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dimanche, 16 octobre 2005

Malsomnie

Dimanche, huit heures et demie.

 

Il faudrait inventer un autre mot qu’insomnie pour une nuit comme celle qui vient d’avoir lieu. Ayant du mal à m’endormir, et me souvenant surtout que je n’avais toujours pas mis en ligne, dans mon carnet Cours 2005, de note concernant l’hétéroglossie (ou le bivocalisme, ou le polylinguisme, depending on the translations from Russian into French), je me suis relevé, ai passé une demi-heure à faire le point, à publier la note en question. Il était minuit passé, et, trop nerveux pour me recoucher immédiatement sans lire de nouveau, je me suis installé dans la buanderie attenante à la chambre de mon fils, ai passé presque une heure à lire le Journal absurde de Harry Laus, puis m’y suis allongé. J’ai mis du temps à m’endormir, et, à trois heures et quart, ai été réveillé par la lumière sur le palier, ma compagne qui se levait, réveillée elle-même par le plic ploc du robinet mal fermé à la cuisine, qui s’égouttait dans une tasse placée au-dessous. Après avoir réglé son compte au bruyant fuyard, je me suis repieuté, cette fois-ci dans le lit conjugal, où j’ai mis un temps infini à me rendormir, pour être éveillé par mon fils, qu, à sept heures moins le quart, avait le nez bouché et n’arrivait pas à respirer. Lui s’est rendormi, mais pas moi, évidemment.

(Pour ne pas accabler ce pauvre enfant, et à titre statistique, c’est la deuxième fois qu’il nous réveille depuis notre retour à Tours, il y a bientôt deux mois, et encore ne peut-on pas parler d’un réveil en pleine nuit… (Quand je pense qu’au même âge, je me réveillais toutes les nuits, parfois deux fois par nuit, taraudé par d’atroces cauchemars, oui, toutes les nuits sans exception dixit ma mère, de trois à six ans, sans faute, dixit ma mère, jusqu’à notre emménagement à Cagnotte, à la campagne (jusque-là, nous vivions dans une petite maison au bord de la route de Bordeaux, à Saint-Paul lès Dax), aussi ne puis-je me plaindre des fort rares éveils nocturnes de mon fils, tout de même…)) (La phrase de la seconde parenthèse, celle qui commence par « Quand je pense… », n’a pas de verbe principal, ou plutôt il y a une rupture de construction (asyndète) avec la seconde partie (apodose), qui, commençant par « aussi ne puis-je », ne correspond en rien à la première (protase).)

Ayant réussi à écrire un long paragraphe exclusivement composé de parenthèses, je poursuis mon sillon, et mon propos initial, qui était de dire qu’il faudrait parler, en anglais, d’illsomnia plutôt que d’insomnia, ou de restlessness en un sens nouveau, plutôt que de sleeplessness. Et, en français, de malsomnie, de “mauvais sommeil”…?

Ce qui me fait penser que, donnant, jeudi dernier, à André Markowicz la liasse des textes que j’ai soumis à la sagacité de mes étudiants du cours d’analyse de textes littéraires (il doit intervenir lors de la dernière séance du semestre et proposera un travail autour dela traduction d’un de ces textes), il a « tiqué » (favorablement, me semble-t-il) en voyant le très beau poème de Tatamkhulu Afrika, Insomnia, que je dois étudier en semaine 5, soit, précisément, le mardi 25 octobre. Il se trouve que j’avais choisi ce texte longtemps avant la note de Livy relative à l’insomnie, et longtemps aussi avant la mince torrentielle prose publiée dans ce carnétoile et intitulée L’insomnie étend. André Markowicz a « tiqué » car il ne connaît pas Tatamkhulu Afrika (who does, indeed?), et j’ai le secret espoir, s’il aime ce poème, qu’il le choisisse, car il est extrêmement difficile et j’aimerais confronter mes vues aux siennes, en l’espèce.

Commentaires

A propos de André Markowicz.
Il est l'invité de l'émission "à voix nue", tous les soirs de la semaine sur France Culture, en compagnie de sa "maman" (dixit Laure Adler).
Votre blog est un modèle d'érudition et de tenue, léger et passionnant.
D.

Écrit par : Inactuel | lundi, 17 octobre 2005

Amusant: Markowicz a parlé lui-même, en conférence, de sa "maman". Ce tic infantile m'horripile, mais, dans son cas, je crois qu'il s'agit effectivement d'une... maman. Et, à tout prendre, c'est le genre de personne à qui, du fait de leur immense talent et leur grande modestie, on passe volontiers ce style de petits glissements.

Écrit par : Guillaume | lundi, 17 octobre 2005

J'avais mentionné en un autre lieu et il y a une paire d'années une étude d'un linguiste à propos de la fréquence des mots « maman » et « papa » dans les discours d'adultes qui ne s'adressent pas à des enfants. En gros, la conclusion était que cela devenait de plus en plus fréquent même dans des situations où un registre soutenu, voire solennel, s'imposerait. J'avais été très frappé lors des discussions au sujet de la sécurité sociale d'entendre Douteux-Blabla et surtout Xavier Bertrand (nettement plus sérieux que le précédent) parler des « papas et [des] mamans » à la chambre ou à la radio. Cela me semble un tic d'époque. Quant aux conclusions... je suis partagé entre différentes opinions, mais j'observe le phénomène avec autant d'attention que le fait de placer son enfant à distance en disant « l'enfant » et non plus le prénom ou mon fils, mon enfant (c'est une autre tendance lourde).

Écrit par : Dominique | mardi, 18 octobre 2005

"L'enfant nous a fait une grippe". (Et la chatte, pour lui faire prendre la pilule, je te raconte pas.)

Écrit par : Guillaume | mardi, 18 octobre 2005

Les commentaires sont fermés.