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samedi, 08 octobre 2005

Bayahibe (Pierre-Stéphane Michel Trio)

Mélancolie et frénésie. Non, ce n’est pas une antithèse, juste cette alliance de mots qui cherche à rendre hommage au beau trio formé par Pierre-Stéphane Michel, à la contrebasse, Bruno Ruder au piano, et Frédéric Delestré à la batterie. Frénésie et mélancolie, et comment ne pas songer, en écrivant ces mots, au quintil d’Apollinaire

Au lac de tes yeux très profond
Mon pauvre cœur se noie et fond
           Là le défont
Dans l’eau d’amour et de folie
Souvenir et mélancolie

Bref… Les compositions du contrebassiste donnent lieu à des envolées soudaines, qui sont toujours un emballement de la douceur mélancolique, quand les moments où triomphent de subtilement tendres doigtés sont surtout des instants de frénésie contenue.
Mélancolie et frénésie. On les entend, tous trois (aussi pour les avoir vus en concert au off de Montlouis), se pencher sur leurs instruments, chercher des répons, là des réponses, jamais las de poser des questions, d’interroger, de tutoyer cet ivoire, ce bois, ces cordes, ces peaux.
Un boisé de contrebasse, un effleurement pianistique (les touches des pétales?), un balai caresse la caisse claire ou fait vibrer la branche comme du métal… Ce ne sont pas des métaphores. Les écoutant, je suis une écorce, une fleur, un rameau. Tour à tour et simultanément.

Découvrez ce trio, qui vaut le détour.

Bayahibe – Prod. 2004 Atelier Sawano – © 2004 Pierre-Stéphane Michel – ASF 037 – HM79

La Compagnie du Coin…?

Ma mère vient de m’écrire au dos d’une carte postale imitant un style vieillot, et qu’elle a dû glaner dimanche dernier, au café de la gare de Saint-Pierre des Corps. Il y avait aussi un marque-page. Carte et marque-page font la promotion de la Compagnie du Coin, « collectif d’artistes musiciens, plasticiens, qui crée et diffuse des spectacles musicaux ». Ils ont un site Web, et une adresse électronique.

Yoko Tawada : Train de nuit avec suspects

[Je reprends cette note, laissée en plan depuis le 25 septembre, une quinzaine bientôt !]

 

Cet ouvrage en treize parties (tout comme L’œil nu, paru simultanément aux éditions Verdier) est une suite de voyages vers des destinations toujours différentes et cosmopolites. Sous la plume de Yoko Tawada, écrivaine japonaise de langue également allemande (j’avais lu, au printemps dernier, ses deux textes écrits en allemand et également parus chez Verdier, Opium pour Ovide et Narrateurs sans âme), tout voyage en train de nuit devient une expérience saisissante, insolite, un feu du regard, la farandole des corps incertains.

 

La protagoniste anonyme est désignée, sauf dans la treizième destination (mais en dire plus serait dévoiler l’un des plaisirs de la découverte), par un « vous » qui n’est pas sans rappeler le fameux précédent de La Modification de Butor. Elle est danseuse, ou peut-être, dans certains de ces récits brefs, chorégraphe, toujours en partance, ou se fardant elle-même. Yoko Tawada n’a jamais été aussi passionnée par les ironies du regard, ces instants où l’œil chavire, où la vue dérive, nous joue des tours ; sans être hallucinatoire, la prose traque les moindres trivialités couramment admises pour en exposer l’étrangeté affolante. Ce qu’il m’a semblé, c’est que ce livre, plus encore que les deux autres, était comme touché par la grâce, sans la pesanteur de certaines des nouvelles de Narrateurs sans âme et sans le caractère parfois programmatique de Opium pour Ovide, ce remarquable texte lié et protéiforme. Est-ce l’écriture en japonais, qui implique d’autres références littéraires et esthétiques, une tournure peut-être plus atemporelle ? Pour moi qui suis condamné à lire au moins le japonais en traduction, cela reste une question sans réponse possible.

