Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

jeudi, 20 juin 2013

15

 

Peut-être que je confonds tout, mais, si j’ai bien lu cette pièce à l’âge de huit ou neuf ans, c’est dans la foulée que j’ai joué moi-même des pièces inventées on the spot, toujours improvisées en alexandrins. (Très impressionné, au sens photographique du terme, par les films que l’on regardait en famille par la grâce du magnétoscope Betamax, je découpais aussi les journées les plus banals, dimanches dehors ou mercredis pluvieux, en séquences cinématographiques.) — J’ai le souvenir très précis d’avoir, là encore vers huit ou neuf, ans, tapé à la machine à écrire (la petite Lettera 32 que mon père nous avait prêtés, ne se servant plus que d’un plus colossal appareil) quelques scènes en alexandrins d’une sorte de comédie sans queue ni tête. Seule véritable réminiscence, un des quatre cinq personnages se nommait Deffailles.

mercredi, 19 juin 2013

14

 

Les Fâcheux se trouve être, je pense, avec Dom Garcie (j’espère ne pas estropier le titre – la tragi-comédie en question n’était jamais mentionnée que pour en souligner l’échec cuisant), la pièce de Molière la plus inexistante : jamais jouée, jamais étudiée, jamais commentée, jamais même évoquée au passage. Or, dans les années quatre-vingts, on pouvait trouver, dans une maison d’instituteurs, un exemplaire bon marché, scolaire, de cette pièce… et un gamin n’y comprenant goutte, lire ces alexandrins. Ce fut pourtant déterminant.

mardi, 18 juin 2013

13


Il m’est difficile de le dire – car, vers huit ans, je fus embringué par ma sœur dans une réécriture très brève et futile de L’Avare (que nous avions vu en film, dans la version avec Louis de Funès) – mais je crois que le premier Molière que j’ai lu n’est autre que Les Fâcheux. Je revois fort nettement le petit livre, une sorte de clone approximatif (brun ou sépia) des vieux Classiques Larousse, et me revois lire cette pièce, en n’en comprenant que très partiellement le langage, la situation et l’enjeu, dans la maison de mes grands-parents, à Saint-Pierre-du-Mont.

Item.

lundi, 17 juin 2013

12


Item. Je me fâche, bien sûr, et ne décolère pas. Ça n’a pas le sens commun, mais ainsi suis-je fait, me dis-je. Maudit je.

Donc la fâcherie serait mon élément substantiel ? Je ne le crois pas, toutefois.

Prendre des gants, comme je le fais, n’est-ce pas le signe d’une gêne qui en dit long ?

dimanche, 16 juin 2013

11

 

Et aujourd'hui, pour la fête des pères, j'étais tout de gris vêtu, mais, en ville, sans que ce soit trop incongru, avec mes souliers en daim bleu.

samedi, 15 juin 2013

§

10


Les chaussures noires bon marché de chez Labarrière, à Dax, que j'y avais achetées au printemps 1995, peut-être, étaient quasiment les protagonistes du premier chapitre du roman que j'écrivis à Oxford à partir de janvier 1996, dont j'ai déjà parlé, je crois, qui s'intitulait Frasques, et dont je crois avoir perdu le tapuscrit, non sans l'avoir pourtant, au préalable, interrompu et fondu dans un ensemble hétéroclite, Feuilletons !, dont les différents fragments portaient des titres commençant par la lettre F.

vendredi, 14 juin 2013

9


Le jour où, à six ou sept ans peut-être (c'était “à la préfecture”), je sortais du magasin avec mes chaussures neuves (beige), je n'en ai aucun souvenir.

jeudi, 13 juin 2013

8

La nostalgie n’est rien, si elle n’est pas constitutive d’une forme.

(J’écris cette phrase tandis que je me débats dans le pire chaos professionnel d’une carrière accaparante qui a connu quelques soubresauts et qui n’a rien d’une carrière.)

