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jeudi, 11 janvier 2024

The Impostor

The Impostor (11012024)      Il y a longtemps déjà que je voulais lire Galgut. Et ma mère m’en ayant offert deux romans pour mes 49 ans, en novembre, j’ai donc attaqué celui-ci lundi soir, toujours dans l’idée d’essayer de faire descendre la pile de livres en souffrance. (En fait il y a plusieurs piles. Trois ou quatre. C’est une autre histoire.)

 

Comme l’idée de cette chronique n’est pas de passer une heure ou davantage, à chaque fois, à écrire une recension détaillée, mais plutôt de pouvoir tenir le compte des livres lus / parcourus / interrompus, voici donc très en bref l’intrigue de ce roman publié en 2008, et qui fait partie des livres de Galgut qui ont été traduits en français :

Le roman raconte, du point de vue d’Adam, quadragénaire au chômage et en plein désarroi existentiel, les années de la transition arc-en-ciel. Adam déménage au fin fond du Karoo, dans une maison un peu déglinguée, au jardin envahi de ronces et de mauvaises herbes, que lui prête son frère ; il s’imagine qu’il va reprendre sa carrière de poète abandonnée après un seul recueil juvénile ; il se retrouve à converser avec un être imaginaire, façon Horla mais pacifique. Son voisin, Blom, est mystérieux ; il apprend vers la fin du roman qu’il s’agit d’un ancien criminel du régime d’apartheid engagé dans un programme de protection des témoins. (Par une forme d’ironie narrative très téléphonée – le roman n’est globalement pas du genre subtil – Blom finit assassiné par les mafieux qui le prennent pour Adam.) Adam croise, presque dès le début du roman, un homme, Canning, qui lui dit qu’ils sont amis d’enfance, dont Adam n’a aucun souvenir alors qu’il est, lui, la personne que Canning admirait le plus quand ils étaient ensemble en pensionnat. Canning a hérité de son père, qu’il détestait, un gigantesque ranch qu’il entreprend de démolir et de convertir – avec l’aide de politiciens véreux et d’un certain Mr. Genov, gros mafieux richissime – en golf. Adam passe tous ses week-ends dans la propriété (qui n’est jamais appelée ranch, c’est moi qui use de cet américanisme inadéquat par commodité), et finit par avoir une liaison avec la femme de Canning, une Noire sublime censée se nommer Baby.

 

Du point de vue des principaux motifs :

 * le veld, encore et toujours (p. 25 p. ex.)

 * la centralité d’un personnage ab-errant, Adam (notion d’aberration à creuser à partir de la p. 238 p. ex.), permet de mettre en lumière une société entièrement composée de figures dysfonctionnelles – tout à fait intéressant en tant que ressort littéraire/esthétique, mais cela m’embarrasse un peu comme la façon dont les romans post-apartheid de Coetzee sont beaucoup plus négatifs et critiques que les textes pré-apartheid (je n’ai pas creusé tout cela, il y a bien longtemps que je ne prétends plus, et de loin, avoir une quelconque expertise concernant la littérature sud-africaine

 * la première rencontre entre Adam et Baby (pp. 62-5) est très dérangeante : est-ce que Galgut fait exprès de jouer avec le male gaze racialisant et de surdéterminer les clichés sur la prostitution ? je n’en suis pas sûr – Adam est dépeint comme un homme blanc en pleine crise de la quarantaine (Galgut ne le dit jamais ainsi, heureusement) et entièrement détaché de ses propres expériences (cf la dernière fois qu’il fait l’amour avec Baby, pp. 196-7)

 * la bipolarité de Canning (nommée « ambivalence » à plusieurs reprises), p. ex. p. 116 : très intéressante en tant qu’allégorie politique (cf aussi dans le chapitre de dénouement, ch. 21, p. 245)

 * la dualité Adam/Canning signifie que chacun des deux est l’imposteur de l’autre (d’où le titre) ; la mémoire (personnelle et historique) comme imposture ; dualité redoublée par la dualité Baby/Nappy [pendant la majeure partie du récit, Canning appelle Adam  « Nappy », son surnom de leurs années d’enfance < Adam Napier, mais le surnom vient du fait qu’il se pissait dessus], comme si Galgut ironisait sur une nation à l’état d’enfance, incapable de dépasser le stade des pulsions primaires (Baby férocement individualiste / Adam qui rentre en fin de compte dans le giron de la classe moyenne/aisée blanche)

mercredi, 10 janvier 2024

La pièce manquante

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Avant-hier soir, ma collègue Katy Testemale organisait, au lycée Descartes, une rencontre avec Jean Harambat, autour de la parution de sa B.D. La pièce manquante, avec la participation de mes collègues Frédérique Fouassier et Laurent Gerbier. Comme j’avais une réunion d’une de mes équipes de recherche à 15 h, je n’ai pas pu y aller, mais C* m’a résumé tout cela avec pas mal de détails tout de même (cf son compte Instagram aussi, d’où provient aussi l’image ci-contre). Elle a trouvé l'ensemble de la table ronde très intéressant, très stimulant.

 

La B.D., que j’ai lue dimanche, m’a un peu laissé sur ma faim : c’est plutôt sage, et également un peu verbeux. L’idée de faire se rencontrer, dans l’Angleterre du 18e siècle (avec un hommage appuyé au genre picaresque) l’actrice Peg Woffington (dont je n’avais jamais entendu parler (mais la WP anglophone m'apprend qu'elle a fait l'objet de plusieurs romans et films, et même d'une mention dans Ulysses de Joyce...) et une figure majeure (un peu sous-employée par Harambat), Ignatius Sancho, est très judicieuse, et l’ensemble est bien mené. C’est l’occasion aussi de broder un peu à partir de Cardenio, la fameuse pièce coécrite par Shakespeare et Fletcher en 1613, et irrémédiablement perdue.

 

Au sujet d’Ignatius Sancho (dont je ne peux que chaudement recommander les Lettres, un texte fondamental de la Black Britishness et de l’histoire de l’abolitionnisme), Katy Testemale a parlé du roman que lui a consacré, tout récemment, l’acteur Paterson Joseph, et que j’ai commencé à lire.

