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mardi, 11 octobre 2011

Exister est un plagiat : 5 et 68

5

 

Au cours de ma cinquième année, je me revois, dans la cuisine de la maison de Saint-Paul-lès-Dax, en train d’écouter la copie sur cassette du dernier album de Brel. Ma chanson préférée était Le Bon Dieu, qui m’a longtemps ému jusqu’aux larmes. (Aujourd’hui, je suis un cœur de pierre, et plus rien ne m’émeut.) Comme ma sœur l’a déjà raconté avant-hier, les dames pipi de l’école maternelle s’amusaient aussi à me faire chanter Les Remparts de Varsovie, qui n’est pas la chanson la plus enfantine que l’on peut imaginer, que je connaissais par cœur et à laquelle, bien évidemment, je ne comprenais rien. Je ne sais pas très bien comment je pouvais restituer des vers comme Madame promène les gènes de vingt mille officiers de marine.

C’est dans ces eaux-là, aussi, que j’ai commencé à jardiner avec mon père.

Sinon, ma mère a retenu deux images, ou deux souvenirs :

Lors d’une journée à la Mongie en 79 (Pâques) et pendant que ton père et ta sœur skiaient, nous avons arpenté le parking de l'époque, tout en longueur le long de la route menant au col, fermé bien sûr, en regardant les voitures. Tu me donnais leur nom et je te lisais les numéros des départements, ce qui a fait démarrer ta passion des chiffres : grâce à ta mémoire et à ton intérêt pour les voitures, le soir même tu connaissais 40, 64, 65, 33, 31, 32 et quelques autres. Et tu as continué apprenant ainsi de façon très globale !

L'été suivant tu es en photo en train de pagayer sur le lac de Christus à Saint-Paul (avec ton père) tandis que ta sœur est dans un optimiste.

 

(Les souvenirs forment une traînée de poussière.)

 

 

68

 

Fin novembre 2005, je me rappelle m’être promené seul, à Bouchemaine, sur les bords de la Loire la Maine, un matin frisquet. Il y avait un colloque organisé par le centre de recherches angevin spécialisé dans l’étude de la nouvelle et des fictions brèves. Ce n’était que le début d’une longue série de communications enthousiastes donnant lieu à des échanges intellectuels très vifs lors du colloque, et ne débouchant sur aucune publication en raison d’un researcher’s block qui dure encore. J’étais absolument seul à longer la Loire, et à photographier, si mes souvenirs sont bons (car je n’ai retrouvé aucune de ces photographies dans mes archives), la devanture d’un petit restaurant de poissons.

Vers cette même époque, ce même automne, j’ai commencé à écrire plusieurs romans intertextuels dont aucun n’est allé bien loin. L’un d’eux s’intitulait Le Vil Landru à Villandry.

Au cœur de l’hiver, après un très bref séjour à Bagnères-de-Bigorre, j’ai commencé à publier des textes dans un nouveau blog, plus expérimental. Ses teintes grises et noires miroitaient de façon paradoxale le rythme très coloré de ma vie à cette époque. (En fait, c’était juste avant les vacances de février et Bagnères. Mais, je ne sais pourquoi, mes souvenirs persistent à fixer la vraie naissance de ce carnétoile au mois de mars.)

Au printemps 2006, la lutte sociale contre le CPE a donné lieu, non seulement à quelques manifestations auxquelles j’ai participé, avec Alpha, mais aussi au premier blocage de longue durée du site des Tanneurs. Alors que j’avais très peu de cours ce semestre-là, je me suis retrouvé, en tant que responsable des études de Licence 3ème année, à travailler dix fois plus pour répondre aux questions des étudiants démunis, égarés, à participer à des réunions « de crise », à maudire cette forme de lutte sociale qui ne sert qu’à exacerber les positions des uns et des autres sans offrir ne serait-ce qu’une once de début de solution au problème.

Une photographie que j’ai retrouvée de ce printemps montre que je lisais Eric Vuillard, Tariq Goddard, Yémy, Sergio Pitol et Roberto Bolaño (Les Détectives sauvages). À côté de la pile des livres, un flacon de Toplexil. Voilà quelque chose qui n’a pas changé en cinq ans. Autre détail, sur la table de chevet : le réveil rouge, que j’avais acheté en septembre 1994 en arrivant rue d’Ulm, et qui a fini par ne plus fonctionner.

À l’été 2006, après avoir remballé The Good Soldier de Ford Madox Ford, qui n’était plus l’année suivante au programme des concours d’enseignement, j’ai passé une très belle semaine en famille et en Corrèze (est-ce un zeugme ?). Nous avons vu François Hollande à la Fête de l’âne, à Arnac-Pompadour.

En octobre, par une très belle journée, nous avons traîné mes parents au Festival des jardins, à Chaumont-sur-Loire. Ma mère, qui devait finir par se faire opérer de la hanche au printemps suivant, se traînait sans se plaindre. 

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