 

Pourtant, sans une forme exigeante, la nostalgie ne peut pas avoir de sens, ni permettre d’élan.

mercredi, 12 juin 2013

 

7

Que les textes, comme les années, se constituent par l’accumulation de structures figées (31 jours, 13 lunes, cinq années valant un lustre, etc.) que seules les ambiguïtés (parfois délibérées) de la langue peuvent rendre plus mobiles, et, à ce titre, émouvantes, je l’ai toujours su, même sans l’exprimer ainsi, même sans le comprendre, y compris cette année-là, tapant à la machine dans l’obscurité du studio et la douceur moite des nuits de mai.

Quoique… une journée ne compte pas neuf heures.

mardi, 11 juin 2013

 

6

Un jour, étant descendu du bus trois ou quatre arrêts avant la résidence Coppélia (grand ensemble blanc dont l’allure n’évoquait guère, contrairement à son nom, entrechats et pirouettes), je marchai, passai d’ailleurs devant une pharmacie un peu à l’écart, et que je n’avais jamais vue avant, même en observant le trajet depuis mon siège ou ma station debout, et composai in petto, ou en fredonnant discrètement, toute une chanson, dont le refrain, constitué du seul vers « Dans les rues de Bordeaux », devenait, à la fin, et répété ad lib. « Dans les rues de Talence ».

Le nom de la petite ville, tout autant que certains de ses quartiers ou certaines de ses rues, m’a toujours beaucoup plu : sept lettres, deux syllabes, un final mélancolique, des échos à la fois obscènes et chevaleresques, et cette attaque abrupte, brutale (TAL), qui en latin évoquerait la valeur ou l’analogie, tandis qu’en allemand on serait plutôt du côté de l’églogue, des riantes vallées de la pastorale. À l’époque, je me sentais pleinement exister dans cette petite ville, qui n’était pourtant pas du tout « mon lieu », et où, hormis étudier (c’est-à-dire travailler tard le soir à mon bureau, près des grandes baies donnant sur le balcon, mais aussi écrire) et prendre le bus, je ne faisais pas grand-chose de spectaculaire. La première année à Talence fut toutefois une des plus essentielles de ma formation, et si, bien entendu, cours ou rencontres, le drame se jouait à Bordeaux, il n’en demeure pas moins qu’il se cristallisait dans le studio de Coppélia, et donc que, le plus fort du sens se situant au terme, comme dans la chansonnette, l’année n’a valu que par les rues de Talence.

lundi, 10 juin 2013

 

5

À un tel rythme, le récit pourrait voir l’envol, par un matin brumeux et froid, de cent quarante mille oiseaux blancs, au-dessus d’un lac gelé, en Tanzanie.

dimanche, 09 juin 2013

 

4

L’Ennemi, me semble-t-il me souvenir, est un des rares romans de Pinget que je ne me rappelle pas avoir lu, et dont j’ai tout oublié. L’oubli m’a toujours fait l’effet d’un allié périlleux. Déjà, à Oxford, j’avais tenté de m’en expliquer, pataud.

(Je sais que j’ai lu L’Ennemi. Où ni quand, ni quoi, voilà.)

samedi, 08 juin 2013

 

3

L’année où j’ai retenté le concours n’a pas été une année de souffrances. Au contraire, elle était très exaltante, j’étais presque aussi exalté que l’année encore auparavant, quand je rentrais tous les soirs, avec le bus A, en banlieue sud, par des cours embouteillés. Ce fut une année (la troisième) assez frénétique, un peu de Guronsan, un traitement régulier et suivi au Roaccutane, étais-je dopé pourtant ? (Pendant quelques semaines, avant le printemps, il fallut arrêter de manger, quoi, du fromage.) Tout ça est en vrac, j’en ai conscience. Ça s’ordonnera.

vendredi, 07 juin 2013

 

2

Vos étonnements devant la tombe du poète inconnu, un éditeur les a ravalés au rang de pure soupe. Depuis la date précise de la fondation de la Ville, tant de phrases se sont accumulées, s’accumulèrent – il n’y avait pas grand-chose à méditer, et encore moins à faire. Tous bouffis d’orgueil et confits dans leur oisiveté, ils attendaient que ça (les alouettes) leur tombe tout engraissé dans la goule. Une vouivre émigra, de dégoût. On disait : tel est pris qui croyait prendre.

jeudi, 06 juin 2013

 

1

Tel est pris qui croyait prendre, affirmation sans ambages.