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mercredi, 07 juin 2017

juin 7

tige

si c'est ainsi qu'il faut nommer la queue par laquelle chaque banane est attachée au régime ou à la main

& donc chacune des quatre tiges détachée de la main droite par le type

en s'aidant d'abord

(pour les deux premières bananes, je crois)

de la main gauche

puis, la main gauche posée délicatement sur le banc à côté de lui, détachant chaque tige d'une seule main,

geste adroit qui vint toutefois battre en brèche l'image plus globale du quasi dandy dégustant prestement cinq bananes en moins de dix minutes

car essayez de détacher une banane par la tige d'une seule main

& vous verrez : il est presque impossible de faire cela sans caler le fruit contre son buste ou contre un objet, un banc,

donc le quasi dandy se fit, sur ce coup-là, remarquer par un geste plus abrupt,

moins lié, moins lisse, moins dandyesque disons-le

& donc je ne me rappelle plus si, pour la quatrième (l'avant-dernière) banane il a réussi à conserver intacte chaque banane avec sa tige

car qui a déjà essayé cela en a souvent fait l'amère expérience

(amère d'un simple point de vue esthétique) : l'une des deux tiges s'arrache, en quelque sorte, laissant voir la pulpe, le fruit sous la tige,

& d'ailleurs quand on se trouve à faire cela et qu'on ne souhaite pas manger les deux bananes

(ce qui est fréquent,

le cas le plus répandu)

on craint que la banane restante dont la tige est aussi arrachée ne s'abîme, ne se flétrisse, ne se tale ou ne pourrisse par la tête, par la tige, par la queue, mais comment dire, comment dit-on, personne ou tout le monde dit cela et personne ne le dit, personne ne raconte ses mésaventures avec une banane, il faut croire que tout le monde a ce genre de minime mésaventure

(minor mishap)

mais que personne ne s'en soucie vraiment, personne ne formule cela, personne ne dit, ne raconte, et écrire encore moins

(quelle blague)

en tout cas vous voyez ce que je veux dire

si déjà dans votre vie vous avez détaché quelques centaines de bananes de leur régime avant de les peler, si déjà dans votre vie vous avez PELÉ des centaines ou des dizaines de bananes il vous est sûrement arrivé de laisser la dernière banane du régime

(en en détachant l'avant-dernière)

avec la tige cassée et la pulpe apparente,

ce qui s'est peut-être produit pour le type

mais enfin il n'en avait cure

il ne pouvait en avoir cure

puisque quelques minutes, pas même ça, après avoir pelé et dégusté prestement la quatrième banane il s'attaqua à la cinquième,

et alors que sa tige fût cassée laissant apparaître ou poindre franchement la pulpe ou le jaune plus doux plus crémeux du fruit, qu'en avait-il à faire,

il ne pouvait en avoir cure

puisque très bientôt il rassembla en un tas les peaux de bananes avec leurs tiges

& peu devait lui chaloir

(omg omg)

qu'il y ait une peau sans tige (celle de la dernière ou 5e banane) et deux (2) tiges attachées à une seule peau (celle de la quatrième ou avant-dernière)

puisque tout (peaux et tiges) allait partir à la benne ou au bourrier

sans queue ni tête, sans peau ni

tige

11:49 Publié dans Juin | Lien permanent | Commentaires (0)

mardi, 06 juin 2017

juin 6

pèle

cette banane et puis cette autre encore

comme tu pèlerais une orange et te mettrais du jus partout ou devrais l'éloigner de toi et de tes habits, sans assiette ni couverts, pour ne pas te tacher,

si du moins j'ose à présent m'adresser à 

(et même tutoyer) ce type qui a dégusté précipitamment cinq bananes en six ou sept minutes,

ce que jamais je n'osai faire ce midi-là où je le regardais sans le dévisager, où je l'observais de loin, comme sans y toucher

(sans toucher à son repas mais sans paraître même effleurer du regard la scène qu'il offrait pourtant aux passants ou témoins),

et l'action de peler me parut presque plus essentielle, ce midi-là, que l'engloutissement (relatif, cette question a déjà été abordée) des cinq fruits à la FILE, car à la façon dont on pèle tel fruit on peut certainement deviner bien des traits de caractère

du type, donc,

du presque dandy comme je l'ai déjà qualifié,

à qui je ne me suis pas adressé, que je n'ai pas interpellé, et que j'interpelle à présent dans ce texte, avec des mots que jamais sur le coup je n'ai pensés, des mots que je ne dis pas à voix haute, des mots que j'aligne ou que j'égrène

peut-être pour tenter donner un sens, ou à tout le moins façonner, donner tournure à cet événement sans importance

& pourtant singulier : un type mange sans marquer de pause et en moins de dix minutes cinq bananes arrachées au même régime

(je tiens au mot régime, je tiens à tant de mots, tant de mots me tiennent, et par la présente je tiens ma quatrième de couverture)

en se comportant, par ses gestes, en presque dandy

qui mange ou dévore moins qu'il ne pèle

& pour tout dire qui pèle moins qu'il ne détache les fruits & même moins qu'il ne les déguste

car dans l'acte de peler c'est la peau qui l'emporte,

la peau de chaque fruit avec la tige

& peut-être le contact des doigts avec la peau des fruits

le contact d'une peau humaine peut-être souffrante avec la peau peut-être talée ou brunie de la banane,

et c'est autant à cette peau de la main ramassée en doigts qui détachent et pèlent que je voudrais parler qu'à l'individu, le type, l'être humain,

pour autant que ses gestes de presque dandy m'ont fait considérer sa peau

& le tas de peaux de bananes que, chaque fruit mangé l'un après l'autre, il constituait sans savoir en fin de compte où les jeter,

peau de type étonnant bouffeur bananivore

dont peut-être le nom était banal, si son nom à aucun moment ne reflétait la bizarrerie du choix de ce déjeuner,

& quand bien même la banane est devenue un fruit banal, commun, vulgaire même ou familier peut-être, elle qu'on peut manger par cinq, cinq à cinq en un rien de temps

