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samedi, 20 août 2005

Visite de Plieux le jour de l'Assomption

(18 août, cinq heures de l’après-midi)



Quinze août, trois heures. La voiture s’approchait de Plieux, par le même chemin emprunté cinq ans auparavant, et le conducteur s’étonna du carrefour qui indiquait que le chemin de droite conduisait à Plieux (1,8 km) et que celui de gauche était recommandé pour le château (avec le sigle des Monuments historiques). Pourtant, si la visite de 2000 avait capoté car le site était fermé, une chose était sûre: le château était au cœur du village. Y avait-il là un désir particulier que les visiteurs arrivassent d’un côté plutôt que de l’autre, avec telle vue plutôt que telle autre? D’emblée, nous voici dans l’énigme.

Une fois la voiture garée sur la placette qui se trouve au bas du château, le conducteur, qui avait vu le grand portail en contrebas, s’imagina que c’était là la seule entrée, au lieu de se rendre directement au petit portillon situé tout près de la placette. (Dans tous les cas, cela doit ajouter trente mètres à l’itinéraire, et, si je fais remarquer cette autre bévue, c’est qu’elle semble montrer un goût poussé du maître des lieux, Renaud Camus, pour les ambages et bifurcations: pourquoi ce lieu aux choix cachés?)

Sonnons à la cloche! La cloche tinte! Un bruit de pas dans l’escalier. Un jeune homme finement barbu et moustachu vient nous ouvrir: ce doit être Pierre, le compagnon de Renaud Camus. Il nous demande gentiment de patienter en attendant la fin de la précédente visite (des Britanniques) et nous ouvre les deux salles jouxtant la tour, où se trouvent exposées plusieurs œuvres de Marcheschi: de quoi bellement patienter, indeed! Ces murs austères, cette pierre rugueuse et suave se prête merveilleusement aux grandes brûlures, aux jeux ignés et fuligineux du peintre. Longue admiration et déambulation.

Ensuite, notre guide revient, la visite commence, vite interrompue par un couple qui souhaite visiter mais a oublié l’argent dans la voiture. Pendant que le monsieur retourne à la voiture, nous discutons avec notre guide, qui nous explique le sens de la démarche et les techniques de Marcheschi. Trop timide jusque là pour avancer un pion, je lui fais comprendre que je connais l’artiste et la collection de réputation, mais que c’en est la première vision. “Ah, vous êtes des lecteurs du Journal, peut-être?” “Oh, du Journal et des autres pans de l’œuvre…” répondis-je.

Comme Monsieur Pierre (c’est une citation) comprend que je suis membre de la SLRC, il s’avoue confus de nous avoir fait payer. Je ne suis pas à jour de cotisation, mais la vraie raison en est que, parfois, on veut payer. (Je ne suis pas, contrairement à ma mère ou ma sœur, du genre à réclamer ma réduction enseignants à 5% dans les librairies, par exemple.)

Le monsieur revient enfin de son expédition en quête de sous, et la visite peut commencer. Je n’en dirai pas grand chose, car je crois qu’il faut visiter Plieux, non pour l’amour de l’œuvre de Renaud Camus, mais pour la singularité du lieu, qui ne ressemble véritablement à aucun autre château habité par des particuliers et ouvert à la visite que je connaisse. La «décoration» (thanked be Jean-Paul Marcheschi) y est pour beaucoup, bien sûr, et le goût du maître des lieux en matière d’ameublement et d’espaces épurés. Mais la vastitude des pièces et leur faible nombre tracent un trajet sans pareil.

