Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

samedi, 31 mai 2025

31052025

Hier, j’ai écrit dans l’article publié par En attendant Nadeau que Decolonising the Mind était l’arbre qui cache la forêt.

Et de fait, je ne compte pas les publications que je vois passer depuis hier, par des Africain·es ou afrodescendant·es, et qui se réclament de ce seul et unique livre. Qu’on ne se méprenne pas sur le sens de ce que je vais écrire : tout d’abord, comme je l’ai très clairement écrit, l’essai de 1986 est « un livre fondamental, qui se trouve à juste titre au programme de tous les séminaires d’initiation à la théorie post-coloniale et de tous les cours de littérature africaine » ; ensuite, tout intellectuel ou tout écrivain serait très heureux de voir un seul de ses livres avoir autant d’influence que celui-ci, de Ngũgĩ wa Thiong’o.

Ce qui me dérange, ou m’interroge, ou me titille dans cette invisibilisation de tout le reste du corpus de Ngũgĩ wa Thiong’o, c’est qu’elle est totalement en contradiction avec ce que Ngũgĩ lui-même écrit dans cet essai. Par exemple, il écrit que les savoirs africains décolonisés passent par les langues africaines, mais aussi par des formes spécifiques de récits échappant aux normes eurocentriques. Or, Decolonising the Mind, son auteur ne s’en est jamais caché, est un essai qui suit étroitement les codes de l’argumentation « à l’occidentale ». Parfois, j’ai un peu beaucoup l’impression que certains parlent de Decolonising the Mind en répétant les 2 ou 3 mêmes idées que Ngũgĩ lui-même a beaucoup répétées dans des conférences ou interviews, en particulier sur les langues, mais auxquelles l’essai est loin de se limiter : l’ont-ils lu ?

Ainsi, disserter à l’infini sur l’importance fondamentale de Decolonising the Mind (importance que je ne nie aucunement, je le répète encore) sans ressentir la nécessité impérieuse d’aller lire les textes de Ngũgĩ wa Thiong’o qui ont courageusement mis en pratique l’appel à des formes de récit et de littérature décentrés, ça me semble être s’enfermer encore dans les codes de cet eurocentrisme.

Donc, sans aller jusqu’à apprendre le gĩkũyũ (et pourquoi pas ? moi, je suis trop paresseux, et depuis trop longtemps), il faut lire Petals of Blood, qu’il a écrit en anglais mais qui va déjà à contre-courant des formes narratives de la littérature afro-européenne ; il faut lire son grand poème épique (The Perfect Nine - Les Neuf Parfaites, trad. Laurent Vannini, éd. Présence Africaine), qui explique la cosmogonie et l’ontologie gĩkũyũ à partir d’une forme narrative afrocentrique ; il faut lire Wizard of the Crow, là encore autotraduit par Ngũgĩ.

Comme j’ai dénoncé ma propre paresse, j’en profite pour dire que les publications Facebook, souvent à rallonge, qui parlent des romans de Ngũgĩ en copiant-collant des succédanés trouvés sur Wikipedia ou (vu les invraisemblances et erreurs factuelles) générées par ChatGPT, sont insultantes et lamentables ; je trouve plus acceptables, évidemment, les posts de personnes qui admettent humblement qu’elles n’ont encore rien lu de lui.

Ngũgĩ n’était pas seulement un penseur ou un intellectuel ; réduire son travail et son œuvre à Decolonising the Mind, cela reviendrait à dire de Césaire qu’il n’a écrit que le Discours sur le colonialisme : un effacement et une invisibilisation d’une œuvre complexe et multiforme contre les canons de la production occidentalisée.

 

vendredi, 30 mai 2025

30052025

Capture.JPG

Mon troisième article de la saison pour En attendant Nadeau vient d'être publié, à la une. Il a été écrit en quatrième vitesse, suite à l'annonce de la mort, hier matin, de Ngũgĩ wa Thiong’o. Il s'agissait d'occuper le terrain, en quelque sorte, et d'en profiter pour mettre l'édition française face à son incurie.

 

*                   *

*

On a different note :

Ce 30 mai correspond à nos noces de saphir, à Claire et moi (mais ce qui compte, pour nous, ce sont nos noces de porphyre, dans 19 jours).

 

17:29 Publié dans 2025 | Lien permanent | Commentaires (0)

jeudi, 29 mai 2025

29052025 (in memoriam Ngũgĩ wa Thiong’o)

501013776_10231133848743471_3618942191390352119_n.jpg

 

Ngũgĩ wa Thiong’o est mort, donc.

