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lundi, 20 novembre 2017

Surconsommation. Un modèle.

dimanche, 15 octobre 2017

d'un palimpseste de blues (tercets)

tercets improvisés sur la dernière vidéo bluesy de F.B.

 

chariots abandonnés

gros blocs de béton tagués

chaque mercredi longés

 

l'horloge sur l'esplanade

avant chaque nouveau cadrage

de l'aiguille en blues malade

 

deux étages : c'est la rame

 

les petits pavés rouges

véhicules et piétons comme accélérés

après le bleu fluo d'un granizado

 

au médian des rails : les phrases

 

blues de penser à la retraite

la vitre où défilent secs

immeubles & lignes (vieillir tes os)

 

à la bottleneck : come on in my kitchen

 

la fatigue avec Beckett

défile dans la nuit refaite

des mots apparus disparaissent

 

dans le ciel gris pétrole

le blues est-il un jeu de rôle

à coups de cutter dans la tôle

 

à l'arrivage : dédicace

 

& encore des murs

encore des murmures

le poème en vidéo perdure

 

samedi, 10 décembre 2016

« Quelqu'un a perdu son charme »

Ce matin, après avoir passé l'aspirateur, j'ai dû reprendre Oméga qui, en se faufilant sous l'immense épicéa — on se souviendra longtemps de l'année où j'ai envoyé un SMS « Le sapin est trop petit » et où mon épouse n'a saisi l'antiphrase qu'en débarquant à la maison — a fait tomber des brassées d'aiguilles, ce deux heures à peine avant son frère aîné, qui, dansant pour nous faire rire entre deux plis à la belote (oui, nous avons des débuts d'après-midi très traditionnels !), en a aussi fait tomber. 

 

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Avec ça, et le reste, je n'ai pas commencé à corriger de copies, mais je visionne Coiffeuses, le film que François Bon a fait avec le réalisateur Fabrice Cazeneuve et qu'il vient de mettre en ligne. Ça aussi, notre dialogue, nos polylogues sur la Toile, même par la vidéo : ce matin, j'ai fait ma cinquante-neuvième vidéo de traduction, avec une qualité inférieure, des hésitations à la pelle. En regardant une des séquences dans lesquelles une des apprenties lit le texte qu'elle a écrit pour l'atelier de François, je suis frappé par cette phrase : « Quelqu’un a perdu son charme mais a toujours son charme quelque part. » — Frappé, car je trouve ça très fort, très durassien. Je vérifie le texte, que je n'ai aucun mal à retrouver sur le site de François, et il s'avère que l'antithèse repose, non sur une répétition mais sur une paronomase que je trouve, pour le coup, plus faible : quelqu’un a perdu son charme mais a toujours son arme quelque part.

Les rayons percent, filtrent, et les aiguilles peuvent tomber. Ça fait des semaines que je bloque sur deux sonnets à écrire, et quelques chapitres à relire. J'aimerais m'en moquer.

 

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C'est vers cette même époque, fin 2006 puis 2007, qu'on a un peu travaillé ensemble, avec François Bon.

Sur des erreurs de perception repose beaucoup, pour moi, le charme de la poésie. On a perdu ce charme en fixant trop à l'écrit. Le passage par la piste audio — ici, par le visionnage — restitue un charme ambivalent. Dans l'image, retenir par exemple ce plan où, tandis que la jeune fille parle du renoncement à sa vulgarité, on voit le couple de dos, main dans la main, marcher le long des panneaux électoraux, avant le rodéo du scooter tout seul devant des portails de garages.

Faut-il aussi me moquer de tout ce que je laisse en plan (ici) ?

 

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Aiguilles d'épicéa qui tombent : mes cheveux ras qui tombent dans la bassine quand je me tonds la tronche, deux fois par moi, ou les mèches blanches dans cet autre film de François que j'ai découvert ce matin (on partait pour l'Angleterre).

 

samedi, 05 novembre 2016

La belle équipe

Revu La belle équipe.

En 1991, quand je l'avais vu, FR3 avait diffusé les deux fins. Cette fois-ci, avec une copie remastérisée (et très belle), c'était la fin tragique, de sorte que je n'arrive pas à me rappeler comment s'achève « l'autre film » : le couple Jeannot/Charlot chasse-t-il derechef la tentatrice ?

Étonnant comme tout le portrait de l'homosexualité (qui n'est même pas un sous-texte, ça crève l'écran) m'avait échappé à 17 ans... peut-être parce qu'on [= je] n'attendait l'homosexualité que dans les œuvres explicitement et a priori désignées comme telles ?

23:19 Publié dans Tographe | Lien permanent | Commentaires (2)

dimanche, 16 octobre 2016

De rouille & d'os Sur mes lèvres

Hier soir, nous avons regardé en famille — ou presque : Oméga ayant neuf ans, il est encore un peu jeune — De rouille et d'os. Il se trouve que, plus tôt dans la semaine, C* et moi avions regardé Sur mes lèvres, du même Audiard, et que nous ne connaissions pas non plus.

