mercredi, 30 septembre 2015
“ombre grise de l'accenteur”
Hagetmau, 4 août 2015.
ombre grise de l'accenteur
furtive derrière des ronces
un chevreuil au poker menteur
jappe 43 semonces
toujours courir avec lenteur
où dans la chaleur on s'engonce
l'ombre s'éclaire l'ombre fonce
feu follet des pois de senteur
les ronces grifferont le deuil
dans la peau comme à un chevreuil
le faux moineau offre une esquisse
humble discrète sur le seuil
l'ombre s'attarde l'ombre glisse
sur la page bon pied bon œil
13:13 Publié dans Chèvre, aucun risque, Hors Touraine, Sonnets de janvier et d'après | Lien permanent | Commentaires (3)
mardi, 29 septembre 2015
Cessyle, un beau prénom
Comprendu-je l'enfant qu'elle s'appel Cessyle
Si que sa mère elle a une grosse imbessyle.
[N.B. : Les distiques ribéryens sont des poèmes composés de deux alexandrins, et délibérément truffés de fautes de français.]
17:50 Publié dans Distiques ribéryens | Lien permanent | Commentaires (0)
Pour un estuaire (ébauche de note pour moi-même)
Au loin, au-delà de la brume, des gens criaient. On nous prenait pour des créatures de race blanche. Voilà pourquoi on nous appelle dombe, qui est le nom que l’on donne aux poissons. Depuis des siècles qu’ils ont jeté l’ancre ici, on désigne ainsi les Portugais. Échoués sur les plages, venus de l’horizon liquide, ils ne pouvaient être nés que dans l’océan. Dont nous provenions, Arcanjo et moi.
Étendu à mes côtés, inconscient, le chasseur avait l’air mort. C’était mon cauchemar : Arcanjo et moi faisions naufrage sur une plage en fuyant dans une pirogue, en descendant le fleuve. Le courant nous jetait au-delà de l’estuaire jusqu’à nous déposer sur la grève, parmi les débris éparpillés sur le sable.
Mia Couto. La confession de la lionne [A confissão da leoa, 2012]. Paris : Métailié, 2015, traduction d’Elisabeth Monteiro Rodrigues, pp. 149-50
Je reprends ces pages, lues au printemps, à la lumière de La pluie ébahie, également de Mia Couto, que j’ai lu cette semaine, et où ce motif du fleuve et l’eau est plus présent encore. Il se trouve que, le hasard faisant les choses, je viens également d’achever de lire The Fishermen de Chigozie Obioma. Il me semble qu’à l’exception notable du deuxième roman de Ngugi, The River Between, ce motif du fleuve était beaucoup moins présent dans les récits africains de la première génération des Indépendances. Y a-t-il là un élément écocritique (comme cela est très net dans La pluie ébahie), un retour à certains mythes (dont le motif de la route engloutissante, déjà présent chez Soyinka puis Okri, serait un jalon romanesque moderne), une allégorie de l’histoire des nations africaines après cinquante ans – peu ou prou – d’indépendance ?
Dans La confession de la lionne, l’importance accordée aux chasseurs, et à leur rôle dans la libération d’une parole collective affranchie de codes narratifs “européens”, rejoint ce que je perçois de plus en plus nettement dans ma lecture de Tail of the Blue Bird, le roman de Nii Ayikwei Parkes que j’ai mis au programme de L3 et de M1 ce semestre.
11:35 Publié dans Affres extatiques, WAW | Lien permanent | Commentaires (0)
lundi, 28 septembre 2015
AR POETIK (3 août 2015)
commence un nouveau paragraphe
bois l'eau à même la carafe
après la quinzième tournée
qu'importe un putain d'accent grave
ça doit sortir de ton néant
à chaque nouvelle fournée
vilain gribouillis de géant
ou fourmi dans un trou béant
ça doit sortir de ton zéro
après le quinzième apéro
fi de la rime chantournée
muse sévèrement burnée
bois le saint-estèphe au goulot
et allez bordel au boulot
06:00 Publié dans Sonnets de janvier et d'après | Lien permanent | Commentaires (0)
samedi, 26 septembre 2015
“mangerez-vous”
31 août 2015, 21 h.