Si l’on connaît l’œuvre du propriétaire, l’attente est sans doute importante, car de nombreuses pages ont servi à dessiner les contours de ce château, à faire deviner tel détail de telle pièce. La contemplation de la bibliothèque, par exemple, prend un sens différent selon que l’on est familier de l’œuvre ou non. Dans mon cas, la surprise est venue de l’escalier et de l’enchaînement des pièces, dont je n’étais jamais parvenu à me faire une idée exacte. Comme mes livres sont à Tours, je n’ai pu vérifier non plus où se trouvaient les pièces de commodité (salle de bains, cuisine), qui, naturellement, ne se visitent pas, et dont je ne parviens pas à comprendre où elles se trouvent. (Bon, j’ai une quasi-certitude, mais, plutôt que d’écrire des âneries, je préfère, pour une fois, passer pudiquement!)

Les Morsures de l’aube et Nuits sont certainement le fleuron des deux étages, mais une autre surprise est venue, pour moi, de nombreuses statuettes ou objets “primitifs”, que je pense africains (mais d’où exactement?), dont un cimier remarquable admiré dans la bibliothèque (et qui a détourné longtemps (longtemps, c’est-à-dire, à l’échelle d’une visite d’une heure au plus (hélas), deux minutes) mon attention des tranches). Héritage d’une “autre vie”, ou goût persistant de Renaud Camus pour l’art africain, dont je n’ai pas gardé le souvenir ou qui s’exprime dans des textes que je n’ai pas lus (ou qui constituerait le vrai jardin secret de l’écrivain…)?

Nous avons dû, évidemment, quitter les lieux à l’issue des quarante minutes de visite, non sans avoir posé plusieurs questions sur tel point d’histoire ou d’architecture (et notre guide fut, comme on pouvait s’y attendre, incollable). Sur le chemin du retour, une énigme n’a pas été résolue: quel pouvait être le Pléiade absent de son boîtier, entre Kafka et Mallarmé? (à vos méninges)

Une autre énigme, de mon point de vue, c’est la présence, sur les rayonnages, de toutes les pièces de Jean-Luc Lagarce, dont je ne connais qu’un seul opus, vu à Beauvais, et dont j’avais conclu qu’il s’agissait d’un dramaturge ultra-mineur, sans inventivité. La pièce que nous avions vue (en 1999) s’intitulait Derniers remords avant l’oubli, était sans intérêt tant pour son texte que pour la mise en scène, et a été montée plusieurs fois depuis, dont l’an dernier à Tours (à moins que ce ne soit une autre du même, j’ai un doute subit).

Cette fois-ci, nous ne nous sommes pas cassé le nez à Plieux. Sur le chemin de retour, nous étions encore sous le charme des prouesses brûlantes de Marcheschi et de cette rencontre curieuse, en léger porte-à-faux, entre une œuvre lue et sa matérialisation partielle.

Commentaires

Vous êtes très sensible à ce qui manque... mais les chiens ? la meute ?

Écrit par : stephen | samedi, 20 août 2005

Kant ? Kipling ?
Quel auteur en "l", par contre, je ne sais!

Écrit par : Virginie | samedi, 20 août 2005

Et si c'était Laclos ?

Écrit par : fuligineuse | samedi, 20 août 2005

Larbaud.

Écrit par : VS | samedi, 20 août 2005

C'est le genre de porte-à-faux qui me retient de visiter Plieux. Mais si Madame de Véhesse vient à Bordeaux en décembre, et que j'y suis encore, peut-être pourrions nous y faire un saut ?

Écrit par : Philippe[s] | dimanche, 21 août 2005

Whoops, ça se fait de se donner des rendez-vous sur le blogs des autres? Veux-tu (voulez-vous) continuer ici, chez vous (chez toi), ou par mail?
L'intervention de RC a lieu le 8 décembre de 17h15 à 18 h45, mais il y a des conférences tout l'après-midi, de 14 à 17heures. Y assister ou pas? Aller à Plieux avant ou après, le même jour, la veille, le lendemain? Prévenir le "Maître", ou pas ? (c'est un peu délicat, je le connais peu, je ne veux pas m'imposer, mais ne serait-ce pas impoli de ne pas le prévenir puisque je le connais quand même?)

Écrit par : VS | mercredi, 24 août 2005

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