lundi, 11 mai 2020
*1105*
Ce matin, je me suis levé pour constater le rafraîchissement, et surtout les averses à la limite de dégénérer en tempête. Il paraît que les métros étaient bondés ce matin, et Olivier Véran s'en est scandalisé : mais enfin, c'est leur faute !!! Le déconfinement sans distribution de masques ni incitation à maintenir le télé-travail, c'est la faute de ce gouvernement... à 100%.
Hier soir, interminable partie de Monopoly, à quatre — comme il y a quelques semaines, déjà à l'initiative d'O* — et qui s'est soldée par un dernier acte inédit : dix minutes où C* et moi avons disputé la finale, le temps de s'assurer que c'est bien elle qui me plumait, et non l'inverse.
Dans la journée, j'avais mis la piquette à O*, au piquet : 141/71, 120/57. Pas eu besoin de la belle en 221 points. (Pourquoi 221 points ? Le nombre 221, à part qu'il s'agit d'un multiple de deux nombres premiers consécutifs, n'a rien de particulier.)
Un peu avant midi, apéro visio (mais sans apéro en fait) avec mes parents, ma sœur, mon beau-frère et ma nièce.
Vendredi, j'ai promis à une amie de lui expliquer les motifs de mon hostilité à l'égard de Pierre Rabhi. Comme je manquais de temps, je lui avais promis un billet de blog d'ici dimanche. Comme elle m'a gentiment rappelé à ma promesse, je lui ai répondu vite fait, en MP. La vérité est que je n'ai aucune envie, en fait, de me (re)plonger dans ou tel texte de ce charlatan, dont on peut dire au mieux que son spiritualisme kitsch et creux est ridicule, au pire qu'il s'agit d'une stratégie d'extrême-droite pour placer toute la responsabilité de la lutte écologique sur les individus. Peut-être le ferai-je, tout de même.
11:40 Publié dans *2020* | Lien permanent | Commentaires (0)
dimanche, 10 mai 2020
La Pseudo-Phèdre, sommaire
Aujourd'hui, je me suis lancé dans un truc un peu dingo, qui consiste à réécrire sur Twitter, un vers sur deux de Phèdre. L'idée vient d'une énième fanfaronnade à côté de la plaque de ce paltoquet de Blanquer.
Comme d'autres se joignent et comme il se pourrait qu'on aille assez loin dans la pochade, j'ai décidé de reprendre, scène par scène, le texte dans ce blog.
Voici donc le sommaire :
- Pseudo-Phèdre, I, 1 (entièrement composée par Guillaume Cingal)
- Pseudo-Phèdre, I, 2-3 (à six mains)
- Pseudo-Phèdre, I, 4-5 (entièrement composée par @angry_prof39)
- Pseudo-Phèdre, II, 1 (à quatre mains, peut-être davantage)
17:43 Publié dans *2020*, La Pseudo-Phèdre | Lien permanent | Commentaires (0)
samedi, 09 mai 2020
Odds and ends
Aujourd'hui, je n'ai pas fait grand chose, ou plus exactement : je n'ai guère bossé.
Comme, d'une part, il faisait beau, et comme, d'autre part, O* a été occupé à faire son travail d'arts plastiques le matin, à jouer à Fifa19 en début d'après-midi (il a été limogé de son poste d'entraîneur du PSG car avec les difficultés à jouer au niveau pro il y a 2-3 semaines quand il a passé ce niveau, il n'a pu terminer "que" 5e du championnat), puis à aider A* à faire la cuisine (quiche aux tomates cerise, velouté de fenouil et enfin chili pour demain), il n'y a eu ni partie de piquet, ni billard, ni ping-pong, et donc j'ai pu beaucoup lire, dehors, donc, malgré quelques agaçantes chignoles voisines autour des 3-4 heures de l'après-midi.
J'ai fini de lire La statue de sel d'Albert Memmi, son premier roman (1953), que j'avais trouvé dans une boîte à livres je ne sais plus où, et qui s'est d'ailleurs débigoincé en cours de lecture : une fois la prochaine vidéo faite, il ira au recyclage, ce qui est dommage car c'est un très bon livre. En cherchant quelques bricoles hier au sujet de Memmi (dont j'ai lu il y a très longtemps, à Beauvais, Le scorpion) j'ai découvert qu'il était toujours vivant : il fêtera ses cent ans en décembre prochain. Roman en partie autobiographique, mais en partie seulement : on sait que les deux derniers chapitres correspondent en quelque sorte à une vie alternative d'Albert Memmi. Il s'agit d'un Bildungsroman qui suit les étapes d'un jeune Juif tunisois de l'enfance au début de l'âge adulte, après un “séjour” très rude dans un camp de prisonniers, sous le joug nazi. Memmi décrit très bien comment les Juifs d'Afrique du nord, considérés comme des citoyens de seconde zone avant et pendant la guerre, se sentent toujours aussi délaissés, tant par les FFL que par le nouveau gouvernement. Là où le roman se distingue notamment de la vie de Memmi, c'est qu'il s'agit d'un Künstlerroman déceptif : comment Alexandre Mordekhaï Benillouche n'est pas devenu écrivain. Le roman commence d'ailleurs d'une manière qui m'a rappelé le film de Perec Un homme qui dort, vu récemment.
J'ai ensuite enchaîné sur un Pirandello acheté il y a un bon moment au Bibliovore (la fermeture des librairies ne m'a pas frustré car j'ai des dizaines de livres en souffrance, parfois depuis un bon bout de temps), Feu Mathias Pascal. Pirandello, ce sont surtout des souvenirs de théâtre lu, il y a longtemps : souvenir très vif d'avoir adoré Vêtir ceux qui sont nus ; je me revois encore rencogné dans un des deux vieux fauteuils de notre studio à Coppélia. Ce roman, le chef-d'œuvre de Pirandello selon la quatrième de couverture, commence très bien, les 150 premières pages, on va dire, mais je suis moins convaincu par les pages du milieu, l'intrigue dans la pension de famille romaine.
[On a side note, lire ce roman a été l'occasion de découvrir une scène des Évangiles qui m'avait échappé, la guérison de l'Hémorroïque.]
