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lundi, 30 mai 2016

Caryl Phillips, premiers pistages

Depuis quelques jours, j’ai enfin pris le temps de me lancer dans l’œuvre de Caryl Phillips, écrivain britannique que l’on qualifie aussi parfois de “Black British”, d’origine antillaise, mais qui a enseigné et écrit pas mal aux États-Unis… bref, cette question des définitions identitaires est, comme on peut le supposer et comme sans doute l’histoire littéraire en retiendra le caractère essentiel pour les générations d’écrivains des années 1970 aux années [reste à compléter], au centre de son travail.

Le prétexte – fortement agissant – de cette plongée est le fait que je devrai préparer, s’il y a des candidats, les agrégatifs de l’option Littérature du pôle mutualisé Limoges-Poitiers-Tours à l’œuvre mise au programme, Crossing the River. En général, les cours d’option débutent seulement en janvier, mais comme il faut, dès début septembre, voire avant, donner des indications de lecture aux étudiants, et comme d’autre part ce mois de juin devrait être plutôt calme sur le front du boulot, je m’y mets d’arrache-pied maintenant.

Pas encore relu Crossing the River, que j’ai lu il y a une dizaine d’années et qui m’a laissé un souvenir diffus. Préféré, pour l’instant, arpenter le territoire d’autres livres de C. Phillips. Commencé par Dancing in the Dark, portrait en kaléidoscope de l’itinéraire du grand comédien noir américain – originaire des Bahamas – Bert Williams. Dans sa structure, ce livre va certainement m’éclairer sur les choix de point de vue et de voix qui figuraient déjà dans Crossing the River.

Actuellement, je lis les essais rassemblés dans Colour Me English et The Atlantic Sound, un texte très étrange mêlant fictions, récit de voyage et réflexions historiques sur la traite et le commerce triangulaire ; le moins réussi, pour l’instant, est le passage narratif de la première partie dans laquelle Phillips raconte le séjour à Liverpool, en 1880, d’un jeune Ghanéen venu tenter de récupérer les fortes sommes perdues par son père après affaire avec un marchand anglais véreux. (Pourtant, quel beau sujet...)

Pour le style autant que pour le regard, Phillips m’évoque les récits de Naipaul, le Calcutta de Chaudhuri — pour la recherche d’une signification englobante lyrique, les aphorismes et les envolées d’un Ben Okri — et, pour le travail autour de l’identité très particulière du prolétariat du nord de l’Angleterre, la prose quasi ethnographique d’un Stuart Maconie. Curieusement, son anglais, précis, recherché, s’autorise de curieuses ruptures, comme le non-respect quasi systématique de la règle de grammaire sur les pronoms relatifs who et whom.

vendredi, 27 mai 2016

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                                        Pas atteint rue de Védrines, en route pour le conseil d'école, où je siège en tant que représentant élu des parents d'élèves, au moment de longer une maison dont l'alarme (ou était-celle d'une voiture garée dans la cour ?) nous vrillait les tympans, à moi et à d'autres passantes encombrées de leur poussette.

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mardi, 24 mai 2016

D'un Cingal l'autre ▓ Ma nuit entre tes cils

Il y a quelques années, mon père, se trompant dans mon adresse mail, eut un échange hallucinant avec mon homonyme, un Guillaume Cingal ingénieur à Toulouse. Persuadé que c’était bien moi qui lui faisais une blague en prétendant être quelqu’un d’autre, mon père, qui n’est guère pétri de doutes, avait écrit cette phrase restée dans les annales de la famille : « Je n’ai pas de trou de mémoire : tu es bien mon fils. » Plus récemment, à la Toussaint je dirais, ce même homonyme, pauvre garçon qui doit décidément trouver encombrant son Doppelgänger gascon/tourangeau, m’a écrit pour me dire de rappeler mon adresse électronique précise à mes étudiants, car il y avait encore eu plusieurs erreurs.

