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dimanche, 16 octobre 2005

Langue, déguisement et pensée (suite)

Au cours de l’écriture du chapitre “Chansons”, Leiris relit le paragraphe qu’il vient d’écrire et enchaîne ainsi :

« Ce passage […] est non exempt de ces trucs grâce auxquels les incertitudes de la pensée sont masquées par le clinquant des mots et ce qui tend à n’être qu’évidence verbale substitué à l’évidence des idées » (Biffures, 1948, Gallimard, « L’imaginaire », p. 19, italiques ajoutés)

Tout ou partie

Dimanche, onze heures vingt.

Il y a, dans la première page de Biffures, de Michel Leiris (premier tome de La Règle du jeu, dont j’avais jusqu’à ce jour retardé la lecture,  et qui est, de fait, un véritable bonheur (il faut se garder de belles choses pour plus tard)), l’expression « toute ou partie de la famille ». Il me semble que c’est « tout ou partie de la famille » qu’il faut écrire, au masculin, soit que l’emploi ici soit adverbial et donc invariable, soit qu’il s’agisse d’une réduction d’un groupe nominal dont la forme complète serait « le tout ou une partie de ». Je dois avouer que j’écris ceci sans avoir fait la moindre vérification, mais, bon, c’est aussi histoire de dire que ce toute me gêne.
Toutefois, pour être aussi complet que possible, je dirai aussi que, lisant le premier (fort bref et d’une beauté époustouflante) chapitre, je pensais :
       aux rapports entre ce texte et L’Âge d’homme
       à ma lecture, il y a un an et demi, de Kotik Létaïev de Biély
       à mes longs et oiseux développements du mois dernier à propos de la phrase « Je rêvais corne de taureau »
       au rapport entre le suspens offert par la première phrase, toute en méandres et parenthèses, et la phrase faulknérienne, telle que, notamment, nous avons pu l’explorer mardi dernier dans un cours d’analyse de textes littéraires
       au sujet de composition philosophique auquel j’ai consacré une note plus tôt ce matin, pendant que mon fils lisait seul, assis sur le canapé, un album de Où est Charlie? (Where’s Waldo? en anglais)
       à tant d’autres choses encore, dont ce texte si bref appelle la pesée (le clavier m’échappant, j’écris pesée au lieu de pensée et je laisse cette coquille, ce lapsus significatif)
       à l’écriture même de cette note, dans ce mouvement si habituel qui consiste, lisant une œuvre inspirante, à vouloir l’abandonner, à regret mais irrépressiblement.

L’Ogrorrhée

Je n’ai de vie qu’en mots
A maudire en mollusques
En motorisations

Je n’ai de vie qu’en mots
Mollement moquettés
En moqueries en moi

Je n’ai de vie qu’en moi
Et par les autres mots
Et par les mêmes morts

Le langage est-il le déguisement de la pensée?

N.B.: Une précédente version de cette note a été publiée plus tôt dans la journée, avec une horrible coquille dans le titre (elle au lieu de il (j'avais d'abord écrit langue au lieu de langage et je n'ai pas harmonisé...)). Que Tinou, qui a attiré mon attention sur cette erreur imbécile, mais dont le commentaire a, du coup, disparu, soit vivement remerciée de sa remarque.

********

Ce très beau sujet de philosophie, donné en composition par un professeur (une professeure ? (voilà justement une alternative qui masque bel et bien une idéologie)) de Sainte-Ursule, n’est pas seulement une variation sur le dualisme langage/pensée. C’est aussi une réflexion sur la damnation, sur la chute de l’âme conçue comme immortelle dans un corps fugace et voué à disparaître. Il faudrait sans doute voir du côté de Platon et Descartes, et certainement chez certains théologiens, car, d’autre part, « le Verbe s’est fait chair ».

Cette déchéance de l’expression par rapport à la conception intellectuelle, de la réalité corporelle par rapport à l’âme, est assez bien résumée dans une belle formule du Journal de Julien Green : « La pensée vole et les mots vont à pied. Voilà tout le drame de l’écrivain. » (4 mai 1943).