 

mardi, 09 janvier 2024

09012024 — (re)traduire Virginia Woolf

Je découvre très tardivement le Journal de traduction des Vagues de Virginia Woolf sur le blog de Christine Jeanney, et c’est passionnant. Je l’ai découvert grâce à un partage sur le média social Bluesky. De façon générale, j’adore tous les témoignages d’une réflexion autour d’un work in progress de traduction.

 Il s’est malencontreusement trouvé que le premier billet que j’ai lu – le dernier paru – servait à commenter la traduction du passage dans laquelle un jeune valet lutine / tchatche / baratine / (baise ?) une bonniche (tweeny en anglais, c’est un saut très soudain dans un niveau de langue familier) : the growl of the boot-boy making love to the tweeny among the gooseberry bushes. Or, C. Jeanney avait traduit par « garçon chaussé de bottes », ce qui m’a poussé à lui écrire ceci sur Bluesky :

Si je peux me permettre, « boot-boy », c'était un jeune valet, préposé au nettoyage des bottes. Donc « chaussé de bottes » est un contresens ici. Vu que tweeny est familier, je pencherais quasiment pour une rupture du type « le petit valet en train de baratiner la bonniche »...

Elle m’a répondu :

Merci ! J'ai cherché je ne sais combien de temps parce que je sentais bien que je passais à côté ! Marguerite Yourcenar dit « groom », Cécile Wasjbrot dit comme moi et Michel Cusin dit « cireur de chaussures », c'est donc lui qui a raison (mais la formulation me paraissait un peu lourde).

Et ma réponse :

Donc tout le monde se trompe... ce qui compte c'est que c'est un jeune valet, tout en bas de l'échelle. C'est étrange que personne n'ait trouvé cela à part Cusin car il y a carrément un article Wikipedia. Mais cireur de chaussures, c'est inadéquat également.

En effet, le personnage du boot-boy ici n’a d’importance qu’à deux titres : c’est un jeune homme ; c’est un serviteur situé tout en bas de l’échelle. Donc, même si Yourcenar (dont j’avais déjà vu il y a longtemps que la traduction est très médiocre) a compris le sens sociologique, le choix du franglais groom est assez problématique, et ce d’autant plus, aujourd’hui, que ce terme n’a plus guère de sens. (Par parenthèse, je pense que growl suggère quelque chose d’un peu plus avancé ou aventureux que le simple fait de conter fleurette. Après notre échange, C. Jeanney a corrigé comme suit : « Les grognements du jeune valet en train de lutiner une servante dans les groseilliers » — et je trouve lutiner très pertinent.

Dans la suite de nos échanges sur Bluesky, C. Jeanney vient de me signaler que, dans un passage ultérieur (“Through its fine plumes specked with little pricked ears of green in spring, of orange in autumn, I saw boats”), les trois traductions consultées donnaient toutes « oreilles » pour ears, ce qui est une absurdité. Elle l’a d’ailleurs parfaitement compris, je cite son message :

(juste pour vous dire, je traduis maintenant un passage avec la description d'un pré, il y a des “ears” qui se dressent, ce que les trois traductions publiées traduisent par oreilles, mais je vois que “ear” est aussi le nom botanique de l'épi de blé) (le diable, les détails et tout ça:-))

 

On voit donc que, même avec plusieurs traductions disponibles, The Waves de Woolf mérite une nouvelle traduction, moins fantaisiste. Même en prenant le train en marche, celle de C. Jeanney m’intéresse hautement.

 

lundi, 08 janvier 2024

The Centre

The Centre (08012024)    Hier soir, j’ai achevé la lecture d’un roman très récent, qui m’a été offert pour mes 49 ans par ma sœur Delphine, The Centre d’Ayesha Manazir Siddiqi. Quoique le roman ait eu beaucoup de presse, et malgré une publication chez Picador, l’autrice n’a même pas d’article dans la Wikipédia anglophone. En fait, ça commençait très bien, très fort, avec une idée d’intrigue formidable – and then, it peters out, somewhat. Ça se délite, ou ça part dans autre chose, de très cohérent, mais qui m’intéresse moins.

 

[Attention : les § ci-après divulgâchent à tout-va ce qui se passe dans le roman.]

La narratrice protagoniste est une jeune traductrice qui, après sa rencontre avec Adam (bien sûr – mais en fait, d’après moi, cet Adam est plus un gros clin d’œil à Adam Thirlwell qu’au père de l’humanité selon la Bible), découvre un moyen d’apprendre n’importe quelle langue à la perfection en dix jours. Ce pitch, qui implique que les premiers chapitres parlent beaucoup de langues, de traduction, d’interculturalité, promet beaucoup, mais on comprend progressivement que cette situation n’est qu’un prétexte à une sorte d’exercice entre sci-fi et thriller ; d’ailleurs, il n’est plus du tout question de langues, et encore moins de traduction, dans le dernier tiers du roman, à savoir les quatre derniers chapitres.

La puce m’est venue à l’oreille quand, après avoir appris l’allemand en dix jours et être devenue une traductrice en vue, Anisa apprend le russe de la même manière. Or, le roman reste très évasif sur les modalités de l’apprentissage lui-même (et pour cause : c’est de la science-fiction), mais cela coince pour le russe car jamais il n’est question d’apprendre autrement que par l’écoute. Alors, même si les révélations ultérieures (qui relèvent du cannibalisme dans un sens pas seulement culturel) permettent de se dire qu’Anisa a magiquement ingéré la connaissance de l’alphabet cyrillique, j’aurais aimé, pour ma part, que Siddiqi prenne la peine de rendre son récit plus vraisemblable, en fait, en montrant comment Anisa découvre qu’elle sait lire et écrire le russe, et pas seulement le parler.

