mardi, 11 juin 2013
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Un jour, étant descendu du bus trois ou quatre arrêts avant la résidence Coppélia (grand ensemble blanc dont l’allure n’évoquait guère, contrairement à son nom, entrechats et pirouettes), je marchai, passai d’ailleurs devant une pharmacie un peu à l’écart, et que je n’avais jamais vue avant, même en observant le trajet depuis mon siège ou ma station debout, et composai in petto, ou en fredonnant discrètement, toute une chanson, dont le refrain, constitué du seul vers « Dans les rues de Bordeaux », devenait, à la fin, et répété ad lib. « Dans les rues de Talence ».
Le nom de la petite ville, tout autant que certains de ses quartiers ou certaines de ses rues, m’a toujours beaucoup plu : sept lettres, deux syllabes, un final mélancolique, des échos à la fois obscènes et chevaleresques, et cette attaque abrupte, brutale (TAL), qui en latin évoquerait la valeur ou l’analogie, tandis qu’en allemand on serait plutôt du côté de l’églogue, des riantes vallées de la pastorale. À l’époque, je me sentais pleinement exister dans cette petite ville, qui n’était pourtant pas du tout « mon lieu », et où, hormis étudier (c’est-à-dire travailler tard le soir à mon bureau, près des grandes baies donnant sur le balcon, mais aussi écrire) et prendre le bus, je ne faisais pas grand-chose de spectaculaire. La première année à Talence fut toutefois une des plus essentielles de ma formation, et si, bien entendu, cours ou rencontres, le drame se jouait à Bordeaux, il n’en demeure pas moins qu’il se cristallisait dans le studio de Coppélia, et donc que, le plus fort du sens se situant au terme, comme dans la chansonnette, l’année n’a valu que par les rues de Talence.
09:47 Publié dans À neuf les terres inondées | Lien permanent | Commentaires (1)
Commentaires
Un petit coup de nostalgie? :-)
Écrit par : Marie Hélène | mercredi, 12 juin 2013
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