mercredi, 15 avril 2020
Huit flemmes
Pas assez dormi, réveillé avec stress et migraine. Cela arrive, pas de quoi se plaindre.
J'espère pouvoir me remettre à travailler efficacement. Hier et avant-hier, je ne me suis ni posé ni reposé, et je n'ai rien fait de bien. Ça, ça m'énerve.
Lundi soir, Macron a parlé et c'était aussi long qu'imprécis ; hier, Blanquer s'est exprimé trois fois à trois moments différents, et c'était plus vague encore. Impression de plus en plus angoissante que tout cela est géré par des amateurs, des incompétents.
Film vu : Huit femmes d'Ozon. Agréable, amusant, et moins agaçant qu'à la première vision. Peut-être est-ce moi qui m'agace moins facilement d'un truc totalement superficiel. Ardant joue presque avec retenue. C'est le genre de film qu'on regarde en jetant un œil de temps à autre au Web pour s'exclamer : ah, Ludivine Sagnier avait vingt-trois ans, là. Et les autres n'en croient pas leurs yeux. Cela donne une idée du film.
06:18 Publié dans *2020* | Lien permanent | Commentaires (2)
mardi, 14 avril 2020
Des beignes
Cela fait huit jours que j'ai laissé en plan une vidéo, et de même pour le projet Scarlatti. Je n'ai pas repris le Projet Pinget. Je me collerais des beignes.
Le temps s'est rafraîchi ; le chauffage se relance.
20:20 Publié dans *2020* | Lien permanent | Commentaires (0)
lundi, 13 avril 2020
Empocher
Levé à 6 h 15, et réveillé pour la première fois depuis un petit bout de temps par les douleurs au dos. Ce matin, il suffisait de se lever pour que ça passe un peu.
Être levé tôt, cela tombe bien : j'ai un boulot monstre aujourd'hui et demain, dans la foulée du week-end. Pas grave, tant que je dors bien et que j'ai des moments de pause : parties de billard sur la terrasse avec O*, par exemple.
Il y a deux ans, j'avais acheté pour 20 euros dans un Troc de l'Île, à Chambray je crois, un billard américain miniature, mais en bois et feutre, avec des queues et des billes “conformes” (pas en plastique). Je le monte sur une paire de tréteaux, et je l'installe dehors quand les beaux jours reviennent, car il n'y a aucune pièce où nous avons de quoi “tourner autour” : miniature, mais pas tant que ça ! O* et moi jouons au jeu du 15, qui n'est pas officiel, mais qui est plus simple que les diverses règles qui m'ont donné la migraine en essayant de les comprendre.
Hier soir, pas de film : O* a préféré organiser une soirée de jeux, ce qui a été accepté de très bon cœur par son frère (!). Donc : Minotaurus, Cluedo, et — pour finir, car on en avait marre — jeu du dictionnaire jusqu'à la lettre O.
O* découvrait ce jeu, ainsi que mes imitations lamentables de Maître Capello (je vous parle d'un temps que les moins de 50 ans...), et il s'est avéré très vif et doué au jeu. Au passage, j'ai découvert les mots manoque et manotte. Aucun des deux n'est facile à placer.
Ce soir, on attend un discours du Président. La façon dont ce discours est monté en épingle depuis trois ou quatre jours est ridicule : qu'il parle, s'il a quelque chose à dire ! La façon dont, à chaque fois, des rumeurs sont “fuitées” via le JDD est dérisoire : plus personne n'est dupe de la technique des coups de sonde. La façon dont, depuis quelques jours, on parle de l'après-déconfinement, est obscène : il y a encore dans les 500 ou 600 morts par jour, il me semble. La façon dont le patronat commence à réclamer d'ores et déjà de futurs sacrifices salariaux est scandaleuse : les salarié·es sont déjà sacrifié·es, tandis que les actionnaires et les patrons évadés fiscaux profitent de la crise pour améliorer leur pactole. La façon dont quelques ténors de la majorité ont, dès samedi, répété le laïus du connard qui dirige le MEDEF, proféré la veille, est aussi inquiétante que pathétique : même Xavier Bertrand a répondu à tout cela dans un entretien qui s'est répandu sur les réseaux sociaux avec des chapeaux tels que “Mélenchon, enlève ton masque, on t'a reconnu”.
06:45 Publié dans *2020*, Indignations, Moments de Tours, Words Words Words | Lien permanent | Commentaires (0)
dimanche, 12 avril 2020
Océan libellule
Aujourd'hui, après un samedi passé à trimer sur le calendrier des examens à distance de mai et à tenter de rassurer pas mal d'étudiants par mail aussi, je me suis embarqué dans l'enregistrement puis le montage d'une vidéo correspondant à mon cours d'avant-hier. Bilan des comptes, 5 bonnes heures. Même si je sais que, ce semestre étrange arrivant à son terme, les étudiant·es vont surtout se concentrer sur leur dossier individuel pour le 15 mai et n'iront pas regarder cette vidéo, je ne regrette pas mes efforts, car, sur la question du chassé-croisé comme sur les modulations, il y a là beaucoup d'exemples et de développements qui “resserviront”.
Moi qui ne recycle jamais de cours, je tiens là une sorte d'archive à laquelle je pourrai renvoyer les promotions futures, comme pour les annales d'examens par exemple. Inhabituellement, j'intègre la vidéo à ce billet car j'en suis assez content, malgré sa longueur, et car j'y évoque aussi au débotté telle question de normativisme linguistique ou tel autre point relatif à la Chinafrique (après tout, j'ai choisi des extraits du roman d'Owuor car c'est un texte qui relève de ma spécialité de recherche).
Tant qu'à user aujourd'hui de ce blog comme d'un dépotoir (c'est cela, après tout – et les textes, des déchets imputrescibles), j'archive ici les résultats d'une série de sondages linguistiques farfelus que j'organise ces temps-ci sur Twitter.
18:30 Publié dans *2020*, Translatology Snippets, WAW, Words Words Words | Lien permanent | Commentaires (0)
samedi, 11 avril 2020
Dérision de l'évaluation
Levé depuis 5 h 45 pour continuer de régler toutes les difficultés liées aux examens. J'ai répondu à un étudiant de L2 complètement paniqué de n'avoir aucune nouvelle et qui se faisait le porte-parole de camarades aussi paniqués que lui, qu'il pouvait (tout en signalant que ça n'avait rien d'officiel) diffuser les infos officieuses que, découragé d'expliquer cela ici sous une autre forme, je copie-colle ci-après :
L'UFR L&L va enfin pouvoir, suite aux décisions de la CFVU jeudi, mettre en place un calendrier avec des modalités de contrôle adaptées. Ce calendrier sera communiqué officiellement aux étudiant-es après approbation par le Président, donc si tout va bien en milieu de semaine prochaine au plus tard. Si nous l'avions pu, nous (au département d'anglais) aurions déjà pris nos décisions et aurions communiqué les modalités d'examen depuis 10 jours ; cela ne nous a pas été permis.
