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lundi, 10 juin 2013

L'ex imparfait, ou le français langue étrangère selon Claude Meinau

L'avantage, avec France Infos, c'est que l'on peut comparer les manières parfois diverses dont est formulée, à un quart d'heure d'intervalle, la même information. C'est souvent très édifiant. Parfois aussi, c'est la répétition à l'identique qui surprend.

 

Ce matin, à 11 h 30, j'ai entendu Claude Meinau annoncer, parmi les titres, la mise en examen, dans le cadre de l'affaire du Crédit Lyonnais et de Bernard Tapie, de deux personnes, dont l'une « était à l'époque l'ex-directeur de cabinet de Christine Lagarde ». Il s'agit très évidemment d'une ineptie, ou plutôt d'une absurdité. Quand on est ex-quelque chose, on l'est à tout jamais, donc l'imparfait rend la phrase incompréhensible.

Ce que l'on est réduit à supposer (comme dans la copie d'un mauvais étudiant en langues étrangères), c'est qu'il s'agit de l'ex-directeur de cabinet de Christine Lagarde, et qu'il est justement mis en examen parce qu'il occupait à l'époque cette fonction.

Comme cette absurdité est assez énorme, tout de même, on se dit qu'il s'agit d'une brève mal rédigée et mal lue (ou mal déchiffrée) par le journaliste, et que le prochain à prendre la parole (lui ou un collègue) rectifiera le tir. Or, pas du tout. 11 h 45. Nouveaux titres. Derechef Claude Meinau. Et rebelote. « Stéphane Richard, qui était à l'époque l'ex-directeur de cabinet de Christine Lagarde ».

 

Claude Meinau ne s'entend pas parler, il ne comprend pas les mots qu'il emploie, il ne sait pas ce qu'il raconte. Comment, alors, avoir une confiance même quelconque en de tels “journalistes” ?

 

 

5

À un tel rythme, le récit pourrait voir l’envol, par un matin brumeux et froid, de cent quarante mille oiseaux blancs, au-dessus d’un lac gelé, en Tanzanie.

dimanche, 09 juin 2013

Verdeur

 

Puisque je m'apprête à remplacer, une nouvelle fois, l'épigraphe (ou le sous-titre) de ces carnets, j'archive ici l'actuelle bientôt éteinte :

 

« Ma tige a reverdi de sève et de verdeur. »

Une course landaise en Touraine (Parçay-Meslay, 9 juin 2013)

Était annoncée, pour cette après-midi, et depuis fort longtemps, sur le site Internet de la FFCL, une course mixte à Parçay-Meslay, soit à deux pas de chez nous. On sait que les ganaderias « de seconde » organisent plusieurs fois par saison ce genre de démonstrations dont le but est de faire connaître la course landaise à un plus large public, et loin de ses territoires habituels. Alpha et moi avions déjà vu passer des annonces de telles courses dans la Vienne, ou dans la Sarthe. Là, notre curiosité ne pouvait manquer d’être piquée au vif, et, bien que nous voyions chaque été plus d’une dizaine de courses formelles, concours ou courses de l’avenir, en dépit aussi de l’absence totale d’information locale et d’une météo qui me semblait de nature à avoir découragé le montage des arènes, nous sommes allés voir du côté de Parçay-Meslay, au cas où.

Parçay-Meslay, qui est surtout connue pour sa belle grange de Meslay, édifice remarquable où se tient, chaque année, en juin, le Festival des Journées Musicales, est une petite cité dortoir proche de Tours. 

Sans titreAprès les quatre minutes de route règlementaires (pas de feu rouge, pas de gendarme à alcootest embusqué au rond-point des Compagnons d’Emmaüs), nous y voici. — En effet, il s’y tenait une course mixte. Nous sommes arrivés peu avant trois heures, et avons compris que l’accès était gratuit (c’est la municipalité qui offrait le spectacle), et que la présence, si loin des Landes, de la ganaderia du Grand Soussotte était liée à un jumelage entre la commune de Parçay-Meslay et celle de Pomarez (ou entre la fanfare locale et la banda des Daltons, de Labatut – pas sûr d’avoir compris). D’ailleurs, la deuxième vache sortie se nommait Parcillonne, car elle avait été baptisée lors d’une précédente course en terre tourangelle, il y a de cela trois ans. Il s’agissait d’ailleurs d’une belle vache, très franche et sérieuse.

