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lundi, 24 juillet 2023

24072023 - mais que lisait la grand-mère de Henry James ?

Et nous voici, le lendemain, et je n’ai pas écrit une ligne de plus. Qu’ai-je fait ? eh bien, j’ai glandouillé : lu des articles du Guardian, attendu de voir si le 5e et dernier jour du 4e test-match entre l’Angleterre et l’Australie allait reprendre, avancé dans le livre de Bill Bryson que je lis en parallèle du dernier Soyinka (expérience assez discontinue), préparé les cadeaux pour ma mère (c’est son anniversaire aujourd’hui – nous le fêterons demain avec elle), vaguement fait la sieste, relu en famille les journaux de voyage écrits par O* puis C* depuis 2014, téléversé sur Flickr les dernières photos et fait un peu de tri dans tout ça, regardé le dernier film de Dupieux à la télé… J’ai aussi préparé ma valise, dans laquelle je n’ai mis que cinq livres, je crois, et pas même celui que je dois commencer à traduire : je sais que je n’y toucherai pas, donc autant assumer les vacances.

Oxburgh Hall, Oxborough - demeure de la famille des barons de Bedingfeld depuis le XVIe - 19 juillet 2023     Hier, en regardant les photos du 19 (et donc d'Oxburgh Hall notamment), j’ai voulu vérifier ce qu’était A Small Boy and Others de Henry James, et il s’avère que c’est un de ses deux livres autobiographiques, écrit fort tard (1913, je crois). Mais combien a-t-il écrit ? J’ai l’impression d’avoir lu beaucoup de Henry James, pas loin de dix romans, les journaux de voyage, beaucoup de nouvelles, et je découvre encore des titres inconnus de moi… !

J’ai lu le premier chapitre de ce Small Boy and Others (le titre est vraiment étrange), et quand il parle des goûts littéraires de sa grand-mère, il ne parle que d’autrices dont il dit qu’elles sont oubliées, plus du tout lues. Voici la liste :

What she liked, dear gentle lady of many cares and anxieties, was the "fiction of the day," the novels, at that time promptly pirated, of Mrs. Trollope and Mrs. Gore, of Mrs. Marsh, Mrs. Hubback and the Misses Kavanagh and Aguilar, whose very names are forgotten now, but which used to drive her away to quiet corners whence her figure comes back to me bent forward on a table with the book held out at a distance and a tall single candle placed, apparently not at all to her discomfort, in that age of sparer and braver habits, straight between the page and her eyes.

 

Ce serait mal me connaître que de penser que je ne suis pas allé vérifier chacune de ces autrices grâce à Wikipédia (oui, j’avoue que je n’ai pas eu le courage de creuser sur la Britannica ni de me connecter à la base Oxford Reference), et j’ai notamment découvert que Mrs Trollope (1779-1863) était bien la mère d’Anthony Trollope (et que nombre de ses livres semblent encore d’un grand intérêt aujourd’hui, à commencer par Jonathan Jefferson Whitlaw, que WP présente comme le premier roman abolitionniste, ce qui me semble étrange) ; que Catherine Hubback (1818-1877), nièce de Jane Austen, a écrit dans l’ombre spectrale de sa tante (qu’elle n’a jamais connue), au point d’écrire son premier roman, The Younger Sister, à partir d’un synopsis de cette dernière et dans un style très imité aussi, autant que je puisse en juger après un survol, d’icelle ; que Grace Aguilar (1816-1847) est surtout connue pour ses poèmes et essais sur la religion et la tradition juives ; que Julia Kavanagh (1824-1877 – tiens, on fêtera le bicentenaire de sa naissance l’année prochaine), romancière irlandaise, a été suffisamment connue de son vivant pour que plusieurs de ses romans soient traduits en français, en allemand, en suédois, en italien, et que la critique contemporaine la redécouvre avec un intérêt prononcé pour les éléments protoféministes de ses romans (le Projet Gutenberg a peu de textes d’elle, et Internet Archive en a beaucoup, mais à chaque fois en 3 volumes dont l’ordre n’est pas indiqué dans la miniature, de sorte que c’est le bazar pour s’y retrouver).

Vous me direz que j’oublie Mrs Gore (Catherine, 1798-1861) et Mrs Marsh (Anne Marsh-Caldwell, 1791-1874 – tiens, on fêtera l’année prochaine le sesquicentennial de sa mort), mais assez pour aujourd’hui. Je noterai seulement qu’il est difficile de savoir si Henry James, hardly the feminist, décourage ici son lectorat de s’intéresser à ces écrivaines en les balayant d’un revers de la main, ou si le seul fait de les avoir énumérées permet à des olibrius dans mon genre de se dire : tiens, et si j’allais creuser un peu tout cela ? Les deux, évidemment.

À l’heure où les questions de canon et de postérité, d’invisibilisation et de marginalisation, occupent, heureusement, le centre des débats (et je recommande notamment la lecture d’Autrices invisibilisées de Julien Marsay ainsi que de suivre le compte Twitter), cette petite recherche m’a une fois encore montré que, même dans les Îles britanniques, qui ont toujours mis au premier plan Jane Austen, Mary Shelley, George Eliot, Elizabeth Gaskell, Christina Rossetti et Elizabeth Barrett Browning, il y a des foultitudes d’écrivaines marginalisées ou invisibilisées, comme l’excellente Mary Elizabeth Braddon dont j’ai lu plusieurs romans ces dernières années, ou encore Rhoda Broughton.

 

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