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samedi, 23 juillet 2005

Promesses

Je m’amuse souvent à user des expressions synonymes «promesse de Gascon» et «promesse de Normand», car il se trouve que je suis Normand par dérivation paternelle, et Gascon par le lignage maternel. Autant dire que j’étais condamné à ne pas tenir mes promesses, même si je crois ne pas les tenir trop mal en général, surtout dans une époque où la parole donnée vaut de moins en moins (et je pense là, notamment, à cette collègue éminente qui ne cesse de poser des lapins aux étudiants, de changer l’ordre du jour des réunions, de ne pas faire le travail qu’elle s’était engagé à accomplir, puis va s’imaginer que la prétendue fuite de nos étudiants vers les rivages de la Seine est imputable à tel collègue, ou à telle autre…)

Je ne connais pas l’origine des expressions, qui voient en Gascons et Normands de piteux roublards, ou de fieffés menteurs. Je constate qu’à la page 498 du tome 5 du Dictionnaire alphabétique et analogique de la langue française (réédition de 1981), Paul Robert ne semble connaître que celle qui vise les méridionaux. Aurais-je, depuis des lustres, confondu avec autre chose ? Avec la réputation des Normands pour le demi-mot, leur tendance à ne pas se mouiller, comme dans la chanson (posthume) de Brassens ?

Non. Dans son remarquable Nouveau Dictionnaire universel de 1881, en trois volumes, Maurice Lachâtre confirme ce que je pensais savoir : “normand” signifie “peu sincère, ambigu”, comme dans les expressionsréponse normande, promesse normande. Ma double origine, ou ma généalogie bifrons, se vérifie donc, d’autant qu’elle s’autorise, sur ce point, d’une référence à La Fontaine, pas moins : «certain renard gascon, d’autres disent normand». Voilà d’où venait, sans doute, ma certitude, car il s’agit d’une fable que j’appris dans mes jeunes années. (Comment ne pas s’étonner, d’ailleurs, de ce jeune professeur de lettres qui avouait benoîtement, sur une liste de discussion réservée à ses pairs, n’avoir jamais lu ni étudié une ligne de La Fontaine au cours de ses études, et, pis, ne savoir qu’en faire ? Mais ce débat, comme je m’en étais fait l’écho, a déjà eu lieu ailleurs.)

Revenons à la parole donnée. J’ai, ce printemps, pour cause de travail imprévu et excessif, manqué à ma parole auprès d’une personne qui m’est chère, et dont je n’ai pas relu tous les chapitres de thèse qu’elle m’avait demandé de lui relire. Ce genre de faux pas est inhabituel, mais scandaleux. Je dois garder cela en tête, ou le porter au front comme une marque au fer, afin que cela ne se reproduise pas. Lachâtre nous apprend que ne pas tenir ses promesses se dit, fort ironiquement, je trouve, se ruiner en promesses.

Je ne saurais finir sans quelques embardées littéraires. Ce qui me saute aux oreilles, évidemment, c’est le célèbre vers de Malherbe (rappelons que je lisais, courant juin, le Pour un Malherbe de Francis Ponge) : «et les fruits passeront la promesse des fleurs ».

Parlant de Kairouan, Maupassant écrivait : «nous apercevons entre les maisons un beau ciel propre et pâle plein de promesses de chaleur et de lumière». Cette citation, empruntée, une fois encore, au Grand Robert analogique, pourrait me pousser vers l’exploration de souvenirs tunisiens, ou, tout simplement, à dire que ce sont de pareils cieux qui agrémentent en ces temps-ci, sur le matin, notre séjour landais.

Commentaires

Je voudrais apporter une nuance entre les expressions "promesse de Normand" et "promesse de Gascon" qui, AMHA, ne sont pas tout à fait synonymes. (Elles le sont dans la mesure où le locuteur n'a pas l'intention de les tenir, mais pas dans ses motivations). Le Normand, avec le "ptêt ben qu'oui, ptêt ben qu'non", entend ménager aussi longtemps que possible la chèvre et le chou, de manière à faire, le moment venu, le choix le plus favorable à ses intérêts. C'est un flegmatique. Le Gascon fait des promesses inconsidérées, dans le but immédiat de séduire son interlocuteur et sans réfléchir aux conséquences qu'une promesse induit. C'est un paon qui fait la roue. On voit tout de suite les différences de comportement que cela suppose entre peuples du Nord et du Sud...

Écrit par : fuligineuse | samedi, 23 juillet 2005

Revenons à la parole donnée. J’ai, ce printemps, pour cause de travail imprévu et excessif, manqué à ma parole auprès d’une personne qui m’est chère, et dont je n’ai pas relu tous les chapitres de thèse qu’elle m’avait demandé de lui relire.

Il n'est pas trop tard maintenant qu'elle est entièrement écrite!

Écrit par : thésarde | samedi, 23 juillet 2005

Bonjour,

Concernant l'origine de l'expression "une promesse de Gascon" ou "une promesse de Normand", ne faudrait-il pas chercher du côté de l'histoire de France, vers 1200 et des poussières, à cette époque si particulière où les alliances se nouaient et se dénouaient tout aussi rapidement dans cette guerre qui opposait Phillipe Auguste, Jean Sans Terre et l'Empereur d'Allemagne (dont j'ai perdu le nom...) ?

Salutations amicales,

Pierre DOMENY

Écrit par : Pierre DOMENY | vendredi, 30 septembre 2005

Revenons à la parole donnée. J’ai, ce printemps, pour cause de travail imprévu et excessif, manqué à ma parole auprès d’une personne qui m’est chère, et dont je n’ai pas relu tous les chapitres de thèse qu’elle m’avait demandé de lui relire.

Il n'est pas trop tard maintenant qu'elle est entièrement écrite!

Écrit par : funny things | vendredi, 24 avril 2009

Je n'ai jamais pensé à ces comme ça, merci pour un conseil agréable.

Écrit par : casino en ligne | vendredi, 24 juin 2011

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