♣♣♣♣♣♣♣
Soir : Chat noir, chat blanc de Kusturica. Nous avions vu ce film, C* et moi, lors de sa sortie, en 1998, à Beauvais, avec une amie de l'époque, Béatrice, perdue de vue avant même que nous ne quittions la Picardie : elle s'était enfoncée dans la dépression, certainement, et avait glissé sans contrecoup possible dans les abonnées absentes. Il y a quelques mois, nous avons revu aussi avec les garçons Le Temps des gitans. La vie est un miracle, que je n'ai jamais vu, nous attend aussi. Chat noir, chat blanc est conforme à mon souvenir : brillant, drôle, emporté, véhément, avec bien entendu ces scènes anthologiques rythmées par des orchestres dans les postures les plus inimaginables. La grande scène du début chez Grga et la scène du convoi ferroviaire (avec le chef de gare pendu à une barrière levée) sont des hommages appuyés mais très réussis à Sergio Leone. Je n'avais pas de réel souvenir des entourloupes mafieuses qui rythment le film, ni du fait que les deux chats du titre sont aussi ceux qui, en folâtrant, ressuscitent les deux vieux. La résurrection et la joie macabre sont deux motifs essentiels du cinéma de Kusturica. La destruction progressive de la maison a un petit côté métafictionnel : regardez, on détruit le décor au fur et à mesure qu'on tourne le film. — Il faudrait revoir Underground aussi ; j'avais beaucoup aimé ce film et n'avais pas trop compris, à l'époque, pourquoi le film était accusé de défendre évidemment le nettoyage ethnique de Milosevic et sa bande...
Sinon, j'ai visualisé le rayon de 100 kilomètres autour de notre domicile, afin de voir quelles petites virées (avec pique-nique et masques) nous pouvions envisager : outre le Bioparc de Doué (mais quand les oryctéropes seront visibles, dixit le spécialiste), les châteaux vont commencer à rouvrir leurs portes, sans parler des villages des bords de Loire. Pour les grandes villes, nous avons été amusés de voir qu'Angers et Poitiers — très belles et captivantes — étaient tout juste dans le cercle, de même que Le Mans, alors qu'Orléans — cette cité grisâtre et médiocre — était hors de portée, à quelques kilomètres près.
23:30 Publié dans *2020*, Blême mêmoire, Lect(o)ures, Tographe | Lien permanent | Commentaires (2)
vendredi, 08 mai 2020
Mensonges, suite
Il y a un mois, le gouvernement disait que les écoles ne rouvriraient qu'en cas de ralentissement très marqué du Covid19, et que des tests et des masques seraient disponibles pour tout le personnel de l'Education nationale.
7 mai : finalement, pas assez de tests même pour les soignants et les personnes présentant des symptômes. C'est ce que Véran a appelé des "tests massifs". Tous les autres pays doivent se foutre de notre gueule XXL.
Blanquer : pas de tests pour les profs, car il ne faut "pas gâcher".
Quand j'écrivais hier que le mensonge est leur unique politique...
14:57 Publié dans *2020* | Lien permanent | Commentaires (1)
jeudi, 07 mai 2020
Reprise ?!?
Matinée : préparation de cours et correction de devoirs.
Après-midi : 4 h 20 de conseil d'UFR en visioconférence.
Demain je ferai un cours d'agrégation en streaming YouTube, un 8 mai, oui, car pas d'autre créneau possible avec les nombreuses collègues en poste dans le secondaire, et qui sont accaparées toute la semaine par la "continuité pédagogique".
J'ai vu passer des trucs sur la "reprise" ou la "rentrée" des profs le 11 mai. Que des comptes macronistes. Normal : le gouvernement et ses soutiens détestent les profs et veulent faire haïr les profs. Au prix des pires mensonges, car le mensonge est leur unique politique.
21:51 Publié dans *2020* | Lien permanent | Commentaires (0)
mercredi, 06 mai 2020
Où il est notamment question de Hilde Domin
En ce moment, A* se lève à 6 h 30 car il a des examens de maths tous les matins à 7 h 30 ; j'ai remis le réveil chaque jour à 7 h, au cas où... et, curieusement, je recommence surtout à être réveillé dès 6 h... Première chose ou presque, après les mails pro (pas grand chose ce matin) et un coup d'œil à Facebook et Twitter : ma traduction quotidienne.
Ce matin, j'ai traduit un poème de Hilde Domin, poète du 20e siècle très connue en Allemagne, et plus ou moins inconnue en France, je pense. Il faudra que je pense à chercher des éditions de ses poèmes, ainsi que sa correspondance — retrouvée après sa mort, en 2006 —avec son époux. Hilde Löwenstein, née en 1909, a connu à peu près toutes les vicissitudes d'une émigrée juive tentant d'échapper à l'Allemagne nazie : d'abord émigrée en Italie (mauvaise pioche), elle réussit à s'enfuir avec son époux in extremis, en 1939, avant de rejoindre l'Angleterre. Elle n'est revenue vivre en Allemagne qu'en 1961 après un long séjour en République dominicaine : c'est à ce pays qu'elle emprunte en quelque sorte son pseudonyme.
Peut-être que, pour un prochain défi de traduction d'un poème par jour pendant un mois, je pourrais choisir Hilde Domin, et elle seulement. Dans le poème d'aujourd'hui, il y a un jeu sémantique sur la polysémie du mot Kätzchen, qui, heureusement, est identique en français : les chatons du saule se voient affectés d'un “pelage dégoulinant”. En anglais, ce jeu de mots n'eût pas été possible (kitten vs catkin).
Fini de lire Louis Lambert, qui est en effet, à bien des égards, et comme le disent deux personnages de The Ambassadors, un livre raté. Mais comme toujours chez Balzac, c'est un livre raté essentiel.
Aujourd'hui je dois continuer mes corrections de L1 et L3 (les étudiants déposent leurs devoirs au compte-gouttes, et moi je ne peux attendre le terme pour m'y mettre), et préparer mon cours d'agrégation sur Cook pour vendredi. Au début, le cours devait avoir lieu hier matin, mais diverses complications ont fait que j'ai dû le décaler. Les collègues/étudiant·es préfèrent la date du vendredi matin, seul moment calme de la semaine. Cela a beau être un jour férié, tant pis, je cède. La situation est déjà si compliquée, et pour tout arranger le jury qui devait annoncer les résultats d'admissibilité aujourd'hui a apparemment renvoyé la publication sine die. De toute façon, il est à espérer qu'on sorte enfin rapidement de cette situation, car entre les collègues qui continuent de travailler et d'avoir un fonctionnement quasi normal, comme s'il ne se passait rien de particulier, et les gens qui font n'importe quoi, il ne reste pas grand chose d'un peu mesuré...
D'ailleurs, les scènes diffusées hier à la télévision l'ont montré, Macron et Blanquer sont irresponsables et grotesques ; je ne sais lequel des deux adjectifs les décrit le mieux. Comme la situation est tragique et comme leur irresponsabilité risque d'augmenter le nombre de morts, on peut dire que le ridicule tue, et l'incompétence aussi.