Ce n’est qu’un aspect de la question. Il y a aussi le déguisement, bien sûr, troisième terme à ne pas négliger, charnière centrale de l’énoncé et lien entre les deux concepts. Cette métaphore du déguisement appelle une personnification implicite des deux instances (langue et pensée), une sorte d’allégorie dans le style des formules rabâchées comme la vérité toute nue. Dans déguisement, il y a bien sûr la guise, c’est-à-dire « ce qui tient lieu de » (en anglais, in the guise of signifie « sous les traits de »). Le Robert historique nous apprend que guise vient du germanique wisa qu signifiait « manière, façon ». Le déguisement est, à cette aune, un maniérisme, une manière, un style : répondre oui à la question posée dans le sujet revient à formuler implicitement une supériorité de la pensée sur le langage, ou, à tout le moins, que la pensée précède toujours la mise en mots, que le langage est une pure expression, une mise en forme du sens (une traduction?).

Bien entendu, cela va à l’encontre de la plupart des philosophies du langage, qui postulent au contraire que c’est la mise en forme par le langage qui conditionne le sens. Il suffirait pour cela de reprendre certains exemples de Benveniste (je pense au célèbre exemple des couleurs de l’arc-en-ciel), mais sinon, on peut s’attaquer à Wittgenstein ou à L’écriture et la différence de Derrida ! (En terminale, j’en doute, quand même…)

Je me permets de divaguer sans structure (Marione, you know that you’re not allowed that, don’t you?), et cela me fait penser, par libre association, au très beau poème d’Aragon « Tous ceux qui parlent des merveilles… », joliment mis en musique par Ferrat sous le titre (justement) des Oiseaux déguisés. Ce poème, me semble-t-il, reprend le mythe de l’artiste aux dons supra-humains, dont l’essence est éternelle, et qui a l’allure d’un homme ordinaire : “ce sont des oiseaux déguisés”.

Enfin, autre piste possible, le déguisement est une dissimulation : si la pensée est condamnée à échouer, à déchoir dans le langage, si sa pureté abstraite se ternit au contact de l’accoutrement des mots, il y a le risque, selon l’expression familière, que « les mots trahissent la pensée ». En déguisant, le langage dérobe, pervertit le sens, trahit. Ce serait ma suggestion pour une troisième partie : justement, cette hypothèse rejoint celle des philosophies du langage, car c’est toujours la langue, évidemment, qui a le dernier mot, et la pensée ne peut se concevoir hors des mots. Déguisement, peut-être, mais déguisement inévitable… Toutes les tentatives littéraires qui ont consisté à remonter à la pensée, à la manière dont les pensées se forment et s’élaborent dans le cerveau, in petto, dans le for intérieur, se sont justement traduites en mots ; je pense au stream of consciousness de Virginia Woolf, qui passe par le monologue intérieur – ou encore aux écrits de Nathalie Sarraute (le si beau et si drôle Ouvrez!, par exemple), ou le torrent de mots de Lobo Antunes.

Mais voilà : la philosophie n’est pas la littérature. Et les exemples que je viens de donner, outre qu’ils démontrent le peu de souvenirs que j’ai de mes lectures philosophiques, posent aussi la question du style des philosophes. Si la pensée se travestit dans les mots, comment accéder aux Idées par le langage? Comment un philosophe peut-il écrire sans s’abaisser? Il me semble que l’on en revient à Platon, et, à l’oppose du spectre, à Nietzsche, pour qui le formalisme de l’expression philologique, puis poétique, est au cœur de la question du savoir.