Pour l'anglais, tout sera en distanciel, avec plusieurs matières en CC qui vont "basculer" en examen terminal. Dans certaines matières, des évaluations qui ont pu être faites avant la fermeture seront prises en compte dans le cadre d'un maintien en CC ; mais comme il n'y a eu que 4 semaines de cours, il y en a fort peu.
Pour les évaluations en examen terminal et évaluations pour RSE, les sujets seront communiqués le 1er mai au plus tard et les étudiant-es auront 15 jours pour les rendre, via Célène ou par mail, avec, par ailleurs, une grande souplesse dans les formats de devoir remis (des photos d'un travail manuscrit seront admises, a priori). Le cas des étudiant-es empêché-es n'est pas encore fixé, la CFVU ayant interdit la proposition de l'UFR L&L de neutralisation du semestre et la demande des élues étudiantes (10 par défaut aux étudiant-es se déclarant empêché-es de composer). Ce que vous pouvez d'ores et déjà dire à l'ensemble de vos camarades c'est que des solutions seront proposées à celles et ceux qui seraient vraiment dans l'impossibilité de remettre des travaux entre le 1er et le 15 mai.
Ce qui est évident également, au vu de la situation actuelle, est que les équipes pédagogiques ont reçu des consignes de bienveillance et que le S2 sera globalement plus facile à obtenir que le S1 ; cela signifie donc que les étudiant-es ajourné-es au S1 ont tout intérêt, dans la mesure du possible, à rendre l'ensemble des évaluations distancielles en usant du délai long qui sera accordé. Je vous dis tout cela pour remotiver tout le monde. La fermeture de l'université, le confinement etc. ont pour conséquence un bilan très lourd sur le moral de tout le monde, et donc des étudiant-es aussi. Nous le savons. La situation en matière d'examens sera bientôt officiellement clarifiée, et d'une manière qui doit faire renaître l'espoir et la motivation à travailler chez tou-tes les étudiant-es.
Maintenant, j'attends qu'on me sanctionne pour avoir tenté d'éviter, à ma façon, quelques suicides chez les étudiant·es. (Ceci n'est pas une hyperbole.)
L'Université française est (une fois de plus, devrais-je dire) pas du tout à la hauteur de la situation et ne propose que de petits aménagements technocratiques tièdes à une véritable catastrophe. Le conseil d'UFR avant-hier en fut un excellent exemple : trois heures à discuter du sexe des anges...
08:20 Publié dans *2020*, WAW | Lien permanent | Commentaires (1)
vendredi, 10 avril 2020
*1004*
Pour un des deux cours d'agrégation que je vais tenter d'assurer (comment ? Teams ? Renavisio ? YouTube live ?) la semaine prochaine, toutes les étudiantes ont rempli le sondage en ligne afin de définir un créneau. Et pour l'autre, rien, nada, au point que je suis allé vérifier que j'avais bien envoyé le mail avec le bon lien. Oui, je l'ai fait, lundi dernier aussi.
Bizarre.
Les réunions se suivent et se ressemblent : les instances universitaires sont en-dessous de tout et ne comprennent rien à la situation.
Heureusement qu'on peut constater combien nous sommes, malgré tout, privilégiés, en lisant chaque jour les témoignages des personnes qui sont obligées de travailler, souvent avec de grands risques, ou qu'on voit à quel point les pays pauvres sont dans une situation terrible (pas de confinement car dans ce cas-là tout le monde meurt de faim). Cela permet de relativiser l'épouvantable gabegie dans les universités françaises.
(Et je précise bien, pour qu'on ne se méprenne pas : ni Schadenfreude ni suave mari magno. Je tiens le coup car je me rends compte que les trucs ingérables que je dois me coltiner sont peu de choses, relativement parlant.)
17:07 Publié dans *2020* | Lien permanent | Commentaires (0)
jeudi, 09 avril 2020
Bar By
Après un conseil d'UFR par visioconférence ubuesque et absurde à tous égards, face à la montée de dangers immenses d'une part et de pusillanimités administratives d'autre part, la tentation de tout envoyer bouler est plus grande que jamais.
(Je dis ça, mais j'en suis incapable.)
16:56 Publié dans *2020* | Lien permanent | Commentaires (0)
mercredi, 08 avril 2020
Alambic, sortie confinée
Hier, on s'est intéressé au hautbois musette, au saxhorn duplex* et à l'orgue Cavaillé-Coll d'Azkoitia.
Retour du soleil et de la douceur.
Le sondage Twitter d'avant-hier a donné des résultats surprenants : balls est arrivé devant nuts, mais d'une courte tête (si j'ose dire). — L'émoticône poivrière a surtout été choisi pour qu'on se pose des questions, ou pour débusquer les personnes aux idées mal placées. Pas réellement d'allusion argotique non plus.
Impossible de me (re)mettre à des choses d'envergure. Je me claquerais**. Passé une bonne partie de l'après-midi avec S°, ma directrice de département, et à tout configurer dans des tableaux Excel. (Ai-je déjà dit ici que je déteste les tableurs ?) Le soir, quelques mails suite à l'envoi, par S°, du long courrier du Doyen et des propositions d'évaluation en distanciel seulement.
Depuis quelques jours, retour des moustiques, aussi.
Ce matin, levé tôt, aussi parce que ces histoires d'examens de première session me taraudent.***
Hier soir : Gervaise de René Clément. Plutôt beau film, mais son pas toujours synchro — l'occasion aussi de se rappeler, pour C* comme pour moi, qu'on ne se rappelle pas parfaitement bien L'Assommoir : j'ai quelques excuses, l'ayant étudié en classe de troisième — donc il y a 32 ans (quoi ??!?) — et ne l'ayant pas relu, ou alors seulement par extraits, depuis.
Il y a, dans le film, à en croire l'interminable générique de début (on avait largement le temps de finir sa clope avant d'entrer dans la salle, à l'époque), des chansons écrites par Raymond Queneau, qui s'est amusé dans le pastiche.
* Ce n'est pas l'instrument qui a le mieux traversé les âges.
** Ich könnte mich zerreißen. (Phrase trouvée dans le dictionnaire en ligne PONS une heure après avoir écrit ce billet, en préparant ma traduction allemande du jour.)
*** Et j'en ai oublié de signaler que ce billet était le 4.646e du blog. À la louche cela fait donc, depuis le 6 juin 2005, une moyenne de 0,8579870729455217 billet publié par jour.