(si j'écrivais un texte sur les nèfles ou sur l'amélanche ce serait une autre affaire, une autre paire de manches)

même devenue banale la banane ne se laisse pas dévorer ni déguster souvent en mains de cinq comme ça sur un banc aux yeux des passants

pour ça qu'on voudrait pouvoir interpeller le type, ou que j'aurais dû l'interpeller et, qui sait, lui demande son nom, si ça se trouve banal, et si ça se trouve compliqué, à faire répéter sept fois, à coucher dehors

sur un banc,

nom que tandis que je l'exhorte à continuer de détacher, peler et déguster cinq bananes à la file, dans cette fiction où je l'interpelle pour ma gouverne il é-

pèle

19:24 Publié dans Juin | Lien permanent | Commentaires (0)

lundi, 05 juin 2017

juin 5

file

puisque c'est ainsi qu'en regardant le type dévorer ou plutôt déguster prestement (précipitamment) ses bananes je me disais qu'il les mangeait : à la file ou d'affilée

et comme il est curieux bien sûr d'avoir pensé ça alors que je regardais un type tout seul sur un banc

comme si les bananes lui tenaient compagnie

comme si les CINQ bananes formaient une sorte de file d'attente tenant compagnie à ce guichet humain, à ce gouffre, et j'écris gouffre alors qu'à ce moment là, en direct pour ainsi dire, je ne pensais pas gouffre,

je ne pensai pas gouffre,

je n'ai pas du tout pensé gouffre,

j'ai bel et bien pensé ou formulé la scène comme une scène de dévoration

alors que ce n'était pas le cas, je l'ai écrit plus haut, il s'agissait plutôt d déguster précipitamment ou prestement, et là encore d'ailleurs je m'en avise, prestement convient mais pas précipitamment, le type dégustait prestement mais pas à la hâte,

à la file en revanche oui, il enfilait les bananes,

il se les enfilait, comme on dit, avec ce pronominal (ou est-ce une tournure réfléchie, plutôt ? (oui, ce doit être ça)) un peu familier, j'ai du mal à écrire tout cela, à décrire tout cela avec justesse, je m'en vois pour dire ce que j'ai vu, ça me regarde d'écrire ce texte à partir de ce que je regardais,

et partir c'est mentir un peu,

le type donc enfilait les bananes plus qu'il ne les engouffrait, c'était très étrange, et pas seulement parce qu'on voit rarement (je n'avais jamais vu) qui que ce soit manger en cinq à dix minutes (et plutôt cinq que dix, il me semble) cinq fruits, et donc en l'occurrence cinq bananes, fruit qui présente la particularité, sans doute, qu'il se pèle prestement

& donc qu'on peut le manger vite, en mâchant juste ce qu'il faut,

on peut manger cinq bananes assez vite sans donner l'impression d'engouffrer, d'engloutir, de dévorer, la main gauche presque en permanence posée délicatement à côté de soi sur le banc,

et ce ne serait peut-être pas possible avec un autre fruit,

l'orange par exemple,

qui prend plus de temps à peler et qui, surtout, juteuse comme elle est, ne vous laisse pas la manger prestement sans vous forcer à de précautionneuses manœuvres afin de ne pas être éclaboussé de jus,

voilà bien un fruit, l'orange, qui ne permettrait à personne de la manger seule,

et encore moins à la file,

la main gauche délicatement posée sur le banc à côté de soi, comme un objet indépendant, là seulement pour la parade, là seulement pour l'image, là seulement pour la pose presque de dandy,

on ne peut avoir l'air d'un dandy en mangeant une orange,

et cinq, n'en parlons pas,

alors que l'orange passe, je pense, pour plus noble ou plus raffinée, ou moins ridicule, qu'en sais-je (il faudrait creuser cela), que la banane,

ce qui ne doit pas faire perdre de vue

(que je m'en vois)

que la banane, elle, a pour indéniables qualités de se peler sans simagrées et de ne pas éclabousser ni dégouliner

(c'est aussi son défaut, dira-t-on)

et donc de permettre à quelque type pressé d'en faire son déjeuner, oui, d'un régime complet, d'une main de bananes prise à même la main, cinq pelées prestement et tout aussi prestement non pas englouties mais dégustées à la

file

09:23 Publié dans Juin | Lien permanent | Commentaires (0)

dimanche, 04 juin 2017

juin 4

cinq

et au départ on ne savait pas trop si le texte parlerait surtout de minutes ou de bananes, même s'il est clair désormais que le chiffre cinq (5) se rapporte surtout au nombre de bananes du régime plutôt qu'aux minutes

dont il m'est difficile de déterminer le nombre,

le type sur le banc a-t-il mis moins ou plus (et si plus, combien) de cinq minutes à boucler son insolite déjeuner intégralement composé de bananes, donc d'un régime dont il m'a bien semblé qu'il était intact au moment où il l'a sorti du sachet,

et ce régime constitué de cinq fruits, le TYPE a entrepris d'en détacher une à une les bananes et de les manger à la file sans faire la moindre pause entre chaque fruit, et moins encore entre chaque bouchée,

voilà quelqu'un qui a l'estomac solide

et pas seulement l'estomac : l'œsophage

(tant et si bien qu'on serait tenté, dans une autre disposition d'esprit, avec d'autres principes de composition, d'intituler ce texte encore à ses balbutiements L'œsophage du bananivore)

car même si j'ai pu dire précédemment qu'on ne voit jamais qui que ce soit manger cinq oranges d'affilée il s'avère que je n'avais jamais vu non plus quiconque éplucher / avaler comme ça cinq bananes à la file

et donc ce chiffre cinq a son importance

aussi parce que j'ai évoqué la main gauche du type reposant presque tout le temps de cet insolite déjeuner sur le bois du banc

et que les cinq doigts de la main ne peuvent manquer de rappeler les cinq bananes du régime

ou de la grappe

et même de la main, puisqu'on parle parfois de mains de bananes

& si l'on en croit plusieurs dictionnaires une des étymologies possibles du mot banane le ferait remonter à l'arabe banan (doigts), sans que j'aie eu l'idée de chercher si une étymologie voisine permettrait d'y adjoindre le banyan