07:26 Publié dans *2020*, Indignations, Translatology Snippets | Lien permanent | Commentaires (0)
mardi, 05 mai 2020
Ça travaille (au ciboulot)
Ce matin, le cours d'agrégation sur Gordimer s'est bien passé : c'était une étudiante/collègue qui se chargeait du commentaire de texte. Afin de permettre davantage d'interaction qu'avec Youtube, j'avais créé un “salon” avec Jitsi. J'ai donc pu voir — ce qui change tout — les collègues, dont le seul garçon, qui a eu l'air de s'emmerder tout du long des 2 h 30...
D'ailleurs, j'ai tenté de faire un live streaming de la visioconférence sur YouTube, mais il a dû y avoir un bug car seules les 90 premières minutes ont été enregistrées / archivées. Heureusement que j'avais fait un document avec mes suggestions de plan et d'analyses pour les absentes.
Pour préparer ce texte, je me suis replongé dans De Chirico, et surtout dans The Enigma of Arrival : une envie folle de relire ce livre. Si je me mets à vouloir relire, je ne suis pas sorti de l'auberge... Pendant ce confinement, toutefois, le “placard des livres en souffrance” se vide un peu, mais pas le “confiturier”.
Soirée : The Big Lebowski, vu au cinéma à sa sortie. Même impression qu'il y a 20 ans et quelque : film distrayant, bien joué, mais trop long, pas très bien ficelé, répétitif, trop “second degré”. En fait, ni C* ni moi ne nous rappelions l'intrigue, plutôt l'ambiance seulement. Mention spéciale pour le numéro hallucinant de John Turturro au bowling.
22:27 Publié dans *2020*, Lect(o)ures, Tographe, WAW | Lien permanent | Commentaires (0)
lundi, 04 mai 2020
Un beau bouic par Beuys
Levé tôt, avant même le réveil, à 6 h 30. Raté le café, c'est assez rare pour être souligné : il m'arrive d'avoir la main lourde, mais cette fois-ci j'ai fait, exceptionnellement, un café trop léger. C'est vraiment infect.
La journée est studieuse pour tous ici, dans la maisonnée : A* a deux examens à distance, dont un de maths tous les matins de la semaine à 7 h 30 ; O* en face de moi écoute des documents en espagnol pour une compréhension orale ; C* dans la chambre fait un cours en visioconférence ; de mon côté, j'ai déjà fini un de mes 5 paquets de copies, traité les mails professionnels, commencé à préparer le cours de demain matin (commentaire de texte sur un extrait de Gordimer). Suis en pleine lecture et correction aussi du chapitre que m'a envoyé mercredi dernier mon étudiant de M2.
J'ai aussi traduit vite fait mon poème quotidien pour les Germaniques de mai. Celui d'aujourd'hui est d'Eva Zeller, poète toujours vivante (97 ans !), à ne pas confondre avec Eva Christina Zeller dont on trouve, sur son site Web, gratuitement, toute une anthologie de poèmes traduits par un universitaire néo-zélandais. — J'ai un peu tergiversé dans mon choix de la poète à traduire et ai commencé à lire, avant de renoncer (la langue est trop complexe), une poète du dix-huitième siècle, Sidonia Hedwig Zäunemann.
Hier, je me suis “débarrassé” de la vidéo très longue dont j'avais commencé l'enregistrement le 6 avril. Une bonne chose de faite, en attendant mon improbable liste des 100 (73 ? 41 ?) livres majeurs du 21e siècle. — Hier soir, aussi, le nanard du dimanche soir : Les Bons Vivants, film à sketches de 1965 qui n'est (vaguement) sauvé que par le troisième “acte” et un de Funès en pleine bourre. Petit détail, l'excellent dictionnaire de l'argot Bob suggère plusieurs citations pour le mot bouic, synonyme de bordel que je n'avais jamais rencontré.
10:32 Publié dans *2020*, BoozArtz, Flèche inversée vers les carnétoiles, Tographe, Words Words Words | Lien permanent | Commentaires (0)
dimanche, 03 mai 2020
Ping-pong ?
Ce matin, à jeun, dès mon lever, à 7 h 30, je suis allé à la boulangerie pour y refaire le stock hebdomadaire : huit baguettes bio, deux pains. Sans compter les viennoiseries du petit déjeuner. Toujours pris par ma lombalgie, j'ai eu un peu de mal sur le chemin du retour, puis dans l'heure qui a suivi.
Hier, j'ai assuré mon troisième cours d'agrégation sur Gordimer en vidéo, ce qui a été l'occasion du douzième portrait de ma nouvelle série des Caractères : à l'imitation de Paul/Laurent, je vais écrire un bref portrait de chacun·e de mes contacts Facebook. Ce matin, j'en ai écrit deux de plus, le 13 et le 14. À terme, je les publierai ici, en les retouchant sans doute.
La nouvelle série de traductions quotidiennes est consacrée à des poètes de langue allemande ; aujourd'hui, c'est en traduisant le bref texte d'Ilse Blumenthal-Weiss que j'ai vraiment compris qu'il évoquait l'extermination des Juifs.
Aujourd'hui, il faut j'enregistre les derniers rushes de la vidéo commencée il y a bientôt 4 semaines et laissée en plan. (Personne ne me la réclame, il faut bien dire.)
09:55 Publié dans *2020* | Lien permanent | Commentaires (0)
samedi, 02 mai 2020
*0205*
Impression que les tourterelles ont abandonné le nid : déjà, hier, on les y a moins vues. Peut-être est-ce à cause des fortes pluies, ou de leur nid foutraque et bâclé... C'est triste.
Hier O* et moi avons appris à jouer au piquet : la goutte d'eau, ça a été ma lecture de Son Excellence Eugène Rougon. Au vingt ou trentième roman qu'on lit et dans lequel des personnages jouent à ce jeu, la curiosité l'emporte. Et, de fait, pour un jeu de cartes à deux, c'est probablement ce qui se fait de mieux. — Il semblerait, à en croire le TLFi, que le substantif féminin piquette, au sens de déroute ou raclée, ne provienne pas du jeu de piquet, ce qui eût pourtant été piquant.
Hier encore : Macron ridicule ou scandaleux, on ne sait plus avec lui ; c'est comme avec Trump.
Hier toujours : Stavisky de Resnais. Bon film, qui a dû être “exploité” abondamment, en son temps (l'âge d'or de Ricardou et des structuralistes), par des profs voulant montrer le fonctionnement d'un récit mêlant prolepses et analepses. C'est très bien joué, et le contrepoint Trotski très judicieux. Pourrait-on faire une version contemporaine, voire un cycle de films, sur des modèles narratifs similaires, mais avec Boulin, Bérégovoy, Strauss-Kahn, Benalla...