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mardi, 07 avril 2020
Chambres
Didier Goux me fait remarquer qu'il n'est toujours pas possible de mettre en italiques, ou en gras, dans les commentaires du blog. Déjà, en 2005, cela semblait rudimentaire, alors maintenant... Cela dit, l'immense majorité des gens qui écrivent sur Facebook ou Twitter s'accommodent de ne pas pouvoir justifier ni policer leurs textes sur ces sites-là. J'ai découvert très récemment comment créer des italiques e tutti quanti sur Facebook. Sur Twitter, cela reste impossible, je crois. Bref, tout ça pour dire que je testerai un subterfuge tout à l'heure et que je vous en dirai des nouvelles. (Voir infra, en commentaires, si j'y suis parvenu.)
En tout cas, le quotidien enchaîne. Après sa vidéo sur A Room of One's Own, Azélie Fayolle a publié dimanche une vidéo très juste et très fine, assez essai à la Montaigne, sur le confinement.
Les éboueurs ne sont pas passés hier, la Poste non plus. Le soleil revient, après 24 heures de pluie pas toujours fine. Il y a des trucs de boulot auxquels je n'arrive pas à me mettre, alors je procrastine, en enregistrant des vidéos, en traduisant de l'allemand, nawak total.
Hier soir : Dixième chambre de Depardon. Peut-être celui des 3 films sur le système policier/pénal qui est le plus dérangeant du fait de son montage : on ne sait jamais vraiment quel est le contexte, et surtout l'institution judiciaire est loin d'y montrer son meilleur visage. Le meilleur est le premier, Faits divers : j'ai beau ne pas aimer les flics, c'est là qu'on voit que, sur toute la chaîne, c'est eux qui font le travail le plus dur, dans tous les sens du terme.
10:49 Publié dans *2020* | Lien permanent | Commentaires (4)
lundi, 06 avril 2020
*0604*
Il s'est mis à pleuvoir, depuis une demi-heure peut-être — je ne saurais dire, j'avais le nez sur mes copies —, et je crois qu'il n'avait pas plu depuis le début du confinement. Du vent très froid, et très violent il y a huit jours, oui, mais de la pluie, je ne crois pas. Tant mieux pour les allergiques au pollen, entre autres.
Fini hier Le Nuage et la valse de Ferdinand Peroutka. Très grand livre. L'Épilogue en kaléidoscope reprend toute la structure du livre, en la diffractant encore. Magnifique.
Il faudrait que j'enregistre une, et même deux vidéos je range mon bureau, mais j'ai pris du retard, ce week-end, dans mon travail.
Hier soir, le coin cinéphilie quotidien : Première année, petit film français (l'expression dit tout, je trouve, et j'espère juste qu'on me comprend), mais très bien joué. Film à charge contre l'absurdité totale que représente le système de sélection en PACES. Après le film, on en parlait avec A* notamment, car il a plusieurs potes embarqué·es dans ce cursus : pour critiquer très vivement le fonctionnement des études de PACES, il suffit de faire un film descriptif.
09:25 Publié dans *2020* | Lien permanent | Commentaires (3)
dimanche, 05 avril 2020
Schlock
Dans le néflier une tourterelle a chassé une pie.
Dans Schlock le tueur à la banane, le monstre se sert largement du popcorn dans la bassine de son voisin avant de conduire gentiment un petit garçon aux toilettes.
Lors de mon sondage linguistique le plus récent sur Twitter, aucun·e des 37 votant·es n'a voté pour ma métaphore préférée.
Dans Schlock le tueur à la banane, Édouard Philippe dit qu'il ne laissera personne affirmer qu'il y a eu du retard dans les mesures de confinement.
La tourterelle à présent me guette depuis le lampadaire.
Dans Schlock le tueur à la banane, les voitures de police zigzaguent dans tous les sens.
Ce matin j'ai eu mal à la tronche rien qu'en faisant ma to-do list pour aujourd'hui et demain.
Dans Schlock le tueur à la banane, Bruno Le Maire tient des propos hostiles à l'idéologie libérale.
Bon, il faut que je m'y mette.
Dans Schlock le tueur à la banane, la jeune aveugle prend le montre pour un chien et lui renvoie neuf fois de suite un bâton.
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samedi, 04 avril 2020
Scorbut en or
Pas tant dormi que ça, mais après un réveil à 7 h, flemmardé et traînassé au lit jusqu'à 9 h. La honte. Du mal à me battre les flancs pour bosser aujourd'hui, donc je glandouille en écoutant des cantates de Bach et le dernier album de Sophie Alour.
Je n'arrive pas à savoir si notre métier, qui consiste très largement en une grosse dose de travail à la maison, nous aide à mieux vivre le confinement ou pas. En tout cas, il y a, sur Twitter, des collègues du secondaire complètement paranos qui se répandent depuis hier en interprétations délirantes et conspirationnistes des annonces du Ministre : les hiérarchies sont souvent lamentables, les réformes sont destructrices, mais ça n'aide pas qu'il y ait autant de collègues totalement à la ramasse non plus.
Mercredi dernier, j'ai enfin commencé la lecture du Nuage et la valse de Ferdinand Peroutka, traduction Hélène Belletto-Sussel. J'en suis à peu près aux deux tiers, et c'est très fort. Curieusement, plus qu'aucun autre livre sur l'expérience concentrationnaire, ça me rappelle Les Communistes d'Aragon.
Il fait très beau aujourd'hui. Pas de courses depuis mercredi, et on doit encore pouvoir tenir même sans aller à la boulangerie ou acheter fruits et légumes et frais jusqu'à lundi. Phrase du jour, d'ores et déjà, par C* : "Mieux vaut attraper le scorbut que le Covid."
Hier soir, Pulp fiction. Vu une fois seulement, au cinéma à sa sortie. Grand film, même si le côté un peu postmoderne-qui-tourne-en-rond et mise en abyme infinie de la construction des récits ne résiste guère. Me suis amusé de découvrir que les Québécois avaient commercialisé ce film sous un titre qui est un contresens total, Fiction pulpeuse !
11:36 Publié dans *2020* | Lien permanent | Commentaires (1)
vendredi, 03 avril 2020
Un peu de cinéma
Hier soir, nous avons regardé Rafiki. Le film est un peu conventionnel, mais même ainsi il n'a pas manqué d'être considéré comme un brûlot au Kenya. La manière dont sont organisées les plongées et contre-plongées dynamiques m'a beaucoup plu. Je suis prêt à parier que des militantes lesbiennes auront été dérangées par le côté un peu binaire du film (le couple formé par une jeune fille très sexualisée et un “garçon manqué”), mais là encore il faut voir que les enjeux politiques liés aux discriminations homophobes dans plusieurs pays d'Afrique sont également loin d'être subtils. Les personnages du père et de Blacksta, mais aussi de la mère de Ziki, offrent une vraie complexité au film.
Beaucoup pensé à Binyavanga Wanaina en regardant ce film : auteur majeur qu'il ne faut pas “réduire à” son homosexualité, mais dont il serait bon que davantage d'Africain·es aussi lisent la très belle nouvelle ‘I Am A Homosexual, Mum’.