(mais j'en doute),

la main gauche posée sur le banc n'était donc pas seulement le pendant de celle, plus active, dont se servait le type pour éplucher et tenir les cinq bananes mâchées et avalées l'une après l'autre, mais aussi, au moins à la sortie du sachet, quand le régime

(la main)

était encore intact

(intacte),

le pendant de cette grappe formée de cinq fruits dégoulinant incurvés comme des doigts tordus ou agrippés autour du vide, avec à l'esprit tant d'expressions plus ou moins désuètes (slap-of-the-five, en serrer cinq) qui finiraient par déboucher sur un fou rire irrépressible face à d'ineptes hypothèses :

un sketch dans lequel des acteurs se tapent, non dans la main

(high five)

mais, tenant chacun un régime, dans la grappe de bananes,

c'est tellement idiot que c'est le genre de choses dont on rit de seulement les imaginer, on pique un fou rire, on se tient les côtes, ou plutôt même face à un gag aussi nul, aussi imparfait, aussi tiré par les cheveux aussi, on se tient le visage dans la main (droite), on place sur sa propre face la main de bananes de ses cinq doigts rassemblés et pliés, tordus pour épouser les contours du visage,

de même que le type dévorait l'un après l'autre les cinq doigts jaune vif de cette main arrachée au sachet qui la contenait

non sans en éplucher préalablement l'épiderme épais jaune vif

avant d'en engloutir, insolite déjeuner,

cinq

10:50 Publié dans Juin | Lien permanent | Commentaires (0)

samedi, 03 juin 2017

juin 3

type

qui a donc pour caractéristique, dans ce récit où je le prends pour sujet, de manger cinq bananes pour tout déjeuner,

et là encore qu'en sais-je,

peut-être avait-il déjà englouti, ailleurs, avant de s'asseoir sur ce BANC, un sandwich ou une barquette de coleslaw, auquel cas les calories ingérées avec ce régime de cinq (5) bananes dépasseraient amplement, très largement, la norme pour un seul repas

(et même d'ailleurs avec cinq bananes, on se demande),

toujours est-il que ce type, j'en fis l'objet de mon regard & j'en fais le sujet de ce texte,

ou plutôt je tire ce texte de ce que je lui ai vu faire,

à savoir éplucher/avaler pas moins de cinq bananes, à la file, l'une après l'autre, en se servant surtout de sa main droite, et ce en moins de dix minutes (j'avais même dit au départ que ça n'en avait pas pris cinq, mais cela, je ne pourrais le garantir), de sorte que le sujet de ce texte

ou de ce récit

(mais est-ce un récit ?)

n'est pas le type à proprement parler mais la façon dont ce type, assis sur ce banc que je n'ai pas encore décrit, dans un décor que je n'ai pas encore évoqué, a déjeuné d'un régime de cinq bananes à 2,39 €

mangeant d'abord pour 37 centimes de fruit à moins qu'on  ne compte la peau dans le calcul du prix de ce qui fut consommé, puis pour 54 centimes à moins qu'on ne compte que la partie mangeable et pas la peau dans le calcul du prix de ce qui fut consommé, et ainsi de suite, ne se servant de sa main gauche que pour détacher chaque banane de son régime ou pour en casser le coudic

(j'ai eu beau chercher, je ne suis pas sûr du terme approprié pour décrire le bout (la queue ?) de la banane, cette partie dure par laquelle un régime est accroché à la branche (la tige sans doute ?))

et donc ce type n'est pas le sujet

mais fatalement

vu que ce type a mangé ce midi-là cinq bananes d'affilée, sans faire de pause entre chaque, son repas, et le fruit au centre de son repas (ou de son dessert si on imagine qu'il avait, par exemple, mangé auparavant, avant d'atterrir sur ce banc, une barquette de coleslaw), sont le sujet, mais le sujet c'est forcément aussi ce type

sorte de héros bananier ou bananophage ou bananivore

(le mot banane n'étant ni grec ni latin je pense qu'on peut s'autoriser l'un ou l'autre de ces adjectifs)

ce type par glissement devient lui-même le sujet

et par-delà ça le mot type lui-même, car pourquoi ne pas avoir écrit homme ou monsieur ou mec ou gonze ou zigue ou quoi d'autre encore, sans doute car c'est bien d'un type qu'il s'agit :

si distingué qu'il fût, si dandy qu'il parût être, si digne qu'ait été son comportement,

il avait tout du type car quand on voit quelqu'un s'asseoir sur un banc puis sortir d'un sac un sachet contenant un régime de cinq bananes avant de les manger une à une on se trouve effectivement face à un type

& si on rentre chez soi le soir si on raconte ça on va dire j'ai vu un type qui ceci cela

de sorte que le mot type lui-même est tout autant le sujet de ce récit

(mais est-ce un récit ?)

que le personnage, la personne de ce type que j'ai vu, que je voyais alors et que je vois encore maintenant en racontant ce que je lui ai vu faire alors, manger cinq (c'est-à-dire 5) bananes d'affilée

ou à la file

en me disant sans doute en mon for intérieur tout en tentant de retenir un maximum de détails, tout en le regardant détacher éplucher porter à sa bouche mâcher mastiquer déglutir avaler, en me disant mais qu'est-ce que c'est que ce

type

10:31 Publié dans Juin | Lien permanent | Commentaires (0)

vendredi, 02 juin 2017

juin 2

banc

où le type donc passe cinq minutes, peut-être un peu davantage, à éplucher consciencieusement puis à engloutir précautionneusement, l'une après l'autre, les cinq bananes de son régime à 2, 39 €,