Ce matin : troisième cours d'agrégation sur Gordimer via le streaming de YouTube. Cette fois-ci, je ferai cours dans la chambre. Comme je vais beaucoup parler du concept bakhtinien d'unfinalizability, il faut que je pense à insister auprès des candidates afin qu'elles s'entraînent à prononcer cet octosyllabe.
07:48 Publié dans *2020*, Tographe | Lien permanent | Commentaires (2)
vendredi, 01 mai 2020
Pour ne pas en finir avec les nombres premiers
Hier soir, nous avons regardé un film canadien, Pauvre Georges ! de Claire Devers — pas mal, plutôt allusif malgré quelques lourdeurs de mise en scène — pas du genre à casser des briques. Je me disais ce matin, en y repensant, que c'est exactement le genre d'histoire qui peut donner tout et son contraire, d'un point de vue littéraire : par exemple, la même histoire, peu ou prou, racontée par Nuruddin Farah, d'un côté, et par cette baderne nullissime d'Eric-Emmanuel Schmitt de l'autre.
Consulté, pour l'avoir vue sur Facebook, la liste des 100 livres les plus importants du 21e siècle compulsée par le Guardian. Il s'agit d'un article de 2019 qui a resurgi, je ne sais pourquoi. Comme d'habitude avec ce genre de liste, je fais le décompte des livres traduits, donc histoire de voir ce qui, pour le monde anglophone, représente le monde : 84 livres sur 100 ont été écrits en anglais par des anglophones, pour l'immense majorité d'entre eux/elles britanniques ou nord-américain·es.
Toutefois, j'ai aussi essayé de repérer combien de livres j'avais lu. 14, comme suit, avec mes conseils au collègue avec qui j'ai échangé à ce sujet sur Facebook :
99/ Verre cassé de Mabanckou (aucun intérêt – AM n'a écrit qu'un seul bon livre, Lumières de Pointe-Noire)
95/ les Chroniques de Bob Dylan, intérêt trèèès relatif
75/ Tokarczuk, j'en ai lu plein mais pas celui-là je crois (pb du titre en anglais ?) – je conseille très hautement Les Pérégrins
69/ idem Javier Marias, pas sûr au vu du titre — bien aimé la trilogie Ton visage demain, qui même oxbridgisme et espionnage pendant la Guerre froide
47/ Persepolis, ok
46/ Human Chain, je ne connaissais pas l'existence de ce recueil de Heaney / à suivre
41/ Atonement, un McEwan très dispensable (moins mauvais qu'Amsterdam quand même) — à mon avis, il faut lire deux livres de McEwan: The Cement Garden et Black Dogs, point barre
33/ Fun Home, ok
29/ La mort du père et la suite de l'hexalogie de Knausgaard (j'en suis au tome 3), pas mal mais ça faiblit - le premier est vraiment très dérangeant et fort du coup
21/ Sapiens, m'a pas mal énervé, j'en ai parlé dans une vidéo
17/ The Road, ok
16/ Franzen, c'est comme Foster Wallace, pu finir aucun de ses livres, zzzzzzzzzzzzzzzz
12/ The Plot Against America, pas le meilleur Roth mais bien (je pensais qu'il était plus ancien que ça en revanche)
10/ Adichie, oui, il faut la lire [et plutôt Half of a Yellow Sun qu'Americanah, pour commencer, en effet]
Il faudrait que je compile ma propre liste des livres publiés entre 2001 et 2020 dont je considère que les gens que je connais gagneraient à les lire, ou à les avoir lus. Il n'y en aura pas cent : un nombre premier, peut-être...?
10:01 Publié dans *2020*, Chèvre, aucun risque, Lect(o)ures, Tographe | Lien permanent | Commentaires (4)
jeudi, 30 avril 2020
Bureaux, billards, palindromes
Depuis hier matin, il tombe, par moments, des trombes d'eau. Je plains, malgré l'épais feuillage du néflier qui les protège, les tourterelles, et les autres oiseaux (une nichée de mésanges charbonnières, peut-être, du côté du prunus qui fait face à la haie, dans le lierre touffu ?).
Le 30 avril, j'aurai donc réussi à écrire un billet chaque jour depuis le début de l'année. Des repères. Il y a trois jours, toutefois, j'ai manqué l'occasion de signaler le 4664e billet, pas seulement pour l'amour des palindromes mais parce que ce nombre était le numéro de dossier de mon fils aîné chez l'orthodontiste.
Hier soir, épisodes 7 et 8 de la saison 5 du Bureau des légendes. La série traîne en longueur, tire sur tous les fils déjà abondamment pris et repris lors des saisons précédentes, sans réel renouvellement. Il aurait fallu un peu de courage, une déstabilisation narrative, comme, par exemple, reprendre tout depuis le point de vue d'un seul personnage secondaire (l'informaticien ou le spécialiste de la zone Moyen-Orient, par exemple). Changer de mode narratif, ou de système formel, que sais-je. Là, on s'emmerde gentiment ; ça ronronne.
Depuis deux jours, un jeu littéraire fleurit sur Twitter, avec le hashtag #UnLivreUnePlace.
Le temps se rafraîchit, ce qui est presque habituel pour le tournant d'avril-mai. — Plus personne ne comprend rien aux annonces du gouvernement ou du Ministère de l'Education nationale, mais on a l'impression que plus personne ne cherche à comprendre, qu'on s'habitue à couler à moitié dans un navire au gouvernail arraché, au capitaine absent.
Essayé de comprendre les règles détaillées du jeu de la 8 au billard américain ; je me demande si passer l'agrégation de philosophie n'est pas plus compliqué.
07:50 Publié dans *2020*, Flèche inversée vers les carnétoiles, Lect(o)ures, Zestes photographiques | Lien permanent | Commentaires (0)
mercredi, 29 avril 2020
Doublons d'argent
Nous nous sommes — par ma faute (c'était à moi de choisir lundi soir) — enfilé un tunnel de trois nanards en trois soirs : Le Roi Lion (version 2019), Signé Furax et L'homme-orchestre.
Bientôt fini The Ambassadors, mais je bute un peu.
