dimanche, 24 mars 2013
Thème d'Agrégation (Djian)
Je viens de traduire en 33 minutes le sujet de thème proposé aux agrégatifs de la session 2013 avant-hier. (Non, pas trouvé mieux pour me gâcher le dimanche.)
Vous trouverez ICI le sujet, et LÀ ma proposition. Comme le thème n'est pas mon point fort, et comme je n'ai pas fait de vérification (à part pour confirmer qu'il n'y avait pas de solution miracle inconnue pour des éléments lexicaux comme pruneau d'Agen ou tomate cœur-de-bœuf – je m'en suis donc tenu à mes quelques approximations de départ), il va de soi que cette proposition ne me vaudrait pas nécessairement une excellente note.
Par ailleurs, je ne suis plus membre du jury.
Ce n'est donc aucunement un corrigé officiel. Disons que c'est une proposition vraisemblable de ce que peut faire un (plutôt bon, on l'espère) candidat.
10:30 Publié dans WAW | Lien permanent | Commentaires (2)
Commentaires
Pas de proposition pour la version cette année ?
Alors, toute honte bue, voici la mienne :
Il était debout, dehors sur le pont, observant les dockers qui manipulaient à grand peine les lourdes amarres pour les enrouler autour des bittes d'amarrage, observant l'espace d'eau, auréolée d'hydrocarbures, entre le bateau et le quai et qui se rétrécissait jusqu'au contact et il sentit les larmes lui monter soudainement aux yeux. C'était inattendu. Et plutôt que d'éclater en sanglots, il s'y dissolvait, son visage se recroquevillant doucement sur lui-même, ses yeux crispés se fermant, ses lèvres faisant la moue et sa tête s'inclinant comme s'il priait. Il agrippa le bastingage, se reprit, plein de gratitude pour les gouttelettes de pluie qui tombaient en balayant les quais et scintillaient dans les halos des lampes des entrepôts. Il s'essuya les yeux et les joues du revers de ses mains. Les personnes qui se tenaient autour de lui commencèrent à s'en aller, à descendre sur le pont des voitures ou par les sorties pour piétons, à sortir tranquillement par groupes de deux ou trois. Une sourde vibration de pièces métalliques frottant l'une contre l'autre secoua le bateau tout entier quand les portes de proue s'ouvrirent. Il jeta un regard à l'extérieur sur Belfast, sur les buildings serrés les uns contre les autres sous le ciel bas et gris, sur les tours qui pointaient au travers de la pénombre, sur l'horizon de basses collines imprécises au loin.
Il s'éloigna du quai pour atteindre la gare routière en suivant les indications d'une carte qu'il avait apportée avec lui. Les rues étaient tranquilles et sombres, comme si les gens attendaient le tout dernier moment pour partir au travail et gardaient alors tête basse et lumières en veilleuse. Les gens qui étaient descendus du bateau avec lui s'en allaient d'un pas rapide, parapluies ou journaux au-dessus de la tête pour se protéger de la pluie. Une Land Rover de la police passa en cahotant, jupe de blindage autour des roues, treillis de métal sur les vitres, en faisant éclabousser les flaques d'eau. Un homme lui jeta un regard depuis l'intérieur d'un kiosque de presse bleu foncé tout en défaisant des paquets de journaux avec son couteau. Un autre homme sortit d'une rue adjacente devant lui, poussant une charrette à bras débordante de fleurs fraîches dans des seaux noirs, et il essaya lui dire bonjour d'un signe de tête mais l'homme l'ignora. Il arriva à un hôtel dont toutes les fenêtres de façade avaient été barricadées, et derrière il trouva son bus à l'arrêt dans la gare routière : il y prit place.
Plus tard, il colla dans un cahier les tickets, les cartes et les indications manuscrites avec d'autres souvenirs du voyage (cartes postales, tickets de bus, ronds de bière, bouts de papier où étaient imprimées des adresses de chambres d'hôtes) et il imagina quelqu'un, quelqu'un qui souriait, avec des rides qui se creusaient autour de ses yeux et à partir du coin des lèvres, quelqu'un qui disait tu vois comme tu es passé près, qui disait ah mais tu es là maintenant malgré tout.
Écrit par : Coriolan | dimanche, 24 mars 2013
Je ne l'ai pas encore faite - je regarderai donc votre proposition après avoir fait la mienne (ce soir normalement).
merci !
Écrit par : Guillaume | dimanche, 24 mars 2013
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