samedi, 08 octobre 2005
A primeira bala
Samedi, dix heures
Le premier texte que je découvre de l’écrivain brésilien Harry Laus est aussi son premier publié en France, La première balle, une nouvelle brûlante, nourrie d’un superbe revirement. C’est un texte de dix pages, pas plus, précédé d’une préface de Laus lui-même suivi du texte original portugais, puis d’un entretien avec Bernard Bretonnière. L’opuscule est une co-édition des éditions Arcane 17 et de la Maison des Ecrivains Etrangers et des Traducteurs de Saint-Nazaire (dont le sigle M.E.E.T. doit avoir une signification acronymique délibérée).
J’ai lu ce bref récit chemin faisant, en marchant sous un beau soleil retrouvé, dans la douceur de cet automne qui se refuse à commencer vraiment, en allant chercher A. à l’école. Je connais le trajet par cœur, et j’aime généralement profiter de chaque instant, des moindres bribes, des plus infimes variations dans le spectacle, des plus menues nouveautés apportées au décor. Mais là, j’avais envie de lire. De lire La première balle de Harry Laus.
Il vaut mieux ne pas résumer une si brève nouvelle, et il reste donc peu à en dire, si ce n’est qu’elle fut lue chemin faisant, par un fou trop patient, inattentif (pour une fois) aux chats, aux traces d’avion dans le ciel, aux marrons écrasés sur le trottoir, aux visages croisés, aux bordées des véhicules.
Il me reste donc, seul recours en ces cas délicats, à recopier une phrase que j’ai particulièrement aimée, en français et en portugais :
Em vez disso, dei-lhe as costas porque a lembança de Maíra encheume de súbita tristeza e aquele rapaz não tinha o direito de partilhá-la.Au lieu de cela, je lui tournai le dos parce que ce souvenir m’emplit d’une subite tristesse et que le garçon n’avait pas le droit de la partager.
P.S.: J'ai omis de préciser que la traductrice de ce texte de Harry Laus s'appelle Claire Cayron (et que la nouvelle a été écrite au Cay-Rou...!)
14:25 Publié dans Lect(o)ures | Lien permanent | Commentaires (6)
Commentaires
Pardon, c'est anecdotique mais j'ai tant de plaisir à voir mentionnée Claire Cayron... Elle fut à Bordeaux ma prof de lettres et aussi un peu de vie (avec elle pas d'atermoiements, "quand ta vie devient trop compliquée, simplifie-la !" voilà le plus sobre et le meilleur conseil qu'on m'ait jamais donné, aussitôt dit, aussitôt fait !) A l'époque elle traduisait Miguel Torga.
La meilleure bien qu'un peu en marge de l'Université, tout en pratiquant le tutoiement réciproque avec ses étudiants elle leur faisait lire les textes les plus difficiles alors qu'il ne s'agissait que d'un cours dans un IUT de journalisme, et son autorité était telle que même les moins littéraires d'entre nous lisaient et comprenaient... c'est une femme exigeante et libre, une grande dame !
Écrit par : Alina | samedi, 08 octobre 2005
D'Harry Laus, on peut lire aussi, comme un document, le "Journal absurde (1949/1959)", publié chez José Corti — et traduit également par Claire Cayron. Des pages souvent marquées par la mélancolie, le vide existentiel, une amertume douce et résignée — "Mon vrai livre devrait être tout entier écrit avec des larmes" — et une à peu près totale absence d'humour. Sauf peut-être dans cette remarque : "Boucherie Vasco de Gama, c'était son nom. Bien sûr à cause de l'équipe de football, pas du navigateur."
Écrit par : C.C. | samedi, 08 octobre 2005
... que je suis en train de lire, aussi!
Alina, merci du témoignage... Bon, le côté "tutoiement réciproque" est quelque chose qui me hérisse au plus haut point, mais, pour elle, je veux bien passer l'éponge :-)
Écrit par : Guillaume | dimanche, 09 octobre 2005
Oui oui je comprends Guillaume, je l'ai dit parce que justement malgré le tutoiement elle avait une grande autorité, "naturelle" donc, et c'est encore plus fort ! Ensuite je suis allée en fac de lettres et je n'ai rien retrouvé de tel. La preuve il me semble qu'un traducteur digne de ce nom est aussi un écrivain, ou du moins en absorbe la consistance.
Écrit par : Alina | dimanche, 09 octobre 2005
Comme je l'ai écrit, il est des exceptions!
Écrit par : Guillaume | lundi, 10 octobre 2005
Torga, c'est ma découverte de l'année dernière.
Écrit par : Papotine | samedi, 07 janvier 2006
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