Par contre, je me suis remis, timidement, à traduire des poèmes de Johanna Wolff et ne désespère pas de reprendre le Projet Scarlatti : j'ai calculé qu'en écrivant un quadrilatère tous les jours en mai-juin j'aurai fini pour le 30 juin. Reste à savoir ce que je ferai du livre : assembler les quadrilatères dans l'ordre d'écriture ? dans un autre ordre mais en gardant les n° d'opus ? avec les “doublons” ? sans les “doublons” pour conserver la structure de 139 fois 2.020 signes ?
07:40 Publié dans *2020* | Lien permanent | Commentaires (0)
mardi, 28 avril 2020
Trio de tourterelles
Depuis vendredi, nous pouvons observer un nid de Tourterelles turques, le couple s'étant installé dans le néflier juste au niveau de la fenêtre du bureau. Ce matin, en ouvrant les volets (électriques, ce qui permet de ne pas ouvrir la fenêtre, mais est peut-être bruyant (ce sont des oiseaux citadins, les bruits humains les dérangent moins)), surpris de voir, posés sur la branche tout près de la couveuse, non pas l'autre partenaire mais deux adultes...
Aucune idée de ce que cela signifie.
07:41 Publié dans *2020*, Moments de Tours | Lien permanent | Commentaires (2)
lundi, 27 avril 2020
Grosses mesles
Hier soir, la voisine d'en face (bien vêtue, et non dans sa sempiternelle robe de chambre usée d'octogénaire économe) est venue me demander quel était l'arbre près du bureau. Je lui ai dit (redit, car on en avait déjà parlé) qu'il s'agissait de deux néfliers. Comme moi, elle aime beaucoup le contraste des feuilles d'un vert intense et des fleurs blanches au printemps, mais aussi le contraste entre le vert jaunissant des feuilles et les fruits d'or brun à l'automne. Elle m'a redemandé cela car une passante s'était arrêtée dans l'après-midi pour prendre des photos, et comme elle (notre voisine) est tout le temps en train de guetter, de fouiner et d'alpaguer les uns et les autres, la promeneuse lui a expliqué qu'elle s'était demandée ce qu'était cet arbre et que l'application mobile lui avait dit que c'était un... pommier... Notre voisine lui a dit que c'était l'arbre qui faisait des mesles, car c'était le mot qu'elle entendait jeune du côté de Bourgueil (et c'est le mot de Rabelais), mais elle se doutait que le nom commun officiel n'était pas celui-là. De mespila en latin à mesle ou nèfle, et medlar en anglais (Mispel en allemand ou nìspero en castillan), il y a 4 ou 5 ans j'avais commencé à écrire un texte sur les nèfles, mais il s'est perdu dans les profondeurs de Twitter ; j'ignore comment récupérer l'ensemble des archives d'un compte sur Twitter.
07:42 Publié dans *2020* | Lien permanent | Commentaires (0)
dimanche, 26 avril 2020
Le monde d'après, encore plus pourri et fliqué ?
De retour de la boulangerie. Sur le chemin, j'ai vu le cadavre de la fouine, déjà très décomposé.
Dix ou douzième fois que je sors en six semaines, toujours avec mon attestation manuscrite sur du papier brouillon, et jamais contrôlé.
Hier après-midi, après, mon cinquième cours d'agrégation de la semaine, j'ai enfin pu souffler un peu : The Ambassadors sur la terrasse, parties de billard (on essaie le jeu de la 8 mais il faut que je potasse les règles détaillées).
Un poème génial de Browning : The Last Ride Together.
Hier soir : Les chimpanzés des Monts de la Lune (le film, mais C* et A* connaissaient le livre).
Ce matin, alerté (en pure perte, ce sont des fantoches godillots) les 5 député·es d'Indre-et-Loire pour leur demander de rejeter la loi sécuritaire obligeant l'utilisation de l'application StopCovid.
08:01 Publié dans *2020* | Lien permanent | Commentaires (1)
samedi, 25 avril 2020
Printemps
Première fois depuis fort longtemps que j'ai été réveillé par le réveil : depuis le confinement, je le mets à 8 h, mais je suis toujours réveillé (longtemps) avant. Ce matin, j'assure encore un cours d'agrégation, le cinquième en six jours.
En préparant le café à la cuisine, je me suis fait la réflexion que les deux minuscules et graciles érables avaient enfin sorti toutes leurs feuilles. Ce n'est pas demain la veille qu'ils nous cacheront un peu la rue et la maison d'en face, ces arbres qui, comme tant d'autres (comme les gigantesques merisiers de l'autre côté), ont poussé tout seul.
En ce moment, comme chaque année, les plants de muguets sont en fleur et embaument à dix mètres à la ronde ; là aussi, ils se replantent seuls chaque année. Je ne conçois pas le jardin autrement. Et même en faisant des bouquets, le parterre éclate sous ce camaïeu de vert et de blanc.
Il doit refaire un temps tristounet à partir de lundi ; profitons du week-end.
Hier soir : version filmée du Marchand de Venise dans l'adaptation de Jacques Vincey et Vanasay Khamphommala. Je l'avais vue au théâtre il y a deux jours, mais C* l'a téléchargée sur YouTube et mise sur clé USB. C'était vraiment pas mal du tout. J'avais beau avoir étudié la pièce il y a fort longtemps, je ne me rappelais pas, dans l'acte IV, la tirade de Shylock dans laquelle il explique l'arbitraire humain en prenant comme exemple les hommes qui ont envie de pisser en entendant jouer de la cornemuse.
What if my house be troubled with a rat
And I be pleased to give ten thousand ducats
To have it baned? What, are you answer'd yet?
Some men there are love not a gaping pig;
Some, that are mad if they behold a cat;
And others, when the bagpipe sings i' the nose,
Cannot contain their urine: for affection,
Mistress of passion, sways it to the mood
Of what it likes or loathes. Now, for your answer:
As there is no firm reason to be render'd,
Why he cannot abide a gaping pig;
Why he, a harmless necessary cat;
Why he, a woollen bagpipe; but of force
Must yield to such inevitable shame
As to offend, himself being offended;
So can I give no reason, nor I will not,
More than a lodged hate and a certain loathing
I bear Antonio, that I follow thus
A losing suit against him. Are you answer'd?
07:43 Publié dans *2020* | Lien permanent | Commentaires (0)
vendredi, 24 avril 2020
I'M A Man / Of Constant Sorrow
Pour la première fois depuis quinze jours, j'ai fait une to-do list, car je n'ai pas le couteau sous la gorge. Si je voulais, je pourrais ne rien faire ; aucune tâche urgentissime. Cela étant posé, je viens quand même de me faire une to-do list, histoire de relancer deux ou trois petites choses en souffrance, et aussi de ne pas laisser déraper les x tâches qui continueront de pleuvoir d'ici début juin au bas mot.