Fous de librairie, V : le Robert culturel

Vendredi, nous avons encore laissé la bagatelle de 280 euros à la librairie, dont, toutefois, le Robert culturel en quatre volumes. C. et moi sommes sceptiques face au battage médiatique qui est fait autour de cet « événement éditorial », comme on dit quand on n’aime pas la langue française, et surtout face à la mise en avant de l’auteur principal, le certes très passionnant mais très médiatique Alain Rey. Le libraire, lui, n’est pas sceptique ; il est à la fois admiratif de et atterré par ce marketing qui vise, selon ses propres termes, « les gens qui n’auraient jamais l’idée d’acheter ce livre et ne l’ouvriront jamais ».

Toutefois, c’est un ouvrage remarquable, qui n’a pas vraiment d’équivalent. Ni les dictionnaires de la langue française en cinq ou six volumes que je connais (Larousse et Robert, justement), ni le Robert historique ne proposent les mêmes synthèses. Par ailleurs, le dictionnaire renouvelle considérablement l’appareil des citations. La notice sur l’humour (dont j’ai fait mes délices, UE libre oblige) est bien meilleure que celle de l’Universalis.

Voulant vérifier l’entrée SCIE (car je n’ai jamais rencontré ce terme au sens de rengaine ou, mieux, de cliché linguistique (ce qui est un signe de faible culture de ma part et non d’une quelconque folle idiosyncrasie de la part de l’écrivain en question), que dans l’œuvre de Renaud Camus), j’ai trouvé cette superbe citation extraite du Voyage en Italie de Théophile Gautier :

Nous continuions à être insupportables avec notre refrain :

A Saint-Blaise, à la Zuecca,

qui commençait à devenir ce qu’on appelle une scie en argot d’atelier ; scie à dents aiguës, quoique sans malice de notre part.

Il s’agit de la première occurrence écrite attestée de ce mot dans ce sens. Aussi doit-on trouver cette citation dans d’autres dictionnaires, et l’exemple n’est-il peut-être pas très bien choisi. Mais ce qui a stimulé ma rêverie littéraire, c’est que le refrain en question, tirée d’une chanson tardive de Musset, doit être le seul vers de ce poète que cite le Dictionnaire abrégé du surréalisme d’Eluard et Breton, et qui fut le premier ouvrage dans lequel je le découvris.

Toute la première partie de la séance du séminaire de M2 sur Allah n’est pas obligé a été, vendredi dernier, consacrée à ce questionnement sur le rôle du dictionnaire dans la création littéraire. Il faudra que je fasse sur le point sur tout ce qui a été dit (car c’était, de ma part, pure improvisation) dans mon carnet Cours 2005… mais cela pour dire que le rôle que joue « le Dictionnaire » dans mon rapport à la vie et à la littérature est un sujet de préoccupation de plus en plus tarabustant.

Bon, j’ai dérivé, ripé, dérapé… et je parlerai plus tard du Robert culturel. Je voulais seulement donner quelques exemples des nouveautés flamboyantes qu’apporte ce dictionnaire, mais, comme toujours, je ne pourrai clore, faute de temps ou d’envie, cette note que sur une remarque plus négative, car figurez-vous qu’ils n’ont pas trouvé moyen de dégotter la moindre référence littéraire pour TONSURE ou TONSURER. Moi qui n’aurai bientôt plus un poil sur le caillou, j’y vois une discrimination scandaleuse!

Choix d’écriture

Lisant Harry Laus, j’ai songé que, face au manque de temps dont je dispose en ce moment pour ce carnétoile, je pourrais publier certaines entrées brèves, certains extraits, au jour le jour, histoire de donner de belles phrases en pâture à mon aimable lectorat. Mais j’hésite, n’ayant pas l’âme du compilateur. Il existe de nombreux blogs littéraires qui sont, plus ou moins, de semblables compilations, ce qui n’est pas sans intérêt, et il est certain que j’ai grand plaisir à lire des pages d’auteurs connus ou moins connus, plus de plaisir que ne doivent en avoir la plupart des visiteurs occasionnels de ce carnétoile à lire ma pauvre prose. Mais voilà, chacun son affaire, non ?

 

Je copierai pourtant trois passages très intéressants du Journal absurde, mais je risque de ne pas résister à la tentation de les enter de miennes ponctuations.

