche, semble obéir à un principe structurel dont, pour séduisant qu'il soit, j'avais énoncé les limites dans le cas d'Eric Meunié. Depuis, j'ai moi-même écrit des centaines de pages selon des principes incrémentiels, et ne cacherai donc pas mon intérêt pour ce type d'entreprise.

dimanche, 09 septembre 2007

(Autres) vendanges

"Le poète ne redoute pas la cascade des dangereux adverbes de manière" écrit Yves Sandre dans sa préface à l'édition des Vendanges de Saint-Pol-Roux (Rougerie, 1993).

Oui, c'est la saison des vendanges.

La vigne nous fait un signe.

Un signet dans un livre, s'en soucier comme d'une guigne.

(Que dire alors des matins mordus, des soirs perdus pour les chevauchées, des midi fendus comme des jupes ?)

Un charpentier rugueux joue de la guiterne avant de s'en remettre au vent.

Les raisins pleuvront dans son sac, mais pas avant le soir.

Les raisins pleuvront dans sa hotte, sans retour.

J'ai lié ma botte avec un brin de paille.

La vigne nous fait un signe. Il pleut des sarments. Un homme rugueux à la tête noueuse de cep desséché prend la tangente avant l'arrivée des vignerons. Quelques liserons se posent dans le champ voisin, comme des alouettes perdues pour les virevoltes.

C'est la saison des vendanges.

Un archange admoneste Jeanne et lui reproche de lambiner. (Get moving, maid ! Rires intempestifs mais inévitables.)

Saison des vendanges.

Que dire du vin qui coule à flots, dans le ressac des alouettes, dans le havresac des liserons, quand joue la sacqueboute des vignerons ?

Des vendanges.

À Sully-sur-Loire, l'issue s'inverse et le but vire au début (acte III de Fronton du Duc).

Vendanges.

J'ai lié ma botte avec un brin d'osier.

Vent

Où irons-nous courir, si même les liserons migrent et s'envolent pour l'Afrique ?

danger.

Matin mordu

Avec le couteau acheté au Portugal je pèle et découpe des poires, et je repense à la semaine passée jadis au Portugal, avec la Supercinq. Comme la compote d'hier était plutôt réussie, quoique trop sucrée, j'en prépare une autre, métissée de Williams et de Guyot. Au couteau, les Guyot sont plus moelleuses, de chair plus pâle, nettement plus juteuses ; plus grosses, les Williams ont la chair plus ferme, imperceptiblement moins blanche sous la lame. (Un couple d'oisillons / Un couple d'oisillons / Un couple d'oisillons) C'est à Castelo Branco que les souvenirs toujours me ramènent, dans l'odeur des poires.

Je les aime toutes, dans leur variété : passe crassane, "Conférence", Doyenné du Comice, packhams, etc. J'aime tous les murs blancs du Portugal.

(Un couple d'oisillons)

mardi, 13 mars 2007

Retour sur remaniements (tourne manivelle)

Mardi, dix heures.

 

Juste là, je pourrais revenir sur chacune des variantes entre la première version (first bad draft, in Nuruddin’s words) et le texte remanié qu’on va dire définitif (mais toujours décevant, frustrant). Il y en a beaucoup, et chacune avec ses raisons. Je veux seulement noter ici – pour aide-mémoire, comme on consigne, sur une feuille volante, un rendez-vous déjà passé chez le dentiste – que j’ai remis l’asyndète fautive et tout à fait involontaire de la toute première version, que j'avais corrigée avant première publication :

N’avait-il pas choisi le lectorat à Cambridge comme d’autres, il n’y a pas si longtemps, choisissaient de s’embarquer sur un baleinier ou la légion étrangère ?

 

Pour involontaire qu’elle soit, elle me plaît beaucoup, et, comme il n’y a pas grand-chose qui me plaise dans tout ce texte, allons-y gaiement.

Sinon, F.B. avait justement remarqué l’écho entre la situation narrée/décrite et les années de lecteur de Beckett à Paris. Cela, c’était à peu près conscient quand j’ai écrit le texte, et d’ailleurs, si j’ai choisi de préciser la variété de bière (Murphy’s), ce n’est pas seulement que j’en buvais beaucoup cette année-là (le choix était moindre à Cambridge qu’à Oxford).

Moins conscient, déjà, dans la double triangulation qui structure le texte – ou, tout au moins, son invention –, le fait que la thèse de Hugo portait, si je ne m’abuse, sur Faulkner, Joyce et Proust. Peut-être aussi n’ai-je écrit ce texte (mais là, ça devient du mauvais Aragon) que pour y placer les frasques, phrase réellement prononcée par Hugo, sur le maudit punt, mais titre aussi d’un petit roman que j’écrivis cette année-là, concomitamment dirons-nous. Que ces frasques aient en retour attiré la ribambelle du premier paragraphe (puisque j’avais projeté d’écrire un roman appelé Ribambelles l’année d’avant à Paris, projet resté sans suite (mais non sans suie dans les turbines)), c’est possible, mais je ne m’en avise que maintenant.

De là, je pourrais enchaîner sur cette heure de solitude à visiter St John’s, à Cambridge, pendant que Jean-Pascal donnait un cours peut-être bien, et à prendre des photographies (en noir et blanc ? je ne suis plus si sûr), véritable et durable moment épiphanique, ou sur la salle informatique sans fenêtres et surchauffée, à Oxford, où j’avais écrit Frasques et aussi de nombreux poèmes en anglais jamais sauvegardés et dont la version imprimée s’est perdue, je crois.

Pendant ce temps-là, Frédéric Monino et ses cinq comparses (Stefano Di Battista et Thomas de Pourquery surtout) s’échinent superbement sur Caravan. Au début de Moya, composition que je ne connaissais pas de Laurent Cugny, c’est le tromboniste Francesco Castellani qui donne à rêver. Je dors si peu et si mal, cauchemars, angoisses. Et maintenant que l’électricien est passé relever le compteur, aller au turbin.

Onze ans après, remanié

   Je l’ai rencontré plusieurs fois, quand j’allais passer quatre ou cinq jours d’affilée à Cambridge, chez cet ami que je perds aussi de vue maintenant. Jean-Pascal m’avait présenté la ribambelle de ses amis, et parmi eux Hugo.

    Hugo s’appelait en fait Hugues, mais il régnait, autour de son vrai prénom, un parfum d’interdit. You go first, right ? Lui, contrairement à nous autres, était lecteur pour une durée de cinq ans, et finissait sa thèse. Il était donc sensiblement plus âgé que nous, et avait plus ou moins claqué la porte au nez des siens, Parisiens. N’avait-il pas choisi le lectorat à Cambridge comme d’autres, il n’y a pas si longtemps, choisissaient de s’embarquer sur un baleinier ou la légion étrangère ? That’s one goal now.

    Étonnamment séduisant, et – à sa façon – raffiné, Hugo n’était en rien poseur. Un jour, nous discutions, tous les trois, avec Jean-Pascal, à la table crasseuse d’un bar de college, et Hugo, de façon tout à fait caractéristique, s’était assis en dehors du cercle formé au départ par la table et les trois chaises. Comme ça, non ? Tout aussi caractéristique, sa façon de nous encourager à reprendre une pinte, à ses frais, une Murphy’s, je dirais, tout en laissant quasi imbue la sienne. Il se contentait d’y tremper les lèvres, et discutait avec feu, riait, fronçait les sourcils, parfois les trois à la fois, puis, de son profil acéré, nous lançait des phrases ambiguës, tout en oubliant consciencieusement de boire. C’est une violence. Puis, entre deux paroles enflammées, deux rires, deux froncements, il se levait, comme nous partions, et vidait en deux fois une bonne part de la pinte jusque là délaissée. Let’s go lads, et le jus noir abandonné.

    Il me semble qu’une autre fois, au début d’une soirée qui fut la plus arrosée de mon existence – avec les conséquences que l’on imagine –, je le vis jouer, avec une élégance rare, au baby-foot. Trois à rien quand même (l’accent sur à et quand, je pense). J’ignorais que l’on pût s’adonner à ce jeu, et même s’y donner, d’une façon qui fleure autant le gentleman. Hugo était autant fait pour les envols de l’imagination que pour l’atmosphère feutrée des clubs les plus select. Tu es sûr que ça va, Guillaume ?

    Il y eut aussi, peut-être la dernière fois que nous nous vîmes, son détachement dans ce punt infâme que nous avions loué à six et dont seul il se débrouillait, piroguier expert de ces bords presque gallois. Il faisait beau et frais, sur la Cam. Je m’énervais après tout le monde. Mais après lui, impossible.