à moins qu'on ne puisse vraiment parler d'éplucher

car pour manger une orange, par exemple

(mais nous sommes en JUIN, et il est rare de voir quiconque manger une orange en juin, pour ne rien dire de quelqu'un qui mangerait cinq oranges à la file, mais après tout il n'est pas courant de voir quelqu'un manger cinq bananes à la file),

on l'épluche puis on la mange après l'avoir séparée en quartiers,

donc l'épluchage complet de l'orange est une phase préalable à sa dégustation, ou à sa dévoration, ou à sa mastication, bref :

on l'épluche avant de la manger

(la langue anglaise a raison, qui privilégie les verbes),

mais une banane s'épluche au fur et à mesure qu'on la mange, sauf dans le cas de certaines personnes (enfants, le plus souvent) qui ne commencent à manger leur banane qu'après lui avoir entièrement retiré sa peau, qu'après dégainage total, ou désemmaillottage, épluchage, préfère-t-on ici des termes techniques ou des métaphores

ce n'est pas le problème — le problème est

de savoir si on peut dire qu'une banane s'épluche puis s'engloutit

(s'avale)

ou si l'épluchage est nécessairement, par définition, une phase autonome, non simultanée, comme pour les oranges, alors qu'ici

(sur ce banc)

c'est bien d'un régime de bananes que j'ai vu le type détacher un à un les fruits avant de les éplucher/avaler, la main gauche reposant le plus clair du temps sur le bois du banc, à son côté, c'est-à-dire que quand il ne se servait pas de la main gauche pour détacher une banane du régime ou pour casser la queue (la tige ? comment se nomme le coudic (comme on dirait en gascon) du fruit), il n'usait jamais que de sa main droite pour éplucher et manger chacune des cinq bananes,

et donc la main gauche posée sur le bois du banc

ce type avait, malgré son activité frénétique d'épluchage et d'engloutissement d'un fruit généralement tenu pour peu aristocratique, quelque chose d'un dandy, une allure très digne

sans rien de comique ou de ridicule

alors que tout de même manger à la file cinq bananes détachées l'une après l'autre d'un régime, ça a de quoi attirer les regards

& les moqueries

puisqu'on n'est jamais à l'abri des regards sur un

banc

10:08 Publié dans Juin | Lien permanent | Commentaires (0)

jeudi, 01 juin 2017

juin 1

juin

& faute de nèfles il déjeunait de bananes

je le regardais qui mangeait, l'une après l'autre, cinq bananes arrachées l'une après l'autre à leur régime :

son déjeuner sans doute se composait de ces cinq bananes, qu'il mâchait longuement bien qu'il n'ait pas mis cinq minutes, à la fin des fins, pour venir à bout du régime,

et donc il mangeait 48 centimes de fruit,

chaque banane coûtant, on va dire, 48 centimes — mais en fait NON : à 2,39 € le régime, la moyenne précise serait de 47,8 centime d'€

et donc là, à sa troisième banane, on peut dire qu'il savourait précipitamment, qu'il engloutissait lentement 41 centimes peut-être,

41 car comment savoir si la peau compte,

si les cinq peaux de ces 5 bananes doivent être comptées :

quand on achète des bananes, évidemment on les achète avec la peau,

personne ne mange la peau des bananes mais personne, dans une épicerie ou chez un maraîcher (ou chez un marchand des quatre saisons, ou dans une supérette, ou à l'étal d'un vendeur de fruits etc.), personne n'accepterait jamais d'acheter un régime de bananes sans la peau, sans leurs peaux,

donc celui qui avait payé 2,39 € son régime de cinq bananes avait bel et bien payé pour les peaux,

pour pouvoir les dégainer, en retrousser l'épaisse peau jaune avant de commencer à croquer ou mordre dans le fruit,

jamais il n'aurait acheté ces bananes sans leurs peaux,

et donc il avait payé pour être ensuite encombrés de ces peaux qu'il aurait voulu jeter sous un arbre au lieu de les mettre dans une poubelle

(est-il normal, franchement, que le tri sélectif ne soit pas proposé, en 2017, à chaque poubelle de ville)

et dont il était embarrassé,

donc mange-t-il avec cette quatrième banane 54 ou 47 centimes de fruit (je dis 54 car il semble que ce soit la plus grosse du régime), c'est ce qu'on ne peut déterminer, encore que si, tout de même, si : il mange pour 47 centimes, car la peau il ne la mange pas, donc il consomme ou s'approprie 54 centimes de fruit, mais n'en mange que 47,

à cet instant on aimerait qu'une équipe de biologistes calcule le ratio moyen peau / fruit à partir d'un échantillon de, disons, 239 bananes, de sorte qu'on sache véritablement si cette histoire de 47 centimes de fruit pour 7 centimes de peau tient la route,

et plus je le regarde engloutir (c'est-à-dire savourer) et mâcher (c'est-à-dire avaler) cette quatrième (ou 4e) banane, plus je me dis que le ratio doit être tout autre, sur une banane lambda

(mais qu'est-ce qu'une banane lambda ?)

la peau doit occuper nettement plus de 7/54 du poids total, pour ne rien dire du volume,

il n'y a qu'à voir comment ce type qui déjeune d'un régime de bananes à 2,39 € est embarrassé des trois peaux qu'il a posées par terre devant son banc, oui, il est assis sur un banc, sans même attendre l'encombrement supplémentaire des deux peaux à venir,

à suivre, et sans aller jusqu'à dire que, comme pour les artichauts, la banane produit un volume de déchets supérieur au volume ingéré, voire même au volume avant préparation & cuisson, les cinq (ou 5) peaux de bananes

ne manqueront pas de prendre à peu près autant de place

dans sa main,

dans la main de ce type assis sur le banc que fasciné je regarde déjeuner d'un régime de bananes

à 2,39 €,

autant de place que le sachet dans lequel il tenait tout à l'heure le régime inentamé

en ce jour où faute de nèfles il déjeune

(déjeunait)

de bananes

(en un régime)

en bâclant l'affaire en moins de dix, peut-être même de cinq (ou 5), minutes, le temps d'un souffle de vent, sur un banc, en ce premier jour de

juin

21:25 Publié dans Juin | Lien permanent | Commentaires (0)

mercredi, 21 décembre 2016

Huitain retrouvé

dites-moi

ces grands réverbères

ces illuminations

les voit-on mieux les yeux fermés

 

ou s'imagine-t-on

la venue d'autres étoiles

parmi les myriades de mélancolies

murmurées

27.11.2013.

mardi, 29 novembre 2016

Ballade des drames du tens futur, de Françoys Fillon

Ballade des drames du tens futur

par Françoys Fillon, escholier françoys de souche (sarthoyse)

 

Dites-moy où, n’en quel pays,

On sucrera l'aide sociale

Aux smicards, ces sales nantis,

Leur préférant l'évasion fiscale ?