Malsomnie

Dimanche, huit heures et demie.

 

Il faudrait inventer un autre mot qu’insomnie pour une nuit comme celle qui vient d’avoir lieu. Ayant du mal à m’endormir, et me souvenant surtout que je n’avais toujours pas mis en ligne, dans mon carnet Cours 2005, de note concernant l’hétéroglossie (ou le bivocalisme, ou le polylinguisme, depending on the translations from Russian into French), je me suis relevé, ai passé une demi-heure à faire le point, à publier la note en question. Il était minuit passé, et, trop nerveux pour me recoucher immédiatement sans lire de nouveau, je me suis installé dans la buanderie attenante à la chambre de mon fils, ai passé presque une heure à lire le Journal absurde de Harry Laus, puis m’y suis allongé. J’ai mis du temps à m’endormir, et, à trois heures et quart, ai été réveillé par la lumière sur le palier, ma compagne qui se levait, réveillée elle-même par le plic ploc du robinet mal fermé à la cuisine, qui s’égouttait dans une tasse placée au-dessous. Après avoir réglé son compte au bruyant fuyard, je me suis repieuté, cette fois-ci dans le lit conjugal, où j’ai mis un temps infini à me rendormir, pour être éveillé par mon fils, qu, à sept heures moins le quart, avait le nez bouché et n’arrivait pas à respirer. Lui s’est rendormi, mais pas moi, évidemment.

(Pour ne pas accabler ce pauvre enfant, et à titre statistique, c’est la deuxième fois qu’il nous réveille depuis notre retour à Tours, il y a bientôt deux mois, et encore ne peut-on pas parler d’un réveil en pleine nuit… (Quand je pense qu’au même âge, je me réveillais toutes les nuits, parfois deux fois par nuit, taraudé par d’atroces cauchemars, oui, toutes les nuits sans exception dixit ma mère, de trois à six ans, sans faute, dixit ma mère, jusqu’à notre emménagement à Cagnotte, à la campagne (jusque-là, nous vivions dans une petite maison au bord de la route de Bordeaux, à Saint-Paul lès Dax), aussi ne puis-je me plaindre des fort rares éveils nocturnes de mon fils, tout de même…)) (La phrase de la seconde parenthèse, celle qui commence par « Quand je pense… », n’a pas de verbe principal, ou plutôt il y a une rupture de construction (asyndète) avec la seconde partie (apodose), qui, commençant par « aussi ne puis-je », ne correspond en rien à la première (protase).)

Ayant réussi à écrire un long paragraphe exclusivement composé de parenthèses, je poursuis mon sillon, et mon propos initial, qui était de dire qu’il faudrait parler, en anglais, d’illsomnia plutôt que d’insomnia, ou de restlessness en un sens nouveau, plutôt que de sleeplessness. Et, en français, de malsomnie, de “mauvais sommeil”…?

Ce qui me fait penser que, donnant, jeudi dernier, à André Markowicz la liasse des textes que j’ai soumis à la sagacité de mes étudiants du cours d’analyse de textes littéraires (il doit intervenir lors de la dernière séance du semestre et proposera un travail autour dela traduction d’un de ces textes), il a « tiqué » (favorablement, me semble-t-il) en voyant le très beau poème de Tatamkhulu Afrika, Insomnia, que je dois étudier en semaine 5, soit, précisément, le mardi 25 octobre. Il se trouve que j’avais choisi ce texte longtemps avant la note de Livy relative à l’insomnie, et longtemps aussi avant la mince torrentielle prose publiée dans ce carnétoile et intitulée L’insomnie étend. André Markowicz a « tiqué » car il ne connaît pas Tatamkhulu Afrika (who does, indeed?), et j’ai le secret espoir, s’il aime ce poème, qu’il le choisisse, car il est extrêmement difficile et j’aimerais confronter mes vues aux siennes, en l’espèce.

