lundi, 20 juin 2005
Réponse douce à Fuligineuse
Fuligineuse écrit que l'écriture du blog a certainement supplanté, pour moi comme pour d'autres fêlés (au rang desquelles elle se compte, je suppose), la plupart des autres activités.
Pas vraiment. En fait, l'écriture ne me prend pas tant de temps que ça, et cela se ressent sans doute dans mon style pas toujours assez retravaillé.
Je voulais justement ajouter une note ce soir, avant d'aller me coucher, pour raconter comment, ayant lu plusieurs chapitres de Du lyrisme, que je croyais avoir fini de lire mais que j'avais en fait délaissé à la salle de jeux, un après-midi de lassitude (physique, rien à voir avec un quelconque désaveu de mon J2M à moi), j'avais finalement changé de cap, lisant les premières pages de Purple Hibiscus (il serait temps...). C'est alors, après une dizaine de pages, que j'eus une conversation avec ma voisine de lit, qui me faisait remarquer les citations relatives à la masturbation qui accompagnaient l'article du Magazine littéraire consacré à l'ouvrage de Thomas Laqueur, Le sexe en solitaire, que toute l'intelligentsia française, ou ce qui passe pour tel, découvre cette année à l'occasion de sa traduction. Bref, relisant la citation de Montaigne et la trouvant curieusement tronquée, je fonce à la bibliothèque, me saisis du Garnier jaune, me mets à chercher le passage en question, qui se trouve, pour comble de malchance, dans l'Apologie de Raimond Sebond, le plus long des Essais (II, XII). L'ayant trouvé, je m'arrête aux pages circumvoisines avant de me perdre avec délices, allongé sur le lit de la chambre aux corbeaux, dans les premières pages de cet essai, si fortement réputé que je ne l'ai jamais lu, c'est tout dire.
Puis, m'avisant que je devais aussi mettre le rez-de-chaussée (pas d'inquiétude, je vous donnerai un plan de la maison some day) à aérer, je descends, lance l'ordinateur où, compulsivement, je vérifie la fréquentation et la tenue de mon carnétoile, lequel, c'est vrai, commence tout de même à m'envahir l'existence, et c'est en quoi, finalement, chère Fuligineuse, contre toute attente et au rebours de mes précautions oratoires liminaires, je vous donne entièrement raison.
23:00 Publié dans Ecrit(o)ures, Flèche inversée vers les carnétoiles, Lect(o)ures, Moments de Tours | Lien permanent | Commentaires (1)
Mai 2002 : premières heures arrachées à Tours
J’étais bien venu, plus jeune, à Tours, et même en Touraine. Mais c’est de ce lundi de mai, lendemain du second tour de l’élection présidentielle, que je date le début de ma vie tourangelle. J’étais venu, pour quelques heures à peine, le temps de participer aux auditions de la Commission de Spécialistes pour le poste de maître de conférences en Littérature anglaise du 20ème siècle.
Ce que j’ai vu de Tours, c’est donc, surtout, l’université. Mais, entre la gare et la rue des Tanneurs, j’avais pu, considérablement alourdi par le poids du sac où gisait l’exemplaire de ma thèse que m’avait remis la présidente de la Commission de Spécialistes de Bordeaux-III le matin même (cela s’appelle, en jargon universitaire, le marathon des auditions), admirer le chemin qui passe par la rue de Bordeaux, la place Jean-Jaurès, éblouissante de soleil et de classicisme offert, la rue Nationale.
J’ai dû bifurquer à un moment donné, car je ne me rappelle pas avoir remonté la rue Nationale tout du long. Et j’ai vu un peu du vieux Tours, dont me sont restées en mémoire les façades de la place Plumereau, évidemment (je doute d’être un touriste original, et, par l’impression d’une demi-heure ou une heure tout au plus de vadrouille, pouvait-il en être autrement ?). Toujours est-il que j’ai été très favorablement impressionné par la ville, ce qui n’a pas dû compter pour rien dans ma grande satisfaction, le soir même vers dix heures, d’apprendre, à Montrouge par où je transitais, que j’avais été classé premier sur le poste.
La gare est très belle. Je ne parle pas de l’affreux conglomérat détestable de Saint-Pierre des Corps, ville pour l’essentiel à éviter, calme bloc stalinien chu d’un désastre obscur. La gare de Tours n’a pas grand chose à envier, en terme d’architecture de la seconde moitié du 19ème siècle, à ses grandes sœurs parisiennes. Même les équipements modernes y sont assez agréablement joints, ce qui n’est pas le cas de la rue de Bordeaux, où se voit l’étalage des devantures les plus hideuses qui soient.
Ce jour de mai, je n’avais pas vu la plaque apposée sur le mur de la maison natale de Balzac, ou plutôt, à l’endroit où se trouvait celle-ci, car la quasi totalité de la rue Nationale a été reconstruite, avec un bonheur inégal, dans les années 1950-60.
Ce jour de mai, m’étais-je égaré par l’une des petites placettes qui ponctuent le vieux Tours ? Il me semble que oui, mais laquelle ?