J’ai conscience que je juge d’un roman qui n’est pas celui que Siddiqi a voulu écrire, mais du roman que j’ai cru lire jusqu’aux alentours des chapitres 4-5. En fin de compte, le roman est presque plus intéressant dans sa description de l’identité biculturelle anglo-pakistanaise de la narratrice, ainsi que dans le portrait différentialiste opposant Inde et Pakistan, jusque dans le rejet des tentatives d’homogénéisation ou d’expansionnisme de l’Inde contemporaine :

Indians did this to me all the time, this weird colonial swallowing up, this ‘we’re all the same’, which inevitably became ‘partition should never have happened’, which then turned into a full-on mourning for their completely fictitious long-lost perfect India of yesterday. They saw Pakistan, the entire country, as some kind of travesty, a broken-off piece of themselves that had turned rotten and sour once severed from its root. It was fucking annoying, but whatever, I let it go. (p. 259)

 

De même, plusieurs passages mettent en lumière le contraste idéologique et perceptuel entre la génération d’Anisa et la génération des boomers, mais aussi la dissimulation par laquelle certains hommes se prétendent féministes (nouveau trait de masqulinité, aurait pu écrire Jean-Thierry Maertens) :

I remember asking him once why he never reached for me with desire, and you know what he said? That he believed in ‘radical consent’. He explained that this meant that he never wanted to encroach, even accidentally. At first, I told myself that this was sweet, that maybe Adam would help me rewrite some of the violations I had stumbled into in the past, that maybe he would help me heal from all the times that I had overridden my own discomfort to pander to the demands of another. But later, I started feeling like maybe he was just using some kind of woke-boy spiel as macho defensiveness. (p. 19)

 

Assez subtilement, et jusque dans le dernier revirement – le dernier paragraphe autorise deux interprétations radicalement différentes quant au choix d’Anisa (p. 302) – The Centre est aussi un roman féministe :

Except now, we know better. The women who encountered the pushy hand before have told us about it; they’ve gathered their testimonies, these women, and shown us red flag after red flag. Our sisters have spoken, past their shame and sorrow, past their rage and fear, so that we may recognize things like a subtle push, a stray set of words, for what they are. So that we may make out the gleam of the headlights while the train is still far away enough for us to jump off the tracks. (p. 264)

 

Je termine sur les aspects métatextuels : le fait que le texte du roman est la retranscription du récit sur clé USB d’Anisa jusqu’au chapitre 11 (ou au-delà ?), mais surtout le fait que Siddiqi s’est amusée à inventer (or did she?) deux romans contemporains, l’un allemand, l’autre russe, que traduit sa protagoniste, et dont elle livre une ébauche suffisamment fouillée pour que les foldingues dans mon genre aient envie de lire ces romans qui n’existent pas… Autre motif qui rend la notion de sororité assez délicate à suggérer, l'attirance lesbienne, très loin de tout male gaze, fait aussi l’objet d’une mise en abyme littéraire :

You know when you sometimes read about people swooning in old Victorian novels? Well, the idea always baffled me. But truly, in that moment, I felt like I understood. Not that I swooned exactly, at least, not physically. I kept my eyes firmly placed on a small daisy in front of me, overriding my pupils’ impulse to turn upwards as I fielded a rush of light-headedness. When I finally glanced over at Shiba, she, too, was looking at the ground and had turned a bit red. Neither of us said anything for what felt like twenty years. (p. 108)

 

dimanche, 07 janvier 2024

07012024

Après une trouée de soleil, la grisaille est revenue. Je suis allé jusqu’au lieu-dit de la Vinogerie à Chanceaux, puis je me suis réattelé à quelques bricoles, en l’occurrence à écrire des mails de vœux de bonne année en écoutant Kind of Blue sur la platine que C* m’a offerte pour mes 49 ans.

C’est étrange : avec ce principe d’écrire un billet même bref et mal construit pour chaque livre lu, je me retrouve à hésiter à poursuivre la série je range mon bureau, mais aussi sans nécessité de publier d’autres billets.

 

Au début de l’année, j’ai créé la sous-rubrique Disques 2024 dans l’idée surtout d’évoquer les nouveaux disques. Mais voici qu’après avoir redescendu au sous-sol les quatre Zappa de décembre, j’ai remonté tous les Miles Davis hérités de mon beau-père – et donc j’écoute Kind of Blue ; à cet instant précis, “All Blues” même. Le solo de Coltrane au ténor n’est pas du tout coltranien. S’il n’y avait pas le nom de Coltrane sur la pochette, je n’entendrais pas Coltrane. D’ailleurs je n’entends pas Coltrane. (Et depuis combien de temps n’avais-je pas écouté cet album ultra-classique ?)

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Tu parles d’un nouveau disque.

 

Oui, mais c’est nouveau, puisque par exemple, de toutes les années hagetmautiennes, jamais je n’avais lu le texte de pochette, un texte qui s’intitule “Improvisation in Jazz” et dont l’auteur est le pianiste, Bill Evans. (C’est un peu claudicant, d’ailleurs, comme lecture ou comme découverte, car le piano est le seul instrument qui résonne de façon décalée avec cette platine vinyle (rien à faire).) Ce texte commence ainsi :

There is a Japanese visual art in which the artist is forced to be spontaneous. He must paint on a thin stretched parchment with a special brush and black water paint in such a way that an unnatural or interrupted stroke will destroy the line or break through the parchment. Erasures or changes are impossible. These artists must practice a particular discipline, that of allowing the idea to express itself in communication with their hands in such a direct way that deliberation cannot interfere.

 

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Hier, Patrice Nganang écrivait que tous les portraits photo en couleur de Miles Davis étaient ratés : « C'est littéralement comme ces actrices qui avaient raté le passage du muet au parlant. » Armelle Touko l’a contredit avec cette image-ci, à raison.

 

Fabriquer une femme

Fabriquer une femme (07012024)    C* est rentrée d’en ville avec ce livre, et deux autres, vendredi soir. J’en ai commencé la lecture dans le canapé du salon. Comme j’avais du mal à m’endormir le soir (longue sieste et double thé), j’ai lu jusqu’à minuit passé, puis de nouveau entre 7 et 9 : Fabriquer une femme, le nouveau roman de Marie Darrieussecq, a été lu overnight (en l’espace d’une nuit, entre un soir et le lendemain matin…).

Comme souvent avec Darrieussecq, c’est bien, mais ce n’est pas très bien ; il manque toujours quelque chose pour que ce soit totalement épatant / enthousiasmant ; peut-être que c’est bâclé, mais je n’arrive pas à voir où ; peut-être que ce sont les intrigues ou les personnages, mais cela est vrai aussi de ses essais (dont je conseille la lecture : Rapport de police ; Pas dormir)… Bref… (Note to self : étant donné l’importance grandissante de la dimension gasconne/basque dans l’œuvre de M.D., je devrais lire Clèves. – Il faudrait aussi que je puisse échanger avec quelqu’un qui aura lu ce roman et ne connaît aucun des mots gascons dont M.D. se plaît à émailler son texte.)