Hameau de Cingal. Moulines (Calvados), dimanche 19 juillet 2009. Des Cingal, je n’en ai pas croisé beaucoup, n’ayant jamais vécu en Normandie, bastion originel de la famille. À l’époque du Minitel, je m’étais amusé à faire une recherche dans l’annuaire : un seul Cingal dans les Landes (mes parents), un seul en Gironde (moi), un seul dans les Hauts-de-Seine (ma sœur) etc. En revanche, des dizaines et des dizaines de Cingal dans le Calvados (où je me suis autoportraituré en 2009 à côté du panneau indiquant le lieu-dit, mais aussi avec mes fils devant la maison de mon arrière-grand-mère, à Chicheboville, où j’ai passé plusieurs jours pendant plusieurs étés consécutifs de mon enfance) et la Seine-Maritime.

Pendant ma thèse, je fréquentais – irrégulièrement (travailler en bibliothèque m’a toujours pesé) — la bibliothèque de l’INALCO, et avais alors découvert l’existence, la coprésence même, dans le vieux fichier aux cartons jaunis, d’un Cingal, Grégory Cingal, dont j’ai découvert tout récemment, à la faveur d’un voyage à la Rochelle, et d’un passage dans l’excellente librairie Calligrammes, qu’il est l’auteur d’un premier livre, Ma nuit entre tes cils, texte qui navigue entre le roman, la chronique et l’autofiction. Autofiction, puisque l’on voit, à la page 60 (comme le département de l’Oise — entre 1997 et 2003, il y avait un seul Cingal dans l’Oise, toujours selon le Minitel), la femme aimée et morte dont le livre dresse, de façon très émouvante, le portrait autant que le tombeau, donner une série de surnoms au narrateur : « grégouille, gregjoli, greg saint-graal ».

Bien sûr, la coïncidence – simple, à condition que ce Grégory Cingal soit le même que celui qui fréquentait l’INALCO – m’a amusé, et je fais partie de ceux qui peuvent lire le passage cité en le rapportant à leur propre expérience patronymique. Combien de fois dans ma vie ai-je dû, après avoir pourtant épelé mon nom convenablement et distinctement, faire rectifier le S inscrit en tête par mon interlocuteur en un C, sans doute du fait qu’en entendant le nom, l’immense majorité songe à un nom en Saint, même sans connaître la ville suisse (devant le panneau d’entrée de laquelle nous fûmes photographiés, en 1983, mon père, ma sœur et moi — mon père cachant le ‘en’ final du St. Gallen germanique) ? Combien de fois, dans mon enfance, ai-je entendu de quolibets sur cigale et cinglé, alors que mes fils me disent n’avoir jamais rien ouï de tel, ce qui ne cesse de m’intriguer : appauvrissement lexical des jeunes générations ou plus grand respect du nom de l’autre dans une société multiculturelle ?

13245345_10207560043773080_8424044630147788896_n.jpgAprès avoir noirci une pleine page de ces considérations oiseuses, je crains, si l’auteur de Ma nuit entre tes cils tombe dessus, qu’il ne s’imagine lui aussi abandonné, son livre – tout à fait émouvant et bien écrit d’ailleurs – relégué dans la marge au profit des élucubrations onomastiques du Cingal tourangeau/gascon. Pour ne pas encourir trop ce reproche, je préfère citer un passage du livre en encourageant ceux de mes lecteurs qui m’ont de temps à autre exhorté à démarcher des éditeurs de reporter leur déception de ne jamais voir mon nom sur une couverture sur ce beau petit texte des éditions Finitude. Réminiscence indirecte du très bel et très drôle essai Comment massacrer efficacement une maison de campagne en dix-huit leçons, ce passage qui décrit escapades et errances dans la campagne vendéenne – la Vendée, département dans lequel je n’ai jamais mis les pieds et où, vérification faite dans les Pages blanches, il n’y a aucun Cingal répertorié – pourra plaire aussi aux rinaldo-camusiens canal historique :