N'oubliez pas le marché gourmand de Chaveignes...

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Dans la série des insistances dérisoires et neurovégétatives du Cingalombre masqué, on fait difficilement pire, mais enfin...

samedi, 15 octobre 2005

Il y a 132 ans, à Bédarieux

"Le 15 octobre 1873, le Conseil ayant eu connaissance d’un projet de remaniement des garnisons, demanda l’envoi d’un corps à Bédarieux et vota en principe, dans ce but, une somme annuelle de 1 500 francs."

 

Source: C. Trallero, Histoire de Bedarieux, ch. XV.

 

P.S: Quatre jours sans "célébrations à la gomme", je sens que cela vous manquait. Peu avant minuit, voilà l'oubli partiellement comblé.

P.P.S: Depuis hier, outre le travail, je suis absorbé dans le Dictionnaire culturel en langue française.

Soutine à Champigny

Vous pouvez quitter ce carnet pour admirer un tableau peint par Soutine à Champigny-sur-Veude. (Il faut cliquer sur l'image en haut à gauche pour en avoir une vue agrandie.)

21:00 Publié dans BoozArtz | Lien permanent | Commentaires (2)

Lutin de Claude Pasquer, au château du Rivau

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C'est l'une des "sculptures" les plus réussies ou les plus astucieuses du parc du Rivau. J'ai écrit il y a trois jours une note sur la visite du château elle-même.

Boulangerie de Champigny

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De passage à Champigny, dimanche dernier, j'ai appris que Chaïm Soutine y avait trouvé refuge et peint plusieurs toiles, et aussi que ce peintre que j'aime beaucoup était d'origine lituanienne, ce que savaient certainement Marione et Simon, les auteurs du blog Oreilles de cochon grillées, grands ambassadeurs des relations entre la Touraine et la Lituanie.

(P.S.: Vérification faite, il semblerait que Soutine soit d'origine biélorusse mais ait passé son enfance en Lituanie avant de s'exiler en France.)

Concert de Mathieu Boogaerts (La Riche, 14 octobre 2005)

Je ne reviendrai pas en détail, faute de temps, sur le très joli concert donné par Mathieu Boogaerts et ses musiciens hier soir à la Pléiade de La Riche. Mais il est à noter que c’est presque la première fois que je trouve qu’un concert constitue une amélioration, ou – à tout le moins – une variation enrichissante à partir des albums. Ce qui se produit souvent pour le jazz ou la musique dite « classique », à savoir que l’interprétation est à chaque fois neuve, stimulante, inouïe, est bien rare dans le cas de la chanson, où le disque représente généralement une forme de summum, l’orchestration étant au plus juste, la voix au plus affiné.
Hier soir, Boogaerts a chanté environ vingt-cinq de ses chansons (son répertoire doit en compter une cinquantaine), dont neuf, bien entendu, extraites de son dernier album, Michel. Le pianiste était un remplaçant qui avait su la veille à onze heures du soir qu’il était appelé à accompagner ce chanteur dont, peut-être, il ne connaissait même pas l’existence. Rien d’évident, donc, et on sent que Boogaerts (chant, guitare, et, sur une séquence de cinq titres, piano) s’est surtout appuyé sur la complicité de longue date qui le lie à son batteur, Fabrice Moreau, et à son bassiste (électrique), Jean-René Zapha. Le choix d’une orchestration principalement électrique (alors que Boogaerts joue surtout de la guitare acoustique dans les albums) a accentué les côtés les plus reggae de son écriture, mais plusieurs morceaux interprétés en solo ont conservé toute la pureté farouche des mélodies (ainsi d’un superbe Las Vegas offert en bis).
Un rien cabotin, et naturellement grimacier (mais sans que cela paraisse excessif ni outré), il a aussi fait ressortir le caractère comique des chansons, parfois au détriment de leur grand pouvoir suggestif et des beautés émouvantes de l’écriture (Bon et Bien). Les moments forts restent pour moi, en clôture, un Ondulé très lent, Quelque chose dans une totale obscurité (qui m’a définitivement conquis, alors que c’est l’une des chansons que j’aimais le moins sur le dernier album), Siliguri doucement provocateur et déjanté, Néhémie d’Akkadé, Lorsque Flore aérien au piano et L’Espace, décidément un des plus beaux textes de M.B.
Les deux interprétations les moins réussies, de mon point de vue ou à mon oreille, furent Keyornew, voix écrasée sous les cordes, et L’impact de nos ex, dont les sens et sons si subtils s’évanouirent partiellement.
Au bilan, Boogaerts a revisité tout son répertoire, dans des orchestrations très novatrices, loin  des tintinnabulations (pourtant indissociables de son style) ou du minimalisme retrouvé du dernier album. Du deuxième disque, il n’a interprété que Comment tu t’appelles, avec un solo de batterie très défrisant au centre ; cette quasi-absence est assez surprenante, car il y a plusieurs chansons très fortes dans cet album-là aussi : je pense à La bombe, Vite, Si si c’est ça, et J’en ai marre d’être bleu. Voilà, du côté des regrets, avec Bye, les titres que j’aurais aimé entendre : mais, évidemment, il était prévisible d’avoir quelques frustrations au bout de deux heures de concert. J’en avais eu plus encore à la sortie du concert de Dick Annegarn au Cirque d’Hiver en 2000…!

