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mardi, 03 mars 2015

Au bord des fleuves qui vont ▬·▬ le dernier Antunes ?

En quinze chapitres correspondant aux quinze journées d'hospitalisation (21 mars – 4 avril 20007) d'un personnage tantôt nommé Antonio (dans ses souvenirs d'enfance) tantôt M. Antunes (dans son présent d'adulte vieillissant et malade), ce texte plus bref et plus “facile” que les derniers grands livres de son auteur livre l'itinéraire de ce double de l'écrivain vers la mort, avec une inscription finale Exeunt omnes qui suggère la fin d'une œuvre, c'est-à-dire la sortie de tous les personnages, de toutes les voix, l'image de la mort dans le texte.

Par son nom, le cancéreux mourant est le double de l'écrivain, fantôme troublant pour le lecteur qui sait qu'en 2015, lorsque paraît la traduction de ce livre publié en 2010 en portugais, le vrai Antonio Lobo Antunes est toujours en vie. Les quinze chapitres orchestrent magistralement la confusion mentale constante du malade dont la conscience ne cesse d'osciller entre les événements de son hospitalisation et le surgissement (la résurrection) de souvenirs de son enfance et de son adolescence. L'esthétique de Lobo Antunes — qui se fonde depuis bientôt vingt ans sur le mélange des plans, le nivellement des voix, la récurrence obsessionnelle de motifs triviaux — trouve là à s'exprimer dans un sujet à la fois plus simple et plus définitif.

Ainsi, dans le onzième chapitre, les organes tels qu'ils se donnent à lire sur les écrans de la chambre ­d'hôpital “font des fautes d'orthographe, ils divaguent, l'hypophyse évoque les crépuscules d'automne quand les cigognes s'en vont, le thymus l'envie de revoir l'étrangère blonde, le sang fait allusion à un vélo autour d'un châtaignier et vraiment n'importe quoi ces vélos ces châtaigniers” (p. 167).

Comme toujours, le livre multiplie les hypothèses à la question encore reformulée dans le septième chapitre : “qui est-ce qui persiste à habiter en nous au centre d'on ne sait quoi dont notre vie dépend, combien de questions posons-nous sans rien dire et qui restent sans réponse, aucune différence entre nous et à mon tour moi” (p. 110).

 

 

[Très belle traduction, comme toujours, de Dominique Nédellec.]

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