Une première chose m'avait frappé avec Sur mes lèvres : deuxième partie longuette, scénario tirant trop vers l'histoire criminelle poussive (au lieu d'exploiter toute la relation des deux protagonistes au travail, qui donne les meilleures scènes du film). Bien aimé quand même, mais je me suis fait la réflexion que, alors que j'avais beaucoup aimé Regarde les hommes tomber, adoré De battre mon cœur s'est arrêté, et été très impressionné par Un prophète, ce film d'Audiard ne me faisait, au fond, ni chaud ni froid.

Hier soir, plus âpre déception encore. De rouille et d'os succombe, non seulement à l'incapacité de son auteur à faire court, à couper au montage afin que son film ne s'englue pas dans des considérations de deuxième ordre, mais aussi à un story-telling tout à fait hollywoodien : tout, dans la façon dont les itinéraires de Marie et d'Ali se déroulent en parallèle avant de se croiser, puis leurs aventures (et surtout leurs mésaventures), est raconté de façon conventionnelle, conformiste. On sait à chaque instant ce qu'il va se passer ensuite : ils vont baiser, le gosse va se noyer etc. Et du coup, bien sûr, on s'en contrefout. Ajoutez à cela l'invraisemblance totale des trois scènes d'accident (dans la scène de l'accident qui vaut à Marie d'être amputée, les orques auraient attaqué la dresseuse et elle serait carrément morte (fin du film)) ; dans la scène où Ali dérouille* salement, il ne peut suffire que Marie se pointe avec ses jambes en métal pour qu'il prenne le dessus et achève la scène sans même une plaie ; dans la scène de la noyade, eh bien, le temps seulement que le père coure jusqu'au trou d'eau dans la glace, l'enfant est déjà mort normalement, donc NON, il ne peut pas être à peine vaguement mal en point le lendemain...), et comprenez pourquoi on ne s'interroge même plus : on regarde passer le temps en regardant un film...

Si j'écris ce billet, c'est surtout parce que je ne sais pas, compte tenu de ce que je viens de noter, si mes enthousiasmes passés pour les films d'Audiard viennent d'une différence réelle dans la qualité de ces différentes œuvres, ou si c'est moi qui me suis blasé, ou si j'avais surévalué De battre mon cœur... à l'époque — je me rappelle l'avoir vu au cinéma, et, en en discutant après, un ami m'avait dit qu'il trouvait ça trop long, tirant sur la corde, hystérique.

Donc, seule façon de clore ce billet ——— ?

 

 

* Ah tiens, je n'avais pas compris le titre du film, qu'Alpha a dû m'expliquer (oui, ça s'arrange tous les jours...)... mais en écrivant cette phrase, je me demande si le jeu de mots n'est pas sous-entendu par Audiard. (Après tout, c'est quand même le fils Audiard** !)

** Faut pas confondre les Michel Audiard (avec des canards sauvages).

mardi, 10 mai 2016

Taxi Téhéran

Viens de voir Taxi Téhéran.

Moi qui trouve que l'essentiel de ce qu'on nous propose en matière de cinéma est soit vain soit éculé, je suis impressionné.  Voilà un film fin, drôle, direct mais équivoque, dangereux, qui ne tranche pas entre politique et esthétique (car cela n'a aucun sens de trancher — l'art, ce n'est pas trancher).

Du grand cinéma, parce que, d'un bout à l'autre, rien de ce qui est montré, dit ou suggéré ne pourrait l'être autrement que par ce moyen-là, le film. Un sonnet n'est bon que s'il est fondamentalement sonnet ; un roman n'est beau que de se constituer de toutes les possibilités d'épaississement du romanesque (jusque dans ses déterminations et déconstructions contemporaines) ; un grand film est un film dont on ne peut rien traduire dans aucun autre medium.

Tout, dans Taxi Téhéran, relève de l'impression cinématographique. D'où son caractère impressionnant. Quel contraste avec un film comme Mustang, vu il n'y a pas longtemps, tout à fait encensé et cependant médiocre d'un bout à l'autre : bien joué, sans doute, mais totalement rabâché, rebattu, convenu, et surtout — donc — sans rien d'intrinsèquement cinématographique. Mustang pourrait être un article, un poème en prose, une chanson populaire ou une pièce de théâtre que cela ne changerait rien à son sens, ni à sa fadeur. Avec le film de Panahi, en revanche, on se prend plus de cinéma dans la tronche — dans les yeux, le cerveau — qu'en vingt films vantés de la dernière décennie.

22:31 Publié dans Tographe | Lien permanent | Commentaires (0)

vendredi, 01 avril 2016

Vieil homme sous un ciel en suspens

Pour célébrer la vingt-sixième vidéo, filmée tard ce soir, je signale l'importance du poète sud-africain Tatamkhulu Afrika (1920-2002).

Ces prochains jours, les publications de traductions improvisées et filmées seront peut-être plus sporadiques.

dimanche, 21 février 2016

Of Mice and Men (Sinise, 1992)

Regardé hier soir le film de 1992 adapté de Of Mice & Men — que j'enseigne ce semestre, donc je voulais me faire une idée. Occasion de faire découvrir l'œuvre à mon fils aîné aussi (je lui ai fait lire le dernier chapitre en traduction, pour lui montrer comment la schizophrénie de Lennie était évacuée dans le film au profit de sa “simple” débilité).