Avant-hier soir, dans un autre genre, Les acteurs de Bertrand Blier. Outre que le film entier semble avoir été écrit pour le point d'orgue que constitue le dialogue entre le cinéaste et son père mort qui lui parle au téléphone, la meilleure idée est de faire jouer Dussolier par Balasko. Comme pour Convoi exceptionnel, toutefois, on se surprend à trouver longuet un film d'une heure et demie et à se demander quand ça va s'achever alors qu'on en est à peine à la moitié.
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Ce sera le point le plus marquant de ce confinement, pour la vie familiale : jamais nous n'avions regardé autant de films en aussi peu de temps. Et la rubrique Tographe ne s'était pas autant nourrie que depuis trois semaines.
08:58 Publié dans *2020*, Tographe | Lien permanent | Commentaires (3)
jeudi, 02 avril 2020
Tragi-comédie
Cela fera trois semaines ce soir que nous avons appris que les écoles et universités fermeraient. Et cela fait donc deux semaines et demie que la fameuse autant que fumeuse "continuité pédagogique" s'est mise en place, grâce à la bonne volonté des enseignant-es et sans aucun soutien logistique ni technologique de l'Education nationale.
Il en va d'ailleurs d'autres pans de l'Etat comme pour l'éducation : l'armée française est une nouvelle fois en-dessous de tout. Au bout de trois semaines, l'armée française, qui est la risée du monde depuis des décennies, a été capable d'installer trois vagues tentes avec trente lits d'hôpital. En Espagne ou au Royaume-Uni, ce sont de véritables hôpitaux militaires qui sont désormais opérationnels : nous passons pour des glandus ; pas grave, on a l'habitude ; surtout, notre nullité augmente le nombre de victimes. Confirmation est faite qu'à part aider des régimes dictatoriaux en Afrique et cramer des millions de litres de kérosène dans le ciel des villes françaises, l'armée ne sert à rien. La police, elle, ne sert qu'à faire rentrer des sous dans les caisses en fouillant dans les sacs des gens afin de pouvoir leur coller une amende en dépit d'une attestation de sortie valable. Protéger les citoyens, on n'en parle même plus ; je crois que beaucoup de policiers ne savent même plus, en toute bonne foi, que là est théoriquement leur mission principale.
On parle d'un confinement possible jusqu'à l'été. Et la raison principale en serait l'incurie de l'Etat, une fois encore : pas assez de masques, pas assez de tests de dépistage. La macronie est comme le médecin qui préconise d'approcher le thermomètre d'un bloc de glace pour faire baisser la température.
Triste tragi-comédie...
Dans ce bourbier je commence à me retrouver avec des quantités de formalités administratives à accomplir : étudiant-es coincé-es à l'étranger, dossiers de candidatures d'étudiant-es de pays étrangers (Sénégal surtout d'ailleurs, cette année), tableaux des MCC et des examens à faire, défaire et refaire...
10:06 Publié dans *2020* | Lien permanent | Commentaires (0)
mercredi, 01 avril 2020
Normal anormal
Une information de première importance, en ce commencement d'avril, et qui devrait réjouir ma mère : quatre jours d'affilée que je ne me réveille pas avant 7 h, et même que je traînasse entre sommeil et veille jusqu'à 7 h 45 aujourd'hui — une vraie grasse matinée !
Les poissons d'avril, si la presse en fait, risquent d'avoir un goût saumâtre.
Hier soir, nanard ennuyeux (ne le sont-ils pas tous ?) : Twist Again à Moscou.
La forme verbale traînasse peut être du verbe traînasser à l'indicatif 1e et 3e p. s., comme du verbe traîner, imparfait du subjonctif 1e p. s.
Une étudiante chinoise m'a sollicité en me suggérant le sujet de la prochaine vidéo de Miettes et bribes ; je vais l'enregistrer aujourd'hui.
Il faudrait que je commence une nouvelle série, peut-être pas de vidéos, plutôt de traduction de poèmes comme l'an dernier avec Rose Ausländer.
On entre dans le confinement prolongé : cela devient “the new normal”, ce qui fait craindre à la fois pour le retour à la normale et pour notre état psychologique au long des longues semaines qu'il reste à franchir... Je l'ai écrit aux collègues il y a quelques jours en réaction aux injonctions hiérarchiques d'organiser des examens (sinon les examens tel que prévus initialement) : nous devons rejeter toute tentative de normaliser cette situation, qui est fondamentalement anormale. Face à la fracture numérique, bien sûr, mais aussi face au désarroi qu'implique l'absence de cours en présentiel, nous ne pouvons nous contenter d'improviser des évaluations distancielles comme si de rien n'était.
(Un collègue et ami m'a fait remarquer par mail que la différence orthographique présentiel/distanciel était étrange ; j'ai oublié de lui répondre, mais je m'étais fait avoir il y a 15 jours, au point d'être à deux doigts de corriger quelqu'un qui écrivait distanciel car je pensais que cette personne faisait une erreur !)
J'ai en tête la mélodie de L'Ondine de Cécile Chaminade, dont je me sers pour les génériques de mes vidéos Miettes et bribes.
08:43 Publié dans *2020*, WAW | Lien permanent | Commentaires (1)
mardi, 31 mars 2020
Garde-nèfles boulange
Il y a onze ans, c'était aussi un mardi, et j'ignorais que j'allais finir la journée en garde à vue.
Aujourd'hui je vais aller à la boulangerie. Nous sommes plutôt bien organisés : entre le 20 mars et aujourd'hui nous sommes allés une fois à la boulangerie et une fois à l'Arrivage. C* a lancé un drive pour demain soir.
Il y a un an, j'écrivais ceci, qui pourrait me servir de matériau pour le gros coup de collier que je dois donner dans le cadre du projet Scarlatti :
Les merisiers magiques côté jardin sont en fleur. En une semaine, les bourgeons des néfliers, microscopiques, sont devenus des feuilles de cinq centimètres, d'un vert terriblement émouvant.
Hier soir, Thelma et Louise, que je n'avais vu qu'une fois. Encore plus émouvant et mieux filmé que dans mon souvenir.
09:35 Publié dans *2020*, Blême mêmoire, Tographe | Lien permanent | Commentaires (2)
lundi, 30 mars 2020
*3003*
Hier soir, nous avons regardé Parasite, très bon film en effet, même si je trouve que ça manque un peu de rythme vers le milieu du film (scène de beuverie puis scène de révélation de l'homme caché dans la cave-bunker). La scène du carnage est difficilement regardable, mais je trouve généralement tout ce qui est même vaguement gore difficile à regarder.
Confinement, jour 14 ou 17 selon la manière de compter. Darmanin appelle les Français·es à la solidarité et aux dons aux plus démunis. Des milliers de twittos lui ont fait la seule réponse acceptable : remets l'ISF, supprime le CICE, lutte vraiment contre les 80 milliards annuels d'évasion fiscale.