Sans titreMal installés, un peu fatigués par le speaker, pas trop rassurés non plus par la manière dont étaient installées les grilles servant d’arènes (sans compter que trois personnes persistaient à se coller, pour prendre des photographies, aux dites grilles au mépris de toutes les règles de sécurité), nous sommes restés une grosse demi-heure, mais assez pour voir le sauteur basque Mathieu Michelena proposer un saut qui n’est plus, selon moi, au répertoire depuis plus de trente ans, et que, dans tous les cas, ni Alpha ni moi n’avions jamais vus : le saut du bâton !

Sur les trois écarteurs ayant fait le déplacement, Caroline Larbère, la chef de cuadrilla du jour, et Romain Duplaa nous ont fait bonne impression, tandis que Johnny Valdès, à côté de la plaque sur son premier écart, était touché à l’épaule par Parcillonne alors qu’il cherchait à regagner une des talenquères.

 Sans titre

Cette petite heure (boniment de vulgarisation et Cazérienne enregistrée compris) était tout à fait étrange, car tout semblait décalé, dégéolocalisé, si j’ose le néologisme. Témoin de ce sentiment de décalage, je n’avais pas fait suivre mon appareil photographique, et n’ai donc pu saisir que trois clichés minables au moyen de mon smartphone.


µµµ  petite bourgade sans charme, où l’on trouve, à l’exception de deux ou trois bâtisses un peu anciennes et des petits commerces du centre, les inévitables bicoques en camelote des années 70 et les théories de lotissements hideux des années 80-90. Elle prospère (c’est-à-dire qu’elle crève, bien sûr) grâce à quatre « zones d’activité » qui ont achevé de tuer en elle tout charme, ou tout sens du paysage.

700 postes sur 930 supprimés à Joué-lès-Tours

Mines fermées à la sortie de l'usine Michelin hier à 13 heures.

Peut-on être sûr que le jeu de mots n’est pas intentionnel ?

Le journaliste a peut-être voulu susciter un rapprochement avec l’ère de Germinal, mais aussi avec la crise des hauts fourneaux.


L’an dernier, lors d’une réunion visant à « cobayer » des sujets pour le baccalauréat de français, un inspecteur avait donné la liste des auteurs trop sensibles, risquant de provoquer la colère des associations de parents d’élèves, des catholiques, etc., et dont il ne fallait pas même songer à choisir un extrait.

 Parmi eux,  Houellebecq, Zola.

« Le diable bat sa femme »

Différences phonologiques et lexicales aux Etats-Unis ?

Je dois à mon collègue Sylvain Gatelais d'avoir attiré mon attention sur ces cartes absolument fascinantes, et dont je recommande la lecture à toutes personnes qu'intéresse la langue anglaise (ou la question des « idiomes régionaux » en général).

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J'en retiens une, ici, qui m'intéresse particulièrement, parce que les auteurs de l'étude ont l'air de considérer que les locuteurs, très minoritaires, qui disent “the devil is beating his wife” pour décrire le phénomène soleil+pluie sont des hurluberlus de première. Or, comme par hasard, et quoique les auteurs de l'article aient choisi de pointer du doigt l'Alabama et le Mississippi plutôt que la Louisiane, ils se trouvent dans l'une des zones qui fut le plus au contact de la culture francophone. Cette expression est, de fait, le calque, mot pour mot, d'une expression que j'ai toujours entendu dire à ma mère : « le diable bat sa femme ».


Bien entendu, il faudrait pousser les recherches à ce sujet...

Quelques pistes :

 

 

4

L’Ennemi, me semble-t-il me souvenir, est un des rares romans de Pinget que je ne me rappelle pas avoir lu, et dont j’ai tout oublié. L’oubli m’a toujours fait l’effet d’un allié périlleux. Déjà, à Oxford, j’avais tenté de m’en expliquer, pataud.