Il s'agit, globalement, d'une adaptation très fidèle, de et avec Gary Sinise (jamais entendu parler, jamais vu — auteur d'une très fidèle et assez belle adaptation).

John Malkovich, qui interprète le rôle de Lennie, est excellent, comme à son habitude, et campe merveilleusement (c'est-à-dire avec beaucoup d'habileté mais aussi d'humanité) le demeuré. Ce que je me demande, c'est comment il est parvenu à égrener ces litanies de "George" monocordes et semi-plaintifs sans être hanté en permanence par les versions parodiques de Tex Avery.

Tout est là, en quelque sorte, notamment les éléments très évidents de complicité homo-érotique... mais, à ce titre, l'ambiguïté de la relation entre George et Slim est tout à fait effacée au profit du seul couple Lennie/George. Pour cela, le texte reste plus subtil, avec notamment la belle dernière phrase, dans la bouche d'un lourdaud sans cœur, Carlson : “Now what the hell ya suppose is eatin’ them two guys?”. Ces hommes rongés, grignotés par leur humanité autant que par leur sexualité complexe, ce sont Slim et George Milton, eux qui, après la mort de Lennie, demeurent.

21:42 Publié dans Tographe, WAW | Lien permanent | Commentaires (0)

lundi, 04 janvier 2016

Quatrain pour Galabru

sur le principe des quatrains conversationnels

 

D'un tsar ou d'un czar on n'a lu

Très souvent qu'un modeste oukase.

Je me souviens d'avoir vu

Galabru dans Kamikaze.

 

vendredi, 04 décembre 2015

Gib's auf

Un très beau texte publié ce matin par François Bon me remet en mémoire — ou sur le chemin du — bref texte de Kafka, Gib's auf (dont voici la version allemande et, grâce à une autre partie du site de François, la version française).

 

Pour le plaisir de retrouver inactifs (“cassés”), dans quelques années, la quasi totalité de ces liens intégrés, je mets en ligne ci-dessous quelques films inspirés de cette micro-nouvelle, et dans lesquels on peut aussi (pas toujours) entendre le texte allemand.

 

...

(Il n'existe pas de coïncidence : aujourd'hui, dans l'un de mes cinq cours, celui de traductologie pour les étudiants de troisième année, nous allons plancher sur trois traductions anglaises de Matinée d'ivresse.)

 

lundi, 08 décembre 2014

Ennui incommensurable

Après un film, hier, tout en hétéros verbeux qui se foutent des peignées -- ce soir, un film avec des homos taiseux qui s'emmerdent ou s'égorgent.

Plus je vois ces films français imbéciles qu'encense la critique, plus je suis convaincu que la grande création est retournée, plus que jamais, en France, du côté de l'écrit, imprimé ou sur le Web.

23:04 Publié dans Tographe | Lien permanent | Commentaires (1)

lundi, 03 novembre 2014

La Toussaint (+ 2)

Le lundi 6 octobre, je n'avais pas voulu m'encombrer de l'ordinateur portable, et le 13 j'avais dû emmener Oméga chez le médecin en lieu et place de l'habituelle séance au Conservatoire entre 5 et 7, de sorte que mon chronotope a pu donner l'impression de battre de l'aile.

Ce soir, toujours pas d'ordinateur, mais deux bouquins, quelques feuilles de papier dans ma serviette rouge griffée Université, et surtout cet ahurissant changement climatique qui nous a fait passer en deux jours à peine de l'été (ou à peine moins (dans les Landes, en tout cas, et à Pau jeudi, c'était l'été)) à une impression d'hiver. Rue Jules-Simon, puis rue Colbert, la pluie froide, 13 degrés au thermomètre mais l'épiderme comme saisi par le frimas — le matin, j'avais commencé à traduire le poème de Cynthia Atkins, “Goodbye to Winter”, avec les étudiants de L3, quel étonnant contraste, d'une équinoxe à l'autre mais début novembre, bizarre décalage.

Après avoir traîné mes guêtres dans un bistrot minable de la rue Colbert (trop de bruit malgré le peu de monde et piètre éclairage), j'ai dû constater que la pluie avait redoublé (des trombes ininterrompues jusqu'à maintenant, j'écris ces lignes à presque dix heures du soir) et qu'il ne me serait pas possible de commencer le tournage des vidéos du projet “boîtes à lettres”. Vers six heures, j'ai regagné la noire calèche, m'y suis posé, ai poursuivi la lecture de Hiding in Plain Sight, et décidé qu'après tout, lire le passage que j'avais choisi (l'incipit) de La Toussaint là, dans la bagnole, avec la pluie battant contre la vitre et les phares des autos qui descendent la rue Jules-Simon, ce n'était pas mal. Les boîtes jaunes attendront.