    Ma mémoire persiste à me tendre de curieuses perches et à évoquer une possible rencontre, l’année suivante, ou même celle d’après, à Paris (pour sa soutenance de thèse ?). Pourtant, aucune image, aucun son précis ne me vient de cet épis od e pourtant ultérieur, s’il a bien eu lieu. Hugo, à Paris, cela ne se pouvait. Ce devait être Hugues : ce fantôme imposteur n’aura pas laissé de traces dans ma mémoire vive.

    Je vois ça d’ici, toi avec tes frasques.

lundi, 12 mars 2007

Onze ans après

Je l’ai rencontré plusieurs fois, quand j’allais passer quatre ou cinq jours d’affilée à Cambridge, chez cet ami que je perds aussi de vue maintenant. Jean-Pascal m’avait présenté la ribambelle de ses amis, et parmi eux Hugo.

Combien de fois suis-je allé à Cambridge ? On dira trois. À chaque séjour peut-être je voyais Hugo trois ou quatre fois. Et que m’importent ces chiffres ? Je ne sais.

Hugo s’appelait en fait Hugues, mais il semblait régner, autour de son vrai prénom, un parfum d’interdit. Lui, contrairement à nous autres, était lecteur pour une durée de cinq ans, et finissait sa thèse. Il était donc sensiblement plus âgé que nous, et avait plus ou moins claqué la porte au nez des siens, Parisiens. N’avait-il pas choisi le lectorat à Cambridge comme d’autres, il n’y a pas si longtemps, choisissaient de s’embarquer sur un baleinier ou partent pour la légion étrangère ? Si je raconte tout ça, c’est que sa vie paraissait nimbée de tant de demi-secrets, mais sans afféterie.

Étonnamment séduisant, Hugo n’était pas poseur. Ses excentricités verbales et sociales étaient d’une totale sincérité. Un jour, nous discutions, tous les trois, avec Jean-Pascal, à la table crasseuse d’un bar de college, et Hugo, de façon tout à fait caractéristique, s’était assis en dehors du cercle formé, au départ, par la table et les trois chaises. Tout aussi caractéristique, sa façon de nous encourager à reprendre une pinte, à ses frais, une Murphy’s, je dirais, tout en laissant quasi imbue la sienne. Il se contentait d’y tremper les lèvres, discutait avec feu, riait, fronçait les sourcils, parfois les trois à la fois, et, de son profil acéré jamais détendu, nous lançait des phrases si ambiguës qu’elles prenaient valeur de sentences, tout en oubliant consciencieusement de boire. Puis, entre deux paroles enflammées (« C’est une violence » ou « on te verra avec tes frasques »), deux rires, deux froncements, il se levait, comme nous partions, et vidait en deux fois une bonne part de la pinte jusque là délaissée.

Il me semble qu’une autre fois, au début d’une soirée qui fut la plus arrosée de mon existence – avec les conséquences que l’on imagine –, je le vis jouer, avec une élégance rare, au baby-foot. J’ignorais que l’on pût s’adonner à ce jeu, et même s’y donner, d’une façon qui fleure autant le gentleman. Hugo était autant fait pour les envols subits et violents d’imaginations fébriles que pour l’atmosphère feutrée des clubs les plus select.

Il y eut aussi, peut-être la dernière fois que nous nous vîmes, son détachement somptueux dans ce punt infâme que nous avions loué à six et dont seul il se démenait, en rameur expert, piroguier de ces bords presque gallois. Il faisait beau et frais, sur la Cam. Je m’énervais après tout le monde. Mais après lui, impossible.

Ma mémoire persiste à me tendre de curieuses perches et à évoquer une possible rencontre, l’année suivante, ou même celle d’après, à Paris (pour sa soutenance de thèse ?). Pourtant, aucune image, aucun son précis ne me vient de cet épisode pourtant ultérieur, s’il a bien eu lieu. Hugo, à Paris, cela ne se pouvait. Si ça se trouve, c’était Hugues, et ce fantôme imposteur n’aura pas laissé de traces dans ma mémoire vive.

samedi, 03 mars 2007

Frasques de fresque

Je ne sais plus à quand remonte le brouillon de billet ci-après, car il est en carafe depuis des semaines. Un mois et demi, peut-être ? Je comptais donner, à ce quatrain, quelques frères, mais il est préférable de poser d'ores et déjà les jalons. De plus, c'est l'occasion rêvée d'annoncer (avec une semaine de retard) la parution d'un ouvrage en collaboration avec Tinou, qui a très bien fait le service de presse sur son blog ! Merci à elle d'avoir accordé sa confiance à mes mirlitoneries.

 

Vous souriez, mais ce n'est rien.

Vos lèvres déjà vous échappent ;

Le sourcil baissé patricien

Ploie sur la peau comme une chape.

 

jeudi, 08 février 2007

sous les rires les sourires

Laon, 1997

tu es debout tu as froid les mains croisées gants panthère manteau rouge mais sans musique manteau rouge unique et unique dans le manteau rouge sur fond de brouillard ce brouillard picard tu es debout te tiens debout sur le trottoir devant cette porte fortifiée médiévale noyée dans le brouillard et seule aussi Laon ce jour-là noyé dans le froid noyé dans la brume était superbe Laon était superbe et dans la brume nous écumions l’Aisne nous écumions Laon tu souris tu souris à l’objectif ou au photographe ou derrière moi au brouillard tu souris rêveuse au brouillard

 

Guignecourt, 1998

c’est l’été finissant ou l’automne commençant ai-je jamais su c’est l’été finissant et devant la muraille d’enceinte de l’église de Guignecourt en plan américain te voilà légèrement décentrée légèrement excentrée sur le côté de face souriant souriante te voilà encore face à moi et légèrement excentrée sur la gauche je ne revois pas du tout les vêtements que tu as sur cette photo sur cette photo de côté tu laisses voir la mosaïque émouvante des pierres blanches rouges grises briquettes et encore briquettes à Guignecourt ce jour-là grand soleil c’était l’été finissant

 

Saint-Pierre du Mont, 1994

nos ombres bien sûr nos ombres s’allongeant par-dessus les parterres les plates bandes du jardin de mes grands-parents nos ombres lointaines fuyantes rien d’évident nos ombres touchant presque le grillage cette photo en noir et blanc m’est revenue tout de suite en repensant à cette série de photos en noir et blanc ce devait être à Noël il faisait doux j’étais près du figuier et j’appuyais sur le déclencheur de mon Minolta cette année-là je faisais le malin à acheter des pellicules en noir et blanc Ilford 400 et j’avais pris plein de photos ce jour-là je faisais le malin et ce doit être ou pas loin ce doit être la première ou pas loin ce doit être la première photo d’ombres ou pas loin ma première photo d’ombres fuyantes ou pas loin

 

Va savoir où, 2006

pas de gros plan disais-tu et au moment où tu disais pas de gros plan je t’ai attrapée en gros plan en très gros plan on voit ta peau ses aspérités ton nez ses vagues seulement le dessous de tes yeux leurs arpèges

 

Sousse, 2000

tu te prends un joli fou rire dans le clair-obscur de la nuit d’été tu es immobile immobilisée c’est la veille du mariage tu te prends un sacré fou rire avec tes pieds tes mains peinturlurées ici tatouées au henné c’est sur la terrasse le toit de la maison jamais finie on mangeait à côté du mouton à une table basse entre les étendoirs tu te piques un rien de fou rire assise jambes tendues dans ton pantacourt mains tendues tatouées au henné et à côté de toi la grand-tante de notre ami rigole aussi complice elle te glisse un sourire en coin joue avec ton fou rire et sous les vêtements déjà secs étendus tu ne souris pas ce n’est pas un sourire tu te prends un joli fou rire

 

Vianden, 1998

nous deux et le roc la montagne nous deux et les monts au fond nous deux si proches souriant complices d’un air à moitié inquiet comme toujours ces touristes comme tous les touristes qu’un autre touriste inconnu propose de prendre en photo pour que l’album ne soit pas une succession de portraits où manque toujours quelqu’un et dans l’album nous deux et le roc nous deux cet été-là souriions de cet air-là toi en chemisier blanc et jeans bleu moi en chemise blanche et jeans bleu deux toiles blanches dans l’album

mardi, 23 janvier 2007

Lorsque Flore / sort / de l'or du bal

Jeudi à peine croisé la Kangoo de mes parents, qui arrivaient dans notre rue alors que je filais à la fac – soir, pluie, grisaille, voitures et vrac partout sur Tours – sur le pont Mirabeau chanter la vitre ouverte encore et encore Lorsque Flore avec la scie musicale et les tintinnabulements d’origine – peut-être même à tue-tête une fois la cassette arrêtée Ce sont les noms des mots maintenant assis sur une marche de l’escalier Thélème – écrivant sur au dos d’une simple carte postale – j’attends le début de la conférence d’ouverture

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J’avais envie de saluer ma mère avant de filer en ville

sans doute à cause du rêve affreux de la nuit dernière.