(Je sais que j’ai lu L’Ennemi. Où ni quand, ni quoi, voilà.)

samedi, 08 juin 2013

« Antifascisme » et marque-repère

On m'appelle à un grand rassemblement à la mémoire de Clément Méric et contre l'extrême droite, cette après-midi, à Tours. Que les choses soient claires : il est évident que je dénonce les actions de tous les petits salopards de miliciens et autres encagoulés, à commencer par les meurtriers de Clément Méric, et que je m'associe au deuil de sa famille.

Toutefois, deux ou trois petites choses me taraudent, au sujet de ce rassemblement annoncé à Tours, et pas seulement le fait que cette manifestation émane de la section locale du PCF, alors que, de notoriété publique, tous les responsables politiques ont été fraîchement accueillis avant-hier soir place Saint-Michel (à Paris), les « antifascistes » proches du défunt assassiné criant à la récupération. (À cette occasion, il paraît que, pour une fois, notre Grand Psychotique National, le tribun Mélenchon, a fermé sa gueule, ce qui devait être quand même très savoureux pour les personnes présentes.)


En l'espèce, et depuis jeudi, il semble avéré (et je l'écris en grands caractères, afin que tout ce qui suit perde de sa force si je devais être victime de désinformation) que l'assassinat de Clément Méric a fait suite à la “rencontre” de quatre antifascistes et de petits caïds d'extrême-droite lors d'une vente de privée de vêtements de marque, vêtements qui, nous dit-on, serviraient de “signe distinctif” à l'un et l'autre groupe (l'adjectif distinctif étant du plus haut comique pour décrire un signe d'appartenance même pas distinctif d'une quelconque idéologie).

L’enquête de la police judiciaire parisienne doit encore déterminer les circonstances exactes de la bagarre survenue dans le IXe arrondissement de Paris entre deux groupes à la sortie d’une vente privée de vêtements de marques, prisés tant par les membres de groupuscules d’extrême droite que par les militants antifascistes.  (Source : LCP)


Si cela est avéré (grands caractères derechef), j'avoue ne pas comprendre, et, quoique je sois prêt à poursuivre toutes les luttes contre les ennemis de la démocratie, j'avoue ne pas pouvoir m'identifier à des « antifascistes » qui participent à la grand messe consumériste des “ventes privées” et poussent l'esprit de corps jusqu'à adhérer à l'achat de vêtements selon la marque, pour ne rien dire du choix d'une marque identique à celui fait par leurs “ennemis” d'extrême-droite.

En effet, les fameuses « marques » sont un des moyens contemporains d'aliénation du peuple par le Capital et de dépolitisation les plus flagrants. Par ailleurs, qui achète des « marques » participe, de fait, à la hiérarchisation de la société selon des codes “culturels” sans rapport, ni avec l'idéal humaniste, ni avec l'héritage des Révolutions, ni avec la tradition démocratique française, ni avec la lutte des classes (ce dernier point me semblant devoir être au centre des préoccupations de jeunes militants de gauche ou d'extrême-gauche). Enfin, la plupart des temps, adhérer au marquage consumériste par les marques, c'est aussi participer activement à l'exploitation des travailleurs du Tiers-Monde, voire à leur destruction (au Bangladesh par exemple).

Comment peut-on, d'une part, être militant  « antifasciste » et syndiqué à SUD, et, d'autre part, cautionner le système consumériste des marques et l'exploitation des travailleurs ?

 

3

L’année où j’ai retenté le concours n’a pas été une année de souffrances. Au contraire, elle était très exaltante, j’étais presque aussi exalté que l’année encore auparavant, quand je rentrais tous les soirs, avec le bus A, en banlieue sud, par des cours embouteillés. Ce fut une année (la troisième) assez frénétique, un peu de Guronsan, un traitement régulier et suivi au Roaccutane, étais-je dopé pourtant ? (Pendant quelques semaines, avant le printemps, il fallut arrêter de manger, quoi, du fromage.) Tout ça est en vrac, j’en ai conscience. Ça s’ordonnera.

Touché d'un coup d'épingard

Sans titre

vendredi, 07 juin 2013

 

2

Vos étonnements devant la tombe du poète inconnu, un éditeur les a ravalés au rang de pure soupe. Depuis la date précise de la fondation de la Ville, tant de phrases se sont accumulées, s’accumulèrent – il n’y avait pas grand-chose à méditer, et encore moins à faire. Tous bouffis d’orgueil et confits dans leur oisiveté, ils attendaient que ça (les alouettes) leur tombe tout engraissé dans la goule. Une vouivre émigra, de dégoût. On disait : tel est pris qui croyait prendre.

jeudi, 06 juin 2013

 

1

Tel est pris qui croyait prendre, affirmation sans ambages.