Après la lecture à haute voix, j'ai tracé les bouts de phrases suivants au feutre fin vert sur une demi-feuille, dans l'idée qu'ils me serviraient à composer ce billet. Et puis en fin de compte je les livre tels quels, au feutre vert numérique :

la pluie ininterrompue

le café presque désert mais bruyant

l'éclairage partout blafard

photographies

l'ombre grise du cèdre

la ligne blanche du cadre (sombres photographies)

la grisaille des rues et du bitume

le refroidissement subit, mâtiné d'humidité et adossé à la lecture de La Toussaint, donne l'impression d'être passé été → hiver en deux jours seulement

Tout dégouline

Pas eu moyen de tenter le petit film, avec la pluie ininterrompue

dans la Prius, Dionissi de Julien Jacob en voyant défiler l'embouteillage

 

 Sur le chemin du retour, on réécoutait Dionissi, Oméga a lancé qu'il pleuvait des cordes, je lui ai dit que ça collait parfaitement à la guitare sèche.

Le chronotope a repris de la vigueur ce soir. Rideau.

vendredi, 17 octobre 2014

Vitrines sur les Joulins

Depuis bientôt dix ans que je tiens, irrégulièrement, ces carnets, j'ai déjà eu l'occasion d'écrire à quel point la place des Joulins m'inspirait, et combien je pourrais en faire, si j'avais le temps d'y traîner plus souvent et plus longtemps mes guêtres, un chronotope tourangeau fondamental. Depuis un mois, j'ai adopté, pour ma pause déjeuner du vendredi, le bistrot qui a remplacé les précédents avatars situés là (dont les Joulins, tout simplement). J'écris « bistrot », mais il s'agit tout à fait d'un café à la française, côté terrasse, et, à l'intérieur, d'un pub au sens le plus cosy et sombre feutré du terme.

 

Au Kaa, donc, j'expie mes heures de frénésie laborieuse du vendredi matin, et me prépare à mes heures de cours de l'après-midi — au cours desquelles, hier, j'ai tout de même dû préciser, pour la majorité des étudiants de première année, qu'un texte pouvait être “poétique” et évoquer des sujets terre-à-terre, et même des coucheries entre un maître et sa servante...

jeudi, 16 octobre 2014

Expositions Gilles Caron & Jean-Luc Olezak, au Château de Tours

Aujourd'hui, peu avant la clôture des diverses expositions du château, nous sommes allés voir l'exposition Gilles Caron, en partenariat avec le Musée du Jeu de Paume, et celle consacrée, sur le dernier étage, à un photographe tourangeau d'origine polonaise, Jean-Luc Olezak, dont le nom, apparemment, devait à l'origine s'écrire Olczak.

Gilles Caron est très célèbre, non seulement parce qu'il est l'auteur de reportages de guerre mémorables et de photographies non moins célèbres (les enfants dénutris du Biafra, images magnifiques et atroces, ou le Cohn-Bendit jovial souriant à face d'un CRS sur un trottoir parisien), mais aussi pour avoir fait partie des photographes retranchés dans une école, en plein désert, avec les rebelles du Tibesti. Cette histoire, grave, lourde de symboles, je la connaissais pour l'avoir lue et entendue de Depardon. Ce que j'ignorais, c'est qu'il n'était pas mort jeune, mais qu'il avait disparu en 1970 en territoire khmer rouge. Disparu, cela signifie que son corps n'a jamais été retrouvé, non ?

Ce que j'ai découvert, dans cette exposition qui permet d'espacer les vues, de faire respirer le regard entre chaque série, grâce aux belles et vastes salles du Château, ce sont les photographies de manifestations en Irlande du nord, mais aussi que Gilles Caron — lui, dont le nom suggérait ce retournement du chapeau circonflexe ou incurvé de Twiggy en un œil acéré tourné vers toute la saloperie militaire de ce monde — avait commencé par la photographie de mode.

 

jlo_004_m.jpgJean-Luc Olezak, lui, n'est pas, à ma connaissance, très connu. Pourtant, cette rétrospective, qu'il ne reste que trois jours pour aller voir, contient quelques véritables pépites. Par-delà l'aspect amusant (mais anecdotique) qui permet de revoir tel lieu tourangeau qui s'est déjà, même en dix ou quinze ans, métamorphosé, Olezak porte un regard profond, mais sans sécheresse, sur les gens et sur les lieux. Le risque est parfois qu'un certain kitsch vienne côtoyer une plus rigoureuse beauté, ainsi de ce diptyque de la Tour Eiffel : dans une image, superbe et qui n'est pas sans évoquer Kertesz, à une Tour Eiffel tronquée dans le ciel grège répond une flèche semblablement étêtée sur le bitume gris... et dans l'autre, un orteil flou, au premier plan, semble toucher le haut de la Tour Eiffel en arrière-plan (le comble du kitsch à cartes postales). Peut-être le tri n'a-t-il pas été fait très judicieusement, car on sent que sur certaines séries, il doit y avoir des dizaines d'autres photographies tout aussi fortes dans les cartons de l'artiste... à moins que ce kitsch ne soit le goût que l'on souhaite aussi inculquer, ou respecter chez certains visiteurs ?

samedi, 28 décembre 2013

Une partie de décembre

Pendant cinq jours, Alpha ne va pas faire de saxophone. Ce sera la première fois, depuis qu'il a commencé les leçons, en septembre 2011, qu'il passera plus de deux jours sans faire son quart d'heure quotidien.

Hier, il a plu et fait gris presque sans discontinuer. 

Avant-hier, il faisait très beau, et nous n'étions pas les seuls à avoir eu la (mauvaise) idée de descendre en centre ville en bagnole pour aller visiter l'exposition (remarquable) de photographies de Vivian Maier. Écrire un billet.