14:24 Publié dans *2020*, Tographe | Lien permanent | Commentaires (0)
dimanche, 29 mars 2020
La lecture & le viol
La grasse matinée d'hier (réveillé à 6 h 50, levé à 8 h) n'est qu'un souvenir, d'autant plus que le changement d'heure a eu lieu cette nuit et qu'il est “en fait” 5 h.
Lu ce matin le mail d'une collègue sur la messagerie des anglicistes de l'enseignement supérieur :
The generation gap between me and my students increases every year!! Today they asked me for recommendations about novels. I tried to think of novels that might really grab them. These are students for whom under normal circumstances reading a novel is something you do under duress when you are obliged to by a teacher. Et encore.
Of more recently published novels, I thought Solar Bones by Mike McCormack was just amazing, and that On Earth We're Briefly Gorgeous by Ocean Vuong is now the best American novel (!!). I still think that Dermot Healy's A Goat Song is brilliant. But that's me. I don't know if they would really grab these Millenials. Could anyone recommend novels in English that might really hook very-reluctant-reader Millenials? I kind of feel that the stakes are high because if I could find some novels that they could read on their own with genuine pleasure (and not as a chore) it might turn things around (for some of them). And they could move on from there. I hope this makes sense.
Je lui ai répondu ceci :
I didn't know that Vuong, whose poetry collection I've loved, had written a novel.
Si je n'en étais pas “rendu” à devoir donner un gros coup de collier en avril pour mes deux cours d'agrégation, et à devoir désormais pondre à peu près un quadrilatère par jour si je veux avoir fini d'ici l'été le projet Scarlatti, je me relancerais bien dans un défi quotidien de vidéo ou de traduction.
Dans le mail de la collègue, j'aime bien l'emploi des verbes grab (séduire ?) et hook (harponner ?). De la lecture comme viol(ence), aussi...
06:23 Publié dans *2020*, Ecrit(o)ures, Lect(o)ures, Words Words Words | Lien permanent | Commentaires (0)
samedi, 28 mars 2020
*2803*
Aujourd'hui, à part une visioconférence et quelques mails, je n'ai pas travaillé. Première journée de quasi-pause en 2 semaines : tout le monde ne peut pas travailler dans le privé et avoir fini à 13 h en ne faisant rien le week-end.
La bassesse et la vilenie des manipulations gouvernementales sont plus criantes que jamais, par contraste avec la tragédie.
18:59 Publié dans *2020* | Lien permanent | Commentaires (0)
vendredi, 27 mars 2020
Des perruches souris aux mouettes de Franklin
Hier après-midi j'ai fait une petite sieste, et ça m'a complètement foutu en l'air : nuque raide, douleurs vagues jusqu'au coucher. Et là, réveillé très tôt avec la migraine, fini par prendre un doliprane. Sieste réparatrice, my foot.
J'ai lancé un nouveau projet vidéo, Miettes & bribes, a priori pour mes étudiant·es d'échange, mais le public-cible n'a pas encore réagi ; j'aimerais bien, pourtant, que ce soit ces étudiant·es-là qui me proposent le thème des futures vidéos. — Pour le projet Scarlatti, il faut que j'écrive 34 textes d'ici le 31 mars (5 jours donc), mais cela seulement si je veux rester dans le cadre du nouvel objectif : boucler le livre fin juin. (L'objectif de départ était d'écrire ce livre en 12 mois, donc de le boucler fin 2020.)
Film hier soir : Le Magnifique, que je voyais pour la quatrième fois (mais on alterne les films qu'on n'a jamais vus avec des “classiques” pour O*). Pourtant, c'était A* qui se rappelait le gag de la femme de ménage qui passe l'aspirateur sur la plage. Il ne se rappelait pas du tout, par contre, toute l'intrigue autour de la doctorante et de l'éditeur : il a raison, c'est le point faible du film. Envie d'extraire, pour en faire un GIF, les 3 ou 4 secondes de la scène au Jardin des Plantes où Merlin (Belmondo) dit à Christine (Bisset) : “mais tout le monde s'en fout, de votre thèse !”. Gifle incluse, évidemment. Mais je n'ai pas 30 minutes à perdre pour ça, je pense.
François Merlin est un “écrivain en bâtiment” comme le disait naguère voire jadis Didier Goux de ses propres ouvrages. Je me demande si D.G. a fait la liste exhaustive de tous les livres qu'il a écrits sous le pseudonyme (collectif, crois-je me rappeler) de Michel Brice. Toutes les scènes où Merlin est assis face à sa machine à écrire étaient ce que j'avais préféré quand j'ai vu ce film pour la première fois (et ça s'est encore ressenti dans l'écriture de mon quadrilatère d'hier soir).
Commencé à lire hier le texte d'un ami d'A* qui raconte son séjour en Amérique du Sud avec force photos animalières magnifiques. Cela aussi s'est retrouvé dans le quadrilatère 241-244, écrit exceptionnellement avant le coucher.
À faire ce vendredi, outre le cours de L3 à distance, et deux appels téléphoniques pour le travail : la n° 59 de je range mon bureau. Déjà huit jours depuis la 58, et je voulais les enchaîner. Les semaines passent à une vitesse...
Bon, ce fut un billet très égocentrique. C'est un peu le principe du journal, mais enfin...
06:07 Publié dans *2020*, Tographe | Lien permanent | Commentaires (6)
jeudi, 26 mars 2020
Des orfraies aux fraises
Suite à mon billet d'avant-hier, aucune réaction de la principale intéressée, et c'est bien normal (elle est accaparée, comme nous tou·tes, par la fameuse “continuité pédagogique”). Par contre, Didier Goux m'a signalé un beau passage de Chateaubriand, ce qui est l'occasion d'archiver ici cet extrait de l'avant-propos du traducteur de l'édition anglaise de 1902 des Mémoires d'Outre-Tombe, Alexander Texeira de Mattos.
Je le fais sous forme de capture d'écran, car je me suis souvent rendu compte, après une dizaine d'années à bloguer, que les liens hypertexte avaient tendance à ne plus être valides. J'indique toutefois le lien vers la traduction anglaise du tome 1 (et vers l'original aussi sur le Projet Gutenberg). Cela devrait intéresser Claire Placial, qui a publié hier, elle aussi, des vidéos de cours. Ça fait drôlement plaisir, même si c'est dans le contexte tragique actuel. Je mets exprès le lien vers la 2e partie de son cours sur les métamorphoses chez Ovide et dans Harry Potter, car elle a été moins vue que la 1ère (mais cent fois plus que n'importe laquelle de mes élucubrations (tiens, ça va donner raison à VS qui pense que mon angoisse principale est le manque de reconnaissance, cf infra)).
J'évoque VS ? Ah, d'une menteuse l'autre. Hier après-midi, lors de la conférence de presse consécutive au conseil des ministres, la menteuse et manipulatrice Sibeth Ndiaye, vraiment une des pires de cette majorité de faquins, a calmement insulté les 800.000 professeur·es de France, en disant qu'en ce moment “ils ne travaillent pas”.
