vendredi, 20 novembre 2020
Ressacs infinis
Matin : la rue des Tanneurs quasi déserte, à dix heures, en semaine, c'est rare.
Midi : le soleil frappe le linge et le vent le fait onduler. Presque plus une feuille sur le merisier.
De deux à quatre long entretien, par visio, avec J.* L.* qui souhaitait m'interroger car elle fait partie d'une équipe dont le sujet de recherche actuel est la traduction dans l'apprentissage des langues. Discussion passionnante, car elle m'a suggéré de nombreuses pistes et surtout elle m'a conduit, par ses questions, à formuler des hypothèses diffuses jusque là. Autant certains points ont fini par se cristalliser pour moi, du fait de l'expérience accumulée ; autant d'autres étaient pris dans une sorte de nébuleuse. Cela fait quelques années que je n'enseigne plus la traduction, en-dehors (et c'est une exception notable, car j'y tente pas mal de choses) du cours pour étudiant-es d'échange, mais j'enseigne la traductologie, d'une façon de plus en plus rigoureuse d'ailleurs ; j'aimerais réenseigner la traduction en première année en 2021-2022, histoire de mettre en pratique un certain nombre d'idées que vingt ans de boulot sur tout ça ont fini par me faire articuler.
Fin d'après-midi, après promenade ballon : documentaire sur les enfants retirés à leur famille pour cause de maltraitance, avec un juge très calme, à l'élocution lente, que j'aurais aimé trouver pleinement sympathique, si ce n'est qu'il ressemblait en partie à De Rugy et à Guaino jeune. Les témoignages de trois adultes ayant vécu l'enfer des violences familiales étaient aussi édifiants que bouleversants.
Soirée : suite des documentaires américains sur l'astronomie, un sur le soleil et l'autre sur les trous noirs. Outre les musiques insupportables et les animations 3D inutiles et même plus spectaculaires à force d'être rabâchées, cette série présente l'inconvénient de répéter certaines informations plusieurs fois, puis de laisser le spectateur faire certaines conclusions par défaut, par recoupement d'informations. D'un point de vue pédagogique, justement, on est proche du zéro.
Ainsi, dans celui sur le soleil, le reportage insistait, dans le premier tiers, sur le fait que certains phénomènes d'explosion solaire pourraient, par projection de gaz, mettre en péril l'alimentation électrique sur Terre, ainsi que les commandes des avions de ligne et des avions militaires ; le reportage présentait alors un centre d'observation de ces phénomènes solaires ; la façon dont cette sorte de monitoring se passe y était expliquée très clairement, la voix off ne cessant toutefois de répéter que, si jamais tel type d'explosion se produisait ce serait très dangereux pour tout appareil de navigation usant du pilotage satellitaire ; on finissait par voir le scientifique chargé du monitoring observer en direct un de ces phénomènes solaires, puis constater que l'explosion majeure n'avait pas eu lieu, donc que l'alerte était terminée. Puis le documentaire passait à autre chose.
Et nous de nous interroger... Un tel phénomène, annoncé avec grands renforts de musique inquiétante, a-t-il déjà eu lieu ? on suppose que non. Si le scientifique avait constaté que ce phénomène était véritablement en train de se produire, quelle était la procédure ? comment faire cesser tout vol aérien, par exemple ? dans quel délai ? pendant combien de temps ? comment pallier la rupture d'énergie induite ? cette rupture d'énergie affecterait-elle la planète tout entière ?
Rien de tout cela. Comme je l'ai dit plus haut, zéro, d'un point de vue pédagogique.
22:20 Publié dans *2020*, Improviser traduire, WAW | Lien permanent | Commentaires (0)
jeudi, 08 octobre 2020
Retour au Nobel
Chaque année, ou presque, la proclamation du Prix Nobel de Littérature est l'occasion de quelques réflexions sociologiques sur l'état de la littérature, ou de sa réception, ou des malentendus à son sujet.
