Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

lundi, 11 mai 2020

La Pseudo-Phèdre, acte I, scènes II et III



La Pseudo-Phèdre

 

tragédie à moitié racinienne

et à moitié d'inspiration blanquéro-coronavirienne

 

[Les vers en noir sont de Racine et G. Cingal.

Les vers en rouge sont de Racine et Coraline Soulier.

Les vers en bleu sont de Racine et @angry_prof39.]

 

Acte I, Scène II

 

LA BARONNE, dite aussi ŒNONE.

Hélas ! seigneur, quel trouble au mien peut être égal ?

Nous voilà réécrits par le fourbe Cingal.

En vain à l’observer jour et nuit je m’attache,

Et je ne puis souffrir son humour de potache.

Un désordre éternel règne dans son esprit ;

Il ricane tout seul de ce qu'il a écrit.

Phèdre veut voir le jour : et sa douleur profonde

M'impose la javel, beaucoup nauséabonde.

Elle vient.

 

HIPPOLYTE.

Il suffit : je la laisse en ces lieux,

Et vais dans un EHPAD contaminer des vieux.

 

 

 

Acte I, Scène III

 

PHÈDRE.

N’allons point plus avant, demeurons, chère Œnone.

(Oui, c'est le surnom que je donne à Labaronne.)

Mes yeux sont éblouis du jour que je revoi,

Et ce confinement m'aura remplie d'effroi.

Hélas !

 

ŒNONE.

Dieux tout-puissants, que nos pleurs vous apaisent !

 

PHÈDRE.

Invoquons Saint Barbier, pour retrouver du pèze !

Quelle importune main, en formant tous ces nœuds,

De son écharpe rouge a l'attrait vénéneux ?

Tout m’afflige, me nuit, et conspire à me nuire,

Et même Darmanin me semble un dur à cuire.

 

ŒNONE.

Vous-même, condamnant vos injustes desseins,

Avez mandé Véran parmi vos médecins.

Vous-même, rappelant votre force première,

Avez repris vos galons d'ancienne infirmière.

Vous louvoyez, madame ; et, prête à vous cacher,

De Casa de Papel la fin divulgâcher !

 

PHÈDRE.

Noble et brillant auteur d’une triste famille,

Connaisseur du virion autant que du bacille,

Qui peut-être rougis du trouble où tu me vois,

Véran, je veux du gel pour la dernière fois !

 

ŒNONE.

Quoi ! vous ne perdrez point cette cruelle envie ?

Bien se laver les mains, souvent, cela suffit !

Faire de votre mort les funestes apprêts,

Pour quatre flacons de Sanytol égarés...

 

PHÈDRE.

Quand pourrai-je, au travers d’une noble poussière,

Ajouter à mon masque un casque et sa visière ?

 

ŒNONE.

Quoi, madame ?

 

PHÈDRE.

Insensée ! où suis-je ? et qu’ai-je dit ?

Serais-je, des vapeurs de l'armoise, étourdie ?

Je l’ai perdu ; les dieux m’en ont ravi l’usage :

J'ai confondu le gel avec l'après-rasage.

Je te laisse trop voir mes honteuses douleurs :

Confinée, mes rayons ne sont que des pâleurs.

 

ŒNONE.

Ah ! s’il vous faut rougir, rougissez d’un silence

Qui de Son-Forget seul exprime la violence.

Rebelle à tous nos soins, sourde à tous nos discours,

Placez dans la vaccin l'espoir et le secours !

Quelle fureur les borne au milieu de leur course,

Ces chimistes, tel Robinson et son chaource ?

Les ombres par trois fois ont obscurci les cieux :

Le tigre, enfourchez-le, et que tout aille au mieux.

Et le jour a trois fois chassé la nuit obscure

Tandis que vous parliez visière, gel et cure...

À quel affreux dessein vous laissez-vous tenter ?

Qui a croqué Messi ? C'est N'Golo Kanté !

Vous offensez les dieux auteurs de votre vie ;

Ce désespoir total, rien ne le justifie.

Vous trahissez enfin vos enfants malheureux,

Pressés d'aller, masqués, faire "areuh-areuh".

Songez qu’un même jour leur ravira leur mère

Et donnera sa force à nos gestes barrière !

Ah ce fier ennemi de vous, de votre sang,

Qui de la ratatouille aime le goût puissant,

Cet Hippolyte…

 

PHÈDRE.

Ah ! dieux !

 

ŒNONE.

Ce reproche vous touche ?

 

PHÈDRE.

Certes, je lui mettrais bien une cartouche.

 

ŒNONE.

Eh bien ! votre colère éclate avec raison,

Mais citer "La cartouche" est un brin polisson.

Vivez donc : que l’amour, le devoir vous excite.

De Sébastien Patoche, ah ! fuyez l'explicite !

Accablant vos enfants d’un empire odieux,

Ne laissez point Blanquère être éjoui et radieux.

Mais ne différez point ; chaque moment vous tue :

Khauvide, s'il est lièvre, a tout de la tortue,

Tandis que de vos jours prêts à se consumer

Il faut s'en remettre aux drones de Castaner.

 

PHÈDRE.

J’en ai trop prolongé la coupable durée.

 

ŒNONE.

Plutôt que de l'armoise, avalez de l'urée.

Quel crime a pu produire un trouble si pressant ?

As-tu déconfiné de pauvres innocents ?

 

PHÈDRE

Grâces au ciel mes mains ne sont point criminelles :

Je n'ai pas réouvert les cours des maternelles.

 

ŒNONE.

Et quel affreux projet avez-vous enfanté

Dont votre élève encor doive être épouvanté ?