 

Ce qui continue de frapper dans son écriture, c’est l’attention portée aux visages, aux yeux, et en particulier à ce que les visages humains peuvent avoir d’étrange, d’inusité, de terrifiant même. Ainsi, dans “Voiture 3 : Destination Zagreb” :

Deux hommes de petite taille en veste marron fatiguée vous ont adressé la parole dans un anglais sommaire. L’un d’eux avait le pourtour des yeux enflé et rouge, couvert d’un mince glacis de larmes. Des yeux d’ogre : cette image vous a traversé l’esprit. Mais c’était l’autre qui vous parlait. (Train de nuit avec suspects, p. 33)

 

Cette hallucination fait penser aux contes de Jean Paul, peut-être, à Nerval, à ses épigones surréalistes (le Leiris d’Aurora) mais aussi, sans doute possible, dans la minutie de la description, aux Notes de chevet de Sei Shonagôn et à cette scène géniale de Rêves, le film de Kurosawa, où l’enfant assiste à la noce des renards.

Plus loin, dans “Voiture 5 : destination Pékin”, se retrouve l’image de l’ogre :

Le doute par ribambelles enfante des ogres. Soudain, les beaux sourcils du jeune homme vous ont paru suspects. Ils étaient touffus comme des chenilles. Ils brillaient, peut-être parce qu’ils les enduisaient de salive. (Train de nuit avec suspects, p. 54)

 

Comme j’ai fait une allusion au cinéma, et comme L’œil nu, le roman de Yoko Tawada publié simultanément et traduit de l’allemand, prend fait et ancrage dans les films de Catherine Deneuve, avec une référence, en ouverture, à Répulsion de Polanski, dirai-je que ces sourcils touffus comme des chenilles évoquent aussi les films d’angoisse de Polanski, le ballon qui progressivement devient la deuxième tête du locataire, détachée du corps et rebondissant dans les airs ?

 

J’aimerais savoir, également, quels sont les divers sens du mot japonais traduit ici par « ribambelles ». J’ai voulu, jadis (oh oui, jadis), écrire une série de douze romans dont le neuvième devait s’intituler Ribambelles. La proximité du verbe enfanter, le contexte plus général de la référence aux contes effrayants que l’on raconte aux enfants, tout cela est bien beau… quoi, faudrait-il aussi apprendre le japonais ? (Je demanderai au traducteur des textes allemands de Yoko Tawada, également co-traducteur de celui-ci, et qui se trouve être un collègue de Tours…!)

 

Il y a, dans Train de nuit avec suspects, de belles trouvailles cinématographiques, comme l’analogie entre le cadre de la vitre minuscule du Transsibérien et celui des timbres qu’un passager montre à la protagoniste (p. 73). Il existe aussi, comme toujours dans l’œuvre de Yoko Tawada, une forme très ambiguë de malédiction liée aux visages (les GesICHter, visa-je-s de Narrateurs sans âme), ainsi qu’on le voit dans la rencontre avec l’actrice nommée Mimi :

Toutes sortes de souffrances, courant à travers les nerfs fins, sillonnaient son visage, le convulsaient légèrement, puis s’en écoulaient. Vous étiez persuadée que ce visage résultait de son métier de comédienne. Ophélie, Electre, Nora ou Irina étaient passées sur ce visage, elles y avaient laissé leurs traces une fois la dernière représentation passée. La pauvre ! N’existait-il pas un rite pour les chasser, ces visages superposés ? (“Voiture 9 : Destination Bâle”. Train de nuit avec suspects, p. 93)

 

L’une des lignes de force, ou de fuite, d’ailleurs, de ce roman pérégrinant, lancinant et d’une belle constance dans l’écriture, est l’assimilation du récit à ce vous, la danseuse et chorégraphe, ce vous mis à distance mais qui finit par se fondre dans un dialogue aigre-doux (“Voiture 13 : Destination nulle part”).