 

Le récit est construit comme un triptyque dont le panneau central ou de clôture n’occupe qu’une vingtaine de pages ; les deux premières parties couvrent les mêmes événements, vus du point de vue respectif des deux amies d’enfance, Rose et Solange. C’est un roman sur la bourgeoisie rurale, l’adolescence au cours des « années SIDA », et surtout sur la construction patriarcale des « femmes » : fabriquer une femme, c’est ce que fait la romancière, mais c’est surtout ce que fait Solange elle-même – toutefois, déjoue-t-elle les codes patriarcaux ou les épouse-t-elle ? Darrieussecq est trop intelligente pour offrir une réponse uniforme ou simpliste, et pour ne pas savoir que tout est médié, indirect, d’où le titre des deux parties : D’après Rose ; Selon Solange. Mais d’après, c’est aussi après : M.D. s’amuse à souligner le chaos engendré par les nombreuses prolepses. Par ailleurs, comme le/la lecteurice a déjà lu l’histoire, avec certains angles morts certes, la deuxième partie est aussi un après, dans lequel « la Solange du futur » ne cesse de projeter une ombre proleptique. Difficile, dès lors, de ne pas jauger de la jeune fille(-mère) à l’aune de la star(lette) hollywoodienne, et de se dépêtrer  de ce qu’implique la primauté du regard de Rose. Difficile, aussi, de ne pas comprendre le choix d'un personnage de comédienne dans le contexte post-MeToo.

 

D'après Rose

Selon Solange

 

Je clos ce billet écrit à la volée par deux points, dont le second est tout à fait mineur :

1) On comprend progressivement que Thierry, le fils de Solange, dont elle ne s’occupe pas et qu’elle (ou les services sociaux) confi(ent) à sa mère, a un handicap, probablement cognitif. Cela n’est jamais explicite, mais devient évident au cours de la seconde partie, et surtout dans le chapitre final, à Hollywood. Cette marginalisation (au sens presque matériel – il est relégué dans les marges du livre) de l’enfant handicapé – dont il est sous-entendu qu’il est tel en raison des conditions de l’accouchement – laisse un petit goût amer, comme si l’enfant était forcément un embarras, un poids, un obstacle dans la fabrication de Solange. On comprend que Solange n’a pas pu avorter car elle a persisté trop longtemps dans le déni ou la dissimulation de grossesse ; cet aspect-là est assez réaliste, en fait.

2) En lisant la dernière page, je me suis demandé si M.D. ne faisait pas une allusion au dernier plan de Mulholland Drive (M.D. aussi, tiens), but possibly that’s me over-reading.

 

samedi, 06 janvier 2024

T'Zée

T'Zée (06012024)    Hier après-midi, avant de sombrer dans une longue sieste – fort inhabituel – j’ai lu ce roman graphique offert à O* pour Noël.

Réécriture de Phèdre, bien sûr, mais aussi portrait à peine décalé de la dictature Mobutu : à peine, car on sent qu’Appollo, le scénariste, a voulu combiner les Kabila et Sassou-Nguesso dans la figure de T’Zée (Thésée) : le père Kabila était surnommé “Mzee”, un nom swahili très courant pour désigner un modèle de sagesse. Le livre est globalement réussi ; j’aime beaucoup le dessin et les contrastes de couleurs d’une page à l’autre, comme si des univers impossibles se côtoyaient. Suivant la structure tragique, le roman se décompose en cinq actes, avec pour chacun une épigraphe empruntée à un écrivain francophone des années 70-80, et un système d’analepses – le moins réussi étant l’acte IV, celui où Hippolyte, Arissi et leur ami libanais assistent à un match de catch féticheur : on sent qu’il y avait une vraie volonté de marveliser le livre, et d’y adosser une allusion au combat de boxe entre Foreman et Mohamed Ali en 1974.

Il y a aussi ces quelques planches totalement gratuites où Bobbi comme Mami Wata n’ont d’autre fonction que d’exhiber leur corps pour le male gaze le plus lourdingue. Cela résonne d’autant plus péniblement quand, à la page 73, Hippolyte étudiant à Paris découvre « les grandes figures des indépendances » : sur les dix noms / visages, une seule femme… Toni Morrison… Au cours des quinze ans qu’a duré la gestation puis l’écriture de ce livre, Appollo n’a-t-il donc rencontré aucune figure d’écrivaine et/ou de militante africaine ? C’est navrant.

 

vendredi, 05 janvier 2024

Wizard of the Crow

Wizard of the Crow (05012024)    Wizard of the Crow, lu peu après sa sortie, un billet de train daté de décembre 2006 resté dedans en témoigne, je l’avais relu par fragments, il me semble, lors d’une précédente tentative d’en proposer la traduction, il y a dix ans peut-être. Je l’ai repris car Ngũgĩ wa Thiong'o est revenu au centre de mes travaux depuis un an, notamment en raison de la traduction des Perfect Nine par Laurent Vannini, qui m’a valu une invitation aux Assises de la traduction à Arles, mais aussi car j’ai siégé en décembre dans un jury de thèse, le sujet étant un essai de comparaison entre la première trilogie de Nuruddin Farah et deux romans de Ngũgĩ wa Thiong'o, dont Wizard of the Crow, autour des thèmes de la dictature et de la folie.

À cette occasion, j’ai décidé de relire ce génial pavé en entier, et je me réjouis d’avoir pris le temps ; après tout, le roman est constitué de six « livres », de dimensions inégales certes ; j’en ai achevé la lecture hier soir, peu avant minuit. Il faut vraiment traduire ce livre. Je ne sais ni quand ni comment. Mais il n’est plus question de reculer.

 

jeudi, 04 janvier 2024

Que faire des classes moyennes ?