mangerez-vous de mandragore
y goûterez-vous pour plaisir
amour dont on peut se saisir
imprudemment que l'on dévore
un peu de ce pistil encore
sous le cagnard ou le grésil
qu'au gibet pousse le persil
ou la droséra carnivore
mangerez-vous au carnaval
l'heur de se bourrer festival
(pardon s'enivrer veux-je dire)
j'ai tout du voleur à la tire
et votre odeur je l'adore
dévorez-moi de mandragore
11:33 Publié dans Sonnets de janvier et d'après | Lien permanent | Commentaires (0)
mercredi, 23 septembre 2015
“bonsoir la vieille martingale”
8 août, 21 h 13
bonsoir la vieille martingale
avec le bonnet en bonus
les amis coincés du sinus
pris dans la toile de mygale
voyez ce dont on se régale
sous le couvert des abri-bus
calices que nous avons bus
& arnaques d'humeur égale
pour calice on va boire un pot
& s'acquitter de ses impôts
louer la déité fiscale
la pluie qui dehors tombe à seaux
fera renaître les ruisseaux
à l'assomption fraîche pascale
12:13 Publié dans Sonnets de janvier et d'après | Lien permanent | Commentaires (0)
dimanche, 20 septembre 2015
“va-t-on enfin courir”
6 août, 23 h 50
va-t-on enfin courir le lièvre
& même plusieurs à la fois
ou déterrer nos désarrois
pour pondre des élégies mièvres
va-t-on de l'élégant carquois
dénouer le long poil de chèvre
passer le pouce sur la lèvre
& tout lâcher d'un air narquois
avons-nous égaré nos flèches
& l'éléphant a-t-il tout pris
dans sa fuite vers l'autre siècle
il reste à chanter pour des nèfles
& à essuyer le mépris
en écrivant d'une encre sèche
23:50 Publié dans Sonnets de janvier et d'après | Lien permanent | Commentaires (0)
jeudi, 17 septembre 2015
“des trois frères”
27 juillet 2015, 7 h
des trois frères le dernier né
celui baptisé Onésime,
ce n'est pas pour la pantomime
écrivant comme un forcené
(je l'ai appris, est-ce minime,
il n'y a que quelques journées)
qu'il naquit près des Pyrénées
dans cet Orthez de tant d'estime
plus jeune de beaucoup, ma foi,
qu'Élie, venu à Sainte-Foy
de même qu'Élisée — ternaire
essaim se trouve avoir inclus
la triple mort septuagénaire
et leur nom célèbre, Reclus
12:39 Publié dans Sonnets de janvier et d'après | Lien permanent | Commentaires (0)
lundi, 14 septembre 2015
“dans la lune où j'ai”
1er août, 8 heures
dans la lune où j'ai mes quartiers
où je roupille et je folâtre
teint d'endive plus que d'albâtre
maintien plus rigide qu'altier
savez-vous mon chant je le châtre
fruits d'or autour de Baratier
jappements de petit ratier
sa rage une écume blanchâtre
j'y passe des nuits et mes lunes
ça n'est pas vraiment pour des prunes
gueule Popov ou Médrano
ça a tout du foutu chantier
moins Jonas K. que Jack Lantier
cette lune sans Cyrano
12:44 Publié dans Sonnets de janvier et d'après | Lien permanent | Commentaires (0)
vendredi, 11 septembre 2015
“que soudain l'on entonne”
3 août 2015, 9 h 04
que soudain l'on entonne un thrène
avec l'ombre de l'ici-gît
nous égrenant ses élégies
clinquantes piécettes d'étrennes
& tout ce qui est doux revient
refait surface à l'unisson
redis-moi le temps de cuisson
du bonheur mon bon margoulin
je danse pour que vos migraines
emportent le monde à la traîne
je danse pour vos gabegies
je danse avec ce hameçon
coincé dans mes tripes rougies
je danse pour les charançons
12:52 Publié dans Sonnets de janvier et d'après | Lien permanent | Commentaires (0)
mardi, 08 septembre 2015
“spectre tombé sur une nappe”
3 août — 20 h 10
spectre tombé sur une nappe
éclats de bouteilles brisées
déchets de laitues et frisées
un chien aboie un chevreuil jappe
& vous courez sur mes brisées
tout ce qui s'enfuit nous échappe
à grimper la mort en varappe
morts livides et vies misées
petite pluie sur les manèges
bémols partout dans vos solfèges
ah on en voulait des croupières
me tailler mais j'ai mon œdipe
envoyez le pousse-rapière
& un poème prototype
12:56 Publié dans Sonnets de janvier et d'après | Lien permanent | Commentaires (0)
dimanche, 06 septembre 2015
“rosiers taillés”
rosiers taillés au bleu de chauffe
nous couchés dans les prés fauchés
à ne mater regards touchés
pas même un vol de rhinolophe
à rimer gascon pour la strophe
normand allongé dans les choux
la lune nous est un réchaud
brûlera-t-elle ton étoffe
tu me dis tu es dans la lune
je te réponds et quand bien même
se jeter du haut du rocher
on ne le fait pas pour des prunes
la lune tu sais si je l'aime
c'est bien une faux pour gaucher
06:26 Publié dans Sonnets de janvier et d'après | Lien permanent | Commentaires (0)
samedi, 05 septembre 2015
“la ville éternue”
la ville éternue
son plaisir de face
cambouis dans la glace
où la nuit remue
mémoire ténue
d'avenir qui passe
cambouis qui encrasse
votre robe nue
sous un blanc tergal
l'amour m'est égal
la crasse des villes
où ne s'insinue
pour des jours tranquilles
votre voix connue
09:23 Publié dans Sonnets de janvier et d'après | Lien permanent | Commentaires (0)
mardi, 01 septembre 2015
“coing vert tombé”
coing vert tombé sur le goudron
avec juste une seule feuille
haché bigarré de marron
qu'un fil de gravillons endeuille
le ramasser de ce giron
milieu de rue où je le cueille
sans attendre qu'un escadron
de moucherons plus l'escureuille
fruit parfait rond tu ne dois pas
te rembrunir sous le compas
de mes doigts qui te ressaisissent
même échappé du cognassier
et jamais la couleur d'acier
ne t'imposera ses sévices
11:30 Publié dans Sonnets de janvier et d'après | Lien permanent | Commentaires (0)