Seuls parmi les sentiers de son marais vendéen, à bord de l'antédiluvienne 205 grand-maternelle qui tremblait dès qu’on passait la troisième, stoppant à tout bout de champ la voiture pour s'embrasser, écouter le coassement des crapauds, contempler les écharpes de brume qui s'enroulent aux roseaux. Ou bien pour visiter quelques vieux mas à l'abandon aux murs dépecés par l'herbe folle, comme avalés par le temps, aux portes si étroites qu'on y pénétrait instinctivement de profil, aux cloisons effondrées par le zèle remarquable des pilleurs qui allaient jusqu'à desceller les frontons ouvragés des cheminées de pierre. Beauté poignante de ces ruines si préférable à la vogue de la pierre apparente qui se répandait comme un feu de brousse aux façades des maisons habitées, éradiquant un à un le crépi grisé de son enfance, vogue qui ne la révoltait pas moins que ces meubles anciens relookés au dégoût du jour, au point que je redoutais presque, lorsque nous passions à proximité de l'un de ces braves propriétaires occupé à gratter son mur, qu'elle ne baisse sa vitre pour l’abreuver d'insultes, ou qu'elle descende carrément de voiture pour lui arracher des mains sa maudite ponceuse.

(Grégory Cingal. Ma nuit entre tes cils. Finitude, 2016, pp. 37-8)

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Pas atteint après avoir discuté avec la mère de Baptiste et Sandro, en marchant rue Ronsard, remontant vers le lycée Vaucanson. Un bois sauvage a fini par devenir square —— dépeuplé de bêtes —— peuplé de bancs. Tôles partout. À ce moment précis je me trouvais dans la contre-allée située derrière la longue file des magasins de camelote de la zone d'activité, où l'on trouve des cartons défoncés remplis de cintres rouillés, toute la poésie des banlieues saccagées, sous le ciel froid.

lundi, 16 mai 2016

Verdun et Black M, quelques précisions

J'ajoute cinq précisions à mon billet d'avant-hier :

1 — Évidemment, ce que je trouve ridicule ou obscène, avant tout, c'est de penser qu'on peut commémorer une bataille comme Verdun avec un concert de musique. 

2 — Quand j'écrivais que le sujet de la polémique était dérisoire, je pensais en fait que le concert de Black M ne méritait pas de telle polémique. L'annulation du concert est un sujet, en revanche, d'une véritable gravité.

3 — Beaucoup d'amis m'ont écrit qu'on pouvait tout à fait être scandalisé par ce concert sans partager le point de vue initial du groupuscule Fdesouche, par exemple. Sans doute, et j'ai bien entendu les différents arguments — plus ou moins spécieux d'ailleurs, ou décontextualisés — sur l'homophobie et l'antisémitisme de Black M. Ce sur quoi il m'avait semblé insister dans mon billet, mais insuffisamment il faut croire, c'est que l'annulation n'est venue que de l'adhésion massive, y compris de gens de gauche, à une pétition d'extrême droite dont le seul argument explicite était que Black M n'aimait pas “notre beau pays” et dont le sens implicite était que Black M n'était “pas français” (or, il l'est). Les gens qui ont relayé et signé cette pétition étaient peut-être choqués de l'homophobie ou de l'antisémitisme de Black M, mais ils ont signé la pétition de gens qui appartiennent à la frange la plus radicale de la Manif pour tous ou qui participent aux agressions contre les camps de réfugiés. Qu'on ne me dise pas que c'est moi qui suis en plein paradoxe...

4 — Qu'il y ait eu une opposition non raciste à ce concert, c'est possible. Que tous mes amis noirs, qu'ils soient diplômés ou non, qu'ils vivent en France, en Afrique ou ailleurs dans le monde, aient tous interprété cette annulation comme une censure raciste et un refus de prendre en compte la diversité des origines dans la France d'aujourd'hui comme dans les combats de 14-18 et de 39-45, cela demeure et ne doit pas être tenu pour un simple malentendu.