Il y a six ans, atterré par le choix de Modiano, j'avais pondu une petite liste rebrousse-poil, dans laquelle j'avais fait exprès de mettre le nom de Renaud Camus, mais dans laquelle j'avais surtout inclus très peu de noms d'écrivaines : je ne triche pas, je laisse la liste telle quelle. Avoir oublié Annie Ernaux, notamment, n'était pas très malin. Il est vrai, toutefois, que je lis beaucoup plus d'autrices étrangères que de langue française. Depuis, trois ou quatre noms s'ajouteraient, mais pas forcément davantage.
Il y a quatre ans, les délires les plus ineptes autour de l'attribution du Prix à Bob Dylan m'avaient conduit à une mise au point.
Cette année, on peut le regretter, c'est encore une autrice anglophone qui est récompensée... mais au moins, c'est une autrice. Et même une poète. Louise Glück, donc. Que je connais très mal, et dont j'ai improvisé une traduction tout à l'heure juste après l'annonce (cf infra). Il semble que l'académie Nobel, en continuant de ponctuer ses justifications de l'adjectif universel ou du substantif universalité, qui sonnent de plus en plus creux, essaie de rétablir un peu le déséquilibre en décernant le Prix à des écrivaines.
Oui, mais, quelles écrivaines ? à brûle-pourpoint, on ne peut guère parler d'écrivaines radicales. J'ai lu depuis octobre dernier Tokarczuk, dont j'ai beaucoup aimé Les Pérégrins. Mais politiquement elle ne pose pas d'embûches. Pour le dire en termes féministes un peu caricaturaux, ni elle ni Glück ne se trouvent à enrayer les mécanismes du patriarcat.
Autre élément, aucun livre d'elle n'est disponible en français ; seulement quelques fragments traduits dans des revues ou dans des blogs. Il paraît qu'un universitaire qui tente de placer une traduction depuis quelques mois entend soudain vibrer son téléphone... toutefois, les autres poètes inconnu-es, les Africain-es absolument indispensables dont aucun éditeur français ne veut (au point que j'ai renoncé), resteront dans les limbes.
15:55 Publié dans *2020*, Improviser traduire | Lien permanent | Commentaires (0)
jeudi, 01 octobre 2020
... parler javanais rien n'y...
Ce matin, j'ai enregistré et monté la deux-cent onzième vidéo du projet des Traductions Sans Filet, laissé à l'abandon depuis un an et demi. Allons, il y a peut-être de l'espoir pour que renaisse le Projet Pinget...
Un nouveau mois commence...
13:34 Publié dans *2020*, Improviser traduire | Lien permanent | Commentaires (0)
samedi, 05 septembre 2020
« je range ma caméra » ?
J’écris ce billet au café bolivien. Cela n’aura pas eu grand sens, très exceptionnellement, de veiller jusqu’à après minuit pour regarder ce (mauvais) documentaire sur Ferré : j’ai mis du temps à m’endormir, et je me suis réveillé à 6 h 20.
Le billet que j’ai écrit hier – et auquel je vais donner une forme plus diplomatique en écrivant à ma collègue conservatrice et directrice adjointe de la B.U., pour lui proposer tout simplement d’ajouter quelques livres aux tables de présentation de l’exposition – a été rédigé dans le bureau 38, mon bureau à l’université, mon bureau de 2002 à 2007 et de nouveau depuis 2015. C’était la première fois depuis très longtemps que j’écrivais pour le blog à l’université. De même, je me suis aperçu que la dernière vidéo de la série je rends des livres datait de novembre 2019. Donc, ni blog ni vlog depuis un moment, et la pandémie n’y est pas pour grand-chose.
Lundi je dois rendre plusieurs livres que j’avais empruntés en juin. Trouverai-je un endroit où m’isoler pour filmer un trente-et-unième épisode de la dite série ? Avec ses défauts et ses ridicules, cette série a au moins le mérite d’échapper au cercle étrange de la promotion dissimulée. J’ai emprunté divers livres pour diverses raisons ; je les ai lus ou seulement parcourus ; j’en parle en vitesse ; basta. Pas de promotion dissimulée, donc.
