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mardi, 24 mai 2011

Les Sept fous

Des Sept fous, la lecture est encore vivement présente à mon esprit. Je croyais l’avoir lu très récemment (j’hésitais entre mars et janvier). Or, je viens de retrouver une mention de ce livre qui date du 1er décembre, et indique clairement qu’il avait déjà été lu. Ce serait donc novembre ! Que le temps, l’année aura filé vite. En tout cas, j’ai eu raison de le garder sous le coude, puisque je prends enfin le temps d’extraire quelques passages de ce récit d’une dérive sectaire. Le patronyme de l’auteur, mort à quarante-deux ans en pleine Seconde Guerre mondiale, pourrait évoquer – avec une ironie sinistre qui ne lui aurait pas déplu – quelque sigle de notre société post-moderne.

 

 

« La peine, semblable à ces arbustes dont l’électricité accélère la croissance, grandissait dans les profondeurs de sa poitrine et montait jusqu’à sa gorge. Immobile, il se disait que chaque peine était un hibou qui sautait d’une branche à l’autre de son malheur. »

Roberto Arlt. Les sept fous (1929),

traduction d’Isabelle et Antoine Berman. Belfond, 1981, 2010, p. 50.

 

Les Hiboux, gravure de Henry Chapront pour le poème de Baudelaire

 

« Derrière la vitre de la petite fenêtre allaient et venaient des requins borgnes, furieux parce qu’ils souffraient d’hémorroïdes, et Erdosain jubilait silencieusement, riant du petit rire de l’homme qui ne veut pas qu’on l’entende. » (p. 147)

 

« À la manière de celui qui tire de son portefeuille l’argent produit par ses divers efforts, Erdosain tirait des alcôves de la maison noire une femme fragmentaire et complète, une femme composée de cent femmes démembrées par cent désirs toujours identiques et toujours ravivés par la présence de femmes dissemblables. »  (p. 158)

 

« Je vais rompre le faible fil qui m’unissait à la charité divine. Je le sens. À partir de demain, je serai un monstre sur la terre… Imaginez-vous un enfant… un fœtus… un fœtus qui aurait la capacité de vivre hors du sein maternel… Il ne grandit jamais… Velu… Petit… sans ongles il marche au milieu des hommes sans être un homme… Sa fragilité horrifie le monde qui l’entoure… Mais il n’est pas de force humaine qui puisse le restituer au ventre perdu. » (pp. 317-8)

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