Ah, j’ajoute ceci avant de clore cette note : m’étant rendu compte que deux de mes fidèles lecteurs, Irène et Arbor, habitent rue de Bordeaux, je veux marquer ici combien leur amitié m’est chère et combien je la dissocie de ma remarque atrabilaire à l’endroit de la chaude rue bétonnée. Ce n’est pas le moment de perdre des abonnés, comme on dit dans les conférences de rédaction de L’Humanité.
19:45 Publié dans Moments de Tours | Lien permanent | Commentaires (3)
Place Jean-Jaurès
Je viens d’allumer mon ordinateur, m’interrompant dans la longue théorie des copies de littérature truffées de fautes et d’inepties (la session « de rattrapage » n’est pas seulement un piège pour les étudiants, qu’elle dessert grandement, quoi qu’en disent les syndicalistes étudiants qui la défendent becs et ongles contre toute logique, c’est aussi à s’arracher les cheveux), et l’objectif de ce transport vers le clavier était de vérifier un document qui doit me permettre de corriger un autre paquet de copies. Assez curieusement, mes doigts se sont dirigés tout seuls vers le fichier TOURAINE SEREINE, où j’écris celles des notes que je ne rédige pas directement en ligne ; allez comprendre cette décision dont je n’assume en rien la responsabilité, il va sans dire…
Avant de poursuivre, il semble indispensable d’annoncer que ce qui suit sera bassement prosaïque et qu’il n’y sera, une fois encore, pas question de la Touraine, ni, je le crains, de ma sérénité.
(Et, précision pour précision, pourquoi ne crée-je pas plusieurs catégories dans lesquelles j’enregistrerais mes différentes notes en fonction de leur thématique : journal intime, topographie, enseignement, musique, lectures ? L’une des réponses pourrait bien être que, quoique féru d’ordre dans mon métier, j’aime assez ce caractère empilé, chaotique et, pour tout dire, bordélique, du carnétoile.)
***
Ultime parenthèse avant de poursuivre. La définition de clinomania dans le remarquable et hilarantissime livre de Peter Bowler, The Superior Person’s Third Book of Words, est (je cite de mémoire) :
Excessive desire to stay in bed. Not a bad mania, as manias go, and a reasonably plausible excuse to take Mondays off.
Traduction sur demande.
***
Me suis dispensé d’aller à la faculté ce matin, comme rien ne m’y oblige, fors mon immense désir altruiste (ou masochiste ?) de faire avancer le bien commun, et surtout comme je ne me sens pas du tout rétabli de mon gros coup de fatigue. En fait, j’ai toujours aussi peu d’appétit, et je viens déjeuner d’un demi-melon et d’un petit suisse.
(Rassurons les visiteurs médecins qui s’apprêteraient, fort bien-intentionnément, à m’écrire : mon dérapage physique de ces deux derniers jours n’a rien à voir avec des difficultés d’ordre gastrique ou gastro-entérique, qu’un tel menu ne manquerait pas d’aggraver, assurément.)
Nul risque de clinomanie, pourtant, puisque je ne me suis pas recouché depuis 6 h 40. C. est partie à sept heures vingt interroger les lycéens au lycée Jean-Monnet pour le bac de français. J’ai amené A. à l’école, et me suis affairé à domicile.
Ayant des courriers plutôt urgents à faire affranchir, je suis toutefois sorti ce matin, vers onze heures, poussant jusqu’à La Poste du boulevard Béranger, où il est plus facile d’escroquer le service postal qu’à Sainte-Radegonde. Je m’explique : si vous avez à poster un petit colis, c’est-à-dire tout pli, même du format d’une petite lettre, qui contient autre chose que des feuilles de papier, vous ne pourrez recourir au tarif lettre, qui est pourtant moins cher. Cette pratique, récemment mise en place par La Poste et fort assidûment mise en pratique par plusieurs guichetiers de ma connaissance, me paraît inique, donc, en bon Français, j’esquive. Si l’on connaît le montant de l’affranchissement au tarif lettre, pas besoin de s’ouvrir du problème au guichet. Mais, dans mon cas, ce matin, je ne connaissais aucun des tarifs, et il me fallait donc une borne d’affranchissement automatique. Ce qui fut fait, et me permit, même si ce n’était pas à pied, d’admirer une fois encore la place Jean-Jaurès sous le soleil, son jet d’eau qu’un jour lointain de juin 2003, je filmai, sa perspective classique, la façade très réussie (surtout si l’on considère qu’il date du début du 20ème siècle) de l’hôtel de ville.
Tours resplendit sous le soleil, surtout de ce côté-là, largement ouvert. La place Jean-Jaurès constitue un carrefour très haussmannien, où se croisent à angle droit la rue Nationale et l’avenue Grammont (qui la prolonge vers le sud), le boulevard Heurteloup et le boulevard Béranger (qui le prolonge à l’ouest). Je ne suis pas certain de ne pas écrire ici une sottise sur l’endroit exact où débute chacun des deux boulevards.
Il y avait ce matin, une manifestation d’employés de Gaz de France qui s’apprêtait à prendre le départ et, je suppute, à bloquer le trafic. Le Marathon n’a qu’à bien se tenir ; ils étaient bien une quinzaine (donc trois selon la police, supputé-je toujours, selon la loi arithmétique).
En écoute : Ha Po Zamani de Miriam Makeba.
13:30 Publié dans Moments de Tours | Lien permanent | Commentaires (2)