 

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Hier soir, Une partie de campagne de Depardon ; quelques facilités dans le montage, mais le témoignage demeure, très vivant. On s'étonne que VGE ait désavoué “son” cinéaste. Il ne s'attendait pas à ce film, mais à quoi s'attendait-il ? Tout a l'air tellement mis en scène, à commencer par ce candidat (Ministre d'État, tout de même) qui conduit lui-même sa 504 sur les boulevards parisiens et les routes de France ! Depardon a dû refuser de filmer VGE aux commandes des bimoteurs, mais c'est tout juste.

Ce qui frappe particulièrement, c'est le flegme impressionnant du présidentiable, jamais pris en défaut. Que, durant l'annonce des résultats du second tour (et au cours de l'heure entière qui précède), il soit seul en face du téléviseur, voilà qui n'est pas concevable, qui est nécessairement bidonné ; toutefois, la vérité profonde de VGE semble transparaître dans cet homme nonchalant qui n'a, pour autre antienne, à l'heure de son élection, que de répéter à plusieurs reprises à son correspondant téléphonique (Poniatowski) combien il trouve « assommant » que D'Ornano, à qui il l'avait expressément défendu, se soit rendu sur un plateau de télévision.

Les belles images de Paris, dans la dernière scène, m'ont permis de vérifier ce que je ne savais plus, ou n'avais jamais su, à savoir que le Ministère de l'Économie et des Finances avait, jusqu'au début des années 90, son siège au Louvre.

vendredi, 25 janvier 2013

La Crasse bitumineuse

Vieux restes de fruits pourris, excroissances, chewing-gums écrasés et en voie de décomposition, morceaux de sac en papier de fast-food déchirés et collés par la pluie… depuis le temps que je voudrais m’en saisir… C’est là un des sens possibles de la texturologie : un fragment banal de sol, ou d’une surface quelconque, est généralement complexe, dense, hétéroclite. Le plus difficile est de rendre l’impression de fondu, de masse informe, en n’appuyant pas trop sur les contrastes. Par le film ? la vision de biais ? toujours, à défaut, reste l’écriture, qu’on emporte partout avec soi.

lundi, 19 mars 2012

Maudit [...] ton nom

Popescu lui a fait rencontrer des pays, qui n’avaient jamais été perdus, même en nostalgie, « à cause du danger représenté par les mines de toutes espèces dont les plages étaient parsemées ». Un centon serait aisé. (Pourtant, on a écrit peu de pages pour ce Journal raturé, vous savez bien…) Il ne serait pas difficile d’aligner des lignes. (De laminer des mines ? Pas possible.) En lisant Popescu dans le train, il note, au dos d’une carte postale Libération, les phrases « tu la regardes dans ta mémoire » et « tu feuillettes ta mémoire » (p. 10 et 14 respectivement). Quand même.

Alors, de nouveau, cri primal : Attendez, les minettes !

(Comme ça, et pas autrement, il photographia la gare d’Angoulême, sans descendre du train.)

On a sauté en l’air, Tobrouk pour tout le monde. Nul alibi (ce serait aisé).

 

(Travers Divers, p. 761)

mardi, 08 février 2011

Aub ourg (au bourg)

22 décembre 2010, huit heures et demie.

 

Levé à 4 h 30, suite de Campo abierto. Très Aragon (c’est le comble – c’est le moins). Me souviens mal de Campo cerrado, qui avait un protagoniste principal, me semble-t-il (et donc très différent dans la construction). Ne sais pas si les volumes suivants ont été traduits / publiés. Je dois écrire ce billet sur Herta Müller. Les enfants dessinent des lettres au feutre humide, dans le lit. Il y a des myriades de photographies retrouvées dans la mallette

( – Papa, tu étais parti ?

– Non.

        Mais où tu vas, alors, avec ta valise ?)

et que je veux archiver grâce aux fonctions « gros plan » de mon Panasonic. (D’où : faire du vide dans l’ordinateur, aussi.)

 

Il est allé secouer la nappe, qui était couverte de miettes de Panettone.

Hier soir : Becket de Peter Glenville (1964). Très Royal Shakespeare Company, mais orienté yankee.

 

Avant de songer à écrire quelques phrases un peu moins superficielles sur le bref roman de László Krasznahorkai, au titre interminable (rose des vents, orientation du monastère japonais), je dois me débarrasser de ceci : la traductrice confond eut et eût ; il y a d’autres erreurs de conjugaison qui m’ont agacé contre la traductrice et contre l’éditeur négligent ; on ne sait pas du tout, quand on ne connaît aucun autre ouvrage de cet éditeur (Cambourakis), si les marges larges sont du fait de l’auteur ou de son éditeur français.

 

Onze heures et quart. J’ai bien entamé la note de lecture sur l’un des deux Herta Müller (Atemschaukel). J’ai aussi fait la vaisselle, les courses au bourg, des parties de loto des animaux avec Oméga, rangé du linge. Le soleil ne se lève pas. On nous parle de radoucissement, puis de froid avec soleil. Qu’y comprendre.

 

dimanche, 28 novembre 2010

"Je parle à mon bonnet..."