Débarquement, fin d'an VIII

 

Nous y voici, donc, à ce huitième anniversaire.

Peut-être est-ce sous l’influence durable – sa découverte, puis la lecture de tous ses romans et chroniques aura été, pour moi, un des chocs les plus essentiels – de Robert Pinget que je résiste ainsi, et atteins un certain niveau de persistance dans le dérisoire.


(je cite de mémoire)


Reprendre joyeusement l’affreux harnais écrit Monsieur Songe. Puis il biffe l’affreux. Puis il biffe harnais. Reste reprendre joyeusement.


(je cite de mémoire)

mercredi, 05 juin 2013

Vingt distiques — Contre l'Uruguay.

On a lourd du terrain qu'il a vraiment minable

Et que plus qu'à gazon ç'être un vrai bac à sable.


Le coach a énervé que contre Uruguayen

FIFA désignut l'arbitre paraguayen.


Je n'a pas su pourquoi j'ai pas dur le terrain

Endroit que j'aime courir comme d'un lapin.


Celui qui s'appelont Diego Lugano

Glissut sur le ballon tel que sur du guano.


Golri-je que "hard" ç'a la verlan de Dehar,

Zahia que j'aime bien y enfoncir mon dard.


J'a obligé d'écrire en rimes de Zahia

Comme qu'on s'emmerdut un max de le tchema.


Comme qu'il visut les touches de Bakary

Le coach a dur qu'on a savu qu'il a pas ri.


 

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L'arbitre qu'il est fou de sur la pelouse est

Aspergé le coup franc par la mousse à raser.


Deux arrêts décisions qu'il est le Nucera

Et j'a criu Dimitri "ché sera sera".


Un carton jaune a prendu le milieu Maxi

D'est croivu qu'il allont taclir un gros taxi.


Bogoss qu'en le matant dans leur lit (Yo Gourcuff)

Les meufs ont même prêt à mettir des handcuff.


Soares bien perci qu'il un pointu profond

Est mettu Mandanda qu'il en est bien au fond.


Mandanda impuissé qu'on ont pris 1-0

Thaï Nana Liza dit c'être de Kazéro.


Que je (Franck pas Cingal) même pas sur le banc,

Occupi peut-être à faire lapir mon gland.


Dégoûti pas golri j'a de Bafetimbi

Qu'il a rentri bientôt sa tronche de zombi.


Gomis et Valbuena sur le terrain perdus

Presque autant que téléspectateurs s'emmerdut.


Comme si j'étions enfermu dans un linceul

Remplaçants de l'équipe en connus plus un seul.


Plus si t'ont les cheveux de Gomis que Gourcuff

T'ont bien emmerdu en cas où de dandruff.


Cheveux de rastaquouère et de forme mygale,

Ç'a jalousie en fait d'alopécie cingale.


Juste avant la défait et le sifflet final,

J'a pensu foot plus sopo que du gardénal.

 

mardi, 04 juin 2013

Mirages, les deux vanités

Ce n'est pas le foutoir total, ce n'est même pas le foutoir du tout, mais enfin, ma vie n'est pas très ordonnée non plus. C'est à cela que je songeais, très entre autres choses, cette nuit, sur le canapé rouge, entre trois heures et sept heures du matin, après un réveil très (très quoi ? matinal? “précoce” ? faut-il écrire tôtif comme Renaud Camus ? mettons x, donc :) X, je me suis forcé à me réveiller d'un début de cauchemar atroce, ai donné à manger à la chatte (qui m'avait pesé sur les jambes), elle est sortie, je me suis installé à lire dans le canapé rouge, au bout de trente ou quarante minutes, elle a remiaulé derrière la porte de l'escalier, a rôdé dans la maison, est venue me rejoindre sur le canapé, je lisais et me disais que ma vie n'est pas très ordonnée. Déjà, le monde est un foutoir. Tout le monde parle du froid, c'est vrai, c'est notable, jamais vu ça, j'ai bientôt quarante ans – le chauffage “se relance” à six heures du matin, un 4 juin, invraisemblable – mais le plus marquant, ici, c'est le vent, fort et froid, vent fort depuis plusieurs années, tous ces connards de promoteurs et d'édiles n'ont qu'à continuer à tout ratiboiser pour planter des résidences, de moins en moins d'arbres et de plus en plus de permanentes demi-tempêtes. Bref, le foutoir. Ma vie, nettement moins foutraque, mais enfin...