Finalement, l’impression la plus durable est celle d’un chanteur et musicien aussi touchant et juste sur scène qu’en disque, enthousiasmant et mélancolique, et l’une des voix (littéralement et dans tous les sens) les plus audacieuses de ces dix dernières années. Je ne me rappelle jamais sans émotion ma découverte du premier disque, au printemps 1996, à Talence, sous un soleil printanier admirable, puis comment j’écoutais ce disque inlassablement à Oxford (où je n’avais pas besoin, forcément, de langue anglaise, puisque je baignais dans l’anglais en permanence, et ce d’autant moins d’ailleurs que la langue de Boogaerts n’est pas non plus, absolument, le français) ; les albums suivants m’ont toujours surpris, car, après Super, le pavé dans la mare de 1996, je pensais que M.B. ne pouvait que décliner. Non, il changea, mua, s’envola sur d’autres ailes, sans jamais changer le fond de ses recherches vocales et musicales. Le concert d’hier soir a confirmé notre admiration pour cet artiste.

vendredi, 14 octobre 2005

Nobel, suite

Que tout soit bien clair: je suis très heureux de voir le Nobel attribué à Pinter, écrivain et dramaturge que j'aime beaucoup. Je posais seulement une question sur l'hégémonie grandissante de la langue anglaise, mais aussi sur la pertinence relative de certains choix: Saramago, franchement, n'arrive pas à la hauteur de la cheville d'autres écrivains portugais ou brésiliens.

09:53 Publié dans Ex abrupto | Lien permanent | Commentaires (5)

jeudi, 13 octobre 2005

Nobel en glaise?

Le Prix Nobel 2005 de Littérature est Harold Pinter. Je connais bien l'oeuvre de ce dramaturge, que j'admire et ai même étudié (!), mais, malgré tout, j'éprouve une certaine frustration. Comment se fait-il que plus de la moitié des Prix Nobel aillent, depuis une dizaine d'années, à des auteurs de langue anglaise? Il y a tant d'auteurs contemporains de langue portugaise, ou russe, ou italienne, ou espagnole, ou arabe, ou française, ou hindi, qui valent largement le bon Harold... Alors, quel sens donner à ce phénomène?