Nous allons aujourd'hui à La Flèche (par une journée qui promet d'être froide et grise), et, fort opportunément (mais, me semble-t-il, par hasard) nous avons regardé hier soir, avec Alpha (qui appréhendait, je pense, d'être confronté à une pièce de Molière, pensant cela trop difficile pour lui (alors que je savais, pour avoir été exposé au répertoire classique dès l'âge de sept ou huit ans, qu'il mordrait d'emblée à l'hameçon)), la version filmée de la mise en scène de L'Avare par Catherine Hiégel avec Denis Podalydès. Alpha ne s'y est pas ennuyé un instant, est allé se coucher encore hilare et tout excité, répétant les répliques qui l'avaient le plus fait rire ("les beaux yeux de ma cassette ?") au point d'avoir du mal à s'endormir. Tout juste avons-nous eu besoin de deux ou trois "pauses", le temps de lui expliquer ce qu'était une entremetteuse et ce que celle-ci (Frosine) venait faire dans cette galère, ou la situation de quiproquo entre Cléante emprunteur et Harpagon prêteur à usure.

Du coup, je pense  -- le connaissant --  qu'Alpha va lire tout ce qui, de Molière, pourra lui tomber sous la dent, et être enthousiaste à la moindre proposition de regarder Le Malade imaginaire ou Tartuffe. Je suis allé lui dégotter Le Médecin malgré lui dans une vieille édition des Classiques Larousse, et L'Avare, bien sûr, dans l'exemplaire de ces mêmes Classiques Larousse qui appartenait à mon père et à partir duquel ma soeur et moi avions entrepris d'écrire, dans un cahier Héraklès, une version pas même modernisée... une réécriture, au plus, ou une réappropriation (je devais avoir huit ans, et elle douze).

Sur la mise en scène elle-même, pas grand chose à dire, ni à redire. Escalier bien mis à profit, Podalydès très drôle quoique parfois trop virevoltant (son interprétation du monologue me laisse partagé : admirable, en un sens, elle n'a de sens justement que pour quelqu'un qui connaît déjà bien la scène -- or, le méta-méta, s'il convient aux classiques, a tout de même tendance à m'ébouriffer, au théâtre), interprétation globalement bonne quoique penchant vers l'hystérique, et à l'exception d'une Elise dramatiquement mauvaise et dont, au moment de la distribution, au générique de fin, nous avons constaté qu'elle avait un nom maghrébin ; ses origines n'avaient pas pu nous frapper, tout d'abord parce qu'elle n'appartient pas visiblement aux minorités dites visibles, mais surtout parce qu'elle a très bien intégré un mode de jeu que l'on pourrait qualifier d'exécrable à la française.

Et, comme je lis depuis hier après-midi, le journal 2009 de Renaud Camus, Kråkmo, cela m'emmène dans des réflexions en spirale sur la culture, les générations, la discrimination positive etc. Est-il possible que cette actrice se soit retrouvée à la Comédie Française par un simple effet de discrimination, et malgré ses piètres dons (c'est un euphémisme) pour la comédie ? Si c'était le cas, voilà un exemple qui ferait bien du tort, à rebours, aux Roschdy Zem et Sami Bouajila, pour citer deux acteurs que je crois maghrébins, également, et qui sont absolument excellents (et n'ont sans doute pas eu besoin de discrimination positive pour en arriver là où ils en sont, juste d'avoir du talent et de le travailler (ce qui n'est pas rien)).

 

mercredi, 07 mai 2008

Notule pour "Scanners" de David Cronenberg

Scanners : inversion du mythe d'Abel et Caïn, puisque le mauvais fils - sacrilège et destructeur - est ici l'aîné.

Cela dit, on ne sait si, à la fin, l'un des deux corps réduit en bouillie volcanique, le survivant est "le bon fils", comme il le proclame (I am Cameron), ou si c'est Caïn/Darryl qui a triomphé, sous son vrai visage. L'hypothèse d'une fusion des deux n'est pas à exclure, ni, d'ailleurs, que tout cela soit du parfait Portninwak...

L'un est l'autre, comme dans tout schéma duel (et non dualiste).

samedi, 13 octobre 2007

I'll Sleep When I'm Dead

HIer soir, c'était, après une longue et belle journée très cérébrale, I'll Sleep When I'm Dead de Mike Hodges, film impressionnant à bien des titres. Le savant dosage d'accents cockney très variés n'est pas pour rien dans le plaisir très musical que j'ai pris à regarder ce film, sans compter plusieurs gros plans sur des "gueules" mémorables (yeux de Clive Owen, face tordue de Jonathan Rhys-Meyer, rictus tickyholgadesques de Jamie Foreman, impassibilité vibrante de Charlotte Rampling, profil plus qu'aquilin du légiste...) et une intrigue mêlant habilement la simplicité du film noir à quelques impasses sémantiques bien senties.

Il y a aussi, immanquablement, quelques posters de Coltrane, ou la mention comme en passant, sur un message de répondeur anodin, d'un concert de Terence Blanchard, qui situe l'esthétique "noire" du film aussi du côté du jazz post-bop des années 1960, ce qui n'est pas rien. Il y a aussi cette contre-plongée isolée sur Foreman et Owen juste avant leur première incursion dans le jardin de l'assassin sodomite.