5 — Pour en revenir au point n° 1, l'idée d'organiser un tel concert était sans doute mauvaise, et le choix de Black M particulièrement tordu. Soit. Toutefois, une fois le concert annoncé, il est impossible de se réjouir d'une censure qui a pour origine une pétition d'extrême droite. Il m'est impossible, dans l'absolu, de me réjouir de quelque censure que ce soit.

samedi, 14 mai 2016

Verdun, ou l'identité diffractée

Nous avons, de plus en plus, l'art des polémiques enflammées sur des sujets relativement dérisoires.

Toute l'affaire du concert annoncé du rappeur français Black M lors des commémorations de Verdun en est un bon exemple. Je préfère préciser, en préambule, que je n'ai pas vraiment d'opinion concernant les commémorations militaires ou historiques, et que les chansons de Black M, dans le meilleur des cas, m'indiffèrent : c'est, à mon sens, un artiste d'une très grande médiocrité.

 

Son concert a donc fini par être annulé, suite à un mouvement lancé par le groupuscule d'extrême droite Fdesouche et repris à hauts cris par le FN. Même si ceux qui se sont également opposés à ce concert se scandalisent d'être associés à la “fachosphère”, je n'ai pas vraiment entendu, pour ma part, d'autre argument que ceux de l'extrême droite, pour laquelle, en résumant à gros traits, Black M est illégitime car il n'est pas patriote. Toujours pour résumer, c'est lui faire un bien grand honneur de dire que certains de ses textes sont anticolonialistes, mais enfin, on peut dire que, pour un rappeur pas très raffiné des années 2010, ça se rapproche de ça. 

On l'a bien compris, le fond de l'affaire est ailleurs : pour nombre de nos compatriotes, y compris ceux qui se pensent "de gauche" (et le sont sans doute sur bien des sujets), la première guerre mondiale est une affaire de soldats blancs tués par d'autres soldats blancs, et une commémoration digne ne peut commettre d'anachronisme musical en incluant un concert de rap. Si le concert annoncé avait été de Lorie, Christophe Maé, Mireille Mathieu ou Florent Pagny — pour citer quatre artistes tout aussi lamentables que Black M — il n'y aurait pas eu de polémique. C'est donc que le problème n'était pas la “dignité des commémorations” comme on a tenté de nous le faire accroire.

Quel est le seul argument de la pétition que relayaient encore hier certaines de mes connaissances “de gauche” ? Le voici : « Black M s'est illustré dans ses chansons par un grand mépris pour notre beau pays, scandant: "La France, ce pays de Kouffars (mécréants)"». Personnellement, j'en ai toujours tenu pour Les patriotes de Brassens et Charlie Hebdo, ce qui signifie que je suis opposé à toute forme de patriotisme, de sorte que je vois mal comment j'aurais pu signer une pétition qui oppose notre “beau pays” à l'un de ses citoyens. Que des gens de gauche la relaient et la signent en dit long sur la fameuse lepénisation des esprits.

Black M, de son vrai nom Alpha Diallo, a eu beau jeu de publier hier soir un communiqué assez malin dans lequel il se dit "enfant de la République et fier de l'être" et fait valoir qu'il est le petit-fils d'un tirailleur qui a combattu lors de la guerre de 39-45. Il y a certes, là aussi, de la mauvaise foi, surtout vu le cachet annoncé, peu en rapport avec la prétendue "immense fierté ressentie lorsque l'on a fait appel à [lui] pour participer à un concert en marge de la commémoration de la Bataille de Verdun pour l'ensemble des jeunes français et allemands réunis ce jour-là"... Mais il n'en demeure pas moins que c'est plutôt de ce côté-là que se trouve la vérité : les opposants à ce concert ont démontré que, pour eux, l'identité française que l'on doit commémorer en 2016 ne peut inclure les descendants de tirailleurs sénégalais, comme on les appelait (et ce bien qu'Alpha Moumoudou Diallo fût guinéen, comme le rappelle Black M dans son communiqué).