Je pensais surtout à l'anniversaire imminent de ces carnets (huit ans après-demain que j'écris et publie en direct mes écrits, par jets et aussi par intermittences, n'ai-je pas fêté récemment le trois millième “billet”?), à mes très vagues sans cesse réimaginés et sans cesse remis à plus tard projets de rassembler tel ensemble de textes sous forme de livre, envoyer à un éditeur etc. Non que je ne l'aie jamais fait : longtemps avant Touraine sereine, j'ai envoyé une sorte de roman à P.O.L. (en 1997), un recueil de poèmes au Dé bleu (en 2000, je crois, ou peut-être même 1999), et enfin J'allaite le nouveau Kant, dans une version remaniée, à Harpo&, en 2006 (ou 2007?). La réponse que j'ai reçue de l'éditeur (et que je n'ai pas gardée, comme je ne possède pas (plus) la moitié des tapuscrits rédigés sous d'autres formats, en d'autres époques (disquettes Mac désormais illisibles, je ne sais même pas où elles sont)), en cette dernière occasion, était très encourageante : très en gros, il m'écrivait qu'il n'était plus en mesure de publier de nouveaux textes, commentait favorablement mon petit livre, et je sentais en effet sincèrement, entre les lignes, que mon texte était largement, selon lui, publiable. Tout cela est marqué du sceau d'une totale vanité : non l'arrogance de l'auteur enfin publié (il se publie tant de sombres merdes, y compris dans le créneau “poésie”, y compris dans le créneau textes abstraits ou semi-abstraits) mais la vanité de la publication elle-même, le côté tout à fait dérisoire qu'un texte qui a pu être lu ou parcouru par quelques dizaines d'internautes devienne un volume de papier qu'achèteront ou liront peut-être 100 ou 150 âmes. Ce sentiment absolu de la vanité de toute mon entreprise est la raison pour laquelle je n'ai jamais vraiment soumis de textes. Il y a un an et demi, quand j'ai écrit, en 37 jours (c'était le dispositif), Exister est un plagiat, c'était dans l'optique d'obtenir, à l'issue des 37 jours, un texte à peu près publiable (c'est-à-dire soumissible) tel quel. Dès l'écriture achevée, je me suis lancé dans la mise en forme, sous Word, du texte fini (dont le titre devenait La Crise de la dette grecque) mais ai aussitôt été pris entre trois feux contraires : la lassitude de reprendre, si peu fût-ce, un texte déjà écrit ; l'envie de me lancer dans de nouveaux projets d'écriture ; la tentation de transformer la version Word du texte déjà publié dans Touraine sereine en quelque chose de radicalement autre, avec ajouts de textes plus anciens, renvois en marge, écriture sur trois colonnes, bref, un truc tentant mais absolument incompatible avec mon tempérament velléitaire.

Donc, à quoi bon, à quoi bon, à quoi bon, à quoi bon, le tout répété ad lib. ad lib. ad lib.