Que faire des classes moyennes ? (04012024) Facebook m'a rappelé que je lisais ce livre il y a sept ans, pendant une surveillance d'examen. Ainsi, je suis allé le reprendre et me suis surpris à en relire de larges extraits, dont le chapitre 4 :

Un facteur éprouvant de la vie est que nous perdurons dans l’existence avec l’idée et la vision que nous avions des choses étant enfant, puis adolescent ; cela demeure. C’est ainsi que la vision qu’on a de l’école aujourd’hui est encore marquée par l’école que nous percevons dans la brume et la sourdine des souvenirs, d’une idée de l’école véhiculée par les générations antérieures (quelquefois les grands-parents) ou le cinéma (Les Quatre Cents Coups), que la blouse grise et les plumes Sergent-Major, même si nous n’avons jamais porté de blouse, même si nous avons toujours écrit au Bic, sont inclus dans notre mémoire au même titre que ce que nous avons réellement vécu. Animés de quelques vestiges piquants, nous voulons qu’ils s’incarnent, y compris au détriment des autres : nos enfants porteront des blouses grises s’ils continuent, écriront à la Sergent-Major s’ils continuent. S’ils continuent quoi ? S’ils continuent à ne pas être conformes à nos désirs, c’est-à-dire s’ils continuent à ne pas être comme dans les souvenirs qu’on croit qu’on a, c’est-à-dire s’ils continuent à être réels, et non fictifs. [S’ils continuent = nous punirons le réel.] Punir le réel, c’est ni plus ni moins ce qui fait tenir les classes moyennes debout. Leur rapport à l’école tient (ou en tout cas tenait) en une phrase : si tu travailles à l’école, tu auras une bonne vie (réduit à partir des années 1980 à : tu auras un emploi) – soit à peu près l’équivalent de : si tu te grattes le coude, tu te moucheras plus vite, ou : si tu mets une grenouille sous la table, tu gagneras au Loto.

(pp. 24-26)

 

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Je m’étais attelé à mes copies, en écoutant Radiance, double album solo de Keith Jarrett constitué de deux lives japonais de 2002, quand mon collègue co-directeur m’a appelé pour parler de diverses choses de boulot. Nous avons aussi discuté de choses plus personnelles, et de son emménagement dans la maison qu’il vient d’acheter à l’autre bout du département, et où il vient de se faire livrer un piano, de sorte qu’on a parlé de pianos et que, me trouvant à lui dire que pour quelqu’un qui savait en jouer un vrai piano c’était essentiel – banalité absolue –, il m’a répondu quelque chose comme « je ne sais pas jouer du piano, mais en tout cas je m’amuse ». Après notre conversation, reprenant mes copies, et écoutant la dernière plage du second CD, je repensais à cette phrase : « je ne sais pas jouer du piano, mais je m’amuse ».

*               *

*

A* a obtenu le permis de conduire, à la seconde tentative.

 

mercredi, 03 janvier 2024

03012024

 

C’est ici le premier texte de cette année. Malade depuis plusieurs jours (et vraiment cloué au lit le 31 ainsi que la nuit du Nouvel An) je n’ai pu allumer même l’ordinateur qu’hier soir. A* est reparti à Rennes avec F* ; notre ami Éric, qui était venu pour deux jours, et pour qui j’ai surmonté un peu mon épuisement et ma fièvre en m’extirpant du plumard depuis avant-hier matin, est aussi reparti, reconduit par C* à la gare en fin d’après-midi. Aujourd’hui reprend une routine, à trois. Le vent et la pluie se sont calmés, et il y a même un rayon de soleil ; j’ai réussi à photographier une mésange bleue, mais pas le pinson (pas facile à photographier, les pinsons…).

 

L’an dernier, je m’étais promis de publier un texte chaque jour sur ce blog ; promesse partiellement tenue, mais au moins il y a des traces. (Variante : je continue de créer ma propre archive.) Je vais retenter cette année, et même tenter de vraiment reprendre l’écriture sur l’autre blog, avec des projets courts, peu exigeants formellement : je commence aujourd’hui avec une série de textes provisoirement intitulée Mouchoirs 2024.

Ici, je vais me contenter de noter systématiquement quelques brèves phrases sur chaque livre lu, laissé inachevé, ou parcouru. (Il y a donc tricherie : on verra que j’aurai publié à titre rétrospectif des billets aux dates des 1er et 2 janvier.) Idem peut-être pour les disques. Cela devrait permettre d’« alimenter » cette rubrique 2024. Il faut que je reprenne le collier côté boulot : traduction laissée en plan depuis un bon mois, et donc désormais en retard ; copies (des monceaux) ; préparation des cours du second semestre ; préparation de plusieurs interventions de recherche…

 

Je ne peux clore ce billet sans une note moins égotiste et plus lugubre. Je vais donc citer (ce qui permettra de ne pas tricher totalement) ce que j’ai écrit hier 2 janvier à 5 h 55 du matin sur le réseau social Bluesky :

Du mal à souhaiter une bonne année car écologiquement, socialement et politiquement ça va encore être horrible, mais au moins la santé et du bonheur, autant que possible, avec vos proches. Fuyez les toxiques.

 

11:42 Publié dans 2024 | Lien permanent | Commentaires (0)

mardi, 02 janvier 2024

The Shakespeare & Co Book of Interviews

The Shakespeare & Co Book of Interviews (02012024)    Cadeau de ma sœur pour Noël, cet ouvrage compulse les transcriptions de vingt entretiens menés avec vingt écrivain·es à la librairie Shakespeare & Co. Je n’ai lu de livres que de quatre des écrivain·es (Percival Everett, Karl Ove Knausgaard, Leïla Slimani, Annie Ernaux) et j’ai évidemment lu avec plus d’engagement intellectuel ces quatre chapitres-là, mais il y a quelques auteurices dont j’aimerais découvrir l’œuvre depuis déjà quelque temps : Marlon James, Reni Eddo-Lodge, Jesmyn Ward, Rachel Cusk…

 

lundi, 01 janvier 2024

Der gestohlene Gott

Le livre du jour, c’est Der gestohlene Gott de Hans Henny Jahnn, que j’ai lu juste avant le début des vacances. C’est une pièce de théâtre, dont j’ai découvert par hasard – en faisant je ne sais quelle recherche oiseuse sur Jahnn, un écrivain que j’aime beaucoup – qu’elle avait été publiée en 1924 et qu’elle n’avait jamais été traduite en français.