Here is for the record as well :
Tout cela est démoralisant. Impression de bosser plus que jamais, pour se faire cracher à la figure. Difficile de garder le cap. Heureusement, les garçons ont l'air de très bien supporter le confinement. Hier soir, O* a dit qu'il avait beaucoup aimé Rome, ville ouverte, dont je ne me rappelais pas, pourtant, que ce fût aussi bavard par moments. Toute la scène dans les bureaux de la Gestapo est vraiment étrange, jusqu'aux femmes qui entrent et sortent comme dans un moulin de la salle de torture. Très beau film néanmoins. — Dans un tout autre genre je viens de recommander à un étudiant de L3 d'essayer de voir en entier l'excellente adaptation cinématographique de Twelfth Night avec Imogen Stubbs.
À noter : Valérie Scigala, désormais, ne trouve pas d'autre moyen de m'insulter que de dire que je suis chauve... Cela montre à quel point de bassesse elle est descendue. Faut dire qu'elle qui ne cesse de dire depuis trois ans que les fonctionnaires ne comprennent rien au vrai monde du travail et que la politique gouvernementale est parfaite avoue ces jours-ci tout benoîtement qu'il y a des jours entiers de télétravail où elle... ne travaille pas...
06:51 Publié dans *2020*, Flèche inversée vers les carnétoiles, Tographe, Translatology Snippets, WAW | Lien permanent | Commentaires (2)
mercredi, 25 mars 2020
*2503*
Hier, ma grand-mère maternelle a fêté, seule bien entendu (et hélas), ses 93 ans.
Depuis hier, des échanges assez soutenus ont commencé entre collègues anglicistes de Tours, au sujet de l'évaluation du second semestre. Je ne suis pas en mesure de révéler des discussions confidentielles sur des propositions encore officieuses, mais en tout cas ce qui est certain, c'est qu'une fois encore (et plus que jamais, car la gravité sans précédent de la crise fait encore ressortir la futilité des préoccupations) les universitaires montrent, pour beaucoup, leur incapacité à aller au plus simple. Je ne sais si c'est une forme de crispation sur des choses qui paraissent essentielles à mes collègues, en mode byzantin, ou si, plus généralement, cette majorité d'enseignants-chercheurs en sciences humaines trouvent insultante la simplicité... En tout cas, même après 25 ans de métier, ça ne laisse pas de me fasciner, et de m'exaspérer.
Film du jour (hier) : Rencontres du troisième type. — Vu une seule fois, il y a trente ans, and counting... J'avais, comme souvent dans de pareils cas, un souvenir très vif de plusieurs passages, mais totalement oublié d'autres moments pourtant primordiaux. Souvenir d'un film qui traîne en longueur, et je n'ai pas varié sur ce point. Je m'en souvenais si bien que je me rappelle très distinctement qu'il y avait, outre celle qui dessine Devils Tower et celui qui la sculpte, un personnage qui avait décrit le site dans les moindres détails. Chacun sa forme artistique, en quelque sorte. Or, dans la version regardée hier, pas trace de ça. Ai-je pu imaginer cela de toutes pièces ? c'est étrange. Il doit y avoir plusieurs versions du film, et celle que nous avons regardée doit être une version courte (omg!).
Hier sont morts Manu Dibango, des suites du Covid19, et Uderzo, de vieillesse.
08:09 Publié dans *2020*, Tographe, WAW | Lien permanent | Commentaires (2)
mardi, 24 mars 2020
Des cris d'orfraie sur le tombeau d'un ami
Suite au visionnage de la dernière vidéo d'Azélie Fayolle (qui m'a donné envie de relire enfin Stendhal (mais est-ce que cela adviendra ?)), je signale tout d'abord qu'à ce stade je n'ai pas retrouvé la trace de la citation attribuée à Sterne par Stendhal dans les deux textes principaux de Sterne lui-même, ni dans des sources secondaires. L'enquête a duré dix minutes, autant dire que je n'ai pas forcé.
La question reste posée : où, dans Sterne, pourrait-on trouver une formule telle que Stendhal la traduise par « Le tombeau d'un ami » ? Il y a deux passages dans Tristram Shandy qui peuvent suggérer cela, mais pas texto. Sans doute est-ce, comme le dit Azélie, une épigraphe fausse...
J'en profite, au détour de mon enquête, pour vous donner à étudier le début du chapitre XXXVII de la Seconde Partie, en français et dans deux traductions.
Horace B. Samuel (1916)
C.K. Scott-Moncrieff (1922)
Je ne commenterai ici que la traduction d'orfraie, ce mot que l'on n'emploie plus guère en français que dans l'expression pousser des cris d'orfraie (et encore...). Le terme d'orfraie n'est plus utilisé par les ornithologues depuis fort longtemps, et la principale référence en ce sens est Buffon, qui l'a utilisé pour décrire le pygargue. D'autres auteurs ont utilisé ce mot comme une sorte de mot fourre-tout plus ou moins synonyme d'aigle, et parfois pour parler du Balbuzard pêcheur (comme chez Michelet dans le tome 1 de son Histoire romaine).
Le TLFi, toujours précieux, précise qu'il s'agit bien d'un « oiseau de proie diurne » mais que le nom est très souvent employé pour désigner une chouette, par confusion avec effraie. Ainsi d'ailleurs dans l'expression pousser des cris d'orfraie.
Les deux traducteurs de Stendhal ont choisi d'identifier l'orfraie du donjon comme un balbuzard (osprey). Pourtant, voici ce qu'on lit quelques paragraphes plus haut : « Ses remords l'occupaient beaucoup et lui présentaient souvent l'image de Mme de Rênal, surtout pendant le silence des nuits troublé seulement, dans ce donjon élevé, par le chant de l'orfraie! » (II, xxxvi). Cela démontre qu'il s'agit bien d'un rapace nocturne, et donc, de toute évidence, d'une confusion avec l'effraie. Les deux traducteurs ont d'ailleurs traduit cette première occurrence par osprey, en bonne logique “interne” ou intra-textuelle.
Toutefois, si, pour un lecteur français, le terme vague autorise la compréhension par une confusion semblable à celle de l'auteur (le lecteur français lit orfraie mais peut tout à fait imaginer une chouette), les anglophones, globalement plus versés que les Français en ornithologie, n'y comprendront rien. Un certain nombre d'entre eux, en tout cas, tiqueront passablement en lisant ceci : “the silence of the night, which in this high turret was only disturbed by the song of the osprey” (Samuel, 1916).
Il faut donc, en ayant raison contre la littéralité stendhalienne, traduire orfraie par owl.
lundi, 23 mars 2020
*2303*
Aujourd'hui, levé à 6 h 38 : l'heure à laquelle sonne le réveil chaque lundi.