Ici, je renvoie à l’excellent billet d’Ahmed Slama. Ahmed Slama a entièrement raison : même nous, universitaires et blogueurs « indépendants », qui essayons de faire autre chose que du journalisme littéraire de connivence, nous retrouvons souvent à promouvoir. Et Ahmed Slama met le doigt sur quelque chose qui participe sans doute de ma réticence à enregistrer une nouvelle vidéo de la série je range mon bureau : outre que la pile de livres est trop volumineuse, que je vais encore m’épuiser en faisant cette vidéo trop longue que personne ne regardera en entier (et comme je le comprends !), il y a toujours des livres que j’ai lus et qui ont été publiés par une maison d’édition que j’aime bien, que je veux faire connaître etc. Mais si le livre ne m’a pas enthousiasmé, comment faire ?
Comme pour les Traductions Sans Filet, série abandonnée (après 210 épisodes tout de même) car ça ne m’amusait plus ou car j’avais fait le tour de l’exercice (ce qui m’amuserait, c’est de le faire en live, dans une performance théâtrale en quelque sorte), je suis à la croisée des chemins. Ce dont j’aurais envie, ce serait de faire des vidéos plus brèves, sur un seul livre ou sur deux livres, dans une perspective moins vagabonde, moins informelle, plus universitaire sans doute, en un sens. Toutefois, ce qui me retient est que je ferais là, en quelque sorte, ce que font (beaucoup) mieux que moi Ahmed Slama, justement, ou Azélie Fayolle. C’est sans doute très vaniteux, mais je tiens à ce que mes projets restent suffisamment singuliers pour qu’on y retrouve ma griffe : très peu d’abonnés, très peu de visionnages ou de « clics », mais qu’importe, c’est bien de moi que ça émane.
07:37 Publié dans *2020*, Flèche inversée vers les carnétoiles, Improviser traduire, WAW | Lien permanent | Commentaires (0)
mercredi, 28 novembre 2018
Avec Ron Silliman, les légumes sculptés et le bordel intérieur du Cingal de novembre
La nouvelle TSF devrait plaire à Gilles Bonnet, qui apprécie, je crois, les titres longs et farfelus.
Et aussi à Stéphen et Stewen, que je cite, et qui sont (in)directement responsables d'un long prologue digressif nawakien. Et puis à celles et ceux qui aiment me voir englué dans des machins que je ne sais pas traduire, comme les “carved vegetables” ou “Conan the librarian”.
(Clin d'œil aussi à François Bon et ce qu'il dit des livres en bibliothèque, et à Ahmed Slama avec qui il faudra que je discute de Comment parler des livres que l'on n'a pas lus ?)
17:30 Publié dans Flèche inversée vers les carnétoiles, Improviser traduire | Lien permanent | Commentaires (0)
vendredi, 09 novembre 2018
In memoriam Guillaume Apollinaire, mort le 9 novembre 1918.
Je garderai la version avec la rime Cleopatra / tara! car, après vérification, je me suis gouré dans la prononciation de Eurydice en anglais. Ça se dit yu̇-ˈri-də-sē, en quatre syllabes, donc si on veut vraiment inverser l'ordre du quatrième vers, ça peut donner :
Eve, Cleopatra, Eurydice
And there's a couple more, I see.
09:38 Publié dans Improviser traduire | Lien permanent | Commentaires (0)
jeudi, 25 octobre 2018
Cohérence indirecte
Il existe une cohérence parfaite, mais indirecte, entre ma nouvelle photo de profil sur Facebook et ma dernière TSF : la dénonciation de l'américanophobie contre-productive des écrivains anglais par Washington Irving dans “English Writers on America” (un bijou).
19:06 Publié dans Affres extatiques, Chèvre, aucun risque, Comme dirait le duc d'Elbeuf, Improviser traduire | Lien permanent | Commentaires (0)
mardi, 16 octobre 2018
Lancement du projet vidéo autour de Robert Pinget
Dans cette vidéo, j'ai fait deux ou trois choses, et j'en ai dit bien d'autres.
Ce que je n'ai pas dit, c'est que j'avais l'espoir que ça marche mieux que la très éphémère Retraversée des Rougon-Macquart (projet pas entièrement abandonné au demeurant), parce que, par rapport à mars 2016, je me suis aguerri et je sais de quoi je suis capable/incapable.
