mercredi, 28 mai 2025
28052025
Hier soir, très belle rencontre avec Maboula Soumahoro, à la Bibliothèque centrale de Tours. Il y avait près d’une centaine de personnes dans l’auditorium du cinquième étage, et, comme l’a fait remarquer Maboula en réponse à une question sur la lutte et la fascisation grandissante du pays, c’était la première fois qu’il y avait autant de monde pour venir l’écouter depuis vingt ans qu’elle travaille – et donc intervient parfois en-dehors de ses cours – à Tours. Plusieurs collègues ou ex-collègues, ainsi que quelques étudiant·es, ancien·nes ou actuel·les (dont Camille Bourdeau, dont Maboula a salué la présence et avec qui j'étais très heureux de pouvoir échanger, trop brièvement, à la fin).
La discussion a tourné autour de son essai Le Triangle et l’Hexagone, bien sûr, mais aussi autour de sa traduction de Lose Your Mother de Saidiya Hartman, qui est remarquable (et dont je m'avise ne pas en avoir parlé dans le vlog). C’était, comme toujours, clair, riche, instructif, lucide. Je n’ai pas posé de question car j’espère qu’on aura cette conversation à un moment donné, mais j’avais bien sûr plein de choses à lui demander sur sa traduction, mais aussi – dans la mesure où elle a expliqué combien il avait été difficile d’écrire le livre en français, alors que les premières ébauches étaient en anglais – sur les raisons (ou le contexte) qui ont fait que son livre a été traduit par quelqu’un d’autre (et pas par n'importe qui : Kaiama L. Glover, traductrice entre autres de Mûr à crever de Frankétienne (je cite celle-ci car je l'étudie régulièrement avec mes L3).
Cette question découle de mon intérêt pour l’auto-traduction, bien sûr, mais aussi de la situation assez particulière dans laquelle je me suis trouvé quand en 2021, Olivette Otele, qui parle et écrit tout à fait couramment (et nativement) le français a sollicité une autre personne (en l’occurrence, moi) pour traduire African Europeans en anglais.
Très heureux d’entendre Maboula clore l’entretien, avant les questions, par plusieurs références à des textes de rap des années 1990 (La Rumeur, Kery James, Tonton du bled de 113 (et elle aurait pu citer son corollaire Tonton des îles)), en soulignant qu’elle en parlait d’un point de vue sociologique et historique, mais qu’il s’agissait de grands textes littéraires aussi. Si j’avais pris le micro pour lui poser une question, j’aurais commencé avec le refrain de Teemour : On s’ra pas des esclaves dans ce millenium. Ça me semble assez bien illustrer ce qu’elle a dit du devoir de mémoire et la nécessité de transmettre les histoires de l’esclavage et de la colonisation – et de leurs conséquences au présent – comme principale réparation (elle l’a dit mieux que ça).
08:17 Publié dans 2025 | Lien permanent | Commentaires (0)
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