Il fait grand soleil, c'est déjà ça.
Allé faire des courses de frais (fruits et légumes, fromages, viande) à l'Arrivage : contraste saisissant entre la plupart des employé-es et caissiers d'une part (impression d'être dans une centrale nucléaire) et les bouchers sifflotant mains nues au-dessus de la viande. Dois-je préciser que je n'ai rien pris au rayon boucherie ?
Très peu de voitures, et les gens que j'ai vus à l'Arrivage prennent tou-tes beaucoup de précautions. Donc le problème n'est plus, à quelques abruti-es près, le confinement plus ou moins total, mais bel et bien l'impréparation structurelle : la France, contrairement à beaucoup d'autres pays, a refusé de faire des tests de dépistage à grande échelle ; la France n'a aucun stock stratégique de masques, ce qui met en grave danger l'ensemble du personnel soignant ; la France a sacrifié ses services publics, dont l'hôpital, au profit des investisseurs privés et des grands pontes du CAC40 ; avec leurs ordonnances, leurs décrets, leurs mensonges, leur arrogance, leurs LBD et leurs gaz lacrymo pour tout dialogue social, Macron et sa clique sont l'aboutissement de cette impéritie criminelle.
Echangé des mails hier avec notre ami A°, confiné à Caen, et discuté au téléphone avec C°, confiné à Vincennes. Tous les gens raisonnables espèrent que cette grave crise soit, plus qu'une prise de conscience qui a quand même commencé à avoir lieu, un déclencheur de véritables politiques entièrement centrées autour de la lutte contre le réchauffement climatique et les inégalités sociales. À voir la précipitation de ces salopards de macronistes à bousiller les acquis sociaux en profitant de la panade dont ils sont largement co-responsables, et à voir les chouineries de celles et ceux qui se plaignent de ne pas pouvoir aller faire du shopping ou de voir menacée leur connexion H24 à Netflix, j'en doute.
Hier aussi : promené autour de la maison. Des tours de jardin par dizaines, avec variations, cent pas sur la marelle, etc.
Hier soir : Délits flagrants de Depardon. Troisième fois que je le vois, mais première pour O*. La première fois, je m'en rappelle comme si c'était hier, c'était avec mon ami Frédéric G. à Paris, au cinéma. [En fait, je dis que c'était comme si c'était hier, mais je crois que je confonds aussi avec la fois où nous sommes allés au cinéma voir Amateur de Hal Hartley en emportant dans nos bagages le mathématicien et altiste Patrick L., devenu depuis compositeur.]
Plus marqué que jamais par le fait que, des trois substituts du procureur, c'est la femme, Michèle Bernard-Requin à ce que m'apprend le Web, qui est dix fois plus "pro" que les deux hommes, efficaces sans doute mais toujours un peu approximatifs, sardoniques à l'endroit du prévenu... Je vois qu'elle est l'autrice de deux livres, mais aussi qu'elle est morte tout récemment, emportée par un cancer.
10:43 Publié dans *2020*, Blême mêmoire, Tographe | Lien permanent | Commentaires (0)
dimanche, 22 mars 2020
L'essentiel & le futile
(Vers 10 h)
Curieusement, la page d'accueil de Touraine sereine s'affichait convenablement à l'instant mais il était impossible de faire apparaître les billets de façon autonome, donc en visualisant les commentaires : “Server too busy. Please try again later.” Même si cela doit affecter les plateformes de blogs, les réseaux sociaux etc. je ne retire pas un mot de ce que j'ai écrit il ya quelques jours en réponse, et même en riposte, à une internaute qui se scandalisait de l'hypothèse que Netflix puisse réduire sa bande passante : les ENT des établissements d'enseignement, les sites des services sanitaires et des institutions de l'Etat sont plus importants que le binge-watching de millions de personnes qui sont devenues totalement dépendantes du streaming ou de l'activité physique conditionnée (je veux dire : en club ou en salle de gym) et qui n'ont aucune autre ressource personnelle que le loisir généralisé.
(Sur ce point, je m'attendais à voir fleurir les références au divertissement pascalien, mais il faut croire que ce n'est pas le pont-aux-ânes que j'imaginais.)
Je trouve très curieuse aussi la multiplication des liens vers des sites de livres numériques gratuits etc. Bien entendu, je suis le premier à farfouiller x fois par jour dans le Projet Gutenberg et tant d'autres, mais si le Web coupe pendant x jours, j'ai de quoi m'occuper sur mes rayonnages. Peut-être que je vais faire une vidéo autour de mon placard de "livres à lire" d'ailleurs, d'autant que cette pile est loin d'être limitée.
Que les choses soient claires : je ne me prétends modèle de rien du tout. Juste, il faut définir les priorités et être conscient de ce qui est un luxe. Les acquis sociaux que le gouvernement a hâte de bousiller, profitant pour ce faire avec l'énergie des charognards de la crise du Covid19, ne sont pas un luxe. Mater Netflix ou tenir un blog, c'est un luxe.
Pour que ce billet échappe à son côté superficiel et nombriliste, je copie-colle un billet lu ce matin, qui date d'avant-hier et qui est d'une certaine Élise Cordier :
Ce matin, en me réveillant, je pleure. En déjeunant, je pleure. En me préparant, je pleure. En conduisant jusqu'à mon travail, je pleure. Là, dans les vestiaires de l'hôpital, je sèche mes larmes.
J'inspire. J'expire.
Les gens dans les lits pleurent aussi, et c'est à moi qu'il incombe de sécher leurs larmes. De leur faire une petite blague, de leur dire un petit mot, histoire de les faire sourire un peu. Oublier une seconde qu'ils sont là, coupés du monde, une épée de Damoclès au dessus de la tête. Tout ceux qu'ils voient sont habillés intégralement, masqués, protégés, c'est anxiogène. Ils se sentent seuls, abandonnés.
Alors j'inspire, j'expire.
Je reviens dans la chambre pour la troisième fois, et tant pis si on me dispute pour le gâchis de blouse, parce que leur code wifi ne marche pas et que c'est leur seul moyen d'être en contact avec leurs proches : les visites sont interdites, le réseau téléphonique ne passe que très mal dans la chambre. Ils pleurent, parce que tout le monde s'inquiète et que du coup, ils s'inquiètent aussi, mais veulent avant tout rassurer.
Alors j'inspire, j'expire.
Et je rassure aussi, même si juste avant le médecin m'a dit que ça puait et qu'il allait probablement finir la soirée en réa, un tuyau au fond de la gorge. Je parle du temps qu'il fait, comme un pied de nez de l'univers en période de confinement, mais je ne parle pas de tous ces gens dehors qui ne respectent pas ces nouvelles règles.
A quoi bon dire à ce patient, médecin généraliste, qu'on croise des gens dans la rue, masque FFP2 inutile et incorrectement mis sur le nez, alors qu'un tel dispositif lui aurait évité à lui de se retrouver dans un lit d'hôpital.