 

Comme celui qui est un des plus grands écrivains des 20e-21e siècles est, non pas méconnu, mais délibérément/savamment ignoré en France, j’ai annoncé que je posterais (à partir d’aujourd’hui sur les réseaux sociaux) un lien chaque jour, vers des ressources, dont certains des travaux que je lui ai consacrés.

Cela fait plusieurs décennies que cette immense figure intellectuelle est systématiquement marginalisée en France, tant dans la presse et le monde du livre qu’à l’université. Encore un bel exemple avec l’article nécrologique du Monde.

Cet article du Monde (que je ne partage pas – c’est un torchon) n’est vraiment pas à la hauteur.

Il serait trop long de lister les approximations, les erreurs et surtout les oublis de cet article, mais tout d’abord il faut écrire la langue maternelle et d’écriture de Ngũgĩ wa Thiong’o gĩkũyũ (kikuyu est le nom colonial).

 

Ensuite on remarque que la journaliste signale que plusieurs livres sont non traduits, ce qui est très bien, mais il serait sans doute intéressant de signaler les noms des traducteurices des livres qui ont été traduits, et les livres tout à fait disponibles en français, et ici invisibilisés.

Je n’en citerai que trois, censurés par la journaliste du Monde :

* Les Neuf parfaites, poème épique génial traduit par Laurent Vannini (Présence Africaine, 2023).

* Rêver en temps de guerre, premier tome des mémoires d’enfance, traduit par Jean-Pierre Orban et Annaëlle Rochard (Vents d’ailleurs, 2022)

* Combattants et martyrs, nouvelles traduites par Dominique Lanni (Passages, 2019)

 

Problème : cela imposerait que Le Monde renonce à son racisme, d’une part, et à son parisianisme d’autre part (forcément, les rares maisons d’édition à s’engager pour Ngũgĩ ne sont pas les grandes maisons parisiennes, elles-mêmes trop racistes), voire à ce que la journaliste accepte de parler avec des personnes moins incapables qu’elle avant d’écrire son papier.

 

 

mercredi, 28 mai 2025

28052025

Hier soir, très belle rencontre avec Maboula Soumahoro, à la Bibliothèque centrale de Tours. Il y avait près d’une centaine de personnes dans l’auditorium du cinquième étage, et, comme l’a fait remarquer Maboula en réponse à une question sur la lutte et la fascisation grandissante du pays, c’était la première fois qu’il y avait autant de monde pour venir l’écouter depuis vingt ans qu’elle travaille – et donc intervient parfois en-dehors de ses cours – à Tours. Plusieurs collègues ou ex-collègues, ainsi que quelques étudiant·es, ancien·nes ou actuel·les (dont Camille Bourdeau, dont Maboula a salué la présence et avec qui j'étais très heureux de pouvoir échanger, trop brièvement, à la fin).

 

f.jpg

 

 

La discussion a tourné autour de son essai Le Triangle et l’Hexagone, bien sûr, mais aussi autour de sa traduction de Lose Your Mother de Saidiya Hartman, qui est remarquable (et dont je m'avise ne pas en avoir parlé dans le vlog). C’était, comme toujours, clair, riche, instructif, lucide. Je n’ai pas posé de question car j’espère qu’on aura cette conversation à un moment donné, mais j’avais bien sûr plein de choses à lui demander sur sa traduction, mais aussi – dans la mesure où elle a expliqué combien il avait été difficile d’écrire le livre en français, alors que les premières ébauches étaient en anglais – sur les raisons (ou le contexte) qui ont fait que son livre a été traduit par quelqu’un d’autre (et pas par n'importe qui : Kaiama L. Glover, traductrice entre autres de Mûr à crever de Frankétienne (je cite celle-ci car je l'étudie régulièrement avec mes L3).

Cette question découle de mon intérêt pour l’auto-traduction, bien sûr, mais aussi de la situation assez particulière dans laquelle je me suis trouvé quand en 2021, Olivette Otele, qui parle et écrit tout à fait couramment (et nativement) le français a sollicité une autre personne (en l’occurrence, moi) pour traduire African Europeans en anglais.

 

Très heureux d’entendre Maboula clore l’entretien, avant les questions, par plusieurs références à des textes de rap des années 1990 (La Rumeur, Kery James, Tonton du bled de 113 (et elle aurait pu citer son corollaire Tonton des îles)), en soulignant qu’elle en parlait d’un point de vue sociologique et historique, mais qu’il s’agissait de grands textes littéraires aussi. Si j’avais pris le micro pour lui poser une question, j’aurais commencé avec le refrain de Teemour : On s’ra pas des esclaves dans ce millenium. Ça me semble assez bien illustrer ce qu’elle a dit du devoir de mémoire et la nécessité de transmettre les histoires de l’esclavage et de la colonisation – et de leurs conséquences au présent – comme principale réparation (elle l’a dit mieux que ça).