Pour ce PROJET ░ PINGET (ainsi est-il sobrement nommé), je ne perdrai pas de temps à faire du montage, et je tournerai les vidéos au fur et à mesure.
Comme je me retiens, dans ce billet ou dans la vidéo ci-dessus, de digresser trop abondamment, il faudra que je consacre sans tarder une vidéo à la façon dont je me suis intéressé à l'œuvre de Pinget, et aux raisons pour lesquelles elle a beaucoup compté pour moi dans mes années de formation.
(J'emploie cette dernière expression avec un brin d'ironie, car je suis convaincu — ou alors : j'espère — qu'on n'a jamais fini de se former, et notamment en créant, par les blogs et les vlogs, des espaces d'échange et de construction du sens.)
12:11 Publié dans Improviser traduire, Lect(o)ures, PROJET ▓ PINGET | Lien permanent | Commentaires (0)
mardi, 02 octobre 2018
Index alphabétique des TSF par auteur (work in progress)
Le 13 novembre prochain, je parlerai, à Lyon de mon projet en cours et au long cours, les Traductions sans filet (TSF), lors d'une journée d'études consacrée à la LittéraTube. Il faut que je m'attelle à jeter les premiers paragraphes de cette communication, peut-être avec le dictaphone, histoire de prendre le problème systématiquement de biais.
En l'espèce, et même si le caractère réflexif est assez pesant, j'ai décidé de constituer enfin — aussi sur l'aimable insistance de François Bon — un index alphabétique des auteurs traduits lors de ces séances improvisées et filmées.
_____________________________________
Abani, Chris — [131]
Abish, Walter — [160]
Albarracin, Laurent — [167]
Ayitey Komey, Ellis — [35]
Barnes, Djuna — [123]
Baumer, Mark — [88]
Beaudoux, Clara — [134]
Beukes, Lauren — [107]
Bird&Moon.com — [139]
Boltanski, Christian — [33]
Bon, François — [24]
Bonnefoy, Yves — [43]
Breytenbach, Breyten — [119]
Burnham, Bo — [1] ; [2] ; [3] ; [19] ; [97]***
Butor, Michel — [62]
Char, René — [9]
Cheney-Coker, Syl — [36]
Chevillard, Éric — [74] ; [77]
CLV — [157]
Cooke, Jacquii — [65]
Coover, Robert — [34]
Corbett, Bill — [37]
Creeley, Robert —[32]
Döblin, Alfred — [142]
“dognapping” — [84]
Doubinsky, Seb — [27] ; [105] ; [148]
Droste-Hülshoff — [156]
Dujardin, Michèle — [114]
Duras, Marguerite — [125]
Durrell, Gerald — [73] ; [117] ; [120] ; [152]
Éluard, Paul — [48]
Feraoun, Mouloud — [51]
Flynn, Nick — [89]
Fourcade, Dominique — [6] ; [12]
Gide, André — [69]
Ginsberg, Allen — [87]
Gilkin, Iwan — [16]
Gissing, George — [145]
Gordimer, Nadine — [143]
Gotlib — [60]
Gould, Stephen Jay — [70]
Gray, Thomas — [63]
Guillevic, Eugène — [47]
Hejinian, Lyn — [80]
Henri VIII (le faux) — [13]
Hoagland, Tony — [59]
Hobson, Cheryl — [127]
Huret, Jules — [106]
Irving, Washington — [64] ; [166]
Jennings, Elizabeth — [126]
Joans, Ted — [28] ; [29] ; [31] ; [38] ; [44]
Johannin, Simon — [85]
Johnson, Samuel — [151]
Kalda, Katrina — [162]
Kamanda, Kama — [23]
Kaplan, Leslie — [138]
Khair, Tabish — [45]
Korn, Fadumo — [158]
Le Guin, Ursula — [130] ; [136]
Lopes, Henri — [42]
Limericky News — [122]
Lucashenko, Melissa — [159]
Lux, Thomas — [92]
Maconie, Stuart — [72]
Mail & Guardian — [8]
Malamud, Bernard — [164] ; [165]
Maulpoix, Jean-Michel — [104]
Maximin, Daniel — [93]
McCarthy, Cormac — [109] ; [110]
Meens, Dominique — [116]
Menmuir, Wyl — [46]
