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vendredi, 02 septembre 2005

Kenny Werner : Beauty Secrets (1999)

J’ai entendu naguère, à l’occasion d’une diffusion télévisée d’un concert du Kenny Werner Trio, que ce pianiste était, par excellence, l’anti-Mehldau. Ce n’est pas une citation exacte, mais ce semblait être, dans tous les cas, un compliment de la part du journaliste, ce gros bonhomme moustachu et un peu loufdingue qui… enfin, bref… Si ces messieurs de la presse spécialisée me permettent cet outrage, j’aime beaucoup la musique des trios de Brad Mehldau et de Kenny Werner. Même, ces deux pianistes ne me paraissent pas si antipodalement éloignés. Ecoutant de nouveau, et pour la première fois depuis assez longtemps, l’album Beauty Secrets, je me retrouve sous le charme.

Un. Je m’imagine sous une pluie fine, avec un être aimé qui me dévisage ; la pluie redouble, me défigure, mais cette face aimée reste sèche, inaccessible ; je ne reconnais pas le standard.

Deux. Cordes, pulsations, legato. A cette écoute, la tavelure de mes mains s’estompe, mes bras retrouvent le lisse de leur enfance, et je cours dans le bois ; m’arrêtant soudain au martèlement lointain d’un pic épeiche mélancolique. Sarabande des brindilles. Danse des fougères. De la poussière. Saveur de ton agilité, pianiste. Volte des vergnes. Fin abrupte.

Trois. Secrets de [la] beauté, un rien de suavité en trop.

Quatre. Je dévale les escaliers. Une voisine m’arrête. Elle me tend un baril de lessive. je dévalise la voisine.

Cinq. Brydon at this instant tasted etc.

Six. Cuivre, tu ouvres un chemin parmi les ronces, pour qu’y folâtre le piano.

Sept. “His intimate adversary” s’avère une mélopée. Je me suis égaré dans une grange silencieuse, comme une chambre sans échos.

Huit. lancinance. je me revois descendant Banbury Road, aux larges trottoirs. L’an si lancinant, que je nommai, dans une chanson d’alors, mon année bizarre, me revient aux oreilles à l’instar d’une nappe de brume fouettée en plein visage.

Neuf. Petit à petit, je me sens envahi d’une torpeur qui se mue en un visage, le tien, toi anonyme dame blonde, au visage radieux de blondeur, qui me sourit, enivrante, de ce recoin d’un club de jazz où…

Dix. … mais c’est ta voix qui s’élève, était-ce prévu, ce chant soudain d’une jeune Anglaise splendide, qui juste avant m’avait souri? Send in the clouds, dis-tu ou crois-je entendre. Tu es si tourmentée soudain, est-ce la comédie du désespoir mimé. Non, toi, lancée ainsi, hallucinante, ne peux mentir.

Onze. Est-ce moi qui chante maintenant ? Je m’éveille d’un rêve. Gravis les marches du même escalier, tes yeux ravis, un étoile haut dans le ciel, tes yeux dérobés, a le sourire désespéré de la belle aux pommettes douces, tes yeux ravis, et aux hanches superbes, larges, tes yeux d’envie. Gravis, gravis. je m’arrête sur le palier. Lessivé.

Douze. C’est le pianiste (mais lequel? ils se sont multipliés brisés comme en un kaléidoscope) qui désormais murmure un poème, qui sonne dans une langue inventée. Piano, contrebasse et violon suaves lancinants.

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