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Mardi donc ce matin, oui à peine au bas de la rue du Nouveau Calvaire cette chanson se lance, s’étend dans l’habitacle, commence – froid hivernal après tant de semaines de douceur, flot discontinu des cars et des bus – sur le pont Wilson me rappeler les milliers de souvenirs liés à cette chanson, depuis onze ans déjà Ce sont les sons des noms maintenant de retour chez moi pianotant – écrivant dans ces carnets toujours compulsivement – je songe à la rubrique Autres gammes, qui pourrait accueillir les fragments souvent rêvés d’une autobiographie aux ritournelles.

samedi, 30 décembre 2006

Time’s Mirror / Train shuffle

Les remous du drap blanc qui va servir de nappe – lors d’un pique-nique pré-électoral – envahissent l’écran sans que l’on sache, le temps d’une ou deux pulsations, si l’action va désormais se transporter sur un navire, dans le ciel des anges, dans une fabrique d’édredons. Ce drap blanc qui frétille, tangue au gré des gestes gracieux de deux figurantes, représente aussi ces fausses mers de théâtre, comme, par exemple, dans la première scène de La Tempête, a lieu le naufrage. Mais aussi, comme tout cela ne dure qu’une poignée de secondes (nous n’aurions pas même le temps de passer sous le drap, la nappe, par jeu), cette image si brève – dans un film qui sait, par ailleurs, prendre le temps des descriptions, des cadrages savants, des démonstrations subtiles – est le miroir du temps, dans l’éclatement des cuivres qui fait suite à la lente et douce mélopée. La tempête après le calme, avec ces ondulations de la nappe, annonce aussi le bringuebalement du train d’enfer, entre deux ères, entre deux lignes, entre deux fenêtres, entre deux arcs-en-ciel. Duvet de plumes d’eider s’échappant d’un trombone folâtre.

dimanche, 24 décembre 2006

Esperluette au frigidaire

Ce n'est rien, pensa-t-il. Puis décampa, prit la poudre, se tira avec l'héroïne, et alors macache les adieux ! Sans même pousser de simiesques hurlements, sans se demander même s'il avait vu juste, il prit le taureau par les cornes, et même si c'est un jour orange je m'en tape, je me barre. Prit aussi la poudreuse, le mauvais virage avant l'avalanche. Mourir dans le feu d'un sati comme une épouse hindoue, tard venue, sur le bûcher presque lancée, ou droguée peut-être, une autre forme encore d'héroïsme béat. Chacun sa sainteté, pensa-t-il en plantant le bout du bâton dans la neige décidément trop lourdement damée. Dépassé par les fuseaux horaires, comme si jamais avant il n'avait skié dans les montagnes rocheuses (ce bonnet, pensa-t-il, me rend beau), il s'interrogea : peut-on attraper froid par les jambes ? Par les sentiments plus sûrement, mais c'était encore une autre affaire, paire de manches ou poisson à frire, enfin c'était autre chose, et les pleins et les déliés n'auraient pas ce crime sur la conscience. Il se demande bien, tout de même, où et comment tout cela va finir. Dans tout mauvais film, il y aurait une trace de sang atroce sur le mur, et atroce de réalisme bien sûr (fausse). Dans tout mauvais film, aussi, je me réveillerais en sueur. On n'en est pas très loin, pensa-t-il. Ronge tes barreaux avec tes dents, la dinde - de son gloussement macabre - t'attend. Les passants verront son ombre difforme s'allonger sur le macadam. Du raisiné, encore un verre !

mardi, 19 décembre 2006

Le borgne lorgne

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Sans doute ai-je déjà publié cette photographie, mais, comme elle reflète étonnamment mon état d'esprit actuel, je ne prends pas la peine de vérifier et la refourgue sans vergogne. Après quatre jours de jachère, ce carnétoile se renouvelle un petit peu. (À peine si j'ai remarqué que la note précédente, si brève et anecdotique fût-elle, était la 1400ème en dix-huit mois de hauts et de bas.) En ce moment, plus que jamais la tête dans les bouquins et la main à la plume, je délaisse ces pages, il est vrai. Il est douteux, toutefois, que je devienne moins rare après le 23, car je n'aurai plus d'accès haut débit durant une dizaine de jours.

C'est la vieille rengaine de Noël, les affreux rougeauds en plastique à toutes les fenêtres, la main droite glacée, et la gauche moins froide. On s'effarouche toujours d'un rien, car les cheveux font des fourches. Tant pis pour les sentiers de montagne.

 

En écoute : "Stella by Starlight" (Jean-Pichel Pilc. Welcome Home).

mercredi, 13 décembre 2006

Vitraux de Truyes, 4

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Deux notes par jour, depuis lundi. Saint Rémi, priez pour nous !

Deux billets par jour, depuis lundi. Le dollar et le dinar, face à l'euro, se déprécient.

Une image par jour, depuis lundi. Chaque texte contient une multitude de bons points et chaque image repique celle de la veille.

(Dans Apex Hides the Hurt de Colson Whitehead, n'était-il pas question, dans une phrase brève comme un coup de canif, de la vieillesse comme d'un desséchement ? Cliché. Ou était-ce dans le volumineux roman fini juste avant ? Quoiqu'il en soit, faire un roman cratylien quand on s'appelle Whitehead et qu'on est noir...)

Un jour par image, dans la rétine du temps. 

Deux billets par jour, depuis lundi. Jingle coins, jingle all the way.

Deux notes par jour, depuis lundi. Encore un carreau de cassé, Gustave Doré n'était pas vitrier.

mardi, 21 novembre 2006

Borée souffle d'autres borborygmes

Pas moribond ! Non ! D'un bond, Melchior (en plein dans la fleur de l'âge) pointe du doigt vers les premiers borborygmes. Un bonobo lui coupe la parole (enclin au vagabondage). Non ! Pas moribond !

Un dieu presque vieux

Une peau de pomme

Etc.

 

Avec le mythe des rois mages, on pleure un bon coup. Les marges sont reines, c'est sûr, that's what Marge said (but The Handmaid's Tale is not selling too well, quoth her publisher). En tout cas, ça y va, ça y va dans les borborygmes !

(Je crève la dalle, oui !)

Prochain & lointain virage : le moment choisi par Borée pour se lancer à l'assaut des zéphyrs. Il neige sur les Alpes. C'est tout ce qu'ils trouvent à dire ??? (Bah, cherchez pas à comprendre...)

mardi, 03 octobre 2006

Vertes fenêtres...

Vertes fenêtres désuètes,

Quand le soleil brûle, attiseur,

Vous offrez vos grâces --- muettes

Que surprend un climatiseur.

Tout ce que je vois...

Quatrain barcelonais

Tout ce que je vois, sous les cubes,

C'est, la casquette bien vissée,

Lisant son journal à pleins tubes,

Un cannier aux carres plissées.

 

De la guérite...

Nouveau quatrain barcelonais.

De la guérite que surplombe

À force de planches la toile,

On guetterait pendant des plombes

Au loin, médusée, une voile.

jeudi, 28 septembre 2006

À plat, tope là...

Ce n'est pas le calme plat sur la Touraine. C'est juste et seulement le calme plat dans ces parages. Faire du plat... à  personne. Passer le plat aux invités. Se prendre un plat dans la piscine (ah, ce sont les mots bleus, au fond, tout au fond, contre les carreaux minuscules, de l'autre côté de la vase). Pour le travail, j'en ai  eu ma (belle ou parfois lourde) dose en septembre, et c'est normal, me  direz-vous. Peu de photos, peu de sorties, peu de poèmes. On fait ce qu'on peut, étant (ou pas) à plat, débitant des fadaises ou encore des platitudes, ou même encore à cette aune oserait-on (citant une chanson) écrire platités ? Non, faire du plat, très peu pour moi, je n'y goûte pas, ne mange pas de ce pain-là. Sauçons, tiounquons. La vie est belle. La vie est-elle belle ? Reprenons. Le plan, l'espace plan, la mappemonde, et quoi encore ?
(La barre d'espace réagit plus que celle de mon ordinateur portable, d'où de grands blancs entre certains mots.)

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lundi, 18 septembre 2006

Quelques quatrains barcelonais...

... sur des images de Tinou ...

 

Rongé par la folie qui songe

À la façade tel Argus,

L'esprit se débride la longe

En Barcelone aux vifs aigus.

 

****

 

Ne se croirait-on au théâtre

Où irait arlequinement

Se découvrir, le teint albâtre,

Un Don Quichotte de roman ?

 

***

 

Aubergiste, approche la lampe

Que je puisse m'émerveiller,

Sous les barreaux de cette rampe,

Du bleu globuleux écaillé.

 

**

 

Gaudi reconnaissable entre mille

Comme l'illustre Gaudissart

De Honoré et non d'Emile

(Où manque une rime en -issart...)

 

*

 

Qu'aux panneaux vides alignés

Comme la grille d'un poème

L'horizon vous ait assignés,

Vous, mes yeux, voilà ce que j'aime.

