samedi, 07 juin 2025
07062025
Au cours de cette journée passée au festival Etonnants voyageurs, j’ai été frappé par ce qui n’est pas une coïncidence. Lors d’une table ronde réunissant Ananda Devi, Vidya Narine et la romancière brésilienne Eliana Alves Cruz dont j’ai commencé à lire le seul roman traduit hier, Ananda Devi a évoqué Mahé de la Bourdonnais, dont plusieurs toponymes soulignent l’héritage (extrêmement douteux pourtant) sur l’île Maurice. Or, le matin même nous étions passés, en nous rendant de l’appartement que nous louons à la cité intra muros, près de la statue de Mahé de la Bourdonnais. Ananda Devi a insisté sur le fait que les esclavisés, les engagés, tous les opprimés du système colonialiste étaient absents des toponymes, qu’ils n’avaient pas de nom.
J’ai repensé au fait que, dans les toutes premières pages du roman d’Eliana Alves Cruz, elle évoque le rôle de Duguay-Trouin dans les luttes entre forces coloniales à Rio de Janeiro : de façon tout à fait ironique, le Palais du Grand Large, où se déroulait la rencontre, se trouve quai Duguay-Trouin. Le grand écrivain malgache Johary Ravaloson, assis à côté de moi – et qui a passé un mois et demi en Inde ce printemps, à l’invitation des Alliances françaises – m’a soufflé que cet amiral avait également joué un rôle important à Pondichéry.
Il n’y a pas de coïncidence : Saint-Malo est un port, et comme tous les grands ports historiques, chaque rue, chaque place célèbre des figures de l’expansionnisme européen, en effaçant les crimes contre l’humanité auxquels ces figures ont participé.
Olivette Otele a annoncé cette semaine qu’elle avait achevé d’écrire son livre Doorways to Empires. 15 Ports that Made Empires through Slavery, qui devrait être publié en 2026 et qu’il me tarde de lire.
21:32 Publié dans 2025, Hors Touraine | Lien permanent | Commentaires (0)