Ce qui n'a pas peu contribué à ma réflexion sur cette vanité, et sur la question des caps, outre l'imminence du huitième anniversaire de Touraine sereine et (on dira, pour aller vite) de mes 40 ans, c'est la découverte, hier matin, sur une table de cette librairie que je n'aime pas et où je ne vais que forcé, d'un “roman” que publie un ancien camarade de classe préparatoire, lequel, jadis médiocre connard doublé d'un fat dénué de tout sentiment de son propre ridicule, s'avère (après des échanges privés, sur Facebook, avec une amie qui l'a côtoyé plus récemment) être resté le même crétin manipulateur bouffi de suffisance. Tout est parti de la lecture, en librairie (mais on les trouve aussi sur Google Books), des 5 premières pages du roman, qui sont d'une indigence totale. Clichés, tics d'écriture à deux balles, pauvreté du lexique, métaphores lourdingues lourdement élucidées... c'est si mauvais qu'on se croirait dans un Marc Lévy, ou dans un Gérard de Villiers repassé à la moulinette du campus novel. C'est à ne pas le croire : on pense toujours qu'il faut n'avoir rien lu, ne rien connaître, ne rien comprendre, pour pondre de pareilles bouses. Or, ce n'est pas le cas : on peut être passé par “la prépa”, avoir dû lire les grands auteurs de la littérature européenne, les avoir fréquentés assidûment, et même être devenu “spécialiste de la Renaissance florentine”, en l'occurrence, sans être capable du moindre recul critique sur soi-même, et pouvoir, sous son nom, débiter de pareilles insanités canivellesques. À vingt ans, il m'avait dit que je ne pouvais pas le comprendre parce qu'il était “rebelle” (sa rébellion (sa rebellitude ?), en l'espèce, s'exprimant dans son goût pour les Guns & Roses). On avait ironisé ensuite, pendant des semaines, avec plusieurs amis, sur le fait que tout ce qu'il y avait de rebelle, chez lui, c'était sa mèche (et en plus : même pas).

Il était d'un conformisme affolant, appartenant à une catégorie très définie, très caricaturale, sans du tout s'en rendre compte. Nous appartenons tous à une ou plusieurs catégories simplifiables : pour ma part, je pourrais écrire un autoportrait caricatural en soulignant tout le banal de mes aversions, la symptomaticité de mes goûts (à commencer d'ailleurs, sans doute, par la manière dont je dézingue, ici même, hic et nunc, ce pauvre garçon dont la personnalité n'est probablement pas assez éloignée de la mienne (d'où mon angoisse, etc.)). Nous appartenons tous à la catégorie de ceux-qui-etc., mais lui, pas plus aujourd'hui (semble-t-il) qu'à vingt ans, n'a jamais eu le moindre recul, aucun Surmoi en quelque sorte.

Bien entendu, je brode. Ce qui m'intéresse, dans ce type, c'est ce que cette découverte m'a dit de moi, de mon passé, d'une lecture possible de mon trajet. Que puis-je savoir des changements réels ou non de l'ancien condisciple devenu piètre romancier ? Il est toujours possible, le garçon en question ayant toujours été guidé par le fric le fric le fric, qu'il soit parvenu à produire quelque chose de formaté, en imitant Musso, Lévy et autres Gavalda de douzième rayon et en se disant qu'il y avait là une niche, du Musso-pour-les-mussophobes. Peut-être même est-ce une commande : après tout, il est aussi l'auteur de quatre romans policiers sous pseudonyme (navrants, me suis-je laissé dire), et doit avoir des tuyaux. Je ne sais pas. Mais tout de même. Ça laisse rêveur. Et donc, ce qui laisse rêveur, c'est que, dans un monde “éditorial” où on peut publier de pareils néants, de surcroît sous la plume d'un “universitaire” qui n'hésite pas à signer de son nom le néant en question, on se dit que la vanité est totale.

Autre embranchement, plus complexe, et je crains fort, sur ce coup-là, de paraître d'une prétention infinie. Hier, C*** a lu un livre qui lui a été offert pour son anniversaire, un très beau livre de (très émouvants) dessins (j'écris dessins pour aller vite) de Barcelo, accompagnés de (ou qui accompagnent des) quatrains de Michel Butor. Or, ainsi que nous nous en étions déjà aperçus lors d'un rapide feuillettage, soit Butor commence à devenir méchamment gâteux, soit il sait qu'il peut refourguer n'importe quoi (he'll get away with it, donc). Les quatrains sont parfois réussis, souvent amusants, mais, dans leur caractère ludique même, tout à fait dérisoires. Dérisoires parce qu'ils ne sont que cela, ludiques, et parce que, signés Butor, on s'attend à autre chose, tout de même.

Ici, une précision s'impose : je suis un grand admirateur de Butor, notamment de la série des Génie du lieu, dont j'ai déjà écrit à plusieurs reprises, ici et ailleurs, qu'elle est, avec le “Projet” de Roubaud et les Eglogues de Renaud Camus, un des sommets de l'écriture des 70 dernières années. Cette admiration ne m'empêche pas de savoir que Butor a, depuis longtemps déjà, souvent cédé à la facilité. Mais même cette facilité était toujours dix fois plus profonde que le labeur poussif de 95% de ses contemporains ou de ses épigones.