 

08:17 Publié dans 2025 | Lien permanent | Commentaires (0)

lundi, 26 mai 2025

26052025

C’est compliqué, ces temps-ci, de faire tout suivre.

Trop de projets en parallèle, mais il faut se rassurer en se disant que tout avance de front, parfois imperceptiblement. La semaine dernière, j’ai bien avancé sur Gurnah, au point d’envoyer samedi soir à mes collègues qui organisent le colloque de Lille en octobre pas moins de 4 hypothèses de propositions. Ananda Devi m’a envoyé le texte de sa nouvelle inédite, mais j’ai peu de réponses des collègues sollicités pour des articles. Je n’ai toujours pas remis sur l’atelier la traduction d’Aidoo, mais c’est prévu pour cette semaine. Enfin, l’ouvrage sur le plurilinguisme n’a pas avancé d’un iota depuis dix jours. Amma Darko, elle, reste introuvable, pour ne rien dire des manuscrits sur lesquels j’espérais pouvoir travailler.

On pourrait considérer que c’est un tableau mitigé, et c’est toujours vrai d’ailleurs, mais à l’impossible nul n’est tenu. Je ne parle pas de l’émission de radio, qui n’entre pas spécifiquement dans le cadre de mon travail, mais qui me fait lire et réfléchir, et surtout dialoguer en ouvrant des pistes sur ces questions de diversité culturelle et linguistique à partir d’expériences sans rapport avec la mienne, assez étroitement cantonnée à l’analyse littéraire et à une vision très linguistique, in fine, du plurilinguisme…

 

09:11 Publié dans 2025, ILMC, WAW | Lien permanent | Commentaires (0)

dimanche, 25 mai 2025

25052025

Journée à Paris, avec promenade dans le quartier de l’Opéra (avais-je déjà vu, vraiment, la place des Victoires ? je ne crois pas).

 

Visite de l’exposition Artemisia Gentileschi. À voir, vraiment. Le dialogue avec quelques œuvres de son père, Orazio, et avec l’esthétique caravagesque, est très bien mis en scène. Les salles sont trop petites, ou la jauge mal maîtrisée : ça se bouscule, mais on y arrive, en étouffant un peu. Le musée Jacquemart-André est splendide, toujours ; il y a tellement longtemps que nous n’y étions pas allés. D’Artemisia Gentileschi, la Judith que je préfère est sans doute la plus ancienne.

 

                Skunder Boghossian, Composition — exposition Paris noir 1950-2000 (Centre Pompidou), 25.05.2025                        Gérard Sekoto, Sans titre (1962) — exposition Paris noir 1950-2000 (Centre Pompidou), 25.05.2025

 

Visite de l’exposition Paris noir 1950-2000, monumentale, enthousiasmante, et qui part parfois un peu dans tous les sens. L’accent porte plutôt sur la présence des Afro-Américains et sur la créativité des artistes antillais·es, avec une euphémisation très jacobine – il faudrait même dire coloniale – du racisme systémique en France. Pour les quelques œuvres qui s’expriment sur ces formes de racisme, il faut lire attentivement les cartouches (et surtout regarder attentivement les œuvres elles-mêmes) pour en prendre la mesure. Il ne faudrait pas que le public parisien (parisianiste ?) qui arpente les allées du centre Pompidou se voie rappeler trop de radicalité, et surtout trop de crimes coloniaux (massacres de mai 1967 en Guadeloupe par exemple). Petit regret, aussi, de constater que les circulations culturelles entre Paris et certaines capitales africaines post-coloniales soient autant marginalisées.

Comme il s’agit d’une exposition qui montre des centaines d’œuvres, avec je ne sais combien d’artistes dont certains, majeurs, que nous voyions pour la première fois, il faudra se procurer le catalogue : hier, mon sac à dos n’en a pas eu le courage.

 

Henri Guédon, "à la décatché” — — exposition Paris noir 1950-2000 (Centre Pompidou), 25.05.2025

 

samedi, 24 mai 2025

24052025

Ma recension d’Un couple panafricain d’Elara Bertho, écrite pour En attendant Nadeau, est publiée en avant-première à la une de Mediapart (rubrique Livres). Ça fait bizarre et plaisir à la fois. En tout cas, j’ai reçu plusieurs messages enthousiastes.

 

21:40 Publié dans 2025 | Lien permanent | Commentaires (0)

vendredi, 23 mai 2025

23052025

Au programme du jour – avant une nouvelle escapade à Paris dimanche – : diverses bricoles de boulot, dont rattraper le retard dans ce blog. Déjà que j’ai laissé filer le projet des 365 neuvains au bout de 100…

En train d’écouter le nouvel album des Sparks.

