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mercredi, 06 février 2008

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12cd4ee7f6530fbe29f2e7618207b2a1.jpgComme Renaud Camus a publié hier, sur son site de photographies, une vue de la tombe de Cecil Day Lewis, plus connu sous son nom de plume (et de Poète Lauréat), C.S. Lewis, en précisant que "Cecil Day Lewis avait demandé à être enterré à proximité de Thomas Hardy, qu'il admirait frénétiquement", je me suis replongé, non sans l'avoir cherché dans les rayonnages de la bibliothèque-placard où se trouvent la plupart de mes ouvrages de langue anglaise, dans le volume bleu lagon des Poems que ma mère m'avait ramené il y a une dizaine d'années d'un de ses séjours à Bristol. Outre que la poésie de C.S. Lewis ne m'avait laissé à peu près aucun souvenir, j'étais tout de même rassuré de voir que jamais C.S. Lewis ne semble mentionner le nom de Thomas Hardy, ni faire la moindre allusion au grand écrivain des Wessex Tales. De façon assez caractéristique, la lecture de ce volume m'a donné, rétrospectivement et donc trop tard, un nombre non négligeable d'arguments pour contrer l'idée, formulée par Eric en marge du colloque Poets & Theory que nous organisions ensemble il y a une dizaine de jours, selon laquelle les poètes américains contemporains se posaient nettement plus de questions théoriques que leurs collègues britanniques. Toutefois, cette lecture ne remet pas en cause le constat relatif au conservatisme à peine imaginable des poètes "reconnus" de l'aire insulaire.

Mais enfin, pour ce qui est de Thomas Hardy, pas l'ombre d'une allusion, m'a-t-il semblé. C.S. Lewis a donc dû exprimer son admiration dans d'autres textes, en prose, ou lors de discours, ou encore, si cela se trouve, dans des poèmes qui ne sont pas rassemblés dans ce volume bleu lagon. Pourtant, les références ne manquent pas : Milton, Donne, Marvell, Hugo, Roy Campbell et tant d'autres, sans qu'il s'agisse toujours d'admirations unanimes, d'ailleurs.

Ce matin, je lisais un peu au hasard des poèmes de Wallace Stevens. Le simple titre Asides on the Oboe ("Apartés pour hautbois") a suffi à me ramener à Oxford, où je découvris vraiment la poésie de Wallace Stevens, en 1995-96, mais où je lus beaucoup aussi l'épais volume des Poèmes complets de Norge, emprunté (me semble-t-il me souvenir (mais c'est curieux car je pillais surtout les rayonnages de St Anne's et de Lady Margaret Hall)) à la bibliothèque de la Maison française. Je me revois, dans la semi-obscurité douce et feutrée, penché au-dessus de l'une des somptueuses tables de bois verni de la bibliothèque de LMH (qui restait ouverte sept jours sur sept et toute la nuit), lire des poètes de la Renaissance française (Mellin de Saint-Gelais) et de la Renaissance anglaise (Spenser), avant d'aller me promener longuement dans les University Parks, où, dès le printemps, les matchs de cricket commencèrent de refleurir, ou d'errer dans les pubs, à découvrir les centaines de bitter différentes, longues errances aussi de cloître en cloître, de college en college, de quad en quad.

Ce que Soyinka écrit, dans You Must Set Forth at Dawn, de sa première année passée en Angleterre (et de la fadeur de la nourriture anglaise), et que j'ai lu hier soir avant de monter me coucher, ne doit pas être étranger à cet afflux d'images du passé, sans oublier combien la lecture récente de Petite nuit a remis en branle l'analogie entre le souvenir du livre lu et le chronotope de la lecture, le moment même où l'on se revoit face à tel livre, à telle heure précise, dans telle lumière.

Enfin, pour ceux qui ne comprennent pas que cultiver son jardin n'est pas nécessairement synonyme de "mégalomanie", je laisse justement le mot de la fin à C.S. Lewis :

All this is flashy rhetoric about loving you.

I never had a selfless thought since I was born.

lundi, 04 février 2008

Perutz, Poitiers, saules, lentes dédicaces

Comme je voulais aborder l'écriture du (long, peut-être) texte que je veux consacrer à Petite nuit de Marianne Alphant, j'ai ouvert le document Word où j'écris certains textes avant de les publier dans l'un ou l'autre de mes carnétoiles, et j'y retrouve ces bribes, datées du 19 janvier dernier et jamais publiées / franchement oubliées :

19 janvier, déjà, minuit quinze, je ne m’endors pas du tout.