Mitchell, Joseph — [101] ; [103]
Montague, John — [61]
Morgenstern, Christian — [7]
Mouton, Antoine — [111] ; [112] ; [113]
Nakhjavani, Bahiyyih — [67]
Nganang, Patrice — [118] ; [149] ; [150] ; [153] ; [161]
Nimrod — [102]
Nirina, Esther — [53]* ; [54] ; [55] ; [56] ; [57] ; [76] ; [98]
Norac, Carl — [10]
Nougé, Paul — [15]
O'Brien, Flann — [20]
O'Faolain, Sean — [135]]
Okri, Ben — [96]
Osofisan, Sola — [18]
Oyeyemi, Helen — [81]
Oyeyinke, Diekoye — [133]
Perkins Gilman, Charlotte — [155]
Phillips, Tom — [137]
Pinget, Robert — [163]
Raharimanana — [52]
Ray, Lionel — [95]
Rebotier, Jacques — [4]
Ronsard, Pierre de — [71]
Roux, Laurine — [146]
Rushdie, Salman — [121]
St Vincent Millay, Edna — [128] ; [129]
Saknussemm, Kris — [147]
Sautière, Jane — [140] ; [141]
Sekiguchi, Ryoko — [17]
Shuttleworth, Red — [25]** ; [91]
Spenser, Edmund — [58]
Tatamkhulu Afrika — [26]
Traullé, Amandine — [154]
Venaille, Franck — [144]
Very British Problems — [41]
Vuong, Ocean— [124]
Walcott, Derek — [115]
Wanaina, Binyavanga — [132]
Watten, Barrett — [11]
Wauthier, Jean-Luc — [30]
Wells, H.G. — [14]
Weltman-Aron, Brigitte — [66]
Williams, Tex — [78]
Yvert, Fabienne — [68]
* La 53e vidéo signait le renoncement à tout montage.
** dédiée à V. Scigala
*** vidéo du 1er anniversaire
09:04 Publié dans Improviser traduire | Lien permanent | Commentaires (0)
jeudi, 20 septembre 2018
Traduction sans filet, la 150e
18:17 Publié dans Affres extatiques, Improviser traduire, Moments de Tours, Zestes photographiques | Lien permanent | Commentaires (0)
dimanche, 11 février 2018
Traduire “A Humument”
Hier, j'ai donc enregistré, au petit salon à l'étage, ma 137e traduction improvisée, ou traduction sans filet. C'est un chantier qui me tient à cœur et que j'ai relancé en 2018 avec pour principe de ne pas dépasser 10 minutes et d'en enregistrer 3 par semaine en moyenne.
Hier, c'était effectivement la troisième de la semaine, de sorte que, si j'en enregistre une aujourd'hui, ce sera en bonus, ou en prévision de semaines moins fastes. (Il y a ce genre de calcul dans le roman d'Ursula K. Le Guin que je suis en train de lire, The Left Hand of Darkness : le premier ministre déchu et l'Envoyé doivent gagner la frontière de Karhide, et, pour ce faire, couvrir 800 miles en 70 jours en traversant un immense glacier. Les journées où ils ne parcourent que 6 ou 8 miles en raison de la pluie et des ascensions difficiles s'achèvent dans le doute ou la déprime.)
Hier, je me suis décidé — mais comment l'idée ne m'en était-elle jamais venue ? — à traduire une page de A Humument. Bien entendu, j'ai choisi une seule page, la page 198, mais “traitée” différemment dans deux éditions différentes. Quand j'enregistrerai le dixième épisode de la série JE RANGE MON BUREAU, je parlerai encore de A Humument. Hier, j'ai tout de même bafouillé cinq minutes avant de traduire à proprement parler, ce qui ex plique un léger dépassement du temps maximal autorisé : la vidéo fait 10 minutes et 56 secondes. Il aurait suffi d'un montage un peu nerveux pour descendre en-dessous des 10 minutes, mais c'est un autre principe : si je procède à un montage, ça me prend entre 30 et 90 minutes, et ce projet ne peut se maintenir s'il devient aussi chronophage.
