jeudi, 31 mai 2007
Journées dionysiennes, [18]
2 mai 2007, huit heures et demie du soir.
Voilà une journée bien morne. Je suis sorti de la Maison de la Légion d’Honneur, un bâtiment certes admirable dans le style « austérité classique » de l’Empire, avec ses carrés cloîtrés, ses pelouses et ses jeunes filles en uniforme, mais où les salles ont une acoustique déplorable et où j’ai une fois encore trouvé la plupart des collègues d’une grande lenteur : nous poursuivrons nos travaux demain matin, mais nous aurions pu tout boucler en une journée, à condition d’y mettre un peu plus de rythme et de ne pas toujours couper les cheveux en quatre. Entre six et sept heures et demie, je me suis promené, histoire de fatiguer la bête, puis j’ai dîné – fort bien – dans un restaurant anatolien ; même le vin rouge était bon. Bref, je dois encore corriger deux copies ce soir afin de préparer la séance de demain : chacun des 17 membres du jury de littérature corrige les mêmes copies, à titre d’essai et afin de comparer nos évaluations. Jusqu’à présent, il n’y a pas eu plus de trois points d’écart, ce qui, si on considère qu’il y a double correction, assure une grande harmonie dans la notation.
La présentation du sujet et des différentes pistes de commentaire était à la limite du navrant. [...] Le plus étonnant c’est la manière dont les tenants de lectures monologiques, entièrement cohérentes – même dans le cas de textes évidemment couturés d’ambiguïté, de polysémie et même de contradictions – réussissent à vernir leur vieux discours cent fois rabâché (on a tout de même entendu évoquer le « message de l’auteur », pour un texte dans lequel il n’y a ni intrusion d’auteur, ni message univoque) de petits replâtrages : un p’tit coup de polyphonie par ci, un p’tit coup de dialogisme bakhtinien par là, ça ne fait pas de mal et ça fait moderne… Heureusement que beaucoup de candidats (et la plupart des collègues du jury, évidemment) valent mieux que cela ! [...]
On s’étonnera, après ça, que je me sois piqué la tête au vin rouge turc et que j’aie moins envie de regarder le débat entre Nicolas Sarkozy et Ségolène Royal que la deuxième demi-finale de football !
(Je viens de m’apercevoir, en allant ouvrir les rideaux pour pouvoir corriger les deux copies photocopiées à la lumière du jour, qu’il y avait un store à lanière : je suis si habitué aux chambres d’hôtel baignées d’une demi-lumière même au cœur de la nuit que je n’avais même pas assombri celle-ci la nuit dernière !)
08:30 Publié dans Hors Touraine | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : Photographie
Commentaires
"Le plus étonnant c’est la manière dont les tenants de lectures monologiques, entièrement cohérentes réussissent à vernir leur vieux discours cent fois rabâché de petits replâtrages : un p’tit coup de polyphonie par ci, un p’tit coup de dialogisme bakhtinien par là, ça ne fait pas de mal et ça fait moderne" :
Oh, s'il te plaît, un ou deux exemples, que je sois sûre de bien saisir (et puis je pressens que ça doit être amusant en plus d'être instructif).
Écrit par : VS | jeudi, 31 mai 2007
Sans commentaire...
Écrit par : Saint-Denis | jeudi, 31 mai 2007
Les commentaires sont fermés.