Après les nanards de ces derniers temps (Gattaca, Million Dollar Baby), that was a real whiff of fresh air, mate !

09:55 Publié dans Tographe | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : Cinéma, Ligérienne

dimanche, 15 avril 2007

Tony Takitani, d'un désir hérésie

Un film qui laisse à penser que l’œuvre littéraire dont il est l’adaptation ne mérite pas qu’on s’y intéresse mais qui vous laisse, en revanche, profondément impressionné et désireux de mieux connaître le cinéaste, voilà un objet précieux de fantasme, un terrain de hantise.

 

En 1997, à Paris, je fis découvrir à des amis – dans la cave surchauffée qui tenait lieu de salle vidéo – un film qui revêtait pour moi une importance capitale, investi d’une valeur esthétique qui tenait autant au paysage (à la scène), qu’aux visages (aux faces) et à l’affrontement (au jeu). Il s’agissait d’Onibaba de Kaneto Shindo, un film de 1964 que j’ai regardé trois ou quatre fois, puis plus jamais revu (ni aucun autre du même cinéaste d’ailleurs). Je nageais alors en pleine période Ozu, et Onibaba, tout aussi génial, est une sorte d’anti-Ozu absolu.

Jeudi soir, j’ai découvert Tony Takitani de Jun Ichikawa. Ce film se signale par une technique de fondu linéaire et panoramique qui permet d’enchaîner les scènes au moyen d’objets-écrans : la caméra glisse, de gauche à droite, derrière une lampe qu’elle interpose entre la scène et le regard, le gris noircit puis, sur la droite apparaît progressivement la séquence suivante. Cette technique entrecoupante est très caractéristique du film (comme la musique de Ryuichi Sakamoto), en ce sens qu’elle donne rapidement une impression de surcharge, d’excès esthétique, qu’elle témoigne d’un désir outré, outrancier, exagéré. Que le cadrage et la mise en scène même soient le creuset où s’ancre le plus profondément le désir du cinéaste – et celui du spectateur –, il y a longtemps que je m’en persuade, et les films d’Ozu, en ce sens, furent une étape majeure. Ici donc, enchaînement surjoué des séquences ; présence envahissante de la musique ; effacement des dialogues par rapport à la voix off : une représentation en acte de l’obsession (thème (ou sujet ?) du film).

Dans la mesure où l’obsession crée le film, où c’est elle qui le porte, en enfante l’imaginaire autant que les images, on peut dire qu’elle en est le sujet. L’obsession a fait naître ce film de toutes pièces (obsession du prénom, phobie obsessionnelle tant de la vie de couple que du délaissement, obsession vestimentaire, obsession des machines et de leurs détails) et dans toutes les pièces : s’il est un point de rencontre entre ce film d’Ichikawa et le cinéma d’Ozu, c’est dans la passion des lieux, et singulièrement des lieux clos (les « pièces de x tatami » des nouvelles d’ Osamu Dazai). Lorsque l’employée de Tony, subjuguée par les centaines d’habits de la défunte et submergée d’émotion, se met à sangloter en allant d’un cintre à l’autre, c’est dans cette pièce qui n’avait été qu’à peine vue auparavant et sur laquelle la caméra s’attardera vide plus tard. Les piles, plutôt modestes, de vieux vinyls auront remplacé les tissus précieux, mais la pièce, elle, happe, si elle hante.

 

En revanche, la nouvelle de Haruki Murakami, si tant est qu’elle soit reprise fidèlement dans le texte lu en off, ne suscite pas, chez moi, le moindre désir. Déjà, j’ai abandonné à son sort, il y a quelque temps, un roman – Kafka sur le rivage – que C. a lu avec des sentiments mi-figue mi-raisin. Un bref survol de la Toile m’apprend, cependant, que Jun Ichikawa a réalisé une petite quinzaine de films… et Kaneto Shindo quarante au bas mot ! Tout un programme !

09:15 Publié dans Tographe | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : Cinéma, Japon, Ichikawa, Shindo, Ozu

samedi, 30 décembre 2006

Time’s Mirror / Train shuffle

Les remous du drap blanc qui va servir de nappe – lors d’un pique-nique pré-électoral – envahissent l’écran sans que l’on sache, le temps d’une ou deux pulsations, si l’action va désormais se transporter sur un navire, dans le ciel des anges, dans une fabrique d’édredons. Ce drap blanc qui frétille, tangue au gré des gestes gracieux de deux figurantes, représente aussi ces fausses mers de théâtre, comme, par exemple, dans la première scène de La Tempête, a lieu le naufrage. Mais aussi, comme tout cela ne dure qu’une poignée de secondes (nous n’aurions pas même le temps de passer sous le drap, la nappe, par jeu), cette image si brève – dans un film qui sait, par ailleurs, prendre le temps des descriptions, des cadrages savants, des démonstrations subtiles – est le miroir du temps, dans l’éclatement des cuivres qui fait suite à la lente et douce mélopée. La tempête après le calme, avec ces ondulations de la nappe, annonce aussi le bringuebalement du train d’enfer, entre deux ères, entre deux lignes, entre deux fenêtres, entre deux arcs-en-ciel. Duvet de plumes d’eider s’échappant d’un trombone folâtre.

vendredi, 24 novembre 2006

Trop la louze

Pas un seul cinéma à Tours qui passe Borat en V.O.. Va être obligé de se mater nescioquid encore.