Il y a notamment la question des traductions de Johanna Wolff : j'aurais voulu en faire une par jour en avril, mais il n'y en aura qu'une dizaine, au mieux. Je n'aurai guère de regrets car en la traduisant j'ai mieux décelé combien cette œuvre ne me retournait pas.
Hier soir, nous avons regardé O'Brother, que C* et moi avions vu au cinéma lors de sa sortie et qui reste à la fois très jouissif, surtout pour les variations sur les registres et les niveaux de la langue, mais aussi pour la manière dont le film revisite la musique populaire des années 30 et les deux sillons pas si parallèles que cela du blues et du folk. Le choix de faire chanter un chant d'esclaves par trois fossoyeurs noirs au moment où les 4 hommes s'apprêtent à être pendus haut et court par le diable est audacieux, et a dû être critiqué : est-ce une identification du diable aux suprémacistes blancs, ou cela signifie-til que les trois Noirs sont au service du diable ?
Ce qui continue de me paraître complètement surdéterminé, c'est la prétendue “adaptation” de l'Odyssée : les sirènes, le Cyclope, le prétendant (unique), la vallée devenue une immense lac... soit... mais tout cela relève plus de la ficelle, du point de départ permettant de structurer le film, que d'une véritable réécriture ou adaptation.
Soudain je me demande : est-ce que la fixette du personnage d'Everett (George Clooney) sur ses cheveux et sur la gomina est une extrapolation d'un truc dans l'Odyssée ?
10:23 Publié dans *2020*, Tographe | Lien permanent | Commentaires (2)
jeudi, 23 avril 2020
Gestion désastreuse, 3
De lundi à mercredi, j'ai assuré trois cours en visioconférence sur le sujet d'agrégation externe Les voyages du capitaine Cook (1768-1779). Neuf heures de cours en ligne qui ont représenté, en amont, des dizaines et des dizaines d'heures de travail.
Cet après-midi, c'est au tour du cours d'agrégation externe sur Jump & Other Stories de Nadine Gordimer : heureusement, ce cours, je l'avais déjà préparé l'an dernier, mais j'ai dû reprendre mes fiches, réorganiser l'ensemble car j'ai mis le fichier audio de trois cours de 2019 à disposition des étudiant·es de cette année, et aussi changé totalement les sujets de commentaire et de leçon. Visio cet après-midi, et rebelote samedi matin.
Et tout ça dans un contexte où les oraux du concours sont maintenus, contre l'avis des experts médicaux et dans le flou le plus total. Dans un contexte aussi où les outils numériques institutionnels de l'Université, en total plantage, sont inutiles : j'assure donc tout cela sur YouTube, soit le grand n'importe quoi...
Impression grandissante que le monde universitaire va sortir durablement marqué, physiquement et psychologiquement, de tout cet épisode, et de la gestion désastreuse de la crise par les responsables, aux niveaux national et local.
10:53 Publié dans *2020* | Lien permanent | Commentaires (0)
mercredi, 22 avril 2020
Gestion désastreuse, 2
Plus personne ne comprend rien aux annonces du ministre Blanquer.
D'abord, il annonce (après dix jours de concertation) une série de mesures relatives au déconfinement et à l'ouverture progressive des écoles. Quelques heures plus tard, devant l'Assemblée, ce ne sont plus que des hypothèses. Le lendemain, la moitié de ces hypothèses sont plus ou moins annoncées comme non valides, après que des milliers de personnes en ont démontré l'impossibilité sur les réseaux sociaux.
10:42 Publié dans *2020* | Lien permanent | Commentaires (0)
mardi, 21 avril 2020
Gestion désastreuse, 1
Je ne comprends plus rien aux instructions et aux mails de la Présidence de l'Université.
J'échange avec mes collègues, y compris directeurs de département etc., et il s'avère que personne ne comprend rien.
Tout le monde est submergé de boulot, découragé ; tout le monde a l'impression qu'on va droit dans le mur et que l'équipe dirigeante ne sait faire qu'une seule chose : appuyer sur l'accélérateur.
17:50 Publié dans *2020* | Lien permanent | Commentaires (0)
lundi, 20 avril 2020
*2004*
Aujourd'hui commence une énorme semaine ; c'est étrange de formuler ça ainsi, car c'était théoriquement la seconde semaine de “pause pédagogique” et surtout car depuis cinq semaines les jours semblent se suivre et se ressembler.
Pourtant, c'est la vérité : aujourd'hui commence une énorme semaine, avec pas moins de quatre cours d'agrégation, de trois heures chacun, à assurer d'ici lundi, en visioconférence.
Aujourd'hui commence une énorme semaine, et je suis levé à pas d'heure.
Quinze jours aujourd'hui que je n'ai pas touché au Projet Scarlatti ; j'avais plusieurs mois d'avance sur le calendrier initial, mais ce n'est pas une raison pour laisser se briser le ressort. Idem pour le projet de traduire un poème de Johanna Wolff par jour : j'ai eu la tête dans l'organisation des examens du 9 au 13, et dans ces fichus cours d'agrégation depuis le 14, au point de ne pas avoir envie de passer davantage de temps sur l'ordinateur.
Hier soir, conférence presse interminable, lourdaude et ennuyeuse d'Édouard Philippe et Olivier Véran. À les écouter, la France a géré cette crise mieux que n'importe quel autre pays, mais en même temps il n'y aura pas encore assez de gants, de surblouses et même de masques pour les hôpitaux avant longtemps. Pour les hôpitaux...! alors, les gens ordinaires, pour ne rien dire des profs ou de leurs élèves, brossez-vous.
On a bien compris que l'impératif était de redémarrer une activité économique normale dans les plus brefs délais, coûte que coûte. Le gouvernement est d'ailleurs en train de donner un pognon de dingue à de grosses entreprises déjà à peu près exemptées de tout, en les exemptant de surcroît de se conformer aux accords de Paris sur le climat. Autant dire qu'entre la deuxième vague du Covid19 et les dérèglements climatiques qui nous attendent, plus rien ne fonctionnera de manière normale.
Ce gouvernement mériterait un Thomas Bernhard. Pour lui tailler des croupières, un costard, choisissez la métaphore que vous préférez.
Pour lui cracher dessus avec verve et génie.
Pour transformer un peu de leur merde en or.
05:39 Publié dans *2020* | Lien permanent | Commentaires (0)
dimanche, 19 avril 2020
Trimard, glandouille et sonnet livresque
Journée étrange. Dû continuer d'arrache-pied mon cours d'agrégation sur les voyages du capitaine Cook, de plus en plus prenant et/mais de plus en plus passionnant.