 

PHÈDRE

Je t’en ai dit assez : épargne-moi le reste.

Je meurs, pour ne point porter un masque funeste.

 

ŒNONE.

Mourez donc, et gardez un silence inhumain ;

Pour fermer vos bahuts cherchez une autre main.

Quoiqu’il vous reste à peine une faible lumière,

Vous éclairez plus que le sinistre Blanquère ;

Mille chemins ouverts y conduisent toujours,

Et sans fin des médias il choisit les plus lourds.

Cruelle ! quand ma foi vous a-t-elle déçue ?

Songez-vous qu’au B.O. nous n'avons rien reçu ?

Mon pays, mes enfants, pour vous j’ai tout quitté.

Mais une bonne mut' est-ce trop demander ?

 

PHÈDRE

Quel fruit espères-tu de tant de violence ?

Castaner nous contraint en cette Île-de-France.

 

ŒNONE.

Et que me direz-vous qui ne cède, grands dieux,

À l’horreur des oraux de français en tous lieux ?

 

PHÈDRE.

Quand tu sauras mon crime et le sort qui m’accable,

Comme dans le métro tu vas péter un câble.

 

ŒNONE.

Madame, au nom des pleurs que pour vous j’ai versés,

Ne songez point aux trams, ni aux bus encombrés.

Délivrez mon esprit de ce funeste doute.

 

PHÈDRE.

Pour vaincre le scorbut...

 

ŒNONE.

... il faut de la choucroute...

 

PHÈDRE.

Ciel ! que lui vais-je dire ? et par où commencer ?

 

ŒNONE.

Il voyage en solitaire ? C'est de Manset.

 

PHÈDRE.

Ô haine de Vénus ! ô fatale colère !

Rien d'un peu récent n'est toléré par Blanquère.

 

ŒNONE.

Oublions-les, madame ; et qu’à tout l’avenir

Le cheval enfourche le tigre sans hennir.

 

PHÈDRE.

Ariane, ma sœur ! de quel amour blessée

Avez vous dépouillé de gel tous les WC ?

 

ŒNONE.

Que faites-vous, madame ? et quel mortel ennui

Vous fait regretter le Sanytol en feng-shui ?

 

PHÈDRE.

Puisque Macron le veut, de ce sang déplorable,

Refusons au pays le testing secourable.

 

ŒNONE. Aimez-vous ?

 

PHÈDRE.

De l’amour j’ai toutes les fureurs.

Aucun masque n'est apte à retenir mes pleurs.

J’aime… À ce nom fatal, je tremble, je frissonne

Plus que la pangoline et mieux que l'hérissonne !

Ce prince si longtemps par moi-même opprimé

Et dont le nom avec le zgègue aura rimé.

 

ŒNONE.

Juste ciel ! tout mon sang dans mes veines se glace !

La rime à "Hippolyte" eut-elle autant d'audace ?

Voyage infortuné ! Rivage malheureux !

Dans le métro partout quel flot malencontreux !

 

PHÈDRE.

Mon mal vient de plus loin. À peine au fils d’Égée

Eus-je de Kaletra offert une gorgée

Mon repos, mon bonheur semblait être affermi,

Jusques à Sibeth qui ne mentait qu'à demi !

Je le vis, je rougis, je pâlis à sa vue,

Plus doux que de Raoult la tignasse touffue.

Mes yeux ne voyaient plus, je ne pouvais parler,

Pas même au micro de Bourdin, sur RMC.

Je reconnus Vénus et ses feux redoutables,

Sans prendre de Ferrand aucun dessous-de-table.

Par des vœux assidus je crus les détourner

Et même à Mediapart je faillis me confier.

De victimes moi-même à toute heure entourée,

Pour des masques gratuits risquant l'échauffourée.

D’un incurable amour remèdes impuissants !

Plus de chiens promenés, plus de Zooms languissants !

Quand ma bouche implorait le nom de la déesse

Borne, je connaissais le métro pince-fesse.

Même au pied des autels que je faisais fumer,

La cocaïne était fournie par Son-Forger.

Je l’évitais partout. Ô comble de misère !

Qu'il dût retourner au bahut : maudit Blanquère !

Contre moi-même enfin j’osai me révolter

Et je voulus aller les fraises récolter.

Pour bannir l’ennemi dont j’étais idolâtre,

Je matais les photos de Macron au théâtre.

Je pressai son exil ; et mes cris éternels

Ne purent éveiller ni Bouhafs ni Plenels.

Je respirais, Œnone ; et, depuis son absence,

Plus de tramway bondé ni de pompe à essence.

Soumise à mon époux, et cachant mes ennuis,

Je rêvais de Griveaux, de ses dickpics enfuis.

Vaines précautions ! Cruelle destinée !

Malgré Pornhub Premium mon âme est confinée.

J’ai revu l’ennemi que j’avais éloigné :

Applaudir les soignants ne m'aura pas soignée.

Ce n’est plus une ardeur dans mes veines cachée,

Ni ce Houlié dont je me crus amourachée.

J’ai conçu pour mon crime une juste terreur ;

Khauvide m'a donné le futur en horreur.

Je voulais en mourant prendre soin de ma gloire,

Et aux intermittents donner fromage et poire.

Je n’ai pu soutenir tes larmes, tes combats,

Et qui sait si Vidal un jour reparaîtra.

Pourvu que, de ma mort respectant les approches,

On rouvre les bistrots et aussi les cinoches,

Et que tes vains secours cessent de rappeler

Les conseils qu'Aphatie ne peut que marteler.

 

Les commentaires sont fermés.