A Humument — je n'en reparle pas ici ; je l'ai souvent fait ; je renvoie le lecteur égaré ici à la préface de Tom Phillips, disponible sur son site à l'instar de nombreux documents et reproductions de l'œuvre.
Dans la vidéo, je ne suis pas parvenu à traduire de manière satisfaisante la paronomase triple shuttered/ fluttered/ muttered. Je n'y reviens pas ici, mais ce qui m'a frappé, en fait, c'est que le contenu presque arbitraire de certains redécoupages en îlots rendait plutôt aisée la tâche de traduire. En d'autres termes, comme je le dis dans la vidéo, cela fait bientôt treize ans que je connais cette œuvre et la traduire ne m'avait jamais traversé l'esprit. Je songe à le faire avec l'édition la plus courte à ma disposition, The Heart of Humument. Il faudra respecter la disposition et surtout la longueur des phylactères, comme pour une bande dessinée. Si je m'y mets vraiment, ça ne devrait pas prendre beaucoup de temps.
(Dans un autre ordre d'idées, si quelque généreux mécène ne sait pas quoi m'offrir pour me remercier de mes blogs et de mes vidéos, voici quelques suggestions. ;) )
07:14 Publié dans BoozArtz, Improviser traduire | Lien permanent | Commentaires (0)
lundi, 13 mars 2017
4141 — Deux vidéos sur les toits de la Bibliothèque
Cela faisait longtemps que je voulais faire ça.
L'occasion de venir prendre quelques photographies de l'exposition de livres d'écrivains africains était trop belle pour que je la manquasse.
Pour la première vidéo, j'ai repris de mémoire (et je me suis planté : pour le dernier vers, c'est « le temps veille », pas « l'esprit veille » (il a dû se produire une conflagration, dans mon esprit, avec le tableau de Gauguin)) un bref poème d'Esther Nirina qui est à l'honneur avec le présentoir de poésie anglophone du troisième étage.
Et donc, deux vidéos d'un coup, pour profiter aussi du passage par le bureau et donc de la connexion ultra-rapide de l'Université.
Pour la deuxième vidéo, plus longue, je me suis attaché à présenter le livre bouleversant de Shailja Patel, Migritude.
Comme je parle du spectacle dansé dont le texte constitue la première partie de Migritude, voici quelques autres liens pour se faire une idée (et se rafraîchir les yeux après ma tronche et mon blabla) :
- un documentaire bref de la chaîne californienne KQED
- The Cup Runneth Over (“an act of poetic terrorism”) — à faire écouter aux fans de Barack Obama
- entretien radiophonique avec Shailja Patel
- “Make It” (Durban)
09:48 Publié dans Affres extatiques, Blême mêmoire, Improviser traduire, WAW | Lien permanent | Commentaires (0)
mercredi, 08 mars 2017
HD
Le 8 mars, c'est la date de la première vidéo de traduction, l'an dernier.
Je me suis rendu compte hier, car j'étais agacé de constater que l'image était encore et toujours de mauvaise qualité sur YouTube, qu'il fallait modifier la qualité de l'image en utilisant la fonction Paramètres dans le coin inférieur droit : presque toutes mes vidéos sont enregistrées en HD, et c'est d'ailleurs pour ça que le temps de téléchargement, à la maison, est aussi long. Apparemment, YouTube les diffuse par défaut dans un format très compressé. Il faut donc modifier manuellement. Cela agit aussi sur le son, il semblerait.
(Essayez : ci-dessous, l'icône Paramètres se situe entre celle des sous-titres et celle du visionnage direct sur YouTube.)
Pour la vidéo d'hier, elle a été tournée dans la chambre ; ce n'est que la deuxième fois, je crois, que je choisis ce lieu de tournage. La fronde baoulé et la statuette mumuye répondent en quelque sorte au texte de Ben Okri.
06:34 Publié dans Improviser traduire | Lien permanent | Commentaires (0)
vendredi, 10 février 2017
Peint sur le visage, mât qui grince
Il fait froid sur les bords de Loire, un vendredi matin en février — mais à peine plus froid que dans mon bureau.