 

Yoko Tawada. Train de nuit avec suspects.

Traduit du japonais par Ryoko Sekiguchi et Bernard Banoun. Lagrasse : Verdier, 2005.

Caractères spéciaux

Dans une note que je viens d’écrire, j’ai voulu, pour écrire une phrase en portugais (langue que je ne parle ni ne comprends, mais que je peux lire un peu et surtout que je sais prononcer (ce qui est très important pour la poésie)), recourir aux caractères spéciaux de Word, et n’y ai trouvé le u accent aigu (ú) qu’avec peine, alors que j’ai tout de même la possibilité d’insérer les bestiaux suivants :

û

ü

ũ

ū

ŭ

ů

ű

ų

ư

ǔ

ǖ

ǘ

ǚ

ǜ

En écoute : « Lulu » (Pierre-Stéphane Michel, album Bayahibe)

(Ce n’est pas Lülû ni Lůlű ni Lũlǖ…)

Mohamed El Baradei

Juste un lien vers un article récent du quotidien algérien El Watan consacré au très controversé Prix Nobel de la Paix 2005. J'ai également retrouvé, grâce au site du Guardian, le texte de son intervention à l'O.N.U. du 14 février 2003: il était question des armes de destruction massives en Irak...

15:15 Publié dans Ex abrupto | Lien permanent | Commentaires (0)

A primeira bala

Samedi, dix heures

Le premier texte que je découvre de l’écrivain brésilien Harry Laus est aussi son premier publié en France, La première balle, une nouvelle brûlante, nourrie d’un superbe revirement. C’est un texte de dix pages, pas plus, précédé d’une préface de Laus lui-même suivi du texte original portugais, puis d’un entretien avec Bernard Bretonnière. L’opuscule est une co-édition des éditions Arcane 17 et de la Maison des Ecrivains Etrangers et des Traducteurs de Saint-Nazaire (dont le sigle M.E.E.T. doit avoir une signification acronymique délibérée).

 

J’ai lu ce bref récit chemin faisant, en marchant sous un beau soleil retrouvé, dans la douceur de cet automne qui se refuse à commencer vraiment, en allant chercher A. à l’école. Je connais le trajet par cœur, et j’aime généralement profiter de chaque instant, des moindres bribes, des plus infimes variations dans le spectacle, des plus menues nouveautés apportées au décor. Mais là, j’avais envie de lire. De lire La première balle de Harry Laus.

 

Il vaut mieux ne pas résumer une si brève nouvelle, et il reste donc peu à en dire, si ce n’est qu’elle fut lue chemin faisant, par un fou trop patient, inattentif (pour une fois) aux chats, aux traces d’avion dans le ciel, aux marrons écrasés sur le trottoir, aux visages croisés, aux bordées des véhicules.

 

Il me reste donc, seul recours en ces cas délicats, à recopier une phrase que j’ai particulièrement aimée, en français et en portugais :

Em vez disso, dei-lhe as costas porque a lembança de Maíra encheume de súbita tristeza e aquele rapaz não tinha o direito de partilhá-la.

Au lieu de cela, je lui tournai le dos parce que ce souvenir m’emplit d’une subite tristesse et que le garçon n’avait pas le droit de la partager.

 

P.S.: J'ai omis de préciser que la traductrice de ce texte de Harry Laus s'appelle Claire Cayron (et que la nouvelle a été écrite au Cay-Rou...!)

Midi pile, ou presque...

Une matinée bien studieuse, pour ma compagne aussi, pensais-je, mais je vois qu'elle a pris le temps de m'expliquer par écrit une règle de grammaire que j'eusse dû savoir. Toutefois, le doute a surgi en raison d'un revirement final provoqué par mon amour de l'euphonie (oui, VS, that is the question).

Mirlontouille et bourchenille

Dois-je en être réduit à penser que les mots mirlontouille et bourchenille n'ont aucun sens?