 

 

... un jour, j'irai à Barcelone. (Partie remise depuis 2000.)

mercredi, 30 août 2006

F fémur

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Je fige l'éphémère. Et alors ? Si l'éphémère ne veut pas de moi ? Que faire ?

Un poème de Norge ? Un roman paysan, Anna et Léonce ? Pas même une romance ?

Questions sans réponse. Sous mes doigts, le i se dérobe. Saloperie de clavier, ou mutilation du miroir ?

 

 

 

 

Moulage de statue menhir. Le Grand Pressigny, 21 juin 2006.

mercredi, 25 janvier 2006

Seuls pharaons

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Antonio n’aime pas beaucoup Zool. Que cherche-t-il, par ici, du bout des doigts ? Zool le fureteur, grillon du foyer et folle du logis. Antonio lit tout ce que l’on écrit sur eux : l’un qui s’entoure de musiciens aussi reluisants que lui (c’est tout dire) pour mieux creuser la solitude de ses harmonies intimes, et l’autre qui se place seul face au piano pour mieux peupler le silence de figurines, de compagnons de débauche ; l’un qui, latin, distille les chaleurs, tandis que l’autre, saxon, propose ses carnavals glacés. Des foutaises ! un foutoir de notes ! remballe !

 

Zool aime bien Antonio. Peut-être serait-il plus juste de dire qu’il aime bien quand il croise le regard agacé d’Antonio. « Tiens, il a l’air énervé » semble-t-il dire, d’un regard innocent et plein d’incompréhension naïve. Zool est un musicien de verdure, et Antonio hume, à pleins poumons, l’air de la nuit profonde.

 

Je prête l’oreille à Zool ; la toile blanche qu’il tend aux trous du vent, pectinée à peine de douces mouchetures, je l’entends claquer, flotter, blanchir les ombres. Il va sinuant si près du sol que sa musique envoûterait les cimes.

 

Tandis que je pianote, je prends garde de ne pas éveiller de vieux démons, de ne pas cogner trop vivement, je veux que les touches se suivent de façon harmonieuse, comme si je jouais la partition prodigieusement délicate de Zool. Comme si je jouais, dans mon coin, avec Ira et Jeff, je veux que les armes reposent en paix, sans colère, je galère laborieusement pour mentir en mots, tandis que je pianote.

 

Je prête l’oreille à Antonio, farouche, bondissant, coloriste et sang de feu. Vous, Zool et Antonio, l’alpha et l’oméga, les deux frères que je n’eus pas, je tends les bras vers vous, dompte le lion mélancolique, tire gentiment l’oiseau de sa noirceur pantomime, et je les présente l’un à l’autre.

 

Qu’ils s’aiment vraiment, profondément, effrontément… qu’ils s’aiment ou non, ce sont mes seuls pharaons.

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lundi, 23 janvier 2006

Vendredi 13, laisse en pas

 

Le chien traîne avec lui sa laisse, mais il a dû remiser son maître quelque part dans les recoins sombres du parc du Musée des Beaux-Arts. Un homme d’une quarantaine d’années le regarde passer, d’un air amusé. Cet homme, que je guette depuis une heure et demie, et que j’ai filé jusqu’à ce point de rencontre habituel, semble épier, de son côté, une jeune femme, peut-être une étudiante déjà bardée de diplômes. Le quadragénaire allume une cigarette en observant le chien d’un air maintenant goguenard. Puis il prend quelques notes dans un carnet tout en scrutant les moindres détails du visage et de l’accoutrement de la jeune femme. Je la regarde à mon tour.

 

Deux policiers à cheval, un homme et une femme, passent, demandent à un vieux de déplacer son véhicule, qui mord largement sur une place réservée aux invalides. L’un des chevaux, beau et bai, esquisse un hennissement que la cavalière a tôt fait d’adoucir, d’une tape douce mais stricte. Le vieux dégage. Les flics se taillent. Ma proie, la jeune femme et moi poursuivons notre manège. L’absent tarde à venir, pour forclore le quadrille.

 

Le chien délaissé frôle la pierre de la cathédrale avant de filer vers la rue Colbert.

 

Dans une semaine, au Salon d’Information des Lycéens, tu verras Jean Germain, l’actuel maire de Tours, se retourner au moment de frôler le stand que tu occupes, et lancer, goguenard, à un homme qu’il vient de saluer : « C’est sûr, on ne sait plus quoi faire à l’UDF, maintenant… ».

 

 

 

) Droits réservés texte et photographie.
Image prise le 1er octobre 2005, place de Châteauneuf. (

Vendredi 13, morsure de l’aube

 

Distillant quelques attentats sonores, au moyen d’une corne de morse… Connaissez-vous la corne de morse, cet instrument lapon taillé et façonné dans une défense de morse, qui produit un son suraigu et porte (erronément) le nom de corne (morse-horn en anglais) ?

Devant la cathédrale, avec Attila, le glabre de mes joues à tout jamais dévasté, j’essayai quelques notes maladroites sur cet instrument curieux, maintenant fabriqué en bois, mais de manière à imiter le son originel de la défense. J’attaque les premières mesures de Round ‘Bout Midnight, mais je m’attire les foudres de la police montée.

J’attends en vain Abbey Lincoln, qui m’a posé un lapin.

 

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dimanche, 22 janvier 2006

Vendredi 13, un attentat facial

Suite de 4.

 

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J’attendais. Ma face s’est muée progressivement en bouillie de carton, en phrases livresques – et je ne savais plus à quel saint me vouer.

 

Saint Attila, protégez-moi, mes cheveux ne repoussent pas.

 

Voyez cette figurine qui m’empoisse les yeux, ces caractères rouges qui m’empâtent la langue. À quel saint me vouer, dans quel antre devenir ermite, dans quelle gangue attendre ma métamorphose ?

 

À la crise de vers succéda l’image, douce et cruelle, de la chrysalide.

samedi, 21 janvier 2006

Au creux de la combe

Jeudi 19 janvier.

Comme

cramée, la mémoire :

La mer enrubannée

s’éloigne

et se dérobe


au fond des catacombes

                                      Est-ce brume


brisants, lame

et vaisseaux fantômes

rugissants gisant mort


Dans la mer

vieilles larmes fourbies

Vieux montagnard fourbu

étonné

mardi, 17 janvier 2006

Ready steady

16 janvier 2006.

Peu adepte du jeu de go,
Mais souffrant d’un fort lumbago,
Je veux jouer pour m’en distraire.
À Trinité-et-Tobago,
D’où tu m’envoies un plumbago,
Les échecs sont notre calvaire.

Certes, c’est un peu démago,
Dans les tripots de Chicago,
Jouer comme un fou au poker…
Face à un terrible Iago
Et une infâme virago,
Vite fait, je clame un joker !

De peur d’avoir l’impetigo,
Je ne touche pas au frigo
De ces sinistres dromadaires,
Et je rêve d’un Turbigo
Tout en regardant Vertigo
(Ah, la scène du lampadaire…)

Voici le docteur Zhivago
Qui me réclame tout de go
La main – de façon bien vulgaire ;
Tandis que d’un veau marengo
Comme en un film de Jean Vigo,
Je me sustente. Comme à la guerre… !

A cet instant, rêvant, ergo
Délirant, je vois le logo
De la fac : un fort ventru R.
Il n’y aura pas d’embargo
Sur mes vers, ni, Victor Hugo,
De concurrence belluaire.

 

P.S. : demain, à la même heure, quelques mots sur l'écriture de ce poème...

Vendredi 13, le frisson

Episodes précédents : 1 ; 2 ; 3.

 

Une chanson de Tom Waits dans la tête, un livre d’Attila Joszef à la main, dans la froidure des pierres, heureux, admiratif des statues, des frises, des petites sculptures si fines qui émaillent les différentes voussures, il attendit, attentif au temps qui passe, aux chevaux de la police montée, à l’Electrobus, aux jeunes et moins jeunes femmes, aux toilettes, à cette collègue de travail qui n’était pas Cendrine Nirdre, aux flammèches des torches, et à l’occasion

qui fait le luron.

samedi, 14 janvier 2006

Hymne

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Les grandes orgues résonnent au cœur de la morgue. Près du calvaire, sans paupières, un homme mort dort les yeux ouverts. Où est passée mon écharpe ? La fureur des cris redouble, et l’angoisse qui me saisit les cils connaît des soirs moroses.

 

Rome ne s’est pas bâtie en un jour. La peau parcheminée, le vieillard s’en va, car les coups de sang ne sont plus de son âge ; la jeune femme lui aura tapé sur les nerfs, avec sa vénération.

 

Oh ! comme on respire mal dans vos cicatrices !