J'avais mal commencé, en perdant intelligemment près de deux heures à écrire un fil (thread) sur Twitter, afin d'expliquer quelques rudiments de prosodie anglaise.
Et je finis mal, vu que je viens de perdre une bonne demi-heure à composer un sonnet livresque. (L'idée vient, là aussi, de Twitter, où plusieurs internautes se relaient et s'épaulent pour en composer des collaboratifs.)
En voici ci-dessus la version complète dite “empilée et verticale”. Mais j'en donne ci-après une transcription (et ce d'autant mieux qu'en faisant la pile je me suis trompé dans le dernier tercet, inversant le vers 12 et le vers 14 et oubliant le premier hémistiche du vers 13). Le sonnet est composé de 33 titres de livres, agencés en 14 vers dont cinq sont triples (à trois titres).
le diable rebat les cartes la mort d'un père
des os dans le désert une méditation
ouvrez pour en finir avec les chiffres ronds
la maison de la faim vies perpendiculaires
le quai de Ouistreham quién es ? crâne chaud
trois ombres sur Paris : leçons particulières
tohu mort d'un cheval dans les bras de sa mère
la mort d'Ahasverus derrière mon bureau
dérangé que je suis deuil la quête de joie
hors les murs bois dormant portraits d'un éphémère
tomates nature morte avec bride et mors
l'instinct de ciel la voix sombre l'aide à l'emploi
la découverte australe allada Marie-Claire
journal des jours tremblants danse autour de la mort
J'ai une affection particulière pour les trimètres 3/3/6 et 4/4/4 des vers 10 et 12 et pour le choix d'une unique rime féminine pour les quatrains et les tercets. L'écrasante majorité des titres de livres, en français, ne se terminent pas par un e muet, de sorte qu'une des gageures d'un sonnet livresque consiste à trouver assez de titres pour les rimes féminines.
samedi, 18 avril 2020
Le Labyrinthe du silence
Regardé ce soir un film allemand très académique et explicite Le Labyrinthe du silence [Im Labyrinth des Schweigens], tourné en 2014 par Giulio Ricciarelli. Tout, ou presque, dans ce film est attendu, sans surprise : les relations entre les personnages, les moments de crise entre les personnages ainsi que leur résolution, les obstacles au travail du procureur et la manière dont ils sont levés etc.
Un des moments les plus lourdingues est la scène où le protagoniste, le jeune procureur Radmann, apporte son veston déchiré à son ex, devenue couturière, afin qu'elle le répare. S'ensuit un dialogue lourdinguissime dans lequel l'état du veston désigne, selon une métonymie filée (c'est le cas de le dire), l'état des sentiments des anciens amoureux. Scène qui reprend quinze minutes plus tard, quand la couturière rapporte finalement le veston recousu à Radmann, alors qu'elle lui avait d'abord dit que l'accroc était irréparable. Autant dire que même la licorne dans la Ménagerie de verre, à côté, c'est du David Lynch.
Il y a aussi les scènes de rêve : afin que le spectateur identifie bien qu'il s'agit d'un rêve, Ricciarelli ne se contente pas de filmer Radmann en train de s'éveiller en sueur de son cauchemar (plan déjà d'une folle originalité) : il le filme aussi en train de dormir, et ce juste avant la scène du rêve. Le moins que l'on puisse dire est qu'il s'agit d'un cinéma explicite. (Il s'agit aussi d'un film qui ne répond convenablement à aucun des points du test de Bechdel, mais n'entrons pas là-dedans.)
Et pourtant, cet accroc à la veste est plus elliptique, plus suggestif qu'on ne le croit en s'agaçant de cette scène téléphonée.
Et pourtant, le film reste intéressant et émouvant, en raison de son sujet. Film parfait d'un point de vue historique et didactique, tout y est représenté de manière claire et simplifiée (voire simpliste, cf les critiques ci-dessus), mais c'est la représentation des tabous, le silence du titre, qui justifie ce cinéma explicite. Ce n'est pas seulement par académisme, mais par parti pris : face au labyrinthe du silence, le cinéaste décide de tout miser sur le fil d'Ariane et la clarification systématique. Le silence du titre (en allemand, le verbe schweigen substantivé, donc le fait de se taire, le silence complice, le silence gêné — pas de traduction totalement adéquate pour ça), c'est celui qui entoure, jusqu'en 1958, date à laquelle commence l'action, la collaboration massive des citoyens ordinaires au nazisme et même à l'extermination des Juifs.
Ce dont il faut faire le procès, selon le procureur général, c'est le nazisme ordinaire, celui des petites gens : en s'obstinant à traquer Mengele, en pure perte, le jeune Radmann laisse filer un ancien tortionnaire “ordinaire” d'Auschwitz devenu boulanger. D'ailleurs, plus fin qu'on ne le croirait, le cinéaste choisit d'évoquer le contraste entre Eichmann arrêté et jugé, d'une part, et Mengele qui échappe à la justice en se réfugiant au Paraguay après avoir fait des allers-retours entre l'Argentine et l'Allemagne sans jamais être inquiété. Dans le film, on ne voit ni l'un ni l'autre : ce ne sont pas les chefs ou les figures reconnues de l'atrocité nazie qui sont représentées dans ce film, et pourtant il est beaucoup question d'eux également. Mengele n'est perceptible que dans la scène où Radmann croit venir l'arrêter à l'auberge (et on ne sait jamais s'il s'y trouvait) et dans le cauchemar du protagoniste.
La question du crime ordinaire, et de l'effacement — sous cette chape de silence / Schweigen — des crimes dans une Allemagne reconstruite et soucieuse d'oublier, est peut-être, après tout, la raison pour laquelle les décors et les couleurs du film sont aussi sobres que clairs : volonté de représenter la jeunesse insouciante amatrice de jazz et de mode, certes, mais aussi refus d'inscrire le film dans l'esthétique crépusculaire des films sur la shoah. Le sujet du film n'est pas Auschwitz, mais la façon dont on voudrait que les traces et les conséquences de la guerre et du nazisme disparaissent sous des teintes pastel ou colorées. En ce sens, l'esthétique du film est certainement ironique et bien moins explicite ou démonstrative qu'au premier regard. Ainsi, les prairies qui entourent le camp d'Auschwitz sont vertes, et le camp lui-même (comme le dit Gnielka) ne dit pas grand chose de ce qui s'y est passé. Ce qui est fondamentalement significatif, c'est la récitation du kaddish au milieu de ce paysage de verdure ensoleillée, comme si Ricciarelli suggérait que la parole compte plus que l'image, ou que l'image n'est rien sans la parole.