C'est donc dans mon bureau que je viens de mettre en ligne la dernière vidéo de traduction improvisée, filmée il y a une vingtaine de minutes devant la gabare sur socle qui est l'un des jalons de cette promenade, non loin du pont Wilson. Pour ces traductions sans filet, j'ai envie de varier autant que possible les lieux, les cadrages : je n'ai aucune compétence technique, mon matériel est pourri, mais je peux au moins faire un effort de conception (voire de conceptualisation). Ce matin, le nocturne avec le bruit mêlé des flots du fleuve et des véhicules sur la rue des Tanneurs — sans omettre les grincements irréguliers du mât — m'a particulièrement attiré.
Peu importe.
J'ai donc improvisé à partir d'un paragraphe que je venais de lire dans le tramway. (J'ai commencé, sans enthousiasme particulier, un nouveau roman de Caryl Phillips. (Nouveau pour moi — The Nature of Blood date de 1997.))
Dans cette vidéo, je finis par aborder une question qui me taraude de plus en plus, et dont François Bon parle encore aujourd'hui au sujet de ses traductions de Lovecraft : la question de l'écart par rapport à la langue (en langue source) et, partant, ce que l'on doit faire en langue cible. Ici, tout est parti de la fin de l'extrait traduit : an anxious smile painted on their faces. La métaphore de la peinture faciale est figée en anglais ; elle n'émane pas d'une recherche stylistique particulièrement innovante de la part de l'auteur. Cependant, je suis de plus en plus tenté — à rebours de la tradition universitaire — par ce que tant de collègues souligneraient en rouge en marquant CALQUE dans la marge : un sourire inquiet peint sur le visage.
__________________________________________________
Une coïncidence involontaire accompagne le choix du lieu de tournage, je m'en avise au moment de publier ce billet : je lis beaucoup Caryl Phillips à cause du cours d'agrégation que je donne cette année sur Crossing the River. Or, voici la Loire !
07:33 Publié dans Improviser traduire, Translatology Snippets | Lien permanent | Commentaires (3)
mardi, 31 janvier 2017
4100, another bullshit video by con translator
La vidéo ci-dessous, elle vient d'être filmée (improvisée) et mise en ligne illico grâce à la connexion vraiment ultra-rapide (ou qui me semble telle) de l'Université.
J'y traduis un paragraphe du roman de Nick Flynn, another bullshit night in suck city, roman de 2004 dont je constate, en faisant la vérification après l'enregistrement, qu'il a été traduit en français dès 2006... et par mon ex-collègue Anne-Laure Tissut, qui était encore en poste à Tours à l'époque. (Parmi les très bons souvenirs que j'ai d'Anne-Laure, c'est ce magnifique et si enrichissant collloque Paul West qu'elle avait organisé.)
Parmi les bizarreries imprévues, les trois secondes atroces où je pousse la chansonnette, Blueberry Hill de Fats Domino (ce ne serait pas arrivé si j'avais été certain que blueberry c'est la myrtille), et la pique à la bravitude de Ségolène Royal (circa 6'10").
Parmi les points les plus intéressants, la question de la traduction du jeu de mots trigger-hippie : je m'en suis sorti en traduisant par “hippie qui aime les flingues”, mais il n'y a plus de jeu de mots. L'idéal serait de trouver un mot-valise (hippitre ? hippitbull ?) mais je n'en trouve aucun qui situe le sens du côté de la mitraille... La B.U. n'a pas d'exemplaire de la traduction française, mais si quelqu'un peut vérifier comment Anne-Laure Tissut s'en est sortie...
Parmi les points les moins intéressants : oui, c'est le même pull depuis dimanche, mais je change de t-shirt.
10:01 Publié dans Improviser traduire, Translatology Snippets | Lien permanent | Commentaires (0)
lundi, 30 janvier 2017
In memoriam Mark Baumer, journal des traductions sans filet
Je viens de faire ma quatre-vingt-huitième vidéo de traduction improvisée.