 

Der gestohlene Gott (01012024)    J’ai donc emprunté le tome 4 des œuvres complètes en allemand via le Prêt Entre Bibliothèques et cet exemplaire est donc celui de la Bibliothèque Universitaire du Grand Palais. Il contient le texte de six pièces de théâtre de Jahnn. J’ai aussi lu Medea, très différente.

 Der gestohlene Gott m’a beaucoup intéressé ; c’est une pièce sans doute trop longue, assez problématique aussi par certains aspects, et pas seulement l’ambivalence autour de la structure incestueuse. Si j’avais des journées de 72 heures, je me lancerais sans doute dans cette traduction ; l’idée qui me trottait dans la tête avant même d’avoir récupéré l’exemplaire était de relancer mon compte Twitch et de faire des séances de lecture / exploration / traduction en direct, pour le centenaire.

Si je reprends les lives Twich, ce sera sans doute avec un autre projet.

 

mardi, 19 décembre 2023

19122023 — Hot Rats (ou “ratas calientes” ?)

 Ce matin j’écoute des albums de Frank Zappa. J’aime beaucoup la musique de Frank Zappa, mais comme souvent mes connaissances sont parcellaires, en pointillés. Par exemple, j’ai tendance à penser que mon beau-père, dont C* a hérité d’une belle collection de vinyles et de bandes dessinées, avait beaucoup de disques de Zappa. En effet, il en avait une douzaine. Or, en voulant vérifier quelque chose dans la discographie de Zappa, j’apprends qu’il a publié 62 albums de son vivant, sous son nom ou avec les Mothers of Invention. Certes, ce nombre couvre les albums live, mais tout de même cela remet en perspective le beaucoup ci-dessus…

Le premier album que j’aie possédé de Zappa, c’était son dernier album avec l’Ensemble Intercontemporain, The Yellow Shark, car j’avais regardé la version concert sur Arte avec ma mère juste après la mort de FZ, et elle me l’a offert quelque temps plus tard. C’est d’ailleurs elle aussi qui m’a offert, pour mes 24 ans, quelques mois après notre installation en Picardie, mon autre disque de FZ, le coffret Läther (posthume celui-ci, mais qui n’est pas tout à fait une anthologie, puisqu’il a été construit par FZ de son vivant, avec des ajouts, des transitions et des inédits). Je n’ai jamais acheté d’autre disques de FZ, car justement il y en avait un bon paquet à Hagetmau, chez mes beaux-parents.

Détails de l'édition espagnole de 1971 de "Hot Rats" (Frank Zappa, 1969)

 

J’en viens au quelque chose que je souhaitais vérifier, à savoir, en écoutant Hot Rats, le deuxième album de FZ sous son nom seul : en effet, avec la pochette sous les yeux, il n’y avait pas moyen de savoir qui jouait du sax ou de la clarinette. Wikipédia m’a vite appris qu’il s’agissait d’Ian Underwood, multiinstrumentiste qu’on entend sur tous les albums des Mothers of Invention.

 

Détails de l'édition espagnole de 1971 de "Hot Rats" (Frank Zappa, 1969)      La pochette est donc lacunaire. C’est alors que je me suis aperçu que les titres de plusieurs pièces étaient en espagnol. Vérification faite, une fois encore, ces titres (Debe ser un camello ou Hijo del Sr. Green Genes) ne sont répertoriés nulle part dans les éditions et rééditions de l’album. Le 33-tours que mon beau-père avait acheté à Bordeaux était donc l’édition espagnole, dans laquelle même plusieurs titres de chansons ou pièces avaient été traduits.

Détails de l'édition espagnole de 1971 de "Hot Rats" (Frank Zappa, 1969)    D’après l’étiquette figurant sur le disque même, il semblerait que cette édition date de 1971, deux ans après l’édition originale. J’avoue avoir du mal à imaginer des disquaires madrilènes vendre cet album sous Franco, mais je sais que la censure en Espagne sous la dictature était, elle-même, passablement en pointillés.

 

mercredi, 06 décembre 2023

06122023

Tandis que je surveillais, au deuxième étage du site Fromont, l’épreuve de fin de semestre d’une collègue qui a démissionné, j’observais deux couvreurs travaillant, par une brume blanche et une température ne dépassant pas 5°C, à couvrir d’ardoises, une à une, minutieusement, en les calant avec les pointes et en les redressant du talon d’un marteau fin, la toiture d’une maison située de l’autre côté de la rue. Et, après avoir échafaudé dans ma tête un système économique salarial reposant sur la rareté des compétences, je les ai de nouveau regardés en pleine action, lentement, dans des postures triturant le corps, et me suis aussi rappelé quel était le projet d’origine de l’autre blog. (J’en aurais pleuré.)

 

mardi, 05 décembre 2023

05122023

Ce matin, ce n’est pas tout : ces foutues copies récupérées en rab, il va bien falloir les corriger – d’autant qu’aujourd’hui mardi, mon jour habituel de traduction cette année, je surveille un troisième examen à la place de la collègue démissionnaire. La traduction prend du retard. Ça se rattrapera…

Hier soir j’ai repris le texte commencé jeudi soir et déjà je trouve ça creux et bête. C’est mon drame depuis si longtemps : commencer un texte ou un livre dans une véritable fièvre et comprendre assez vite que ça n’a aucun intérêt. Au moins je n’embarrasse pas les étals des librairies de mes in(s)anités. Mais j’éprouve une énorme frustration. Et j’ai beau avoir lu bien des textes à ce sujet, dont le très bon livre de David Meulemans, rien n’y fait : je dois me résoudre, je ne porte pas de livre en moi.

 

05:55 Publié dans 2023 | Lien permanent | Commentaires (0)

lundi, 04 décembre 2023

04122023

Ce matin, j’ai pris la voiture, et j’étais – comme chaque jour où je vais aux Tanneurs – un peu avant 7 heures dans mon bureau. Il fait froid. Il a fait froid ce week-end, et l’administration fait tourner le chauffage de manière à dépenser le moins possible : quand on voit les factures…

Après, dans les salles de cours, on compte sur les néons et sur la chaleur humaine.

