dimanche, 14 août 2005
Javier Tomeo, versant traduction
Traduire est merveilleux, lire des traductions est indispensable ou inévitable. Mais qu’il est frustrant de se sentir pieds et poings liés en lisant ce qui semble être une mauvaise traduction. Ainsi, des Histoires naturelles de Javier Tomeo, que je lis en ce moment, dans une traduction de Denise Laroutis, au demeurant passeuse attitrée de cet Espagnol.
D’emblée, pourquoi traduire ce Bestiario par un doublon de l’œuvre de Jules Renard? La parenté littéraire et intellectuelle n’est pas nette, à moins de vouloir attirer à tout prix un lectorat francophone.
Et encore, c’est le seul mot d’espagnol dont l’on retrouve la trace. Pour le reste, seuls les mots de la traductrice nous sont offerts. Et, dois-je le dire, ce français-là est bien douteux. Mais, comme je n’ai pas le texte espagnol à ma disposition (et comme, de surcroît, je n’ai pas non plus une véritable connaissance de la langue espagnole dans mon bagage), le doute subsiste.
Ainsi, dans le texte intitulé “Les Pucerons”, la phrase suivante, en début du dernier paragraphe: «Nous sommes trop, nous savons nous reproduire, là réside notre force.» (Corti, 1993, p.40). Le contexte semble indiquer un sens voisin de “nous sommes trop nombreux”. Nous sommes trop n’a pas de sens, en français, à moins de sombrer dans la langue la plus familière et la plus négligée, ou de ressusciter les mânes de l’oublié Collaro (“ce mec est too much, ce mec est trop” (bon, on a les citations qu’on mérite)). Mais peut-être, se dit-on, cette faute, ou cet effet de style, est-elle/il dans le texte d’origine, et la traductrice fait preuve d’une grande habileté…
Autre phrase incorrecte, sans qu’il soit possible de trancher : «Mais j’avais à peine quatre semaines que je m’aperçus qu’il y avait en moi quelque chose qui me différenciait d’elles.» (“L’abeille”, in Histoires naturelles, Corti, 1993, p.60).
J’avais dans l’idée, au moment de créer ce carnet de toile, de le consacrer, non à la Touraine ou à mes diverses divagations, mais à la question de la traduction. Peu original, mais ouvert à de riches perspectives. Vous voyez, avec cette note, à quoi vous avez échappé…
14:27 Publié dans Lect(o)ures | Lien permanent | Commentaires (0)
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