Ce soir j’enregistre, pour diffusion ultérieure, l’émission de radio avec les deux responsables de l’association Mémoire Vivante d’Amérique Latine, autour de l’enseignement du quechua.

 

08:01 Publié dans 2025 | Lien permanent | Commentaires (0)

jeudi, 22 mai 2025

22052025

499821306_18139526377401477_3602806145413249428_n.jpg

 

 

Journée intense sur le campus de Columbia University in Paris, dans le 6e arrondissement, pour le premier symposium du collectif Black France Noire.

 

C’était très bien d’entendre pour la première fois des spécialistes dont je connais le travail depuis un petit moment, Kaiama Glover, Eva Doumbia, Fania Nöel, Laurent Dubois…

 

 

Ma collègue Maboula Soumahoro, une des co-organisatrices, avait l’air en pleine forme, de bonne humeur, très drôle, ce qui m’a fait plaisir ; j’ai aussi découvert ses talents d’interprète, impressionnants.

 

Capture.PNG

 

22:11 Publié dans 2025, WAW | Lien permanent | Commentaires (0)

mercredi, 21 mai 2025

21052025

Ce lundi 19 mai 2025, une belle émission encore, à la découverte de la filière anglais/chinois en Langues Étrangères Appliquées à l’Université de Tours. Mes deux invitées, Kellyah Ettien et Saïlat Hassan Madjid, étudiantes de L1, ont deux profils différents : Kellyah a commencé le chinois en grand débutant en septembre 2024 (je ne savais même pas que c’était possible, comme on l’entend en direct), alors que Saïlat a suivi une classe bi-langues depuis la sixième, au collège Ronsard puis au lycée Vaucanson.

L’émission – la douzième – a été mise en ligne aujourd’hui.

 

08:15 Publié dans 2025, ILMC | Lien permanent | Commentaires (0)

mardi, 20 mai 2025

20052025

Capture 2.PNG

 

 

 

Aujourd’hui, O* a fêté ses 18 ans.

Ça fait très bizarre.

 

 

J’espère qu’A* et sa copine vont pouvoir, comme prévu, venir pour le week-end de l’Ascension, histoire de fêter tout cela de nouveau avec eux.

 

11:00 Publié dans 2025 | Lien permanent | Commentaires (0)

lundi, 19 mai 2025

19052025

PN.JPG

Aujourd’hui Patrice Nganang a annoncé sur son compte Facebook qu’il se lançait dans la dernière relecture de Scale Boy sur épreuves, avant publication en janvier. Il donne également le lien de pré-commande sur Amazon, mais cela, c’est exclu pour moi, pour raisons idéologiques. En avril, chez lui, il m’a montré le précédent jeu d’épreuves, et nous avons parlé aussi de coupes qu’il a dû faire à la demande de l’éditeur ; je regrette de plus en plus de lui avoir dit que je préférais découvrir le livre dans son état final, comme un lecteur « ordinaire ».

Simultanément, ou quasiment, il annonce qu’il a achevé l’écriture de son premier livre – plutôt bref, une centaine de pages – en medumba. Comment parvient-il à travailler sur autant de plans à la fois ? et moi, comment vais-je écrire mon livre ?

 

dimanche, 18 mai 2025

18052025

498681445_1111068107723815_6377275340369912997_n.jpg

 

 

On ne parle quasiment pas en France du délire suprémaciste – un de plus – qui a conduit l’administration Trump (pas Trump, hein – cet homme n’est pas seul, cet homme n’est pas fou, il y a avec lui toute une super-structure institutionnelle) à offrir des visas permanents à des émigrés sud-africains appartenant à la communauté afrikaner. Le discours, répété à l’envi depuis des semaines et dont le fasciste sud-africain Elon Musk est l’un des principaux instigateurs, est que les Afrikaners sont victimes de discriminations, et même d’un « génocide ».

L’inversion historique – dans la droite lignée de la post-truth déjà conceptualisée par Trump et ses sbires il y a huit ans – est telle que Trump a même exhibé des photos représentant des fosses communes de femmes congolaises en disant qu’il s’agissait des fosses communes dans lesquelles sont ensevelies les victimes du génocide anti-blanc en Afrique du Sud. Le caractère ignominieux et abject d'une telle manipulation dépasse l'entendement, et en tout cas je n'ai pas les mots pour le dire.

 

Je comprends tout à fait que, dans le contexte général, cet énième épisode fasciste n’atteigne que difficilement les marges des journaux, mais il était important pour moi de le noter ici, for what it’s worth. (Et cliquer sur la vignette pour avoir accès au dessin de Francis & Rico en qualité supérieure. - Madam & Eve, toujours.)