Il me semble donc que toute cette histoire fait remonter un racisme larvé, ainsi qu'une étrange collusion d'une partie de la gauche française avec l'identité nationale à la Sarkozy/Hortefeux. Qu'on le veuille ou non, l'annulation du concert de Black M est une victoire de l'extrême droite, et sera — est déjà — interprétée ici et à l'étranger comme un nouveau refus, de notre part, de faire face au passé colonial de la France.

 

Poursuivons, en imaginant que l'artiste annoncé ait été Oxmo Puccino ou Rokia Traoré. Beaucoup plus constructif, le discours radical d'Oxmo Puccino aurait été plus en phase avec les intellectuels de gauche. Rokia Traoré, elle, chante en bambara, ce qui peut faire croire à la majorité de ceux qui l'écoutent que ses mélodies n'ont rien de politique, ce qui est évidemment faux. Pour la qualité de leur travail artistique, ces deux noms, que je n'ai pas choisis au hasard, sont donc ce que j'appellerai télérama-compatibles.

Je gage que, dans ces deux hypothèses, si polémique il y avait eu, elle serait restée cantonnée à l'extrême droite, et la mairie de Verdun n'aurait probablement pas plié. Les descendants des tirailleurs, les Français issus de la colonisation, etc., auraient donc été représentés lors des commémorations de Verdun, ce qui réfute mon argument antérieur relatif à l'identité nationale...

Sans doute, mais... n'est-il pas gênant de classer les artistes noirs qui font carrière — au moins en partie — en France selon le degré de confort intellectuel qu'ils procurent à une frange limitée de l'intelligentsia française ? De fait, pour l'immense majorité des Français issus de la diversité, selon la formule officielle (et, comme toujours dès que c'est officiel, dénuée de sens), Oxmo Puccino et Rokia Traoré ne sont même pas des noms, ou à peine. Que cela plaise ou non — et bien sûr, cela navre le vieux réac élitiste que je suis — Black M et Maître Gims sont très populaires, et pas seulement auprès des jeunes “de banlieue”, pour évoquer un autre euphémisme idiot. Le meilleur ami de mon fils cadet affirme que Maître Gims est le "meilleur rappeur du monde", et cela vient aussi de l'immense fierté qu'il ressent à voir qu'un artiste qui est, comme lui et toute sa famille, d'origine congolaise triomphe dans les hits et sur les scènes de France.

En d'autres termes, et j'en reviens à mon axiome de départ (je n'ai pas vraiment d'opinion concernant les commémorations militaires ou historiques), une commémoration comme celle de Verdun, bataille où sont morts des centaines de milliers de “simples soldats”, paysans, etc., doit-elle être pensée exclusivement par et pour les réacs élitistes dans mon genre ? Ne doit-il pas s'agir, plutôt, d'un moment où la nation, en 2016, tente de penser ce qui la rassemble et ce qui la fédère sans évacuer les erreurs et les chausse-trapes de l'Histoire ?

 

vendredi, 13 mai 2016

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 Pas atteint à l'heure de coucher mon fils cadet, et donc à l'étage de la maison, face au petit fauteuil en rotin dans lequel plus personne ne s'assoit, il me semble, mais qui reste là, en trace du passé. La lumière électrique rend tout de teinte orangée, ou ocre (c'est lié aussi au choix des objets cadrés). Après une journée où j'ai peu marché, au fond, et à chaque fois par sauts de puce, on aboutit à ça.

mercredi, 11 mai 2016

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Il m'est venu une satiété de lire

Et même d'arpenter l'encre des grands voiliers,

Sur le pavé des rues, sous les mornes piliers

Où l'on graffite à tout crin l'ombre d'un navire.

 

Il m'est venu un épuisement à réduire

Au bouillon de la nuit le blanc du batelier

Scindant sa silhouette au creux d'un bouclier,

Et à entretenir la Madone hétaïre.

 

Pourtant, l'obscurité offre ces beaux volumes

À mes doigts tâtonnants d'aveugle dans les brumes.

Un temps pour tout ! Miserere ! Quel faux combat !

 

Je marche sous la lune, et son œil acéré

Me salue dans ma course. Un saule qu'on abat,

Et assez m'est venu d'encre. Miserere !