Aujourd’hui, trois surveillances d’examen, dont deux à la place d’une collègue qui a démissionné la semaine dernière et dont je vais corriger trois paquets de copies. Je n’écrirai pas : business as usual. En effet, ce genre de situation n’est pas courante, heureusement.

 

Rien publié ici depuis le 13 novembre, et mon retour d’Arles. — Il faudrait que je reprenne les archives de ces derniers jours pour publier quelques billets rétrospectifs.

 

07:42 Publié dans 2023, WAW | Lien permanent | Commentaires (0)

dimanche, 03 décembre 2023

Luimneach

Un nouvel exemple de limerick visuel, en anglais et écrit par moi :

 

There was a bloke in Luimneach

Who in fact was a total pneach.

He could never liamh

Hurling before his friend Stiamh

Had scored a magnificent hat-tneach.

 

samedi, 02 décembre 2023

Au coin court

Moi — levé à 4 h, dois corriger des copies, préparer des corrigés, faire des bricoles administratives.

Also moi — m'informe sur Peter Kurzeck (dont le second tome du grand projet initialement prévu en douze volumes mais arrêté à 8 par la mort, vient d'être traduit par Cécile Wajsbrot) et commence à traduire son troisième, Ein Kirschkern im März :

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vendredi, 01 décembre 2023

01122023

Chose que très beaucoup le moral ça me sap
Qu'on voir Juju Fitcats sur mes actus WhatsAp.

jeudi, 30 novembre 2023

30112023

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Au bureau.

Bande-son : The Sight of the Wind (Wyatt en 33-tours).

lundi, 13 novembre 2023

13112023

C'était donc ma première participation aux Assises de la traduction littéraire, sans doute pas la dernière, car, ironie, j'y étais en ma qualité d'universitaire et de spécialiste des littératures d'Afrique de l'Est, pas comme traducteur, vu que je ne publie que des traductions d'essais
 
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Tout d'abord l'organisation. Remarquable. Très bien accueilli, tout le monde aux petits soins, et surtout grand désarroi de ne pas devoir payer pour travailler, et même d'être rémunéré. J'ai même été assez feignasse pour accepter le VTC ce matin (6 h 15 à l'hôtel, ça pique). Donc grand merci à ATLAS - Association pour la promotion de la traduction littéraire - CITL déjà, et les différentes divinités pour qui rien n'est impossible (Julie, Clara, Gabriel notamment).
 
Ensuite, des conversations riches, nombreuses, décousues, passionnantes, difficiles pour moi qui ai un mal fou à retenir 3 nouveaux noms en un jour...
 
Le niveau des conférences et des ateliers : du très très lourd. Pour notre table ronde avec Laurent Vannini, je ne reviendrai pas sur le fait qu'on nous a surnommés Tif et Tondu (mais l'after de samedi était très arrosé (info : les traducteurices ça picole sec)) mais on a eu de belles discussions, de bons retours : une traductrice hyper sympa m'a dit que c'était trop pour initiés et qu'elle n'avait rien compris, et on a parlé deux heures, mais sinon les autres avaient l'air de ne pas avoir détesté (et en tout cas d'avoir compris).
 
Et puis le grand plaisir de rencontrer enfin "en vrai" quelques personnes que je suis depuis longtemps, comme Nicolas Richard ou Guillaume Contré (à qui je n'ai pas pu poser une question sur Borges après la table ronde Tolkien d'hier)... Mea culpa, j'étais trop occupé à picoler avec les sinisant-es.
 
Last not least, samedi en début d'après-midi, un jeune homme vient me souhaiter un bon anniversaire, en me disant que je ne dois pas voir qui il est car il me suit sur Twitter et YouTube. On a beaucoup discuté et sympathisé. J'ai une mauvaise nouvelle pour vous, les ami-es : il me supplie de ne pas arrêter les vidéos "je range mon bureau". Il avait l'air assez fier de son coup, de venir me souhaiter un bon anniversaire alors que j'ignorais qui il était. Grâce à lui, c'est malin, j'ai envie de me plonger dans la BD chinoise, dont il est spécialiste, et comme il vient régulièrement à Tours pour les ateliers de lectures de planches de Laurent Gerbier, stay tuned.

09:43 Publié dans 2023 | Lien permanent | Commentaires (0)

mardi, 07 novembre 2023

07112023

Je me réveille depuis trois jours, trop tôt, et en passant en revue toutes les tâches en retard ; pénible. Peut-être aussi – mais j’en doute – que je n’ai pas besoin de plus de six heures de sommeil.

Hier soir, je me suis endormi après avoir lu le chapitre III de Retour au pays bien-aimé de Karel Schoeman, traduit de l’afrikaans par Pierre-Marie Finkelstein et que m’a offert M.R. (avec de succulents chocolats, pour nous remercier, C* et moi, d’une broutille), et en écoutant des chants du Rabindra Sangeet de Tagore interprétés par Rupankar Bagchi ; en effet, lors de ma fête d’anniversaire, samedi, C* m’a notamment offert des écouteurs sans fil. Il faut que je me répète que c’est C* qui me les a offerts car, dans la mesure où cet objet est associé, pour moi, à nos fils, j’ai le réflexe de penser qu’ils me viennent d’eux. Très bon cadeau, vu que je vais passer au moins quinze heures dans le train en fin de semaine, et il me semble qu’en dépit du choix plutôt calme la musique a retardé mon endormissement, me permettant de lire un peu plus longtemps.

 

Aujourd’hui, je vais travailler à la salle à manger en écoutant deux CD que m’a offerts ma mère ; c’est en raison du séjour de mes parents qu’on a fêté mes 49 ans avec une semaine d’avance (et aussi car je serai à Arles tout le week-end). Mes parents m’ont aussi offert deux romans de Damon Galgut (high time I read him), et ma sœur m’a fait envoyer par Shakespeare & Co et Colissimo trois romans très contemporains, dont un d’une jeune écrivaine anglophone apparemment haoussa, ce qui ne court pas les rues – très content.

Aujourd’hui : corrigé du concours blanc, correction des dernières copies, éventuellement tableau des MCC avec colonnes supplémentaires… je crains que la traduction ne prenne finalement du retard cette semaine.