Peu me chaut en ça la cabale

Des démocrates et des perdans !

Où raflerai-je la timbale ?

C'est ès Frances, au prochainz printens.

 

Une fois gauchistes enfuis

On portera l'âge de retraite

À septante ou soixante-dix

Pour saigner la nation distraite.

Peu me chaudra l'anachorète

Qui va de la loi soulignant

Que du chomasge ça sécrète

En la France, au prochainz printens.

 

Préceptes chrétienz rétablis

On boutera hors du domaine

Mahométans & surtout laïcs

Qui n'ont foi qu'en la science humaine

Et jettera dessus la Seine

Services publics & savans.

Et invertis le mal les prenne,

Sans mariage au prochainz printens !

 

ENVOI

Françoys, la fable américaine

Ne vous distraise même un tens :

Mes sourcils de croquemitaine

Règnent France au prochainz printens.

 

lundi, 19 septembre 2016

Rien la tronche.

20.09.2014.,

peut-être sous l'influence de Frankétienne ou de Tram 83

Ribouldingue pour les fous.

Rigodon pour d'autres farcis empiffrés.

Sarabande des mutiques.

Plein la panse.

Rien la tronche.

 

Bancroche à fond la foison des fieffés menteurs roule-mécaniques.

vendredi, 08 juillet 2016

charrette à bras

ça semble un enfant au cerceau

& ce serait un charretier

pas rue du château des rentiers

où dort le mort dans son berceau

 

d'un épais trait d'encre de chine

tel pour le croquet les arceaux

dépenaille tous les pinceaux

le diable veille à sa machine

 

ton regard hautain pas altier

s'abstient d'embrasser les chantiers

pour y dénicher la bobine

 

d'un trait d'encre de chine épais

tel que sous la télécabine

on prend le forfait au rabais

samedi, 25 juin 2016

Picares

Donc le modèle absolu ce sera le picaresque. On ne fera rien sans ce modèle. Hors de ce modèle cumulatif, de l'idée de ligne brisée appliquée à l'art du récit, rien ne sera possible. D'une part l'avalanche des informations contradictoires, d'autre part l'avancée toujours plus sûre dans la forêt épaisse. D'une part la noirceur du ciel, d'autre part les pattes-de-mouche échappées à l'encrier. Ce qu'il faudra, c'est du picaresque avec des centaines de picaros. Et pas de picaros ibères, pas spécialement. Le modèle a déjà connu bien des traductions et des transpositions, ça continue, que ça continue, que ça participe de la mixtiligne et de la ligne brisée. Un peu de souffle au cœur. Des centaines de picaros pas ibères sous la nuit de l'encrier dans une forêt épaisse. Au turbin, dans la soute.

dimanche, 19 juin 2016

3900 / Fata morgana

Pour nos vingt-quatre ans de vie commune, C* m'a offert hier le dernier livre d'Yves Bonnefoy, Alechinsky, les traversées

or, c'est un ouvrage de chez Fata Morgana

(de nombreuses gravures d'Alechinsky y sont reproduites)

et les pages ne sont pas coupées, depuis que je suis levé, ne voulant pas faire de bruit dans la cuisine ni précipiter les choses, je me tâte, laguiole sans dents ou alors couteau de cuisine en céramique,

car il va falloir les couper, ces pages, comme jadis les Budé des éditions des Belles-Lettres ou les Gracq de chez Corti,

et dès hier j'ai feuilleté l'ouvrage, regardé longuement telle gravure, lu déjà, in the middle of nowhere, tel et tel paragraphe du texte de Bonnefoy

(comment peut-on feuilleter et même lire un livre aux pages non massicotées

(je vous le demande un peu) ?

c'est très facile, en fait, cela se fait d'un doigt délicat et d'un oeil expert

(vous imaginez qu'avec le netbook que je n'avais pas utilisé depuis des mois je ne peux pas accéder au raccourci clavier qui me permet de faire proprement l'e dans l'o

(est-ce si grave ?) et donc j'écris oeil au lieu du mot correctement orthographié avec l'e dans l'o

(d'ailleurs le correcteur orthographique souligne ce mot mal typographié, mal orthographié, on s'éloigne de Bonnefoy et d'Alechinsky et des pages non massicotées et de quel couteau de cuisine à manche de bois ou de corne au fond du tiroir central de la cuisine)

mais je rectifierai plus tard (même dans le netbook il aurait suffi d'écrire ce texte dans un document de traitement de texte, maintenant le texte s'est écrit comme ça, j'ai la flemme)))

comme j'ai la flemme, pour l'instant

ce n'est pas une flemme, c'est un suspens, une attente, un retrait

la flemme ou le suspens ou quoi, enfin bref j'attends et je n'ai pas encore décidé comment je couperai les pages non massicotées du dernier livre de Bonnefoy chez Fata Morgana

ça attendra

& pourtant plus haut pas la flemme de recompter le nombre de parenthèses que j'avais ouvertes afin de toutes les refermer d'un coup

(forme de flemme là aussi)

pour ça je vous l'assure, plus que pour massicoter ou couper au couteau en céramique ou pas en céramique d'ailleurs, j'ai l'oeil

(ce texte pas une gravure de mode, cette main qui hésite pas victime d'un mirage)

ou l’œil.

 

vendredi, 29 avril 2016

De la sphère à la liane

Hier soir, tard, j'ai mis en ligne la trente-septième de mes traductions sans filet, que, vu son numéro d'ordre, j'aurais pu (dû ?) consacrer à mon département d'adoption...