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Vendredi 13, à tant la statue

Je croyais rencontrer quelqu’un que je n’avais jamais rencontré. Cendrine Nirdre, qui avait publié deux romans sous un pseudonyme (on comprend pourquoi, car son nom n’est guère facile à prononcer, voici au moins l’une des commodités de l’écrit), venait à Tours pour visiter l’exposition Lorenzo Veneziano avec quatre autres écrivains et une attachée de presse. Comme nous correspondions depuis quelque temps déjà, elle m’avait prévenu de sa venue. « J’aurai une heure de liberté, et vous serez mon escapade », m’avait-elle écrit de son écriture déliée et grave.

Je l’attendais devant la cathédrale. Aucune photographie n’existait, dans nul magazine, de cette mystérieuse plumitive. Son masque rehaussé d’un grand florilège de mèches noires, je ne pouvais l’imaginer. J’attendais donc, curieux comme impatient de connaître enfin le visage de la dame de lettres.

Cendrine Nirdre, me répétai-je trois fois, comme une formule magique, quand je vis que l’heure tournait. C’est alors que je vis arriver, par enchantement, une collègue, éminent professeur de littérature britannique dans mon université. Manteau gris et chapeau bleu roi, d’une élégance bourgeoise jamais démentie, elle eut un sourire étonné en me voyant.

« – Mais que fait donc notre jeune collègue ici, dans le froid ?

– Ah, j’attends quelqu’un… qui tarde à venir, d’ailleurs.

– Profitant de ma venue à Tours pour surveiller les examens, je suis allée faire un tour à l’exposition Veneziano. C’est très intéressant.

– Oui, c’est bien. Un peu bref, vite vu, mais j’aime beaucoup les toiles du maître de Lorenzo.

– Paolo, c’est ça ?

–  Oui… Bon, ce n’est pas Paolo Uccello ni Lorenzo Lotto. Mais certains visages sont magnifiques.

– Nous aimons bien les prénoms, vous et moi, n’est-ce pas…

– Oui, vous les chérissez plus que moi encore.

– Bien ; je dois y aller. J’ai encore une surveillance cet après-midi. »

Cendrine Nirdre, à vrai dire, n’est pas venue. J’ai hanté les rues du vieux Tours, les galeries, les librairies. Je n’ai pas trouvé trace d’une attachée de presse, ni des écrivains qu’elle remorquait. Si quelqu’un lève le voile pour révéler le visage de l’écrivain célèbre, ce ne sera pas moi.

Vendredi 13, la fête latente

Etait-ce un malentendu ? Elle n’était pas là, assise devant l’une des niches vides, depuis très longtemps. Deux policiers montés sur de fringants chevaux passèrent. Il y avait des fleurs, de douces fureurs dans son regard.

Elle attendait un monsieur, vieux déjà, poudré, drapé de noir, osseux et décalcifié ; un mythe vivant… un ancien maire – très controversé – de la ville. C’était pour sa thèse (ils disent tous ça, non ? c’est pour ma thèse… – avec cet air rêveur, plein de certitude et de mensonges mal dissimulés). Elle disait, à qui voulait l’entendre, qu’elle n’était pas historienne, et pourtant la méthodologie des sciences sociales ou des sciences politiques ne l’attirait pas du tout. Elle allait rencontrer ce vieux monsieur poudré, drapé de gris, ossifié dans son mythe, comme elle aurait donné rendez-vous à Jean Jaurès (saviez-vous que Jean Jaurès lit mon blog ? avait-elle lancé à la cantonnade un soir, et tous de l’admirer), et elle était – non pas émoustillée, mais plutôt joyeuse, sûre de son fait, ne voulant pas lui poser des questions comme l’eût fait un journaliste ou une étudiante.

Je suis dans le bassin de Latone, et je l’observe. Quand le vieux pontifiant arrive, elle est tout sucre, tout miel. Oui, c’est moi, Johanna. Un petit sourire pincé se dessine sur le visage parcheminé. Un rai de soleil s’échappe des cheveux de la jeune femme.

Ce n’est rien, lui dis-je. Tout vient à point à qui sait entendre.

 

jeudi, 12 janvier 2006

À corps écrit

Il y a, ces derniers temps, une raréfaction des textes, en ce carnétoile, au profit des seules images. Heureusement, la fréquentation accrue de nouveaux lecteurs apparemment survoltés ou inspirés compense cela, car vos commentaires, à tous, enrichissent ces pages de mots, de réflexions, de remarques, de formules souvent bien trouvées, judicieuses, et qui y mettent du baume.

Je lisais hier la fin du chapitre « Alphabet » dans Biffures (Michel Leiris toujours !), et remarquais comment mon rapport aux mots est à la fois très proche et totalement distinct de celui du grand maître. Serais-je maniaque sans la rédemption du mysticisme ?

L’influence de mes lectures entrefiliennes * sur mes pensées et mes raisonnements commence à devenir inquiétante, et je me dis qu’il faudrait que je restreigne le temps quotidien consacré à ces carnets : en effet, tel passage me semblait mériter d’être cité ici dans telle perspective – tel autre, relatif au triangle, instrument de musique dont il est rarement question en littérature, me rappelait une note publiée par Simon à ce même propos naguère.

Pour ce qui est du temps englouti par mes arachnéens titubements sur la grande toile électronique, cela est, depuis une semaine, plutôt préoccupant. (Ecrivant ces mots, je suis plus encore absorbé.) Je dois constituer – je pense – une sorte d’emploi du temps de mes tâches, me tenir à l’une, rébarbative et comptable, que je diffère depuis trop longtemps, avant de reprendre plus avant et plus massivement l’écriture ici – puis partager harmonieusement mon temps entre mes activités professionnelles, au ralenti ce semestre, mon grand projet à achever avant l’été (la traduction du dernier roman de Nuruddin Farah (le contrat est signé)), et ces carnets. Pour la traduction, j’établirai un emploi du temps qui commencera au lundi 23 janvier. D’ici là, je dois encore rencontrer moult étudiants pour divers problèmes, régler des questions d’emploi du temps (l’enfer recommence), assurer une permanence au Salon d’Information des Lycéens de Rochepinard le vendredi 20, etc.

Autant dire qu’il vous faudra, quelque temps, vous contenter surtout de photographies, notamment les chenonciennes, dont je n’ai pas fait le tour.

* néologisme stupide pour ne pas dire « sur Internet ».

 

mercredi, 11 janvier 2006

Note n° 1000 : Une blanche pierre de Philippe S.

La millième pour une relecture de la mythologie.
Non, ce n'est pas dangeureusement ni avec la sensation de froid dans le dos que nous atteignons le rivage de la 1000ième note publiée.
Au visage carnétoilé qui n'en finit pas de se mirer va s'ajouter la voix merveilleuse, voidulée en gestation (voidulable me semble encore moins joli).
Il manqua les concepts de lucidité et de sens de l'autodérision à Narcisse.
Il est tout à la fois Eurydice et Orphée.
Il en irait de la millième blanche pierre comme de la centaine d'amour.
Coup de dé magistral de Cingal, maître et possesseur du dédale du carnétoile.

dimanche, 08 janvier 2006

Bagatelles griffonnées...

... qui vont nous changer, par leur platitude, des vivacités de ces jours derniers. (Encore que ces bribes furent griffonnées, hier, au dos de bulletins de vote du syndicat SUD Etudiants...)

 

 

Rien n'embaume une maison comme une casserole de compote qui cuit. (Rien n'empuantit comme la cuisson du chou-fleur ou des autres choux. Mais c'est une autre histoire.)

Baudelaire, poète, avant tout, des senteurs.

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Les Grecs, effrayés par la vipère ammodyte,

Eussent craint plus encore une Hera maudite.

 

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Dictame, nonchaloir, frimas. Mots-clefs des Fleurs du mal ?

***********

Je veux, d'ici quelques journées,

Comme l'eau frémit sur le gaz,

Un travail longtemps ajourné :

Chroniquer les disques de jazz

[suite manquante]

***********

Lost in La Mancha : une malédiction ?

samedi, 07 janvier 2006

Halcomanie, 4

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vendredi, 06 janvier 2006

Cet inquisitoire

J'écris paraît-il des textes noirs Des textes désespérés Ou sont-ils désespérants On me le dit souvent On me le dit On me l'écrit Je ne veux pas l'entendre paraît-il, ou c'est ce que je me dis Pourtant quand j'écris je me sens léger aérien pirouettant dans mes lourdeurs me dégageant De quoi ?