 

samedi, 17 mai 2025

17052025

Beaucoup trop de réveils matinaux ces derniers temps, d’autant que cette nuit, je ne me suis endormi que vers minuit, et encore, en entendant O* rentrer de sa compétition de ping-pong vers 1 h 30 (mais là, j’ai replongé aussitôt). Pour le réveil, c’est la sinusite chronique, aujourd’hui, et dès 4 h 45 ou quelque chose dans le genre.

Malgré les deux jours quasiment perdus pour le travail sérieux à cause des problèmes de plomberie (fuite au compteur, eau coupée pendant 30 heures, coincé à la maison à jongler entre les réparateurs, rendez-vous annulés etc.), je n’ai pas écrit ici et vais devoir tricher rétrospectivement.

Le vingtième anniversaire du blog approche, et je ne sais comment le fêter dignement.

 

05:57 Publié dans 2025 | Lien permanent | Commentaires (0)

vendredi, 16 mai 2025

16052025

Screenshot_20250516-093813_BeReal (1).jpg

 

Huit heures et demie plus tard :

8406b02b-f8ae-4aa1-b3d3-82b0895695d4.jpg

Ce nouvel accident de plomberie m'aura coûté une journée et demie de travail, avec des annulations... sans compter les frais de surconsommation d'eau (depuis quand ?) et de réparation.

 

jeudi, 15 mai 2025

15052025 (cinq romans d'Afrique anglophone)

Un ami traducteur et écrivain, sachant que j'avais évoqué l'indigence du nouveau livre d'Adichie, m'a demandé de lui recommander cinq ouvrages récents d'Afrique anglophone que je trouve cent coudées au-dessus de ce fade brouet.

Comme je suis un critique militant, voici donc mon top 5 :

* Freshwater d'Akwaeke Emezi

* The Old Drift de Namwali Serpell

* Lákíríboto d’Ayọdele Ọlọfintuade

* The House of Rust de Khadija Abdalla Bajaber

* The Orchard of Lost Souls de Nadifa Mohamed

 

mercredi, 14 mai 2025

14052025

495339983_4000622533510721_2091525990857467528_n.jpg

 

Il y a deux jours, quelqu’un écrivait, sous un billet de Fabrice Riceputi annonçant la publication du livre de Pierre Tevanian, Soyons woke : « Retournement du stigmate ».

 

Ce n’est pas du tout un retournement du stigmate puisque le terme woke a été inventé et diffusé à l’époque du mouvement des droits civiques : il désignait les militant·es pour les droits humains qui se considéraient comme « éveillés » et donc progressistes face aux ségrégationnistes. Cela fait moins de dix ans que ce terme a resurgi avec une connotation péjorative. Je n’ai pas lu le livre de Pierre Tevanian, mais je suppose qu’il s’agit d’un retour au sens littéral et à l’usage originel du mot, pas d’un retournement du stigmate. Ce qui m’inquiète un peu, c’est que le site de l’éditeur parle « d’assumer franchement le stigmate », ce qui laisse entendre que l’ouvrage ne revient pas sur toute cette riche histoire philologique (et idéologique).

 

Il est à remarquer que l’article du Merriam-Webster’s qui est consacré au mot n’évoque quasiment pas le sens négatif ; or, il a été mis à jour en 2017. L’article précise d’ailleurs que l’adjectif woke (qui est formé à partir du prétérit du verbe wake et constitue donc, au départ, un solécisme délibéré) a connu un regain depuis 2014 et le mouvement Black Lives Matter : il a donc été « relancé » par des militant·es qui se décrivaient ainsi de façon positive.

 

mardi, 13 mai 2025

13052025

Je me disperse un peu, et pourtant je travaille tous les jours. Il faudrait que je me mette à rédiger une partie d’un des livres prévus avant la fin du sabbatique (donc dans deux mois et demi…).

 

Screenshot_20250514-061520_BeReal.jpg

 

19:00 Publié dans 2025 | Lien permanent | Commentaires (0)

lundi, 12 mai 2025

12052025

Aujourd’hui, c’est le 5.451e billet, ce qui signifie que j’ai raté le palindrome il y a six jours, mais que je pourrais fomenter un petit quelque chose pour le 5.454e jeudi.

Sur l’autre blog, en jachère, il y avait une rubrique intitulée Fièvre de nombres.

 

Aujourd’hui, en tout cas, j’ai réussi à publier un billet en n’ayant rien à dire.