 

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Pas atteint à une heure et quart — heure qui revêtait une importance capitale quand j'étais enfant, les jours de classe —, dans le bus 2, qu'on a emprunté, mon fils cadet et moi, car prendre la voiture était trop risqué (hernie au pneu avant droit).                  Dieu comment capturer un coq

17:05 Publié dans 5005 pas | Lien permanent | Commentaires (0)

mardi, 10 mai 2016

Taxi Téhéran

Viens de voir Taxi Téhéran.

Moi qui trouve que l'essentiel de ce qu'on nous propose en matière de cinéma est soit vain soit éculé, je suis impressionné.  Voilà un film fin, drôle, direct mais équivoque, dangereux, qui ne tranche pas entre politique et esthétique (car cela n'a aucun sens de trancher — l'art, ce n'est pas trancher).

Du grand cinéma, parce que, d'un bout à l'autre, rien de ce qui est montré, dit ou suggéré ne pourrait l'être autrement que par ce moyen-là, le film. Un sonnet n'est bon que s'il est fondamentalement sonnet ; un roman n'est beau que de se constituer de toutes les possibilités d'épaississement du romanesque (jusque dans ses déterminations et déconstructions contemporaines) ; un grand film est un film dont on ne peut rien traduire dans aucun autre medium.

Tout, dans Taxi Téhéran, relève de l'impression cinématographique. D'où son caractère impressionnant. Quel contraste avec un film comme Mustang, vu il n'y a pas longtemps, tout à fait encensé et cependant médiocre d'un bout à l'autre : bien joué, sans doute, mais totalement rabâché, rebattu, convenu, et surtout — donc — sans rien d'intrinsèquement cinématographique. Mustang pourrait être un article, un poème en prose, une chanson populaire ou une pièce de théâtre que cela ne changerait rien à son sens, ni à sa fadeur. Avec le film de Panahi, en revanche, on se prend plus de cinéma dans la tronche — dans les yeux, le cerveau — qu'en vingt films vantés de la dernière décennie.

22:31 Publié dans Tographe | Lien permanent | Commentaires (0)

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Pas atteint en revenant vers la voiture avec mes fils, après un long moment à superviser une course de trottinettes improvisée entre Oméga et son ami L***. Et donc, en lisant ce livre étrange acheté aujourd'hui.

 

(Photographie prise impasse du Colombier, où nous nous garons habituellement — en alternance avec la rue des Platanes — avions failli acheter une maison en octobre 2008.)

19:13 Publié dans 5005 pas | Lien permanent | Commentaires (0)

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Personne dans les rues, en ce jour de Noël.

Il est loin, le chaos de nos voix magnanimes

Du temps où nous pensions, pour accéder aux cimes,

Façonner les quatre visages d'Azraël.

 

Désormais, le futur n'est qu'un vague écho él-

Evé du gouffre profond où d'autres pantomimes

Se jouent, pour des salauds qui versent vingt centimes.

Et même le hugolien crie “Allez l'O.L. !”

 

À peine ai-je entendu la flûte des rois mages

Et je pars, pèlerin, aveuglé d'enfumages,

Encensant le vieux temps des vieilles euphories.

 

L'adolescence est morte... Oh, ce n'est pas nouveau,

Et quoique mon huile admette quelques scories,

Je vais m'affaler entre un mulet et un veau.

 

lundi, 09 mai 2016

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Pas atteint à 15 h 22, après avoir garé la voiture, comme de coutume, pour quarante centimes, au bout de la rue Jules-Simon, et en portant la mallette du hautbois derrière Oméga gambadant avec son cartable d'école. Comme un lundi, comme de coutume, comme toujours à fleur de bitume.

Oasis.

Dire que j'ai composé (parlécrit) hier un texte dont le motif central est, au fond, celui des zébrures...

Routines

Nous ne sommes pas nombreux, à l'Université, aujourd'hui.

La concierge d'à côté, parano sans humour...

 

Toujours clochards et gros clébards. La routine va routiner, tout le mois de mai...

