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samedi, 28 septembre 2019

Red As A Rose Is She, I.5.

(Le projet.

Le texte du roman)

 

Il était une fois – j'aime bien cet incipit ancien, marqué du sceau du temps, car il donne les coudées franches et offre de la place pour y déployer ses ailes, n’attache l’histoire à aucun règne identifiable, ne l’enferme dans aucun siècle étouffant – il était une fois une vallée dans le pays des Taffies… et elle y est encore, à moins que quelque convulsion très récente l'ait hissée au sommet d'une montagne, ou submergée sous les grandes vagues de l'Atlantique… il était une fois, donc, une vallée plus belle que celle d'Ida, la vallée où « le beau Pâris, le méchant Pâris » faisait paître ses moutons et ses chèvres noires de jais, et se lançait dans ses menées néfastes... une vallée où il n'y a pas de Pâris à la beauté dangereuse, seulement un ou deux gentilhommes gallois, rouquins, qui ont épousé tous deux ou qui, avec le temps, épouseront tous deux une femme légitime, rouquine idem, très probablement… ni l’un ni l’autre n’a jamais fait, ni ne fera oncques la cour à la moindre Œnone ni à aucune autre jeune bergère dépravée. A la vérité, dans cette Arcadie, il n'y a pas de telles bergères : les filles des Cymri n’exercent pas « le métier de bergère », et, quand bien même ce serait le cas, ça n’aurait rien de bien romantique ; car, disons-le tout de go, même si cela nous chagrine, elles sont souvent débraillées, édentées, et elles ont les traits durs ; et puis les petits moutons maigres, agiles et efflanqués qui se bousculent, gambadent et se baladent sur les rochers et les pentes abruptes n'ont besoin ni de Jeannetons vicieuses ni  de Phyllis à la voix mélodieuse pour les surveiller et les guider dans le droit chemin.

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mercredi, 25 septembre 2019

Red As A Rose Is She, I.4.

(Le projet.

Le texte du roman)

 

Pourquoi continuer à m’épancher, tel un jet d’eau, sur les manières et le tempérament de cette nation, laquelle n’est, à mon avis, guère intéressante ? Il ne sert à rien que je continue de les « camplimonter », car les hommes et les femmes dont je vais vous parler, et que je veux que vous aimiez un peu, à moins que vous ne préfériez les détester un peu, selon le cas, ne sont pas des Taffies, mais ils se trouvent avoir planté leur tente au pays des Taffies, et c’est dans ce pays qu’ils vous salueront bien bas. Ces hommes et ces femmes n’étaient pas plus mal partis que tant d’autres, que ce soit pour la bonté, la beauté ou le talent ; chacun d’eux, sans exception, s’est livré à cent mille actions condamnables. Certains ont agi en toute impunité, en tout cas pour ce qui concerne la justice des hommes ; certains d'entre eux ont subi le fouet capricieux de Mégère et de Tisiphone, en châtiment de leurs écarts. Ce livre ne sera ni une Vie des Saints, ni une Démonologie ; ce ne sont ni les mémoires du brave capitaine Hedley Vicars, ni La Dame aux Camélias, de sorte que quiconque s’attend en salivant d’avance à l'un ou l’autre de ces deux styles peut immédiatement refermer ce volume, et le jeter – s’il lui appartient, bien sûr, mais pas si c’est un exemplaire usé emprunté à quelque bibliothèque ambulante – au feu. Ceux qui aiment une morale violente, ou une condamnation violente des péchés et des folies (un homme foudroyé pour avoir lancé un juron, ou une femme pour être allée à un bal, selon les voies de la Providence, ou du moins selon la version qu’en propose le Record), tout comme ceux qui ont le goût du déchaînement et du vice, tous seront déçus s’ils cherchent ici l’assouvissement de leurs goûts particuliers. De mes amis que vous allez bientôt rencontrer et que vous jaugerez, «  beaucoup demeurent parmi nous, mais il en est aussi qui se sont endormis ».

 

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mardi, 24 septembre 2019

Red As A Rose Is She, I.3.

(Le projet.

Le texte du roman)

 

Peut-être êtes-vous allé en voyage de noces à Llanberis, assis en haut d’une calèche lourdement chargée qui se déportait dangereusement dans les virages serrés, manquant de flanquer votre Angelina par terre en lui faisant mordre la dure poussière galloise. Peut-être avez-vous pleuré avec Angelina sur la fausse tombe du martyr Gelert, à moins que vous n’ayez découvert, en mangeant à belles dents de la truite rose au Capel Curig, que votre Angelina avait un solide coup de fourchette. Mais avez-vous déjà vécu au pays des Cymri ? avez-vous déjà vu de vos yeux l’étendue de l’ivresse des Gallois les jours de marché, ou la façon dont les Galloises se muent en vieilles sorcières vers leur trentième année ? Avez-vous déjà éprouvé la vérité des vers suivants :

« Taffy était gallois,
Taffy était un voleur »

Le Pays de Galles, j’y ai vécu, donc je sais de quoi je parle ; et pour ma part, je ne pense pas que Taffy soit beaucoup plus enclin à briser le huitième commandement que les canailles de tout autre pays. Non, Taffy n'est pas un homme brillant ; le plus heureux du monde, je pense, quand il a un coup dans le nez ou quand il crie des psaumes dans son conventicule ou dans son échoppe de schismatique, car le schisme lui tient à cœur… Il vous racontera pas mal de mensonges sans les assaisonner de cet esprit vif et désinvolte qui caractérise Pat. Par contre, il est très affable, et plutôt inoffensif ; son voisin qui vit de l’autre côté de la mer est plus dégourdi, mais plus enclin aussi à chaparder traîtreusement les cuillères de son prochain, ou à cogner son épouse avec le tisonnier. Taffy n’est pas comme ça.