 

dimanche, 11 mai 2025

11052025 (la glottophobie, encore)

Quand j’utilise la fonction Dictée de Word en allemand, la transcription est globalement plus propre que lorsque je fais de même en anglais. Outre la possibilité que j’aie vraiment un accent pourri en anglais, il y a deux autres explications : a) je m’applique beaucoup plus quand je dicte en allemand (surtout avec des phrases comme „zwischen den Zeilen ihrer naiv-verfremdenden Darstellung dieser Beziehungen zeichnet sich unausgesprochen die Erinnerung an den Kolonialismus ab“ (!)) ; b) mon accent anglais est beaucoup moins scolaire que mon accent allemand, et donc plus déroutant pour la machine.

Pour prolonger sur le point ci-dessus, il est à noter que, quel que soit l’outil de dictée que j’utilise (sur smartphone ou sur ordinateur), la transcription française se trompe encore régulièrement sur les sons /ɛ/ et /ɛː/, a priori absents de mon français oral (gascon), et qui se trouvent retranscrits "é" ou "er", malgré mes efforts pour essayer de faire des "é" ouverts (comme on dit). Je ne dis pas qu’il n’y a pas de variations régionales accentuelles en allemand (il y en a) ; je dis simplement que mon allemand très fruste est adapté à la norme retenue par le logiciel.

Pour moi comme pour de nombreuxses locuteurices dont le français est la langue maternelle, les sons /ɛ/ et /ɛː/ n’existent pas. Ils n’existent pas, au sens où nous les prononçons /e/. J’aurais plusieurs anecdotes à ce sujet, dont celle de mon épouse (landaise comme moi) se trouvant à enseigner à Beauvais pour son premier poste de professeure agrégée de lettres, et se retrouvant face à des élèves totalement déroutés par sa prononciation et incapables de ne pas écrire « il aller au marché de beau vé » quand elle avait clairement (clairement, pour elle) dicté « Il allait au marché de Beauvais ». L’année précédente, pour son stage à Bordeaux, ce problème ne s’était absolument pas posé. — À l’inverse, vieille rengaine que les habitué·es de ce blog connaissent, nous Gascon·nes respectons la différence entre /ɛ̃/ (un brin d’herbe) et /œ̃/ (un ours brun), différence que ne font pas (au sens où iels sont incapables même de l’entendre quand on la leur fait entendre) plus de la moitié des francophones de France, en particulier celleux des régions oïl.

Quand j’étais élève en classe prépa littéraire, mon professeur de français (entièrement conscient que le conseil qu’il me donnait relevait du simple bon sens pratique et qui savait que ces discriminations langagières étaient cela justement, des discriminations) m’avait recommandé d’apprendre à prononcer les mots contenant le son /o/ comme il se doit selon la norme jacobine, et non avec des /ɔ/. En effet, il savait que si j’étais interrogé à l’oral de Normale Sup’ sur Mignonne, allons voir si la rose, ma prononciation de "rose" (/rɔz/ et non /roz/) ne me vaudrait plus, comme encore pas si longtemps auparavant, moqueries et disqualification, mais que cela risquait de focaliser l’attention du jury, alors distrait de mes propos, la musique chassant en quelque sorte le sens. Or, qui peut dire quel effet une telle distraction du jury peut avoir sur la note ? Par parenthèse, la glottophobie et la normativité langagière, notamment dans le milieu de l’enseignement, restent globalement impensées, donc perpétuées.

 

19:19 Publié dans 2025 | Lien permanent | Commentaires (0)

samedi, 10 mai 2025

10052025 (Affectio : “Fais ta part”)

Fais ta part Do your part (Affectio).PNG

 

 

 

Ce matin, j'ai enfin enregistré ma vidéo de la lecture du poème d'Affectio Societatis (Koffi Agbenoxevi Godwin), poète togolais embastillé à cause de ce poème même.

 

J'ai aussi achevé aujourd'hui ma traduction du poème en anglais (avec un coup d'œil complice et bienvenu d'Alex Dickow et Seb Doubinsky).

 

Le poème en version bilingue et en PDF est téléchargeable ici.

 

vendredi, 09 mai 2025

09052025

492692538_122228975042191952_4652027873728458776_n.jpgIl n’aura échappé à personne que je travaille notamment, ces temps-ci, sur Ama Ata Aidoo, écrivaine que je lis depuis trente ans mais dont je n’avais jamais pris le temps d’éplucher la bibliographie. Beaucoup de livres sont épuisés, difficilement trouvables, même avec le Prêt Entre Bibliothèques, même avec les sites de téléchargement pirates.