Oui ou non réponds

 

Mes textes les plus Les plus quoi Créatifs Poétiques Quoi Aucun mot aucun adjectif ne convient C'est ma dernière nuit à New York City J'écris paraît-il des textes désespérés Je suis peut-être, par certains mots, à certains moments, lugubre, atroce, d'une grande noirceur Et même ce mot-là n'a pas d'envergure ou une fausse envergure une encolure trompeuse J'écris des textes tragiques Non pas du tout Des textes quoi

Oui ou non répondez

 

Vous n'êtes pas sûrs pas certains pas pris par le collet la main dans le sac la vipère sous la roche et le sang coulant sous la pierre Voyez ces ténèbres qui nous environnnent Mais non justement, c'est moi qui tiens la bougie ô ce n'est pas un flambeau une torche je ne peindrai rien de grandiose sur les parois Je suis le souverain d'un territoire gai pas lugubre doux pas féroce serein pas vacillant C'est ce dont tu essaies de te convaincre

Oui ou non réponds

 

lundi, 02 janvier 2006

D’un visage d’Arnold Schönberg [sonnet décomposé]

31 décembre, cinq heures du soir, après un appel déchirant.


Ce visage
Couronné comme de nuages
Me fixe d’orbites lunaires

Où s’extasie communément
La folie rouge,

Ce carnage
De la peau brunie, décharnée
Par l’implacable calenture.

Le serpent des yeux
– Stries sans fin
Puits sans fond –
Berce la brume près du mur ;

Et la fumée s’envole
De la moustache du cadavre.

Bonnes résolutions

31 décembre. 10 h 45.

Comme nous avons composé hier soir, dans le salon, après avoir fini de regarder In the mood for love, une liste pour que C. n’oublie rien des différents objets, cadeaux, vêtements oubliés à Hagetmau et qu’elle est allé chercher aujourd’hui, je pourrais amorcer dès ce dernier jour de 2005 une liste – même pas traditionnelle, car c’est un rituel auquel je ne sacrifie guère, d’ordinaire – de bonnes résolutions, sinon pour ma vie (qui est perdue, je crois bien), du moins pour ce carnet de toile qui navigue gentiment – même avec les journées de reflux, de maigreur ou de vacance qu’il vient de connaître – vers ses sept mois d’existence. Je pense que cette note, comme la précédente écrite, ne sera publiée que dans deux jours, une fois de retour à Tours, ce qui ne rend pas si intempestive que cela la rédaction d’une telle liste.

................

Il fau(drai)t donc que :

1) je reprenne les chroniques de disques, car c’est un exercice salutaire, difficile ; d’autre part, quand je parle de musique, j’obtiens plus de retour par les commentaires que pour n’importe laquelle de mes autres rubriques (hormis, peut-être, les fameusement infâmes autoportraits)

2) je me relance dans la réflexion amorcée l’été dernier autour de la question Qu’est-ce qu’un beau vers ?

3) j’écrive de brefs textes sur les sites ligériens qui me tiennent à cœur

4) je recense, au moins une fois par semaine, un des livres qui m’ont influencé au cours de ces (cinq à dix à quinze) dernières années, en particulier dans la perspective d’un prosélytisme africaniste dont je me suis, à ce jour, gardé

5) la série des Célébrations improbables prenne un nouveau tournant, un tant soit peu plus infernal, et où s’abolisse le sens, même calendaire

De rerum iustitia

31 décembre 2005



Narcisse tue son chien de son safran bâtard.
A peine a-t-il tenté de fuir qu’un sot fêtard,
Enivré, aux propos décousus, le taraude
Et, lui barrant le passage, désobéit
A ses cris. Tous deux luttent devant l’abbaye
Jusqu’à alerter un vieux gendarme en maraude.

Le cadavre du chien, dans la mare aux têtards,
Flotte suavement. On entend des pétards
Echappés d’un sonnet, de quelque bizarre ode,
Ou d’un poème bruitiste. « Dans mon pays,
Pense Narcisse, un œil est, comme à Pompéi,
Un miroir taciturne aux extases faraudes. »

Mutisme ! dérision ! enfer dans les ordures !
Les jardins aux parfums subtils, et aux bordures
Soignées, de ce Satan subissent la morsure.
Narcisse a dévasté les visages nombreux
Du fêtard, du gendarme,
                                   et l’hydre des miroirs,
Où cent mille rictus déplaisants et scabreux
S’échappent de ses dents comme de cent tiroirs.
Le chien mort refleurit au milieu des mouroirs,
Loin des fiers aquilons et des veufs ténébreux.

Ton ombre sur mon front

30 décembre.

 

Ton ombre sur mon front

 

La rondeur de la lune

Eclaire les folies d’autrefois

 

Aux mûrissements nombreux et nourris des saisons

La peur s’arque

boute hors du territoire

un espoir de paix dénudé

Aluni parmi les cyprès

Appréciée de la nue éparse
Ton ombre sur mon front

Eden, dernière

31 décembre. 10 h 30.

C’est le dernier jour de l’année. Bruit fou de l’aspirateur, serpent de bois désarticulé qui chasse les trains miniatures. Un globe illuminé mutile les yeux de l’histoire. Aveuglé, je contemple les saisons qui passent, avec le camion-citerne en panne sur la route enneigée, verglacée. Rumeur du monde et des saisons, mousse des frimas oubliés. Que signifie la fin d’une année, hormis la pure convention, et le glacis vénérable des souvenirs amassés près de Pau, à l’aéroport ? Et le nombre 31, premier et synonyme, dernièrement, de l’âge qui s’avance, sans compter les syllabes du tanka, la forme noble et hiératique du gabay, le sonnet en son extension tertiaire, comment se fier à lui, si ce n’est pour célébrer le premier janvier, ou tout premier du mois qui se présente, comme à cette invraisemblable comédie du temps cosmétique, décoratif, empesé, empressé, qui file vers la mort avec l’amas des adjectifs, égrenés sur la pelouse avec leurs signes de ponctuation, leurs accents, leurs indécentes farandoles – une pelouse qui gèle, avec ses mots ossifiés qui marinent dans l’intervalle, à la folie du nombre ?

En écoute : « Why does my heart feel so bad? » (Moby. Play. 1999)

samedi, 24 décembre 2005

Autour des lauzes

L’arbre usé zigzaguait, élancé, seul ; dans le vent, la bourrasque, autour de nos pierres tombales, seul un murmure se détend ; les mots zèbrent l’espace, tels des coups de fouet.

Menu fretin : l’aquarium a sa raison d’être.

Nous dansions, aimables, frénétiques, rougeauds et ivres de bon vin, faciles entre nous, au pas gracieux et mesuré, nous dansions de tous nos sourires.

C’était un rêve : ne l’éveillez pas.

Danse des asphodèles – où que nous nous trouvions leur chair verte et vénéneuse, leur suc adorable et nimbé de ces coutures d’autrefois. Le dé en est jeté, à la face du monde.

Sur ton ardoise, enfin, le tic-tac de l’horloge.

jeudi, 22 décembre 2005

Je rev(o)is

« Comme une rivière barrée, tout à coup le cours de ma vie s’était arrêté et, maintenant, devant moi, seuls s’étendaient l’immense paysage désolé de la mort, l’automne infini où habitent les hommes et les arbres qui n’ont plus de sang, la pluie jaune de l’oubli. » (Julio Llamazares. La pluie jaune. Traduit par Michèle Planel. Verdier, 1990, p. 43)

………

Je revois, au ruisseau qui coulait, l’hiver, près de notre maison, ce grillage qui séparait le bois de l’enclos à moutons des voisins – et où, depuis belle lurette, il n’y a plus de moutons. Le grillage retenait les brindilles, les petites branches, les feuilles fanées et mortes de l’automne, de sorte que l’amas finissait par former un véritable barrage, juste avant le pont, masse informe et ligneuse que nous dégagions régulièrement  – à la pelle ou à la main –  pour permettre aux eaux du ruisselet de suivre leur cours. De l’automne au printemps, j’adorais marcher dans ce ruisseau, large d’un mètre tout au plus et jamais profond de plus d’un demi-mètre, remontant délicieusement son cours du grillage posé par les voisins jusqu’à la fontaine de pierre, où il surgissait de sous la terre.

Sur la carte I.G.N. la plus détaillée, il apparaît en pointillés bleus, ce qui signifie que c’est un « cours d’eau intermittent ». A la limite de la propriété de mes parents, il cesse d’être souterrain, pour aller se jeter, à quelques kilomètres de là, dans le Bassecq.

Je le revois, je revois le menu barrage de brindilles, je me revois en bottes, marchant dans le lit du ruisseau. J’en suis loin, de tout cela, pourtant.

