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lundi, 07 novembre 2011

Exister est un plagiat : 32 et 41

32

 

Je ne dois pas me mettre martel en tête. Une tête d’halco, autant dire, un singe en décembre avec un duffle-coat. Pourquoi rien en janvier, et après ça une foison, la main de Balzac, le toit tranquille où marchent des flocons, un balai à gazon sur une épaisse couche de glace. Dynamo se met en marche, un tamarin parisien fait signe, un autre singe encore un autre singe, au printemps celui-là. (Au Salon du livre, si j’ai existé, c’est par le sourire et la main, l’attente dans une cabine de photomaton.) Ensuite, j’enfile la série des Virevoltes (sur fond de bassine à linge, sur fond de radiateur en fonte, sur fond de nappe, sur fond de carrelage, sur fond de miroir avec ma gueule, sur fond de matelas moiré, j’en passe), Chambord, le chambard au jardin d’enfants, Landes-le-Gaulois un toponyme de totale prédestination avec notices pancartes fautives vieille 2 CV des années 50, le chambard encore, la guimbarde au retour de Chambord, Saintes avec une couronne jaune, d’autres Virevoltes, Watt, la fée électricité, le chambard, une vie c’est compliqué, Mammouth dans la courette où enfant je jouais aux petites voitures – avec les joints entre les dalles qui faisaient les meilleures routes de toute mon enfance –, la fontaine d’eau chaude, l’aquarium de Biarritz et le mur(et) d’escalade, Lussac Civaux Montmorillon, une nuit à Saint-Savin, tout ça pour finir par un matin au bord de la Mer rouge. Je ne dois pas me mettre martel en tête mais ça continue de plus belle, et depuis belle lurette. Alors ne rien oublier, ni le banc rouge à Ménil, ni le violon de faïence dans une vitrine à Blois (à quoi m’avait servi de lire Champfleury ?), ombres sur le bleu de ciel, keep me covered, un porc-épic, mes parents peignant des planètes, la rue des Fossés-du-Château. D’un château l’autre, donc, ça continue, de plus belle toujours de plus belle, quand s’arrêtera mes aïeux cette effroyable accélération du temps, dire que ce midi encore on parlait de ça, de l’éternelle jeunesse, je confonds toujours un peu Faust et Dorian Gray, pour ne rien dire de ce mois de jouvence, juin pardon, un panda roux au zoo de Doué, des grimaces, un malaise, une fête avec une danse de rubans, une promenade au château du Rivau avec les Québécois d’adoption (Clément venait de naître), quelques jours dans les Landes car C*** faisait passer les examens d’un quelconque BTS dans un quelconque faubourg de Pau (d’Orthez ?) et son père allait très mal, alors à côté de cela Descartes Preuilly La Guerche le Grand-Pressigny ça n’a pas de poids, c’est le jour de l’été, la fête de la musique, en remontant l’avenue en voiture on double ma collègue Fabienne en vélo qui ne nous voit pas. Ça continue, pourtant, le tintamarre de la mémoire ne connaît pas d’interruption, alors j’enchaîne j’enfile je circonflexise à fond, and here we come André Markowicz au prieuré Saint-Cosme, la mosaïque infernale au Musée Labenche, les travaux à Tulle, je me mets toujours plus Martel en tête, d’immenses dinosaures en béton armé menacent de se casser la gueule sur moi, même pas peur, la religion tue le monde, l’illumination à Souillac, le faux derche à Commarque et le vrai François Hollande à Arnac-Pompadour, à la fête de l’âne je n’invente rien. Le mois de juillet s’est-il achevé sur la guimbarde (encore une guimbarde) 110 Cuites 210 Cuites, il fallait que le mois d’août fût modéré, alors on ne retient que la cible rouge d’Arthous, elle suffit à plonger dans le bain d’un mois à la chaleur modérée, aux pluies modérées, aux dernières joies d’une vie comme un feu vif, je pleure en écrivant cela, ce n’est pas bien de l’écrire mais le bien maintenant… Après la mante religieuse pour de vrai, le scorpion pour de faux de Jean-Luc Goupil, donc Tutuola, ergo des orangs-outangs à Beauval, tout cela se tient, on sait se tenir croyez-moi. Je termine ce calendrier cet almanach façon Jean-Louis Murat (je veux dire par là que c’est obscène et dénué de sens), les chrotomis sont très gentils, ma mère boquillonne, octobre est sobre malgré le décor de carton-pâte rouge, un cornichon géant me salue à Montlouis, décidément me dis-je à la fin du mois en lisant Virginia Woolf, le scorpion n’a qu’à bien se tenir. Au moment de fêter mon anniversaire, je suis totalement épuisé (c’en sera de même cette année je le crois) : « jets de pierre interdits » et statue verte de Vigny (sous peine de poursuites).

On poursuit en 41. (Non, j’aurai 67 ans en 2041, hors de question que j’arrive jusque là.)

 

 

41

 

Coquetterie. Dans l’œil. Pan dans les dents.

 

Nous revoici à Bristol. Le texte fait mosaïque, ou plutôt kaléidoscope (on en ramène un, motifs du Magic Roundabout à l’extérieur, petits cristaux multicolores dans la lunette).

Cette année-là, je ne sais plus pour quelle raison, mon père avait ramené à la maison, et déversé près du portillon du jardin, un tombereau indistinct dans lequel se trouvaient surtout des myriades de petits carreaux de faïence bleues, vertes et jaunes, ébréchés pour la plupart. Souvenir d’avoir joué avec ces petites merveilles, plus ébloui que si la caverne d’Ali Baba s’était ouverte devant mes yeux.

On passe un temps fou avec les aïeux, ceux de Fadesse ou ceux de Normandie. Bientôt ces derniers ne seront plus qu’à Saintes, ville dont je ne dis rien dans ce livre, mais dont le nom ne cesse de revenir, comme un mantra.

Mater. Anagramme ? Ma terre, celle dans laquelle je fouaille avec les doigts, aussi en jouant avec les petits carreaux de faïence ébréchés, c’est l’image de ma mère, il n’y a qu’elle. (Trop d’images pour en choisir une seule.)

 

― Tout de même, ce sera étrange, quand j’aurai tout réagencé à la suite, cette convergence vers le centre, et puis ces symétries.

― Tu ne veux tout de même pas dire que tu es allé chercher le souvenir du kaléidoscope pour une satanée, une foutue mise en abyme ?

― Hmmm… non, mais du coup, il se trouve…

― Tu es plus irrécupérable que je ne pensais. Je vais t’apprendre à manier la gomme, moi.

― On verra, je te passerai l’ordinateur. Après.

Commentaires

"hors de question que j’arrive jusque là" >>> Cela écrit le soir même où Joe Frazier est mort, à 67 ans.

Écrit par : Guillaume | mardi, 08 novembre 2011

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