 

        Le seizième chapitre de Turlupin est parfaitement hilarant. Leo Perutz, dont le goût du roman historique – même déconstruit – me semblait un peu fade, sur les premiers chapitres, est maître dans l’art de faire dérailler progressivement, mais non sans une violence jubilatoire, un récit de prime abord anodin. (Il y a aussi la façon dont, subrepticement, « la danse de Toulouse », p. 104, me rappelle « la jambe de Poitiers », octobre 2003.)

        Autour du titre. D’emblée : Je crache des gauloiseries. Avant, il y eut turlupiner, dont je crus lire que l’expression française était « ça me turlupiline » (j’avais sept ans, mettons, ou huit). Turlupin était, nous apprennent les dictionnaires, un auteur de comédies vite populaire pour l’inanité de ses calembours en dessous de la ceinture (ou, en adaptant à la mode du dix-septième siècle, ses mots proches du haut-de-chausses). Le nom de Tirelupin, dans Gargantua, a fait couler beaucoup d’encre : les auteurs du Robert culturel y consacrent d’ailleurs un encart instructif.

        (Accessoirement, le lecteur vagabond finit par apprendre qu’en français du Québec et d’Acadie, la turlutte n’est pas ce qu’on pense. Cela dit, il n’est pas indifférent que le substantif turlupin soit encadré par turgescence et turlute.) Ça, c’était autour du titre. De pleines bouchées de mots crus...


 

Julio Gonzalez, Les saules (1925).


Pour tout compliquer, j'illustre ce billet au moyen d'une photographie de l'exposition "Julio Gonzalez en famille" [Julio Gonzalez. Les saules, 1925. (Ils n'ont pas l'air de saules, mais bon... la pâte prend l'ascendant...)].

dimanche, 20 janvier 2008

Shown meadow

J'écoute la Sonate n° 1 pour violon et piano de Brahms, dans la version de Jaime Laredo et Jean-Bernard Pommier (qui me semble désormais un peu "agressive"), et ce pour avoir lu avant-hier soir le premier chapitre du Maître du Jugement dernier de Leo Perutz. Ma première envie d'écrire de la journée provient du souvenir, évoqué hier soir en regardant le deuxième épisode des Oubliées (série "française de qualité" manifestement surévaluée), de l'ancienne abbaye de Prémontré, dans l'Aisne, que nous vîmes, sans pouvoir y entrer car il s'agit depuis longtemps d'un asile psychiatrique, le jour des morts de 1997, il y a donc un peu plus de dix ans.

Dans l'album La promenade, il y a deux photographies, dont une représente C. en manteau rouge devant l'entrée, et l'autre capture les deux-tiers de la façade de cette superbe bâtisse du dix-huitième siècle. Deux pages plus loin, comme en écho, prises lors d'une virée du 11 novembre, on peut voir deux images du château de Raray, de ses "fameuses parois aux formes chantournées, et surmontées d'une abondante statuaire à thèmes cynégétiques, qui flanquent de part et d'autre la cour d'honneur" (Renaud Camus. Corée l'absente. Journal 2004, p. 144)

Souvent je repense à la Picardie.

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En cherchant des photographies de Raray sur FlickR (car je renonce à scanner mes anciennes images argentiques), je m'aperçois que Renaud Camus, qui s'y trouvait le 18 mars 2004, ce dont atteste Corée l'absente, y est retourné le 8 juin de l'année suivante. En cliquant sur la photographie ci-contre, vous accèderez à l'original en grand format, ainsi qu'à l'ensemble des photographies de Renaud Camus.

Curieusement, Renaud Camus n'a pas mis en évidence, sur son site de photographies, les "fameuses parois", qui sont, de fait, le souvenir le plus vif que j'aie du château, dont on ne peut voir que les extérieurs (c'est un hôtel). Ce jour du 11 novembre 1997, nous avions passé plusieurs heures à Senlis, avec la grand-mère maternelle de C.

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Souvent, je repense à la Picardie. Je me suis beaucoup éloigné, maintenant, de l'ancienne abbaye de Prémontré, qui était pourtant, sinon le sujet, du moins le point de départ, le punctum de ce billet à vocation mémorielle et photographique. Le 2 novembre 1997, nous avions fait une promenade dans la forêt de Saint-Gobain, après une matinée glaciale dans la belle cité médiévale de Laon.