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mercredi, 31 janvier 2007

Coupage de canards en quatre

J’ai bientôt fini de lire la thèse que mon ami Gilles Chamerois a consacrée à Mason & Dixon, le roman pénultièmement publié de Pynchon (dont j’avais interrompu la lecture après 200 pages, faute de temps et d’envie, mauvaise période aussi). Or, dans sa thèse, outre la géométrie & tant d’autres analyses, j’ai été frappé par l’analyse du motif (leitmotiv ?) du canard (sémiotiquement translinguistique : duck + canard). Du coup je vois des canards partout ; mais c’est qu’ils sont partout.

Hier, je vous parlais de rasage. (Vous allez voir que ce n’est pas sans lien, sans ligne avec ce qui suit.)

Avant-hier soir, je me suis appesanti sur le bas de la page 623 d’Against the Day. Cette phrase étonnante :

Kit woke to see looming over him the face of a Dr. Willi Dingkopf, framed by a haircut in violation of more than one law of physics, and a vivid necktie in fuchsia, heliotrope, and duck green, a gift from one of the patients, as the Doc presently explained in a voice hoarse from too much cigarette-smoking.

 

La ligne mélodique principale, portée par l’homophonie entre l’abréviation Doc et l’adjectivation de duck, se prolonge, de manière moins évidente dans haircut, anagrammophonable en duck-hair, et encore dans le substantif necktie. En effet, neck et duck, mieux connus comme noms, sont aussi des verbes, dont le premier peut signifier « caresser » ou « décapiter une volaille » (neck a fowl), et le second « esquiver un coup », ou « baisser la tête ». Ainsi, le double motif docteur/canard rejoint l’autre motif, qui est celui de la tête et de la décapitation : la coupe de cheveux (haircut) et le patronyme même du docteur (Dingkopf : tête de chose en allemand – et, pourquoi pas, comme le suggère le naissant wiki consacré au roman, thing-head euphémisme de dick-head… tête de nœud (ð necktie encore : nœud de cravate, et strangulation plutôt que décapitation) ð décapitation / émasculation (willie)).

… tout ça de sorte que, si on veut représenter ces lignes de sens par des variations de police, on se retrouve avec la phrase comme suit :

Kit woke to see looming over him the face of a Dr. Willi Dingkopf, framed by a haircut in violation of more than one law of physics, and a vivid necktie in fuchsia, heliotrope, and duck green, a gift from one of the patients, as the Doc presently explained in a voice hoarse from too much cigarette-smoking.

 

Il me reste à signaler, que, cherchant la présence éventuelle de cette citation sur la Toile (elle n'y est pas encore, mais y apparaît grâce à moi), je suis tombé sur cette nouvelle de Greer Gilman, A Crowd of Bone, dont une partie commence comme suit :

Kit woke to see his new-made lover squatting naked in the ashy coat, her shorn hair flickering about her skull. So white, her goblin face. So young. What have I done? he thought. O dark, what is she doing? On the hearth lay the long sheaf of her sundered hair, not fading like shorn grass, but fiery.

11:41 Publié dans Pynchoniana | Lien permanent | Commentaires (8) | Tags : Littérature

Commentaires

« La ligne mélodique principale […] se prolonge, de manière moins évidente dans haircut, anagrammophonable en duck-hair »

Jusque là je vous suivais et j’étais d’accord (ça vous avance bien, j’en suis consciente !) mais là je ne vous suis plus. Si vous pouviez clarifier ce que vous entendez par « anagrammophonable », Si j’ai bien compris, il s’agit d’un anagramme au niveau phonétique mais dans ce cas là quelle est la différence avec un homophone ? De plus, l’anagramme ne me semble pas complet. Mais je peux me tromper, et by the way, est-ce que le terme « anagramophonable » existe où est-ce une création maison car j’ai cherché et je n’ai rien trouvé (mais je suis toujours partante pour apprendre de nouveaux mots !!!).

Ah, les slips déclenchent quand même plus de commentaires que le roman de Pynchon….

Écrit par : Lucie | mercredi, 31 janvier 2007

Dites donc, y'a un sacré écho dans ce coin-là ! Attendez, j'essaie pour voir...

Écrit par : Chieuvrou | jeudi, 01 février 2007

Caramba ! Encore raté !

Écrit par : Chieuvrou | jeudi, 01 février 2007

@ Lucie : "anagrammophonable" est une invention. Je me permets, sur ce site personnel, des fantaisies que la pédagogie et le jury des concours réprouveraient évidemment !
............ Mais j'attendais que quelqu'un réagisse. Merci à vous de suivre !
J'ai forgé ce terme car il permet de combiner l'étude des homophones (mais aussi paronymes : tuck/duck par ex.) avec celle des déplacements anagrammatiques.

Écrit par : G | jeudi, 01 février 2007

(...)"mauvaise période aussi": ah, alors pardon pour ce mail farfelu et certainemennt mal venu si vous n'avez pas trop la pêche en ce moment. (reine des bourdes occasionellement..)

Écrit par : Aurélie | vendredi, 02 février 2007

Non, ça va bien. Votre mail m'a bien fait rire ; je vais y répondre.

Écrit par : Guillaume | samedi, 03 février 2007

Je constate avec peine que j'arrive trop tard pour commenter cet "anagrammophonable" qui m'a interloquée et laissée à mi-chemin entre le fronçage de sourcil professoral et le fou-rire qui gratte la gorge. Tant pis pour moi, je n'avais qu'à être plus prompte !

Écrit par : Bloguette | samedi, 03 février 2007

Le retour de Bloguette ? Waaoow ! That's good news !

Je (re)cours y (re)voir.

Écrit par : Guillaume | dimanche, 04 février 2007

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