[Edit de 15 h 45 : TSF #88 + traduction en cours de tout le chapitre 5]
En un peu moins d’onze mois, j’ai eu l’occasion de faire trop long, de faire trop bref, de dire beaucoup de bêtises, d’hésiter, de m’interrompre longuement dans le projet avant de décider de ne plus perdre de temps à faire de montage, etc. Ce qui est intéressant, c’est que cette série déjà assez colossale (à ma modeste échelle) de vidéos ne porte pas seulement témoignage de questions de traduction, mais comment elle vient doublonner les blogs, en quelque sorte, en quoi elle permet d’inscrire — non en creux, puisqu’au contraire ma tronche y est partout convexe — une sorte d’autobiographie par les livres, par les extraits, par les découvertes.
Journal, donc, qui compte ses commémorations tragiques (les attentats de Bruxelles — TSF #15) et ses saluts adressés à des écrivains morts : Bonnefoy [TSF #43], Butor [TSF #62], Gotlib [TSF #60], plus récemment Peter Abrahams [TSF #82]. Journal qui cherche à varier ses lieux : principalement les pièces de ma maison, mais aussi bureau de l’université [TSF #34], maison landaise [TSF #73], parking en sous-sol [TSF #54], parc de la Cousinerie [TSF #32], échafaudages [TSF #87] etc.
Histoire d’ancrer cette pratique, le moment me paraît donc amplement venu de créer ici une rubrique afin de prolonger l’expérience vidéo. (J’avais commencé à le faire pour le projet mort-né de retraversée des Rougon-Macquart.)
Pourquoi aujourd’hui ? Pas vraiment à cause du nombre 88, encore qu’il puisse suggérer un double infini dressé à la verticale (plutôt que le chiffre cryptique des néo-nazis). Plutôt à cause de la vidéo du jour, justement. Après avoir découvert, hier, l’œuvre de Mark Baumer – sa profusion de traces par divers biais non-textuels et surtout non-imprimés, mais aussi sous forme de poèmes et de livres – et la fin tragique (je raconte tout cela, mal, à l’emporte-pièce, dans la vidéo) de ce poète activiste très inspiré par les beatniks et les hippies, j’ai voulu consacrer mon activité de traducteur sans filet à une des pages de son livre de 2016, I Am A Road. *
Je proposerai d’ici demain une traduction française peaufinée du chapitre 5 dans son entier, dans la rubrique Darts on a slate, qu’on ne présente plus bien que son titre demeure peut-être opaque. Il me semble que ce livre serait susceptible d’intéresser certains éditeurs. Dans l’immédiat, se contenter de mes balbutiements et de mes borborygmes tels qu’un appareil photo de piètre qualité les saisit et – provisoirement – les immortalise.
Si l'idée est ici aussi de raconter comment s'est décidée la vidéo, son cadrage etc. — eh bien, justement, j'avais décidé de tourner dans le petit salon de l'étage (où j'ai déjà fait une ou deux vidéos, dont une, très longue, avec les cadres bien visibles), assis au secrétaire, avec l'ordinateur portable bien en vue puisque j'avais besoin de voir l'ebook. Comme je travaille sans aucun matériel, une des contraintes est que je n'ai pas de pied pour poser l'appareil photographique (cette fois-ci, le “vieux” Lumix). Je l'ai donc posé sur un des accoudoirs déplacés puis mis en L vertical du sofa de camelote qui fut neuf (en 1997, à Beauvais) mais ne l'est plus. N'ayant pas (sur le vieux Lumix, donc (il faut suivre)) d'écran rotatif pour contrôler l'image, je ne me suis pas aperçu que j'étais scalpé (ce n'est pas la première fois). De plus, bien entendu, les ouvriers qui ont commencé l'isolation par l'extérieur le 17 janvier (et qui en ont encore pour deux semaines) se sont mis à jouer du marteau vers le milieu de la vidéo, pendant la lecture de l'extrait.
* Le livre est à télécharger en PDF avec les photographies pour la somme dérisoire de cinq dollars ; je n’ai aucun doute sur le fait que ses parents feront bon usage de cet argent et le donneront à des causes justes.
11:35 Publié dans Improviser traduire, Ping-pong | Lien permanent | Commentaires (0)