A quoi bon dire à ce patient que, pendant qu'il est là à attendre de savoir ce que le destin lui réserve, tout le monde dehors lui crache à la gueule.
Pendant qu'il est là à progressivement mais rapidement passer des lunettes à oxygène au masque à haute concentration à la machine de VNI jusqu'à devoir aller en réa se faire intuber, à condition qu'il y reste de la place, les gens débattent de la distance autorisée pour faire leur jogging et de si ils peuvent promener leur chien à deux.
Alors j'inspire, j'expire.
Je gère les sorties, de bonnes ou de mauvaises augures, les entrées. Le flux interminable de patients, en plus ou moins bon état. Je marche, je cours, je vole, ma charlotte me fait mal au front, mon masque me fait mal au nez et me donne la tête qui tourne, l'élastique
de mon masque, couplé à mes deux paires de lunettes, me fait mal aux oreilles, mes mains me font mal à force de les laver.
Mais je prends des tensions, je scope, je prends des températures, des saturations, je perfuse, je fais des prises de sang, des dépistages, je réfléchis, surtout.
Je réfléchis à comment regrouper mes soins pour éviter le gâchis de matériel d'habillage, je réfléchis à comment donner des nouvelles aux familles qui appellent sans trop inquiéter mais sans non plus minimiser, on ne sait jamais, je réfléchis à combien de temps je vais pouvoir tenir à ce rythme.
Je réfléchis au fait qu'on n'est pas encore arrivés au pic de l'épidémie, par ici.
Je réfléchis à ce moment inévitable où il n'y aura plus rien pour s'habiller et se protéger correctement, je réfléchis à ce moment inévitable où il n'y aura plus de place en réa et où il faudra dire à ce patient, à sa famille, qu'on ne peut plus rien faire pour lui si ce n'est espérer, et le soulager.
Alors j'inspire, j'expire.
Ma journée de travail se termine et je passe le relais à un collègue.
Je me change. Je prends ma voiture. Je rentre chez moi. Je n'allume pas la télé, qui ressasse en boucle le nombre de nouveaux décès. J'essaie de rester loin des réseaux sociaux, qui ressassent en boucle les débats futiles des gens face à leur confinement. Je lis les messages de mes proches, qui me donnent du courage, et je rassure, encore. Je lis les initiatives telles que les applaudissements collectifs à 20 h et je pense "au lieu de m'applaudir, j'espère que vous êtes plutôt resté chez vous aujourd'hui, comme il vous l'a été demandé". Au lieu de nous applaudir, j'espère que vous n'oublierez pas et que vous arrêterez de nous cracher à la gueule.
Alors j'inspire, j'expire, et j'espère.
Je ne suis pas une super-héroïne, je ne fais que mon travail, et j'ai besoin de tout le monde pour qu'il soit facilité : restez chez vous au maximum, arrêtez de chercher (et donc trouver) des excuses à la con pour sortir de chez vous 12 fois par jour, même si "oui mais je fais attention".
Profitez de votre canapé, de vos jeux vidéos, de votre foyer, faites du ménage et de la cuisine avec toutes vos pâtes, pensez à tous ces lundis où il a été si difficile de sortir de chez vous.
Inspirez, expirez, et ce sera plus facile pour tout le monde.
Inspirez, expirez, puisque vous avez la chance de pouvoir le faire.
11:38 Publié dans *2020* | Lien permanent | Commentaires (1)
samedi, 21 mars 2020
*2103*
Ce qui est ennuyeux, avec cette manie de me réveiller très tôt et de commencer par tenir ce carnet, c'est que j'y raconte la journée de la veille. Hier, passé la journée à bosser : corrections de devoirs, préparation du fichier pour les L3, mixage des vidéos 24 et 25 des 29 CONTEMPORAINES, écriture d'un quadrilatère, mise en ligne des diaporamas de L1... et courses massives, à l'heure creuse, dans le Leader Price désert.
Il est question d'un prolongement (sans surprise) du confinement, et de son durcissement. Pendant ce temps personne ne semble vraiment s'offusquer du fait que ce gouvernement, Ndiaye, Pénicaud & co, avec Macron au-dessus et les faux parlementaires LREM à côté, profite de cette très grave crise sans précédent pour faire les deux seules choses qu'il sait faire : d'une main, casser encore et toujours les droits des travailleuses et travailleurs ; et de l'autre donner l'“argent magique” aux banques et au privé. — Pourquoi avoir imposé hier la suspension des règles du travail sans limite de date ? Une telle mesure n'a d'autre effet que de montrer encore et toujours aux plus modestes et aux pauvres qu'elles/ils se feront toujours latter la gueule par ce gouvernement. Le discours de Macron du jeudi 12 mars au soir est bien loin, mais on savait que c'était une mascarade électoraliste.
Hier soir, Loulou de Pialat, que je n'avais jamais vu. Dit aux enfants que c'est un cinéma qui avait quand même été marquant parce que l'absence d'histoire linéaire, les mouvements de caméra sans stabilisation, le son “réel”, tout cela était un moment essentiel pour déconstruire les artifices du cinéma. (Je n'ai pas dit ça comme ça.) Il n'empêche que je reste peu convaincu, malgré Depardieu, et que je trouve que le film a bien mal vieilli. Quant au son réel, censé représenter la vraie vie, j'ai toujours envie de gueuler vers l'écran : mais dans la vraie vie, on peut faire répéter les gens quand on n'a pas compris ! ——Est-ce moi qui deviens sourd ? je ne comprends pas une réplique sur deux. La dernière fois que j'ai eu ce problème, c'était pour le Rodin, de Pialat aussi [EDIT du 22.03 : non, pas du tout : de Doillon, cf commentaires ci-dessous] : mais là, le problème est que le film est ennuyeux de bout en bout, malgré Lindon que j'aime bien pourtant.
J'entends siffler un merle : printemps.
C'est reposant, dans ce carnet, de ne pas traquer les virgules, échafauder des synonymies, toujours dégainer des coupes ou des dilutions.
Ici je note des éléments politiques afin de faire les comptes, le jour venu. (Mais ce jour viendra-t-il ?) Je veux aussi noter de toutes petites choses ridicules. Par exemple, j'avais la barbe depuis trois semaines : je l'ai rasée mardi après-midi, au jour 1 officiel du confinement ; l'objectif désormais, afin de montrer ma solidarité avec C* et les garçons qui ne pourront aller chez le coiffeur (quasi- chauve je me tonds moi-même la tronche depuis 4 ou 5 ans), est de me laisser pousser la barbe. Je crains de craquer avant la fin du confinement car déjà là en trois semaines je l'avais retaillée deux fois.
* Source de l'image : page Facebook “Blague Block”, 19 mars 2020.
06:22 Publié dans *2020*, Indignations, Tographe | Lien permanent | Commentaires (3)