Cette traduction, d'un poème en apostrophe et hommage à Thelonious Sphere Monk, je ne m'en avise qu'après coup, est un clin d'œil involontaire, par le patronyme, à ma traduction, publiée sur le site Zazipo, d'un poème d'Ian Monk choisi pour l'oulipien de l'année.

Peut-être, après amélioration, l'archiverai-je dans mes Darts on a slate.

dimanche, 24 avril 2016

Hâtes de Hasenclever

Dubillard.jpgCe dimanche, la promenade — par un temps très frais, pas du tout aprilien (à moins de décider, une fois pour toutes, qu'avril est le mois le plus cruel) — aux jardins des Prébendes, pour le marché des bouquinistes, a donné sa moisson, restreinte mais curieuse :

  • un livre de Roland Dubillard en collaboration avec Philippe de Cherisey (acheté pour Dubillard, et pour sa quatrième de couverture)
  • un roman de Pirandello, Feu Mathias Pascal (je ne savais même pas qu'il avait écrit des romans, c'est vous dire mon inculture)
  • une mince plaquette de vers allemands, qui m'a intriguée, dans un bac dépenaillé de bouquins abîmés à 1 euro pièce, Der Jüngling de Walter Hasenclever, éditée à Leipzig en 1913

IMG_20160424_220316.jpgCe dernier volume s'avère sans doute le plus marquant, non seulement car trouver ce genre de rareté pour un euro à Tours n'est pas chose courante, mais surtout parce que, si j'ai choisi de l'acheter en partie pour montrer à mon fils aîné la graphie gothique et aussi en dépit du caractère plutôt académique — à ce qu'il m'avait semblé — des poèmes, j'apprends en fin de compte que son auteur est un poète et dramaturge certes du second rayon mais tout de même compté parmi les figures de l'expressionnisme allemand.

Né en 1890, il a connu un itinéraire assez proche de celui d'Apollinaire au début de la Première Guerre mondiale, avant d'enchaîner plusieurs pièces théâtres (dont une adaptation en 5 actes du Gobseck de Balzac !). Considéré comme “dégénéré” par les nazis, il fuit l'Allemagne en 1934 après avoir vu ses livres arrachés aux bibliothèques et brûlés publiquement (comme tant d'autres). Réfugié en France, du côté de Nice, il finit par se suicider en juin 1940, après la victoire de l'Allemagne sur l'armée française et l'annonce de la capitulation française.

À première vue, je l'ai dit, les poèmes brefs de la plaquette achetée aujourd'hui n'ont rien de très révolutionnaire... rien qui rappelle Trakl ou Heym, par exemple. Toutefois, il y a d'étranges poèmes de treize vers, de forme non fixe mais presque systématiquement dérivés de la forme sonnet. J'essaierai peut-être d'en traduire un ou deux, et, à coup sûr, d'écrire des sonnets-Jüngling (comme j'ai publié, ces derniers jours, trois sonnets-grands-lièvres*) : faut-il cependant les nommer sonnets ou treizains ?

Le nom de Hasenclever, aussi, est plutôt singulier, ou me semble tel. En tout cas, il pourrait donner lieu à un onzain de la série des Zézaiements.

Je me sens plutôt déprimé, en friche, ces temps-ci... On peut se raccrocher à peu, hein...

 

 

* Pas le temps d'expliquer ce qu'est la forme du sonnet-grand-lièvre. Voici en tout cas la liste des trois publiés à ce jour (seuls les deux derniers sont techniquement de véritables “grands lièvres”) :

  1. Qu'est-ce que ça veut dire 1
  2. Ta/Fou
  3. VCV

 

mardi, 12 avril 2016

Phallacieux podomètre

(J'hésite à écrire et publier ce qui suit — mais enfin, si le ridicule tuait, la moitié au moins des chroniques de ce blog et les trois-quarts de mes cours m'auraient déjà valu un foudroiement en bonne et due forme, donc autant ne pas s'arrêter en si bon chemin.)

Je signalais hier que je m'étais lancé dans un nouveau chantier d'écriture, les Élugubrations, série de textes parlécrits, c'est-à-dire dictés en marchant au smartphone (parlés en vue de les publier sous forme écrite). Comme je compte trouver un moyen de relier ces textes aux trajets qui les ont, non pas inspirés, mais encadrés, pour ainsi dire, j'ai également recours, depuis avant-hier, à un podomètre, dont j'ai voulu vérifier l'exactitude ce matin en allant acheter pains aux raisins, tresses chocolatées et palmiers à la boulangerie.

À l'aller, le smartphone était dans la poche de mon blouson, et il a calculé un trajet de 830 mètres. Au retour, j'ai dicté quelques paragraphes, sur une grosse moitié du chemin, et il en a conclu que l'itinéraire était de 1070 mètres. Or, il s'agit du même trajet, au pas près. J'en conclus que, selon que je laisse le smartphone au repos dans la poche du blouson ou que je l'agite plus ou moins en dictant un texte, l'application Pedometer ajoute ou retranche des pas. Après vérification dans Google Maps (et à supposer que ce site-là ne se trompe pas lui aussi), l'itinéraire fait 950 mètres... soit une distance exactement intermédiaire entre les deux calculées par l'application Pedometer !

Reste, le désir d'exactitude étant définitivement enterré, à régler la vraie question qui se pose à moi : comment faire aussi du podomètre un outil d'écriture ?

dimanche, 10 avril 2016

Du Panamiseur et du Singe

Un Homme panamait. On sait que cette erreur

Va souvent jusqu’à la fureur.

Celui-ci ne songeait que Suisse et Îles vierges.

Quand ces biens sont volés, je les tiens immoraux.

Pour sûreté de son auberge,

Notre filou plaçait ses fonds et ses coraux

Dans des fonds insoumis aux règlements fiscaux.

Là, d’une volupté assez cameronienne

— Ou, qui sait, cahuziste — il entassait toujours :

Il passait les nuits et les jours

À compter, exfiltrer, magouiller sans relâche,

Multipliant les boucliers comme à la tâche,

Dissimulant, carnassier, telle l'hyène.