13:30 Publié dans WAW | Lien permanent | Commentaires (0)

CN4—666

Nous ne sortirons pas, comme hier, dans la nuit.

Le lilas a repris sa couleur de lavande

Et ton regard sur moi ramène son amande

Et ta langue sa fraise. Est-ce d'un autre bruit,

 

D'une autre solitude aux appétits de fruit,

Que notre âme se repaît de ce qu'elle scande,

Petit budget, peut-être, ou bien liberté grande ?

Dans la nuit, ton regard amandier me poursuit.

 

J'ai aperçu hier le renard en maraude

Attentif au moindre souffle qui le taraude

Et malgré ça débusqué par ta fantaisie.

 

Le vert de la forêt comme seul héritage

Et aux lèvres les notes de Chambres d'Asie,

En rêve j'entrevois notre obscur équipage.

 

dimanche, 08 mai 2016

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Jour de fête, me dis-je à moi-même, tout bas.

Le temps a passé vite, en fanfare et en flèche,

Sans nul besoin de foulard ni de chèche.

On sent dans sa mémoire l'odeur des repas.

 

Nous avons pris date à des festins d'abadèche,

Entièrement nus sous nos djellabas,

Sans désespoir ligoteur au fond du cabas

Ni d'huissier litigieux pour nous foutre la dèche.

 

Est-ce étonnant, alors, cet armistice russe

Et ta gaudriole, infernal gugusse !

Est-ce gai ! Est-on fier de pousser des tacots

 

Pour finir raplapla, maboul ou bien cinoque !

Nous prenons date pour des festins de tacaud :

Vivement qu'on soit déglingué ou vioque !

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Pas atteint IMG_20160508_105424.jpgScreenshot_2016-05-08-10-54-04.pngaprès avoir raté deux nombres (5005 et 5050), tant l'application informatique est sensible, et du coup arrêté pile à côté de ce petit plant de coquelicots, de toute évidence l'œuvre des services municipaux.

 

18:08 Publié dans 5005 pas | Lien permanent | Commentaires (0)

Nettoyage dominical

IMG_20160508_102309.jpgIMG_20160508_102412.jpgCe matin, lors de mon habituel tour à pied en solitaire, j'ai encore arpenté ces zones de pavillons et d'immeubles que jouxtent d'improbables bâtiments de bureaux portant le nom d'aviateurs célèbres. On est tout près de l'aéroport : ceci suffit à expliquer cela, je pense.

IMG_20160508_104036.jpgPrès de la ferme de la Milletière, une sorte de parc minuscule, généralement fermé, j'ai été tellement agacé de voir, sur le parking et l'espèce de boulodrome qui conduit aux terrains de handball et de basket (ils étaient accessibles, eux, comme en atteste un billet du projet 3333 pas), divers détritus que j'ai décidé de les ramasser, photographiant même — après l'avoir à demi remplie — la petite poubelle métallique située sur le trottoir et que n'avaient pas eu le courage d'utiliser tous les sagouins consommateurs des canettes, emballages de fast food et paquets de cigarettes que j'ai ramassés.

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Sur le

Comment puis-je encore m'illusionner à penser qu'en voyage, en famille, il me sera possible d'écrire dans ces carnets, et même de décrire un site sur le motif ? Ce n'est tout simplement pas possible car je n'en ai pas envie. Une chose à la fois, ce qui me définit assez mal mais s'avère pourtant exact, sur ce point.

Deux journées dans la Brenne, d'une grande richesse, et qu'il faudrait raconter, tout comme je peine à remettre tout ce qui est narratif sur le métier. Ainsi, le séjour wallon, qui s'est achevé il y a à peine un an, j'avais tenté d'en donner une version a posteriori, mais qui n'a cessé de se ramifier sur le tard, et qui est, pour l'instant interrompue.

