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mercredi, 15 juillet 2009

What's in a name ?

.        Dans l'exemplaire de La Reprise que je vais rendre aujourd'hui à la B.U. se trouvaient, outre la classique fiche de format A6 portant mon nom et les conditions de prêt, deux fiches semblables, l'une entre la couverture et la page de faux-titre, l'autre entre les pages 108 et 109, et toutes deux au nom de Kasereka Mutisyano.

Sur ces fiches de format A6, qui ne sont insérées que dans les ouvrages archivés en magasin et commandés par voie informatique, je gribouille souvent des notes prises en cours de lecture, des numéros de pages, tout un système d'abréviations dont je ne fais rien en général, si ce n'est garder les dites fiches dans un autre livre une fois restitué l'ouvrage emprunté. Ainsi, il peut m'arriver de retrouver, dans un volume de poèmes italiens, une fiche attestant que j'ai lu -- et même griffonné quelques notes à ce propos -- telle pièce de théâtre russe du dix-neuvième siècle.

Trouver, dans un roman qui n'est (assez pesamment d'ailleurs, à sa lynchienne façon) que sosies, doublures, échanges, transferts de personnalité et surtout vertigineux dédoublements narratifs, deux fiches signalant que la même lectrice (car le nom de Kasereka Mutisanyo me semble indubitablement féminin, quoique plus douteusement japonais) a emprunté ce livre consécutivement les 21 février et 6 mars 2003, a de quoi troubler un pauvre dément de mon espèce. Cela m'a aussi rappelé un épisode de mes premières années tourangelles : au printemps 2004, interrogeant un trinôme de classes préparatoires (activité dans laquelle je m'étais laissé embarquer pour dépanner une amie mais que j'ai abandonnée après dix mois, tant les "colles" sont répétitives et ennuyeuses), j'avais échafaudé tout un univers romanesque formel autour du seul nom d'une des candidates : elle se nommait Silithone Phothirath, et était, de surcroît, très jolie.

Les noms Kasereka Mutisyano et Silithone Phothirath ont en commun (outre leur caractère censément évident d'étrangèreté orientale) leur léger déséquilibre numérologique, qui est ce qui les rend particulièrement obsédants pour moi :

Silithone Phothirath : 9 + 10 = 19 (nombre premier de rang 8)

Kasereka Mutisyano : 8 + 9 = 17 (nombre premier de rang 7)

 

Il se trouve, après quelques rapides recherches, que le nom trouvé en double exemplaire dans La Reprise ne serait ni japonais (ce qui, effectivement, me paraissait sujet à caution), ni féminin : il s'agit, selon toute probabilité, d'un nom d'homme africain, peut-être congolais ou rwandais. Ce qui complique l'enquête, c'est que Kasereka, placé sur les deux fiches en position de prénom, semble plutôt être un patronyme : c'est notamment le nom du garde du corps qui assassina, en 2001, Laurent-Désiré Kabila. Le Service Commun de Documentation s'est-il trompé en inscrivant l'étudiant aux nom et prénom trop exotiques pour être distingués l'un de l'autre ? Pas forcément : il existe au moins un chercheur africain, spécialiste d'ailleurs de Valentin Mudimbe (qui est auteur d'un roman que j'iame beaucoup, intitulé L'Ecart (ça ne s'invente pas)), et dont le prénom est Kasereka (le patronyme Kavwahirehi).

Nul doute que Robbe-Grillet aurait pu tirer un roman fort habile d'un tel écheveau...

 

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