jeudi, 01 décembre 2011
3111 / Le Lapin sous le prunier
Dans tous ses états, elle était, la pauvre femme. On va se laisser passer l’heure… le sablier, ça n’est pas rien… la seconde du rendez-vous elle-même est importante… Des foutaises. Mais bon. Elle était dans tous ses états. J’aurais voulu la calmer, la secouer, la calmer ou la secouer, je ne sais, toujours est-il qu’elle faisait pâle figure, un sacré tableau.
C’est quand elle a fait brûler le cadre que je me suis énervé.
Ce n’était plus possible.
On avait fait la sieste sous un prunier, c’était l’hiver – mais quoi ?
Pénible. Pas moyen de se reposer, toujours cette injonction, le lapin d’Alice, en retard, en retard, j’entendais la voix de Guy Piérauld, en retard en retard en retard. Pffff. Pénible. Kano pensively lifted a plum upon the point of a toothpick and began nibbling at its wrinkled skin. Pourtant, je finis par me rendre à l’évidence et par l’accompagner, non sans ramasser les feuilles de prunier et les déposer dans les conteneurs spéciaux prévus à cet effet.
Roger Dorsinville m’ennuyait ; René Barjavel encore plus ; même mon idole, Flann O’Brien, je n’arrivais pas à me plonger dans son univers dense et loufoque. J’avais passé toute la nuit précédente à traduire des poèmes de Bedri Rahmi Eyüboğlu, sans rien savoir du turc, bien sûr, mais juste comme ça, par science immanente. (Ce n’est pas donné à tout le monde. Je raconterai un jour ce qui m’est arrivé. Barjavel peut pâlir.) J’avais appris l’existence de ce peintre et écrivain turc par le biais d’un texte méconnu du majoral Sylvain Toulze. J’avais voulu traduire aussitôt tout ce qui m’était tombé sous la main. Et Marie, devant ces lilas, avait ménagé une large plate-bande, où elle s'amusait à cultiver elle-même quelques rosiers, des giroflées et des résédas. Et j’étais satisfait du résultat.
Mais, quand elle a commencé à faire cramer les cadres, là, j’ai explosé. Dans la ligne de tir. Trop de fers au feu. Et le centenaire de Pompidou, dont tout le monde se contrefout. Alors, voilà, je l’accompagne à son rendez-vous.
Pas moyen autrement.
22:23 Publié dans BoozArtz, Une année de 398 jours | Lien permanent | Commentaires (0)
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