Il me semble que je n'ai plus envie d'écrire que des poèmes, en revenant par là à mes débuts, à l'enfance de l'art sur papier brouillon. Si je devais me fier à la mémoire et tenter de circonscrire l'essentiel de ce que j'ai retenu des 48 heures passées en Brenne, j'en aurais pour des semaines, et ça finirait, là encore, par déraper, de sorte que je m'en tiens à quelques strophes sur le fil du rasoir, qui paraissent en dire plus long (c'est une illusion).

samedi, 07 mai 2016

« Je songeais peu à la Nature...»

D'après un sonnet des Regrets,

en conservant les rimes

 

Je songeais peu à la Nature

À la brasserie L’Univers,

En sirotant face aux couverts

D’argent et sous l’architecture

 

Du vent tourangeau (sa peinture

Si souvent a nourri mes vers)

Quelque bière aux houblons divers,

Improvisant à l’aventure.

 

Soudain il me vint un regret.

L’avouer n’est pas un secret.

Ai-je maté les secrétaires

 

Pour la libido me friser

Et toujours à moi déguiser

Le vert m’inspire en commentaires ?

 

vendredi, 06 mai 2016

29 avril, vers matinaux

29 avril, 6 h 52 — 7 h 11

Au petit matin d'avril

refus de prendre le manteau

ne te découvre pas d'un fil

ça me court sur le haricot

 

Je viens de rater

d'un cheveu

Le tramway

Le froid d'avril en désaveu

 

Le 1er mai

c'est écrit sur l'écran lumineux

l'effroi dans le feu

ni bus ni tramway

jeudi, 05 mai 2016

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Pas atteint à 13 h 46, non loin de l'étang du Tran, après le pique-nique, avant de voir les trois religieuses s'éloigner sur un autre chemin (plus large et plus fréquenté).

Fauvette grisette et bruant des roseaux.

En Brenne.

mercredi, 04 mai 2016

Un trajet en tramway avec Jean de Boschère

Mardi, hier, 8 h 31 — 8 h 54

Le soleil radieux

Illumine la laideur

De la triste banlieue

Grise au cœur

 

Crissement des portes

De la boîte de conserves

Tu t'énerves

À dénicher les âmes mortes

 

Après l'arrêt Trois-Rivières

Je poursuis cette lecture

Le soleil s'aventure

Sur la page de pluie, Jean de Boschère.

 

La page sur le hongreur

Admirable

La banlieue tout de laideur

Dans mon vieux cartable

 

Le quatrain comme un doux tricot

Ni satin ni calicot

Cette voix m'asticote

Annonce Mi-Cote

 

Guitare lourde

En moi place Choiseul

Je flaire la grosse bourde

On se retrouve seul

 

Le soleil dans sa brillance

Éteint sur la Loire

Le vol de cormorans

Et ma mémoire

 

Loin les sternes tulipe

Devant l'amphi Thélème

Café crème

Jeune hipster fumant la pipe

 

mardi, 03 mai 2016

Premières terrasses

On a doux le soleil les premières terrasses

Qu'avant la fin de l'exam les tudiants se cassent.

 

Croivu-je avoir faisi un sujet trop facile

Qu'on n'est pas lu leur truc übermégadébile.

03052016 / 1533

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Pas atteint à 15 h 33 (3:33 sur la capture d'écran du smartphone, opportunément calé sur le système anglo-saxon), en surveillant le partiel de fin de semestre d'Aide à la réussite, en salle 413, cette espèce de semi-amphi (je me comprends) avec sa vue magnifique sur le haut des peupliers et platanes de bord de Loire, avec, à la main, le lisant par saccades, le roman dont l'auteur est une collègue arrivée depuis peu à la B.U. et dont j'ai découvert ce livre, par hasard, il y a 26 jours, chez Gibert.

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lundi, 02 mai 2016

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Pas atteint à 15 h 52, en revenant de ranger le cartable du cadet dans la voiture, et, repartant vers le Conservatoire, dans la rue Jules-Simon que désormais je dois connaître par cœur, je passais devant la glycine, me figeai pour cette image, au moment même du pas.

23:16 Publié dans 5005 pas | Lien permanent | Commentaires (0)