Pour clore ce billet sur ces fameux cauchemars, ce qui reste en suspens, aussi, c'est la figure du père.
Qu'il s'agisse du procureur général (juif persécuté dès 1933 mais dont on n'apprend jamais comment il a échappé à l'extermination) ou du journaliste, Gnielka, qui est à l'origine de l'engagement de Radmann mais dont Radmann comprend vers la fin du film qu'il s'est retrouvé embrigadé à 17 ans dans l'armée et qu'il a été témoin direct des atrocités commises à Auschwitz, le jeune homme trouve des pères de substitution à ce père qu'il vénère, dont il déclare au début qu'il lui sert de modèle et que lui n'avait jamais été nazi. Le troisième père symbolique de Radmann est Simon Kirsch, le rescapé d'Auschwitz qui ne se pardonnera jamais d'avoir laissé Mengele emporter ses filles jumelles car il avait cru qu'avec un docteur, un homme à l'apparence si affable, elles seraient protégées. Pour les jumelles, à la demande de Kirsch, Gnielka et Radmann vont à Auschwitz dire le kaddish.
Mais le vrai père demeure absent, dans l'œil spectral des cauchemars.
Par un détour narratif là encore sans surprise, Radmann finit par découvrir que son père était membre du parti nazi. Là où le film garde intacte l'énigme et se sauve en échappant, pour une fois, à la manie de tout expliquer, c'est que c'est au spectateur de comprendre que si, d'une part, Radmann avait ignoré jusque là le passé nazi de son père, et si, d'autre part, sa mère s'apprête à se remarier en disant que ce père disparu ne reviendra jamais, c'est que la mère en sait plus long, et c'est (probablement) que le père de Radmann s'est tellement compromis qu'il s'est soit suicidé quelque part, soit planqué lui aussi en Amérique du sud, d'où il ne reviendra jamais.
22:45 Publié dans *2020*, Tographe | Lien permanent | Commentaires (0)
vendredi, 17 avril 2020
C'est dur pour tout le monde
Mort du chanteur Christophe, dont on apprend à l'occasion qu'il se prénommait Daniel (!). Label obscur dans la tête toute la matinée. Des esprits facétieux ont fait remarquer qu'ils ignoraient que Luis Sepulveda fût le vrai nom du chanteur. Des esprits avisés se sont surpris de voir qu'alors qu'on le savait malade du Covid19 depuis une quinzaine, là n'était pas le motif officiel de son décès. De là à relancer la machine à complotisme (ici, sur le nombre des victimes)...
Nous ne suivons plus de très près les bilans quotidiens, non qu'on s'habitue mais parce qu'ils sont moins médiatisés : en Italie, je sais que le bilan quotidien est encore de 500 morts par jour en moyenne, alors que le Sud, plus insalubre et moins bien équipé au niveau médical, est resté épargné. C'est vraiment étrange. En France, difficile de suivre, car les chiffres font l'objet de réactualisations permanentes. Dans l'EHPAD de Chambray-lès-Tours, il y a eu 7 morts sur 96 pensionnaires, et 8 autres personnes sont infectées : pour une région censément non touchée...
Aux Etats-Unis, Trump a encouragé, dans une série de tweets en capitales d'imprimerie, les milices d'extrême-droite à manifester et à défier les mesures de distanciation sociales prises dans leur État ; dans le Michigan, notamment. Il les a aussi encouragées à aller scander “Lock her up” sous les fenêtres d'une gouverneure. (Depuis Hillary Clinton, c'est toujours les femmes politiques qu'il veut voir en prison.) — Le Washington Post a écrit un éditorial très virulent. Tout ça ne sert à rien : ce type est dingue et intouchable.
Après déjeuner, A* (qui bosse comme un malade — ce soir jusqu'à 18 h, alors que de mon côté j'ai un peu bricolé sur le Web, guère plus) s'est mis à consulter sur son téléphone les scénarios de divers films de Philippe Clair, car j'avais évoqué, pour son titre, le film (jamais vu) Par où t'es rentré, on t'a pas vu sortir. Pour le synopsis seul, nous supputons que les plus hallucinants navets du cinéaste doivent être Rodriguez au pays des merguez (transposition du Cid au Maghreb) et Le Führer en folie.
Ce soir, nous avons regardé un énorme nanard, presque un non-film : C'est dur pour tout le monde, avec Bernard Blier (heureusement, et même lui ne s'en dépêtre pas trop).
22:45 Publié dans *2020*, Tographe | Lien permanent | Commentaires (4)
jeudi, 16 avril 2020
Au charbon
Beaucoup travaillé ce matin. Mon cours sur Cook commence à prendre forme ; il serait temps. Mais il me donne toujours du fil à retordre. Lundi prochain, j'en assurerai la première séance, probablement via un direct non répertorié sur YouTube : ce n'est évidemment pas idéal, d'un point de vue institutionnel, comme peut l'être Renavisio, mais ça permettra l'archivage intégral du cours.
Dans l'après-midi, alors que nous avons transmis lundi à la Présidence de l'Université nos demandes de modification des modalités de contrôle des connaissances, et alors que les étudiant·es attendent les détails du calendrier pour le milieu de cette semaine, nous avons reçu de nouvelles instructions. Il faut tout recommencer. On ne sait pas quand on pourra informer les étudiant·es.
Tout se passe comme si les autorités de tutelle, à commencer par le ministère, voulaient profiter de la crise sanitaire et du confinement pour écraser les degrés inférieurs sous les tâches : concours en partie maintenus, de façon rocambolesque et absurde, multiplication des exigences formalistes oiseuses mais chronophages — dans le secondaire, confection de nouveaux emplois du temps pour faire croire aux parents d'élèves et aux médias qu'on ne va pas renvoyer les élèves dans de vrais bouillons de culture. Comme si l'administration trouvait qu'il n'y aura pas assez de morts du Covid19 dans l'Education nationale et qu'il faut alléger encore la masse salariale grâce aux burn-out et suicides...
Je lis depuis avant-hier Son Excellence Eugène Rougon (qu'A* vient de lire) ; je crois finalement ne jamais l'avoir lu, comme La Débâcle ; cet après-midi, j'ai repris le chapitre “De la vanité” dans les essais de Montaigne.
Soirée : Germinal de Claude Berri — l'occasion de vérifier, près de trente ans plus tard, à quel point Renaud jouait mal. C'est peut-être même plus criant encore aujourd'hui. Il est vraiment effroyablement mauvais.
19:57 Publié dans *2020*, Indignations, WAW | Lien permanent | Commentaires (0)