Lourdes

Tu ne disais pas la moitié
de ce que fronçaient tes sourcils
Ton monde se dépliait
infiniment comme les vents que l’on voit
venir le soir sur les collines

Tu ne chantais pas la moitié
du temps à la cime des arbres
Et si le monde dévoilait
lentement ses ondes sonores
à la gambade des autans, tu te levais
et chantais pour le faire éclore

Tu ris
tungstène décoloré
aimable brasero
de mes songeries creuses

mercredi, 21 décembre 2005

Le calendrier n’a pas disparu

Le calendrier n’a pas disparu ; Simon, tu exagères.
Le temps, non plus, ne s’est pas évanoui. Le temps de l’écriture a pris la peine d’une pause bienvenue. Pourtant, ce n’est pas le travail qui manque, et sans doute aussi m’étais-je meurtri à continuer d’écrire – c’est-à-dire, plutôt, à continuer de jeter des fragments imparfaits, dans l’épuisement et la nonchalance.
Le temps n’a pas disparu. Un soleil radieux règne dans ces contrées, avec de froides nuits et de belles journées. Le repos – de trimer en ramassant les feuilles ! Des monceaux de copies aussi m’attendent, chaudement assemblées dans les soufflets de mon cartable. Je préfère entretenir les bûches sifflantes d’un âtre bienveillant.
Derrière une baie baignée de soleil, le dos presque calciné – comme lorsque nous recevions hier soir des amis de mon beau-père, et que j’étais dos à la cheminée crépitante –, j’écris, ayant décidé de ne pas laisser passer, tout de même, ce premier jour (officiel) d’hiver, et, dans tous les cas, le solstice.
………
La plume vaut-elle le balai à gazon ?
………
Il règne un vague-à-l’âme difficile ; seuls les pinsons du Nord peuvent me comprendre, eux qui piétinent les graines de tournesol, entre les soubresauts des mésanges bleues et les piaillements frénétiques des charbonnières. Pas de verdiers cette saison, mais un gros-bec nous fait, de temps à autre, l’honneur de sa présence. Il faut écrire comment le temps passe, au moins sous ses aspects les plus agréables.
J’ai embarqué à bord d’un navire, la nef des fous où se complaisent les souvenirs. L’âme suit ici, depuis dimanche, un cheminement douloureux. J’ai relu By the Sea, qui, dans le prolongement d’Amriika, a déroulé ses enrubannades et fleuri ses feux d’artifice. La pluie jaune, maintenant, correspond mieux à mon état d’esprit, et à mes journées. Quand la bûche siffle, il faut laisser se figer la souffrance. Ainsi, elle est plus douce. On ne dort jamais deux fois dans les mêmes bras.
………
L’encre des vaisseaux vaut-elle le sang des valves de mémoire ?
………
Je vous parle de ma mémoire, mais les souvenirs des uns et des autres ne crépitent jamais de la même façon. C’est ce que, jadis, j’aurais voulu nommer la mêmoire ; c’est là une écriture dont je n’ai jamais pris le temps.
Pourtant, indubitablement, le calendrier n’a pas disparu.

samedi, 17 décembre 2005

Ecrire, enfin

Une fois que, le début du mois de janvier passé et quelques gros retards de travail comblés, j'aurai pris mes bonnes résolutions pour 2006, je me trouverai face à un semestre sans cours (mais avec tâches administratives), avec la traduction d'un gros pavé difficile pour l'été, quelques articles de recherche à écrire, mais, tout de même, enfin (et contrairement à ce qui fut le cas depuis deux mois environ) le temps d'écrire des notes pour ce carnétoile.

samedi, 10 décembre 2005

Le Colosse et le manège

Vous qui connaissez le colosse

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Vous qui êtes au paradis

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Auprès des mondes refroidis

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Souvenez-vous de nos amours

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Et des portraits en ronde-bosse

vendredi, 09 décembre 2005

La paille du temps

Quelque part dans le monde une fièvre me tient. Quelque part en Touraine, une fureur me vient. Est-ce ton élixir ? Est-ce le diamantaire ? Une fureur se mure en mon corps, terre à terre. Pas à pas, je renais. Tu n'aurais pas dû vivre affamé, si ce molosse armé, la crosse en bandoulière et la fleur au fusil, le futal en capilotade et la mèche emberlificotée, ne s'était présenté à toi, un matin, au pied des collines - et comment dire maintenant la fureur qui me tient, la furie qui relâche doucement ses griffes pour mieux me faire sentir l'écume de sa rage ?

C'était le diamantaire. Il n'avait pas dit non.

Un miracle revient sur ces contrées éteintes. Un train fou de pensées vagues et tournoyantes, autant dire une brise, autant dire une armée de nouvelles conquêtes. Vous n'êtes plus assis dans la paille du temps.

jeudi, 08 décembre 2005

Loire hivernale

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Un mercredi de brouillard, un matin de brume, la Loire paressait sous le vol indécis des cormorans mûris au froid des courants. Les bancs gelaient, au passage des voitures qui ne les savaient pas.

lundi, 28 novembre 2005

A la manière d'Eugène Savitzkaya

Je pèle les courgettes, purge les radiateurs, mets de la farine sur les engelures et dégivre les vitres de la Clio. Je fais des petits tas de poussière, au balai, que j'aspire ensuite. Je brique les cuivres, remplace les tuiles brisées, et voilà le baluchon déjà près de la porte. Je lave les carreaux de la paillasse, plie les vêtements secs, et je danse furieux sur les incantations de Julien Jacob. Il ne sert à rien de courir, mais les nuages déjà me poussent à biner les bégonias, à arroser faiblement le kalanchoë, à bluter l'hibiscus à fleurs bleues. Le romantisme n'est plus dans l'air du temps, alors je masque les pièges, traque les nuages, et admire les taupinières. Le roseau pensant m'accompagne pendant que je récure la cocotte-minute.

dimanche, 27 novembre 2005

Poèmes en marge du colloque, 3

Des fauteuils en bois rouge

Les feuilles qui roucoulent

 

Où est la brise

Et le vent fou?

 

Quand les buissons

Boivent le vent,

Le bois s'anime

 

Et se détend

Comme un vol d'ailes.

 

Poèmes en marge du colloque, 2 (Translation)

she

speaks

without

really

heeding

us

she is

engrossed

in

her

own

words

 

Poèmes en marge du colloque, 2

débit

haché

et trop

rapide

elle

ne

nous

parle

pas

 

Poèmes en marge du colloque, 1

Limage

L'image. Magellan. J'ai lancé. Encéphalo. Falot poète.

Leafing through midnight's pages.

Sleepless S-shaped lonely writer with no questions asked.

Je l'aime; voilà, j'ai fait l'image.

 

Bouchemaine

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Le froid saisit l'Anjou, vous engourdit les membres.
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Sur les bords de la Maine, avec les quatre barques qui flottillent, je prends la mesure du temps qui passe en suspendant mes yeux au ciel; une dame, accompagnée d'une petite fille, lâche son gigantesque chien, qui, bonasse, baguenaude près du rivage.
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Vous n'aurez plus, dans ce théâtre désert et glacial, qu'à lancer des gerbes de fleurs à une cantatrice absente.
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A quels lugubres oratorios avions-nous été conviés ? La porte était fermée; je me contentai d'un tour au bord de la Maine.
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La vie erre dans les piaillements.
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C'était un samedi matin, à Bouchemaine, la vie dans les plis, comme un poisson sur sa paroi.
J'ai vu les lettres s'incurver. Vous êtes resté dans l'auto.
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vendredi, 25 novembre 2005

...

Le jet d’éponge

écrit pour servir d’exergue au colloque ‘L’Illisible’ (Poitiers, mai 2005)

Pour peu que l’on se soit endormi, accablé des moments du jour, ou que, bâillant à d’autres corneilles, l’on ait interrompu sa lecture entreprise, l’histoire en cours devient fade, et hésite entre le goût de la bette et celui de la blette. (Non qu’elle soit blette comme les fruits, mais le légume insipide : l’agrémenter de crème n’y change rien. Ni lui adjoindre un œuf.)

Alors, le livre me tombe des mains. Ce n’est pas le sommeil, mais l’ire. Fades fragments. Plus moyen de lire ! On s’ennuie ferme. Voilà le livre reposé. La ferme.

……………………………….

Mes muscles évanouis dans le jus de légume, je suis un pauvre boxeur, déganté, sonné, qui n’a plus d’autre choix que de jeter l’éponge.

……………………………….

Pour peu que l’on se soit ennuyé, que les signes se soient brouillés devant mes yeux, que les oiseaux noirs soudainement aient pris la tangente pour ne plus former des phrases que fades ou bouilleuses, je tombe à terre, où l’éponge, rongée, s’est mêlée à la fange.

 

Voilà qu’ici, échaudé, je thermine.

G.C.

26 mai 2005

jeudi, 24 novembre 2005

Roman photo

Vous êtes invités à participer à l'écriture collective du roman photo Le Vil Landru à Villandry sur le site de la fournée de romans.