C'est ici qu'intervient l'élément qui pourra être interprété comme de l'arrogance la plus scandaleuse (mais au moins, j'ai le mérite de suivre mon sillon et de ne pas craindre de sembler ridicule). Face à ces quatrains, je me disais que la plupart de mes mirlitonneries vite torchées de ces dernières années, notamment celles qui sont nées sur Facebook par pur désir de distraction (les distiques (ribéryens ou non), les quatrains conversationnels), pourraient, semblablement, être publiées en regard de dessins, si, à tout le moins (et, comme on va le voir, il s'agit de sérieux bémols), 1) j'avais des connaissances dans le milieu éditorial 2) j'étais mis en relation avec des dessinateurs, peintres etc. 3) je m'appelais au préalable (et avec tout ce que cela implique en amont : une œuvre aussi maigistrale que géniale) Michel Butor.

(Vous étiez prévenus, il y a là un paragraphe à me rendre plus ridicule que les 220 pages du navet pondu par mon ancien condisciple des années bordelaises.)

Donc, pour en revenir à mon cheminement, si je me décide à soumettre de nouveau des textes à tel ou tel éditeur, ne serai-je pas dans une posture assez identique à celle dont je me gausse chez le crypto-Musso (la crise de la quarantaine (comme l'a écrit une de mes amies avec qui nous échangions au sujet du roman en question : « La crise de la quarantaine, c'est bon pour personne »), la vanité d'auteur, le prof qui joue au poète), ou dans la posture du sous-sous-Butor, ce qui n'est guère mieux ?

 

Pourtant, je sais que certains de mes textes, certains de mes ensembles de textes ont (auront (auraient (remaniés (c'est là le hic)))) une qualité intrinsèque qui ne fait pas de moi un génie mais, au moins, un honnête tâcheron de la Littérature. Alors, que faire ? Une fois encore, en lieu et place de la bouteille d'encre qui ne sert qu'à blanchir, je n'aurai débrouillé l'écheveau qu'afin de comprendre moins encore.

lundi, 03 juin 2013

Les Boloss à Roland-Garros, 11-20

Je m'apprêtais à me faire une ligne.
And then, all I got was a banana shot.


Une tête, deux séries. Trois têtes, l'hystérie.


Mon fils est pour le Letton. 
C'est la stricte vérité.


Le Chti Lucas Pouille.


C'est pourtant simple : Benoît Paire ne joue pas en doubles. ——— C'est pourtant simple : mon fils souhaite la victoire de Paire, mais son père se contrefout de Monfils. ——— Quelques lecteurs “aiment” benoîtement mes statuts relatifs au brave Paire. ——— C'est pourtant simple : Benoît Paire doit éviter le burn-out. ——— C'est pourtant simple : on a déjà vu Paire jouer en simples messieurs, mais pas de monsieur simplet jouer en doubles dames. ——— D'aucuns, parmi mes lecteurs, se lassent de ces aphorismes au sujet de Paire, que j'ai la faiblesse de nommer "texticules".

dimanche, 02 juin 2013

Quatre distiques houellebecqiens sur les loisirs dominicaux

Par les pales de la tondeuse, un vieux voisin en short
Pourrait bien, imprudent, se sectionner l'aorte.


S'il ne va pas fissa débroussailler ailleurs,
Je vais lui faire bouffer son débroussailleur.


Le jour où le voisin mourra (comme nous tous),
Faillite chez Leroy-Merlin et Kiloutou.


Le gouvernement lance le plan canicule
Au pied de la Tour Eiffel, pas au Janicule.

samedi, 01 juin 2013

Quatre distiques houellebecqiens

Air France, un air de Fréhel.
Lufthansa, retour au réel.


Hier aussi j'ai, des filles en farandoles,
Vu balancer les délicates girandoles.


Je vais porte d'Auteuil, non pas pour la compète 
— Pour contempler, subtils, les envols de jupettes.


Au premier jour de juin, sous un soleil trompeur,
Les voisins en marcel ressortent leur kärcher.