 

Ce matin j’ai donné une communication sur le plurilinguisme et le rôle de la langue allemande dans Our Sister Killjoy. Pour peaufiner certains aspects de mon travail — tout à fait inutilement pour la communication elle-même, vu que le texte faisait déjà 4.500 mots et que j’ai dû en sabrer plus du tiers — j’ai découvert un recueil de poèmes publié en 1985 par les éditions The College Press à Harare, mais dont Helen Yitah, par exemple (dans un texte publié après la mort d’Aidoo dans le n° 66.4 de l’African Studies Review), semble sous-entendre que certains poèmes ont pu être écrits dès les années 1960. Ce recueil s’intitule Someone Talking to Sometime, un titre très Gertrude Stein ;  il serait intéressant de chercher par quelles synergies une écrivaine ghanéenne déjà réputée aux Etats-Unis s’est retrouvée publiée dans le jeune Zimbabwe.

En lisant quelques poèmes du recueil, j’ai été frappé par un passage du tout premier poème, qui s’intitule “Of Love and Commitment – for Omafumi”, et dans lequel Aidoo évoque Malcolm X et Stokely Carmichael. Vu ce qu’elle écrit plus loin, il est évident que le poème a été écrit au début des années 1980.

 J’ai donc lu ce poème la semaine même où j’ai fini de lire l’essai si riche et si concis d’Elara Bertho sur les années guinéennes de Miriam Makeba et Stokely Carmichael. Il ne saurait y avoir de hasard. Il faut traduire ces poèmes d’Aidoo, il faut les faire connaître.

 

jeudi, 08 mai 2025

08052025 (le troisième génocide)

Le 13 octobre 2023, Raz Segal écrivait ce texte que tout est venu confirmer depuis 18 mois. Ce qui se passe dans l’indifférence publique et l’inaction des gouvernements du monde dit "occidental", c’est un génocide.

Israel’s campaign to displace Gazans—and potentially expel them altogether into Egypt—is yet another chapter in the Nakba, in which an estimated 750,000 Palestinians were driven from their homes during the 1948 war that led to the creation of the State of Israel. But the assault on Gaza can also be understood in other terms: as a textbook case of genocide unfolding in front of our eyes. I say this as a scholar of genocide, who has spent many years writing about Israeli mass violence against Palestinians.

 

Macron déclare sobrement que la situation à Gaza, soumise à un blocus de la faim depuis 55 jours, est « de plus en plus critique ». Après 1940 et 1994, la France est complice d’un nouveau génocide.

 

08:48 Publié dans 2025 | Lien permanent | Commentaires (0)

mercredi, 07 mai 2025

07052025 (comment peut-on encore être carnivore ?)

Roth.jpg

 

Il y a, dans ce recueil de chroniques de Joseph Roth traduit par Stéphane Pesnel, un texte de 1923 (1923 !) qui s’intitule “Visite aux abattoirs de Sankt Marx” et qu’il devrait être impossible de lire sans être triplement horrifié : par ce qui y est décrit, par le ton, et par les analogies évidentes avec les génocides humains et la rhétorique génocidaire.

 

Une phrase : « Il règne une odeur de sang coagulé, depuis quatre-vingts ans le sang coule ici, pour le bien de l’humanité. »

 

Une autre phrase : « Ils avaient derrière eux bien des journées de voyage, des journées passées à l’intérieur de wagons exigus et sombres, dans lesquels, effrayés par le bruit inconnu des roues des wagons, ils frottaient craintivement leur corps les uns contre les autres. »

 

Et la dernière phrase, que je donne en allemand : „Die Rinder tötet man, die Kaninchen läßt man leben, und der Mensch bleibt ein schlachtender Herr der Schöpfung – Sinn und Zweck alles tierischen Lebens.“

 

mardi, 06 mai 2025

06052025 (un début de réflexion sur deux traductions de Fanon)

Il y a toujours ce moment particulier, quand on prépare une communication ou un article – et là je suis en plein dans la préparation du diaporama, dont je vais me servir pour structurer ensuite le discours – où un aspect totalement secondaire conduit à des découvertes assez faramineuses, et qui nécessiteraient à elles seules un article, qu’on n’écrira jamais. Ce matin, l’article que je n’écrirai jamais, peut-être pare que d’autres s’en sont déjà chargés, est relatif à la traduction du début du chapitre 5 de Peau noire, masques blancs. Vu combien tant de spécialistes et de non-spécialistes n’ont que Fanon à la bouche (et à raison : en fait, on le cite trop et on ne le lit pas assez), cet article doit déjà exister.

De quoi s’agit-il ?