19:22 Publié dans Tographe | Lien permanent | Commentaires (4)

vendredi, 03 novembre 2006

Pride & Prejudice, de Laurence Olivier

Hier soir, nous avons vu Pride & Prejudice, dans la version tournée par Robert Z. Leonard en 1940 aux Etats-Unis, avec Greer Garson et Laurence Olivier dans les rôles principaux. Je connais déjà bien la version la plus récente, de Joe Wright (2005), car elle se trouve être, cette année, au programme des concours d'enseignement.

Aucune des deux n'est véritablement à la hauteur (ni même n'arrive à la cheville, s'il m'est permis de risquer cette personnification hardie) du roman, mais c'est une autre histoire. Au moins, le film américain de 1940 a le mérite de souligner (au risque même de l'exagération) les aspects comiques et satiriques du roman, ce que la plupart des "lectures" récentes tendent à gommer ou effacer, au profit de contresens romanticisants et fleur bleue qui sont à l'extrême opposé de l'esthétique de Jane Austen.

Ce qui est très divertissant, dans le film de Robert Z. Leonard, ce sont justement les contresens délibérés, les libertés prises avec l'intrigue et les personnages, libertés qui, au moins, suggèrent au spectateur de ne pas attendre une quelconque (hypothétique ! irréalisable ?) fidélité au texte. Le plus hallucinant est le dérapage hollywoodien qui transforme la tante de Darcy, Lady Catherine de Bourgh, en entremetteuse qui regarde d'un oeil bienveillant la passion de son neveu pour Elizabeth ! Toutefois, tout cela est assumé avec tant de franchise et de bonne grâce que l'on parvient à trouver cette relecture tout à fait stimulante.

Apparemment, beaucoup d'encre a coulé au sujet des costumes qui, récupérés après le tournage de Gone with the Wind, sont tout à fait anachroniques. C'est juste, mais là encore, il s'agit d'une transposition délibérée de la part du cinéaste et de son scénariste, qui n'est autre qu'Aldous Huxley. En effet, dès le début, Mrs Bennet annonce : "Best news we've had since Waterloo!". D'emblée, cette réplique place l'histoire dans un contexte historique qui n'est pas du tout celui du roman, à savoir la toute fin du dix-huitième du siècle. On pourrait multiplier les exemples : les Bingley jouent au piquet, et non plus au lanturlu. De même, lors du bal, la valse est considérée par Miss Bingley comme une danse totalement démodée, et la mazurka fait son apparition.

L'interprétation est, à certains égards, datée ou stéréotypée, mais elle rend compte, de manière générale, des relations entre personnages. Il est toujours possible de hausser les sourcils en remarquant que l'actrice choisie pour jouer Lizzie a dix ans de plus que la soeur aînée (vérification faite, Greer Garson avait bel et bien sept ans de plus que Maureen O' Sullivan) et quinze de plus que n'en requiert le rôle, mais, en fin de compte, cela n'a pas une très grande importance. Après tout, dans le film de Joe Wright, Keira Knightley a le bon âge, mais elle ne joue pas bien, alors...

 

P.S. : Accessoirement, ceci est la 1309ème note publiée dans ce carnétoile... Pour en finir avec les chiffres ronds...

14:55 Publié dans Tographe | Lien permanent | Commentaires (9) | Tags : Cinéma, Film, Littérature

lundi, 09 octobre 2006

Call me Yootha...

Grâce à une étudiante, qui m'a prêté plusieurs DVD, j'ai enfin découvert, hier soir, une série mythique des années 1970, Mildred and George. (J'ai vécu une année en Angleterre, mais je n'avais pas la télévision (ce qui m'a permis d'ailleurs de passer tout mon temps libre (et donc tout mon temps)) dans les bibliothèques et dans les pubs (et il est à remarquer que les bibliothèques, contrairement aux pubs, n'avaient pas d'heure de fermeture et qu'on pouvait s'y trouver à trois heures du matin (ce qui ne m'est jamais arrivé)) et d'y perfectionner mon anglais), d'où mon ignorance d'un certain nombre de monuments.)

La série est traversée, illuminée, ensorcelée par l'excellentissime Yootha Joyce, dont c'était, apparemment, le vrai prénom.  Elle réussit à porter les répliques de son personnage, pourtant stéréotypé, à des sommets d'une subtilité, d'une variété quasiment infinies.  Elle a aussi une voix invraisemblablement stylée.

Le plus passionnant, dans le seul épisode que j'ai vu, est que la série repose entièrement sur des contrastes de classes sociales qui sont d'autant plus frappants, dans leur mise en scène à des fins comiques, que les représentants des classes antagonistes sont, en fait, très proches. Voici l'un des dialogues les plus drôles, entre George et la voisine, qui essaie vainement de lui proposer des thés fins :

- Milk or lemon ?

- No, I'll stick with tea, thank you.

 

08:35 Publié dans Tographe | Lien permanent | Commentaires (0)