 

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lundi, 23 septembre 2019

Red As A Rose Is She, I.2.

(Le projet.

Le texte du roman)

 

Êtes-vous déjà allé au Pays de Galles ? Si vous avez déjà visité ce beau pays vert et sale où prospèrent Patoche et son accent, les pommes de terre, l'absentéisme et les grands-maîtres, autrement dit l'Irlande, vous avez sans aucun doute traversé une partie du pays, très probablement à bord de la malle-poste ; mais dans ce cas, vos yeux, votre nez et vos oreilles étaient si pleins de poussière et de cendres, vous étiez tellement occupé à cligner des yeux, à tousser et à profiter pleinement de la poésie des cahots, que vous n’étiez pas du tout en mesure de voir, d'entendre ou de sentir les beautés, les bruits agréables ou les bonnes odeurs qui, dans des circonstances plus heureuses, se seraient offertes à votre attention. Peut-être avez-vous l'habitude, au milieu de l’été, d’aller promener votre famille d'olives verdâtres des deux sexes afin de remettre le rose à leurs grosses joues (douze, si je compte bien) au moyen de balades rugueuses du côté d’Orme’s Head, ou grâce à des fouilles en règle sur la plage de Rhyl.

 

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dimanche, 22 septembre 2019

Red As A Rose Is She, I.1.

(Le projet.

Le texte du roman)

 

    Êtes-vous déjà allé au Pays de Galles ? Je ne pose cette question à personne en particulier ; je m'adresse simplement à l’ensemble des Britanniques ou, plutôt, aux Britanniques qui auront la sagesse de lire calmement l'histoire d'amour vraie et émouvante qui va suivre ; elle est aussi vraie que les amours du méchant Abélard et de son Héloïse, aussi émouvante que celles du bon Paul et de sa Virginie. Ces sages lecteurs seront probablement peu nombreux ; on pourra les compter au nombre de quelques dizaines, peut-être même sur les doigts de la main : ils ne formeront pas, je gage, la majeure partie de la nation. Aussi élevée que puisse être l’estime en laquelle je tiens mes talents de narratrice, aussi grande soit l'estime de moi-même que m’a donné la Providence, je gage cela car les seuls livres à connaître une large diffusion sont le missel anglican et le Bradshaw. Je ne m’apprête pas à écrire un livre édifiant sur la religion ou sur les trains, alors autant me résoudre à un lectorat plus limité et entonner un air tout simple (quoiqu’un peu grinçant et désaccordé, peut-être), et autant remercier la fortune si ce lectorat limité ne me fait pas taire sous ses huées avant que j’aie atteint la septième strophe de cette vieille rengaine monotone.

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vendredi, 20 septembre 2019

#JeLaLis #ChallengeXIXe #JeLaTraduis : c'est parti

Connaissez-vous Rhoda Broughton ?

 

Il y a encore quelques semaines, je n'avais jamais entendu parler d'elle. Le hasard fait les choses, bien ou mal, on ne sait. Toujours est-il qu'on fêtera l'an prochain le centenaire de la mort de cette romancière prolifique.

 

Rhoda Broughton (1840-1920).

 

Pour commémorer ce centenaire, je m'étais mis en tête de lire un de ses romans, pourquoi pas celui dont on fêtera les 150 ans en cette même année 2020, Red As A Rose Is She (1870) ? Ce roman présente plusieurs intérêts, outre l'obsession arithmétique qui me l'a fait distinguer (centenaire, sesquicentennial, tout ça...) :

 

  • il fait partie des rares textes de son auteure qui soit disponible sur le Projet Gutenberg (il y en a beaucoup sur Internet Archive, mais IA est nettement moins commode).

 

  • son titre le rapproche d'une autre auteure à qui j'ai consacré récemment un projet #JeLaLis, à savoir Gertrude Stein.

 

  • son incipit, la seule chose que j'ai lue, est piquant.

 

  • 1870, l'année de la mort de Dickens, constitue aussi, à peu de temps près, le milieu du règne de Victoria

 

 

Ce matin, tôt, au cours d'une insomnie pas désagréable, j'ai appris que commençait aujourd'hui un autre projet collaboratif sur twitter et la blogosphère, le #ChallengeXIXe. Je vais donc entreprendre dès maintenant, à mes moments perdus, de lire/traduire simultanément le roman de Rhoda Broughton, en accompagnant chaque publication des 3 hashtags (ou mots-dièse si on veut tout franciser), et en ajoutant aussi sur Twitter le hashtag #Broughton2020. Pour ce qui est de la publication ici, sur ce blog, tous les billets seront regroupés dans une seule et même rubrique.

 

Il y aura peut-être aussi des vidéos. Nous verrons bien.

lundi, 02 septembre 2019

Le Président et l'ouragan (fable en limerick)

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