 

Un gros Singe plus sage, à mon sens, que son maître,

Jetait quelque million toujours par la fenêtre

Pour un Euro sportif

Ou quelque présomptif

Été parisien voué à l'olympisme.

On comprend trop bien ce tropisme,

Mais un jour dom Michel (qu'on surnommait Platoche)

S'avisa de jouer double jeu : la valoche

Ajoutée au rusé panem et circenses.

L'effet s'en fit bientôt sentir, et son faciès

Se retrouve, par maints malheurs,

Avec celui d'autres fripouilles

À la une, faisant coasser les grenouilles,

Sous le nom peu glorieux de Panama Papers.

 

Dans le gouffre enrichi par notre déficit,

Que le peuple trouve relâche

Des malfrats de cet acabit

Avant que, par la nuit, debout, il ne se fâche !

 

Pour lire l'original de M. de La Fontaine

jeudi, 31 mars 2016

Rugby ○◙◘○ Rapports

La mascotte est peut-être un loup ou un chien bipède qui s'agite et se trémousse.

un instrument de cuivre très étrange, qui tient du piston, de l’ophicléide et du cor de chasse

Pas envie, depuis trois jours, d'abattre les besognes usuelles.

Les arbitres se nomment Hourquet et Castaignède.

Souvenirs des vendanges, des vignes, des vignobles, de la piquette que je ne goûtais pas (je n'avais pas onze ans).

Lann, en revenant de la carrière, rapportera une cruche toute pleine

Rabattre la balle en arrière par une passe trop appuyée, ce n'est jamais bon. On se retrouve fissa à encaisser un essai ; ça ne loupe pas.

Les envois en bout de ligne sont un peu téléphonés.

l’on commença à le regarder avec un certain épatement, comme on contemple un prestidigitateur capable de sortir des pigeons vivants d’un chapeau haut de forme ou trente petits drapeaux d’un œuf dur

La course du 10 italien en oblique a failli mal s'achever.

samedi, 12 mars 2016

Grand vingtième & terne système

Demain, cela fera un an que je commençais le projet Prison des tempos, un peu moins de deux ans après une autre série de textes visant à subvertir l'idée même de Printemps de poètes, Prime Time of Poesy. — Cette année, la manifestation officielle du Printemps des poètes célèbre « le grand XXe siècle, d'Apollinaire à Bonnefoy ». Tout dans ce titre est à côté de la plaque : l'idée de grandeur poétique ; l'idée que le vingtième siècle seul aurait agrandi l'univers poétique (que serait Apollinaire sans Baudelaire et Rimbaud ?) ; surtout, la primauté du lyrisme et de la poésie versifiée.

Qu'on ne se méprenne pas : j'admire beaucoup Apollinaire et Bonnefoy, que je lis assidument. Le problème n'est pas là, mais dans leur capture — leur embrigadement — leur embastillement par ces forcenés de la mignardise que sont, année après année, les organisateurs du Printemps des poètes.

Dès demain, je proposerai, sur l'autre blog, une série de sizains à métrique variable, antilyriques, dont le titre général sera Le terne XXIe (pour me moquer).

J'essaierai d'en écrire par jour jusqu'au 21 juin.

 

mardi, 01 mars 2016

3777 — Le point sur les chantiers

La majorité des rubriques de ce site (et de l'autre) sont un chantier perpétuel, jamais achevé. Toutefois, après soixante jours en 2016 — nulla dies sine linea, pour l'un comme pour l'autre —, je veux faire le point :

 

Il y a de nombreux projets que j'aimerais reprendre ou poursuivre, mais enfin, cela fait déjà un joli paquet.

Je propose, histoire de redynamiser la partie “Commentaires” de ce site, à tous les lecteurs (occasionnels, hein, je n'ai pas d'exigences) de voter pour les 3 chantiers sur lesquels je devrais, selon eux, me concentrer. Le vote peut être rédigé de manière télégraphique, par exemple : 1. Atlas 2. Untung 3. Farah.

jeudi, 21 janvier 2016

Illustre

Il te faudrait, m'écrit Madame de Véhesse, un dessinateur, un illustrateur. — Et d'ajouter : Un dessin par limerick et ça devrait rouler !

(Elle évoquait les Wikimericks, ou les Limericks du martyrologe.)

 

ll m'arrive de me dire, en effet, qu'on pourrait faire quelques recueils rigolos quoique passablement vains de certaines des rubriques accumulées ici (plus que , d'ailleurs, où l'activité, quoique intense, est devenue entièrement solitaire (mais pas solaire : saturnienne, presque plutonienne, même)).

 

Vains, voilà ce qui stoppe net toute velléité.

À quoi bon constituer des vanités.

Déposer ici, jour après jour, ces textes, ce n'est pas pareil. On se dit que c'est comme ça, c'est à peine publié — en général, ça n'attire ni attention ni réactions, ce qui est devenu, au fond, très reposant, très libérateur. Je continue pour moi. Et ça ne m'empêche pas, au contraire, d'écrire de plus en plus.

 

Aujourd'hui (enfin, il est une heure : hier), je me suis rendu compte, par un quasi hasard, que tout le monde était en train de rater le sesquicentennaire (dit-on ça en français ? en anglais, sesquicentennial est tout à fait banal) de la naissance de Richard Le Gallienne. Qui pense à lui ? à cet écrivain ? pas même moi, qui avais pourtant utilisé un de ses textes lors d'un séminaire de sémiotique, vers 2008. ———— Alors, qu'ai-je écrit sur Facebook ? Pénitence : traduire une page de RLG chaque semaine en 2016. Pourquoi pas ? Il y a plus idiot.

En tout cas, il naquit le 20 janvier 1866.

On a déjà raté sa célébration.

Comme le disait Breton de Saint-Pol Roux, cet illustre appartient à la caste de ceux qui « s'offrent le magnifique plaisir de se faire oublier ».

 

mardi, 12 janvier 2016

Autant de larcins

Il n’y a pas de très nette ou très bonne raison au choix du titre de cette série de textes, Larcins : paronymie du patronyme de Garcin, idée que mes petits textes sont comme des chourades à la dérobée, en lisant un écrivain à peine découvert, glissement vers une homophonie avec mon propre nom (Garcin → cin/Gar → CingaL < lar-cin).