J'en résume les règles ci-dessous :

Le premier commentateur écrit la première phrase, le second la seconde, et ainsi de suite; chaque très bref chapitre, illustré par une photographie, ne peut dépasser six phrases (donc six auteurs différents). A partir de la quatrième phrase, un co-auteur peut choisir que sa phrase est la dernière du chapitre à condition de le préciser. Je suis, il va sans dire, le seul arbitre du jeu; j'ai également le droit de participer à l'écriture (mais pas d'écrire la première contribution).

mercredi, 23 novembre 2005

Dérapages

Outre l'état d'épuisement presque atroce et jamais expérimenté dans de telles proportions, j'ai de nombreuses tâches à accomplir dans les jours qui viennent, certaines lourdes et/ou pénibles. D'où vient que celle qui me fascine, m'attire, me préoccupe le plus soit l'écriture du chapitre 2 d'Avril déjà dérape? Prenant l'écriture de ce chapitre pour prétexte, j'écoute pour la énième fois de ma petite vie certains disques de Gérard Manset, l'un des chanteurs qui a le plus compté pour moi, avec toutes les réserves que je formulais, le découvrant, sur son excessif sérieux. Je ne veux pas recommencer l'expérience tentée en 1998 (je crois), quand j'écrivais un chapitre de roman en partant des vers du dernier quatrain de Jeanne. C'est une toute autre méthode que je veux suivre ici - et comment éviter les tics?

 

Amis qui tournez la tête

Sans savoir

Ou peut-être

Sans y croire

Ici c'est le temps qui s'arrête

Comme un oiseau sans tête

lundi, 21 novembre 2005

L'escalier est un cendrier

L'escalier est un cendrier.

 

L'escalier sous la passerelle,

côté impair, rue des Tanneurs,

est un vrai cendrier

 

plein de mégots

et de déchets laissés

par les fumeurs.

dimanche, 20 novembre 2005

Dictée de l'inconscient...?

L'aigle glisse. La glu en luge, légèrement, dérape. Dans ces parages montagneux, la marmotte sourit et les touches du clavecin se prêtent aux discordes. L'avalanche nous emporte - c'était bien la peine de faire de l'escalade, ou du ski, ou du hors-piste, ou d'aller giboyer dans les prés du seigneur. Enfin, vivement le retour au chalet, le vin chaud, la cuisse amie de la bergère. Je divague! Vertige! Une orée, une rosée plutôt (mais j'ai écrit "orée"), emporte encore les débris de mes os blanchis à la chaux, chauffés au soleil, chantés par-delà les alpages. On ne sait rien de ce persifleur, sinon qu'il fut traité de moine, et de bougre, et de célesta tumultueux (insulte étrange, celle-là). Toujours est-il que, dans nos contrées, la rosée se dessèche, les os se craquèlent et les regards fendillés s'échappent par le soupirail. Toujours cette varappe à brûler nos mains à charrue! Toujours ce festin des rues, et la tourmente qui s'éloigne, emportée dans le bec de l'aigle, une aurore à la commissure.

******************

 

Note de 21 h 27 : Ce texte constitue ma 777ème note. Emotion...

vendredi, 18 novembre 2005

Guillaume Cingal, dans le rouge fade de l'exposition Buren

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......................................................
J'emprunte à ma mère son appareil photo (car j'avais oublié le mien à la maison), je tends le bras (comme j'avais toujours fait), et je me risque à de subtiles discordances, les lunettes neuves cerclant mes yeux, l'écharpe de laine en légère contre-plongée (sinon mon triple menton vous jaillissait aux tripes), le flash perceptible sur le mur d'un rouge uni, j'esquisse même un sourire (anticipais-je sur les objurgations de Jacques?) puis prends la plume (quelques jours plus tard, mais qu'importe?), car écrire (m')est (plus qu')imaginer.

Neuf couleurs : Violet

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La plume mue en volume.

La surface glisse sur place.

Catabase

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La terre a frotté ses arpions contre la pierre des frelons. La pierre-à-feu, elle aussi, pleure, et je pleure dans ma demeure. Rustre, apaisé, mortel talonné par les bises, le skaï sussurre des promesses, ô carminatif louangeur. Mortel, talonné par les braises, une heure a passé sur ma tête.

Au point du jour, dans un gouffre, nous nous ensevelirons.

mercredi, 16 novembre 2005

L’ondieu

que notre monde

heureux d’être obstiné

et forcené par la technique

 

prenne l’eau, la barque à l’onde,

d’un regard dérétiné,

énucléé – chemin de ronde

où s’inscrive un tantinet

 

cette merveille de cantique

Une fontaine nous inonde

et le chagrin lâche la bonde

comme le cordon des tuniques

 

Tu verras l’œil

perdu au milieu des nuages

de Dieu dont nous portons le deuil –

en ce soudain écobuage

le feu n’a pas franchi le seuil.

 

Aussitôt c’est la peur panique,

frisson inné

au cœur du monde.

Romanse, ça continue...

Je suis heureux de vous faire part de la publication, à l'instant même, du chapitre 1 de La Flemme de faire la vaisselle le soir après le dîner sur le site Romanse.

lundi, 14 novembre 2005

Langeais: Vues du haut du chemin de ronde

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Au début, ce n'est rien... juste un balbutiement.
Qui va se précisant,
au moins la foi étreinte.
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Tout d'un coup, vous vous éveillez
en pleines boiseries,
les arbres au loin couvant de leurs
branchages le rideau de pluie.
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Puis encore, la tour si ronde,
la tourelle autrement plus belle
vous enveloppe de fumées
et vous martèle un sortilège.
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Enfin la rue, le précipice,
une tache de sang vous guette;
c'est que, du haut des échauguettes
où la douleur vous a saisi,
la trouée encore étincelle.
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Et vous vous retournez,
grillagé de stupeur
dans la blancheur des pierres.

Romanse... c'est parti !

Touraine sereine est heureux de vous annoncer la parution du premier chapitre d'Avril déjà dérape. A l'issue de leur lecture du chapitre 1, les lecteurs sont invités à voter, par voie de commentaire, pour l'un des trois choix de chapitre 2 proposés.

jeudi, 10 novembre 2005

Neuf couleurs : Vert

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Que ton monde un jour s'envase
Et c'est la chute des comètes
Un arbre caméléon
Comme une vertèbre fleurie
Te dispense de tes poèmes

Imbécile...

... que je suis, je ne me suis pas rendu compte que j'écrivais le 1111ème commentaire !

Le faux Tourangeau n'a pas lu Ravelstein

Russie éternelle, ou encore grimaces.

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Âtre où folâtrent des pigeons,

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vide, éteint, sans embrasement.

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Est-ce cette planète, ou ce roi

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lucide, en sa danse de la pluie,

sereinement conquis?

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Terreur, apothéose!

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Est-ce, de sons, une overdose?

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Il paraît que je ne suis rien,

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non, au chaud sous les couvertures.

Album de limericks ligériens

En attendant la parution du premier chapitre de l'un de mes romans, vous pouvez toujours participer à la discussion autour des limericks en français, sur mon blog pédagogique. Il s'agit d'écrire des limericks en français.

Le limerick est un poème court, humoristique, absurde ou grivois, toujours un quintil de forme AABBA, et dont la première rime est un nom de commune. Habituellement et originellement de langue anglaise, cette forme se transporte très bien, à mon avis, en langue française.

lundi, 07 novembre 2005

En cours d'écriture

Je voulais seulement signaler que, mercredi après-midi, puis un peu hier soir, j'ai amorcé l'écriture des trois romans interactifs que je compte publier d'ici peu sur mon autre site. Tout vient à point à qui sait attendre, et la cristallisation est lente.

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jeudi, 03 novembre 2005

Rue Jehan de Daillon

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Cette rue sentait le graillon. J'avançais à pas de géant.

mardi, 01 novembre 2005

Meurtrissures

Dans le donjon, parmi les rebecs, les flèches pleuvent par milliers, et l’eau bouillante nous éloigne. Une farandole de nuages s’extasie comme à la parade. Tu n’avais pas de sourcils, cette nuit, quand je t’ai rêvé, et pourtant tu étais très beau, comme un soleil de pacotille. Je m’appuie à l’un des créneaux, et je saute sans crier gare. Mes hurlements se perdent dans les nues, et je ne te vois plus.

Les Trois Rois

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les trois rois
traînent reines
rincent princes
***
aux princesses reste l'inceste
  [Vue prise le 1er octobre 2005.]

Phalanstère

C’est la valse des frelons. Les corbeaux dansent dans les arbres. A Carrare, on prend des leçons – de hautbois, de violon, de flûte ou mandoline. Le bossu passe avec sa fille. Elle est vêtue de haillons ; les ortolans se moquent d’elle. Dans mon jardin, il y a des fleurs. C’est la valse des frelons. Le vieil ivrogne exhibe ses fesses. L’addition est pour ma pomme. Tu n’iras pas très loin comme ça, si dru, si dramatique. Je me souviens de Saint Lucien, quartier curieux de Beauvais. Je pèle la pomme en trois quarts ; je ne sais pas comment j’ai fait. Dans la mêlée, le vent bourdonne. Et c’est la valse des frelons, toujours, toujours recommencée…