Pour moi, ces pages sont parmi les plus importantes de l’œuvre de Fanon (et de lui il faut lire ce livre en là en particulier, pas particulièrement Les Damnés de la terre, beaucoup plus rhétorique et parfois ampoulé), et quand je les cite en séminaire je discute toujours cette analyse de Fanon de pair avec la double consciousness de W.E.B. DuBois. En un sens, et sur ce point, je trouve que Fanon va plus loin, plus profond que Du Bois.

 

Là n’est pas le propos. La question, ce matin, était de trouver, pour l’atelier dans lequel je fais une communication sur Our Sister Killjoy vendredi, une traduction de ce passage, car l’auditoire sera principalement non francophone. Je n’ai trouvé que deux traductions, la première de Charles Lam Markmann (1967), dont même l’article de la WP anglophone consacré à Fanon signale qu’elle efface la dimension phénoménologique du chapitre, et la seconde de Richard Philcox (2008) ; Philcox, qui fut l’époux et le traducteur de Maryse Condé, est aussi renommé pour cette traduction du grand classique de Fanon.

Ce qui m’intéresse ici, bien sûr, c’est le n*-word, et ses traductions. Quand on enseigne les littératures africaines, et davantage la culture afro-américaine, on doit toujours insister sur le fait que l’anglais a trois mots : Black, Negro et le n*-word, qui n’est plus utilisé, par renversement rhétorique, que par les rappeurs noirs. Le mot Negro était, jusque dans les années 1970, totalement neutre, et revendiqué même par les intellectuels afro-américains depuis la Harlem Renaissance. Il convient de le traduire, comme Black, par « Noir » ; on n’a pas le choix. En effet, en français, il n’y a que deux termes : le mot noir/Noir et l’injure raciste, le n*-word français. Ce second terme, évidemment racialisant puis raciste, a certes été employé, en parallèle, par des noirs eux-mêmes, Antillais ou Africains, dans une tentative de le déracialiser, ou, en tout cas, de le sortir du champ discriminatoire (d’où la négritude). Aujourd’hui, à part Mbembe, personne ne tente plus cela.

 

Fanon, Peau noire, masques blancs, début du chapitre 5

Au début du chapitre 5, Fanon répète deux fois le n*-word français, en citant les propos entendus ; il s’ensuit une prise de conscience de la réduction à la couleur de peau par le biais du regard des Blancs, qui fait l’objet de l’impressionnante analyse qui suit. Pas de “neutralité” ici, ni d'usage positif du n*-word. Fanon insiste : le n*-word le réduit à l’état d’objet, le fixe (chimiquement) et le morcèle. C’est donc un mot réducteur et destructeur ; c’est le terme même de l’assignation raciale, et, partant, raciste. Pourquoi donc Philcox, après Markmann, choisit-il de moduler en évitant la répétition ? Pourquoi la deuxième interjection, qui a de fait l’apparence d’une plus grande neutralité (« Tiens… »), ne conserve-t-elle pas la répétition du terme stigmatisant ? Il est vrai que de nos jours – et en 2008, quand Philcox publie sa traduction, c’était déjà le cas – le terme Negro était devenu obsolète, mais pourquoi varier quand Fanon enfonce le clou ? Faut-il, dans le champ anglophone (et dans la situation très spécifique des identités afro-américaines), enfoncer le clou et assimiler le n*-word et le terme Negro, en passant par pertes et profits toute une littérature qui a inscrit ce second terme dans une réflexion approfondie, et en réaction contre le n*-word ?

 

            Fanon Charles Lam Markmann, 1967              Fanon Philcox 2008

 

 

(Je n’ai pas le temps de poursuivre l’analyse, mais les documents sont sous vos yeux : notamment, je trouve le choix du présent simple par Philcox très discutable. Ce n’est pas parce que c’est une retraduction, fût-ce par l’époux de Maryse Condé, que c’est forcément meilleur.)

 

lundi, 05 mai 2025

05052025

Dix émissions déjà.

Celle de ce matin a été diffusée à l’horaire habituel (9 h 30 désormais) mais elle avait été enregistrée le 25 avril. Maintenant, je saurai que je peux faire cela, que j’en suis capable.

L’émission de ce matin était la première dans laquelle je n’avais pas seulement un·e invité·e, et cela implique un autre fonctionnement dans la circulation de la parole. Les 12 et 19 mai, de même, il y aura plusieurs invitées, des étudiantes de deux filières différentes.

Cela compte énormément pour moi, que l’émission ouvre une fenêtre sur des missions et des métiers au sein de l’université. Tout le monde va tellement mal, à l’Université, que c’est important d’avoir des moments comme ceux-là, où on construit ensemble, où on s’écoute, où on fait découvrir d’autres aspects de nos métiers.

 

16:03 Publié dans 2025, ILMC | Lien permanent | Commentaires (0)