 

Allons... c'est un beau mot... je ne peux m'y soustraire :

Allez donc ! Ce qu’ici vous perdez de moments

Sont autant de larcins à vos contentements ;

Et ce soir, destiné pour la cérémonie,

Fera voir pleinement si ma haine est finie.

(Cléopâtre, dans Rodogune, acte IV, scène III)

samedi, 05 décembre 2015

Petit poème überurbain

Ce n'est pas rien, hein, les amin-

Ches de se trim-

Baler un sapin

(Un Nordmann, je l'énonce bien)

À bout de bras 

De l'auvent sale et gla-

Cé à chez soi

Le gant droit de jardin

Oublié par ce con de Cin-

Gal à l'atelier, mâtin !

Après midi, pas le matin —

Rues grises, rongez le frein

D'appétits froids

Sur d'autres (encore) trottoi-

Rs.

 

 

mardi, 24 février 2015

Poésie du gérondif — Jean-Pierre Minaudier

Ce petit livre, publié en 2014 aux éditions du Tripode, je l'ai acheté par hasard chez mon libraire. Intrigué par la quatrième de couverture, qui indique que l'auteur – non pas linguiste mais “amateur de mots” – s'est armé de “ses quelque 1 186 grammaires concernant plus de 800 langues”, j'ai feuilleté cet essai d'un genre bien particulier, et été forcément séduit par les 137 différents proverbes ou phrases en 137 langues différentes qui ornent les marges de chacune des 137 pages de texte. Donc, je l'ai acheté, et me dois de préciser qu'après l'avoir lu, j'en ai acheté un deuxième exemplaire, à destination d'un ami, et en achèterai encore deux ou trois autres d'ici peu, car je vois tout à fait qui ce livre séduira.

 

Poésie du gérondif n'est pas un essai de linguistique ; c'est plutôt une sorte d'autoportrait d'un linguiste amateur, d'un fou de grammaires, d'un collectionneur d'exemples et d'ouvrages portant sur les langues les plus rares du monde. L'argument de Jean-Pierre Minaudier, si tant est qu'un livre aussi riche puisse se réduire à un seul argument, est qu'en côtoyant une grande multiplicité de langues on s'aperçoit que la thèse des générativistes relatives à une “grammaire universelle” ne tient pas debout, et que les particularismes grammaticaux des langues les plus éloignées de la souche indo-européenne correspondent à des “visions particulières”. Un de ses exemples, assez classique il est vrai, consiste à partir des différents sens du verbe eimi en grec et de leur importance dans la constitution de la métaphysique aristotélicienne, et à montrer comment une telle métaphysique dépend étroitement de la langue qui la fonde (ou l'a fondée) — p. 51 notamment. Autre point fort de cette démonstration, le développement sur les évidentiels en tariana (pp. 120-2). Syr la question des genres, ou sur celle des pronoms – toutes deux assez attendues à ce stade – Minaudier offre une pléthore d'exemples très parlants et très convaincants.


Ainsi, en vrac, le futunien a deux pronoms de première personne du singulier, l'acehnais n'a pas d'adjectifs, le motuni compte jusqu'à cinq genres différents qui ne distinguent pas des “genres” au sens où nous l'entendons (gender), les locuteurs murinyapata comptent dans une combinaison de base 2 et de base 5 (de sorte que leur mot pour dire “100” a soixante-dix syllabes), le kalam n'a pas d'autres voyelles que le schwa, etc.

 

Ce qui doit recommander, par-dessus tout, cet ouvrage est qu'il n'est jamais cuistre, toujours vibrant de passion, et surtout extrêmement drôle. Hyperbole, images cocasses, humour de répétition (avec le gag récurrent  au sujet des inestimables éditions De Gruyter & Mouton, qui s'achève en apothéose dans l'Épilogue et dans la note 100), la drôlerie est le signe d'une subjectivité omniprésente et délibérée. Cela signifie aussi que cet essai en forme d'autobiographie partielle n'est jamais neutre, de sorte que Minaudier s'y autorise des jugements sur l'espéranto “hideux et grotesque avec son look de patois latin dégénéré” (p. 19), non sans aboutir à des développements d'une profondeur et d'une concision admirables. Ainsi, je tiens la page 119 pour une des synthèses les plus claires et les plus abouties sur les questions de plurilinguisme et de traduction. (Je ne la cite pas – achetez le livre. Ou, si vous êtes de mes amis, attendez de voir si je vous l'offre.)

 

Pour conclure, et comme c'est aujourd'hui le 55ème jour de l'année 2015, laissez-moi citer la phrase marginale de la page 55, en fidjien (j'ai un peu triché, ou, en tout cas, ça tombe bien – la plupart des langues citées ont recours à des lettres, accents ou diacritiques que je ne saurais pas trouver sur mon clavier, même avec les raccourcis Alt) :

Au taaleita'ini i'o va'alevu ca'e ti'o mai ina veisiga.

Je t'aime chaque jour davantage.

dimanche, 04 janvier 2015

Treizain à chute (27.XII.2014)

le tanin des tristesses sur la langue 

un terreau plus friable 

dérouté par la tarentule du temps

(velue, ne tisse pas de toile)

 

le velours du sommeil dans la roue des journées 

autant de cristal que de tuf 

autant de brio que d'effroi

 

on se demande désormais 

ce que fut cette année 

engendrée au tamis de fleuves capricieux 

brassée d'azur et de grisaille 

 

grièvement désormais 

brasse

.

samedi, 03 janvier 2015

Douzain astérisqué

je n'ai pas d'âme

* rideaux de papier en volutes

lourde enclume du corps dansant *

 

dansons *** vous n'avez pas

le sens commun *** et moi

je n'ai pas d'âme

 

* -* cette légère bulle de *-* tulle

n'est que le souffle de *-* la bruine

(je n'ai)

* ce fleuve lourd qui pousse ses

marécages mais c'est mon sang *

(pa*s d'â*me)

.