 

06:14 Publié dans 2023 | Lien permanent | Commentaires (1)

dimanche, 05 novembre 2023

05112023

 

Je* m'aperçois depuis une semaine que j'y vois moins bien de loin, et aussi que mes yeux démarrent plus lentement le matin. Il va falloir reprendre un rendez-vous chez l'ophtalmologiste, mais sans être pressé ; moi qui ne portais plus de lunettes depuis cinq ou six ans (à vrai dire, je n'ai aucun repère plus précis quant à la date à laquelle ma vue s'est améliorée), c'est reparti pour un tour.

Maux de tête aussi, presque tous les jours.

 

Mes parents repartent ce matin. Bon séjour ; nous avons passé de bons moments. Jeudi soir nous sommes allés voir The Old Oak de Ken Loach. Il retombe un peu dans son travers de personnages trop parfaits, qui délivrent ponctuellement des sermons dont la teneur avait déjà été comprise, en peu de mots, en moins de mots, lors de scènes précédentes. Le film reste tout à fait réussi, bien joué, avec des scènes très fortes.

 

Hier matin j'ai pris le temps de chercher – mais il faudrait prendre plusieurs journées pour ranger et réorganiser entièrement le bureau-bibliothèque – et constate que j'ai vraiment égaré mes quelques livres de littérature mauricienne, que j'avais tous « rangés » ensemble à la suite de mon intervention liminaire lors de la conférence-débat de Mariam Sheik Fareed. Qu'est-ce que j'en ai foutu, morbleu. Voilà le problème : j’ai quatre piles différentes de « livres à lire », la pile des « livres à chroniquer » (en vidéo), et puis des livres non rangés épars (livres de cours du second semestre sur le bureau, livres qu’on m’a prêtés sur une petite étagère etc.). Mais là, le livre de Mariam Sheik Fareed est bien à sa place, à côté de ceux d’Ananda Devi… mais tous les autres se sont volatilisés.

 

 

* L’ébauche de ce billet a été écrite avec le téléphone, en attendant que l’ordinateur démarre : moyen astucieux de ne pas m’énerver en attendant de longues minutes que tout soit utilisable sur ce PC portable de l’université, qui a 4 ans et demi et qui sert beaucoup.

 

09:21 Publié dans 2023 | Lien permanent | Commentaires (2)

dimanche, 29 octobre 2023

29102023

4 h 20

(C’est malin, de se réveiller tôt la nuit du changement d’heure…)

 

Ce mois d’octobre, côté discipline d’écriture, ça aura été n’importe quoi. Je m’avise aussi, en retombant sur la dernière entrée, celle d’il y a 15 jours, que je n’ai traduit que deux chapitres depuis lors : c’est normal, au sens où j’ai été très accaparé par la préparation des emplois du temps du second semestre et la finalisation des maquettes de Licence pour l’année prochaine. Mais c’est idiot, au sens où cela me prendr(rait) dix ou quinze minutes d’écrire un billet quotidien, et où cela s’avère, à long terme, satisfaisant – et plus satisfaisant bien sûr que de trouver ces carnets tout troués, en quelque sorte.

 

Ce week-end, nous devions aller à Oléron, où nous ne sommes jamais allés, passer le week-end chez H* et J*, qui y ont une petite résidence secondaire depuis deux ou trois ans, mais l météo est si épouvantable que H* a préféré nous déconseiller de faire les sept heures de route aller-retour pour rester enfermés à écouter la tempête : partie remise, espérons.

Comme j’ai prévu de traduire les chapitres 9 à 11 d’ici la fin des vacances, il faut que je m’y mette aujourd’hui. Hier, j’ai glandouillé, et fini de lire Terminus Babel de Mustapha Benfodil (qui m’a moins plu qu’Alger, journal intense), The House of Rust de Khadija Abdalla Benjaber (très très bien – S* m’a dit qu’elle espérait pouvoir placer un projet de traduction de ce roman) ; il me reste deux chapitres des Indociles d’Adam Shafi Adam, excellemment traduit du swahili par Aurélie Journo, dont j’ai été le collègue quand elle préparait sa thèse, que j’ai recroisée à Toulouse l’an dernier et qui a donc étendu ses compétences au swahili (cela m’impressionne toujours). Hier soir, j’ai trouvé dans la boîte à lettres la première des deux parutions récentes/imminentes de chez Louise Bottu, avec/sans titre de Florence Saint-Roch et Dominique Quélen, que j’ai commencé à lire en me promenant, au point d’en improviser une lecture près du square Max-Ernst.

Il fait, ici comme ailleurs en France – mais moins violemment que sur la façade atlantique –, un temps d’automne : bourrasques, averses brusques et massives…

 

04:31 Publié dans 2023 | Lien permanent | Commentaires (0)

dimanche, 15 octobre 2023

15102023

Aujourd’hui, première fois qu’on branche le petit radiateur à bain d’huile dans la chambre d’O*, à l’étage ; après des semaines de chaleur anormale, les nuits sont (enfin) fraîches. Malgré les deux vagues averses d’hier, la sécheresse reste. Le chauffage central, lui, ne se « relance » pas ; cela risque de se produire pendant une heure le matin, à partir de la semaine prochaine.

 

Aujourd’hui comme hier, chose singulière, c’est C* qui s’est réveillée tôt, avant moi, me réveillant.

 

Aujourd’hui, j’ai donc passé cinq semaines sans écrire dans ce blog. Il suffirait d’aller piocher dans mes publications des réseaux sociaux pour tricher : ni le temps ni l’intérêt. La pile de livres pas encore chroniqués pour le vlog s’élève – le terme est adéquat : c’est une tour qui menace de s’effondrer, avec ses myriades de mots sur cet ordinateur – désormais à 29.

 

Aujourd’hui je vais peut-être attaquer, plutôt que les emplois du temps rectificatifs du 2e semestre, le chapitre 7 de Born in Blackness : à raison d’une (grosse) journée par semaine, j’ai traduit 85 pages depuis le 12 septembre, mais je suis à peine dans les temps.

 

Aujourd'hui, mon arrière-grand-mère (la mère de ma grand-mère maternelle) aurait eu 126 ans. Elle est morte quand j'en avais dix-neuf.

 

09:20 Publié dans 2023 | Lien permanent | Commentaires (0)