18:00 Publié dans Ex abrupto | Lien permanent | Commentaires (6)

Château de Cinq-Mars la Pile

Samedi dernier, nous avons eu l’excellente intuition d’aller visiter le château de Cinq-Mars la Pile, tout près de Tours, sur la rive droite de la Loire. Excellente intuition, car il sera bientôt fermé aux visiteurs, comme beaucoup de « petits » châteaux qui n’ont intérêt à ouvrir qu’entre mai et octobre, mais surtout en raison du temps splendide et presque estival : le château, en effet, se réduit à deux tours étêtées ou “découronnées” (sur ordre de Richelieu, qui avait fait exécuter Henri Ruzé d’Effiat, Marquis de Cinq-Mars, pour haute trahison), mais il y a une très agréable promenade autour des tours, dans les douves herbeuses, puis au-dessus de la terrasse de la Juiverie, et enfin par le bois d’ifs. Nous y avons été accompagnés par le maître des lieux, un chat fort aimable et joueur.

Nous avions été, de prime abord, accueillis par la propriétaire, qui nous a appris que la majorité des visiteurs n’étaient pas de la région, soit que les Tourangeaux ignorassent l’existence même de ce château, soit qu’ils préférassent partir en promenade plus loin et se garder, en quelque sorte, cette excursion voisine pour de plus lointaines journées : c’est tout près, on aura toujours l’occasion de le visiter plus tard… Curieuse mentalité, mais si elle le dit, comment ne pas la croire ?

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Du haut de la première tour, on peut observer le panorama. La propriétaire nous avait promis que nous pourrions admirer Villandry, en raison du temps dégagé, mais tout ce que nous avons vu, c’est cette affreuse et immense usine que l’on voit depuis la route qui relie Tours à Saumur. Cette terrasse est toutefois un lieu mémorable et singulier, en raison aussi des nombreux graffiti gravés, parfois fort anciens, et creusés à l’aide d’outils très perfectionnés (burin de marbrier, certainement). Il y a, notamment, une gravure représentant une silhouette assise.

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Dans la salle du premier étage sont exposés trois tableaux d’un certain Nicolas Untersteller, notamment une Descente de croix, apparemment des années 1950, très influencée par l’expressionnisme allemand et le nouveau réalisme français d’après-guerre (Hélion, par exemple), mais sur le mode mineur. Comme la propriétaire nous a introduits dans son salon (la demeure occupée par les actuels propriétaires correspond aux anciens communs) et que nous y vîmes chevalet, tableaux, matériel de peinture, nous ne savons si l’artiste est son mari, son père, son beau-père, etc.

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Il y a, dans les douves, plusieurs figuiers superbes, aux figues toutefois complètement vertes, ce qui est étonnant.

Après cette visite, nous avons admiré la porte qui ouvre sur la rue de la Juiverie, acheté rillettes et rillons dans la charcuterie locale et pris un verre dans le bistrot complètement désert, et décoré d’affiches dont le thème commun était « le corps féminin fortement dénudé », exposition aussi d’un autre genre.

Propos de garçonnet, 14

Non, ce vêtement, je vais le garder encore longtemps. Je vais pouvoir le mettre jusqu’au Moyen-Âge.

mercredi, 12 octobre 2005

Comment je me suis senti revivre

Hier, à quatre heures et demie, après une journée déjà fatigante, six heures de cours, un aller-retour Tanneurs-Fromont avec un cartable fort lourd, sans compter plusieurs mauvaises nuits avant, il me restait une heure et demie de cours à donner, et, installé à la terrasse du Vieux Mûrier, place Plumereau, avec deux collègues, dont Irène, je me suis senti revivre, à peine la douce blondeur du demi eut franchi mes lèvres. Ma voisine m’a fait remarquer que la bière risquait de m’endormir, alors que ce verre m’a fait le plus grand bien, m’a désaltéré, relaxé, délié la langue, j’ai ensuite été d’une grande lucidité pendant ce difficile cours d’analyse de textes littéraires, tous sons et accents toniques bien à leur place, attentif ô combien aux suggestions des étudiants, j’ai rarement été aussi content du déroulement d’un cours. De retour chez moi, le soir, j’ai eu envie d’une autre bière, je me suis descendu une 1664, qui m’a également rafraîchi le gosier, aéré le cerveau. J’aurais pu repartir à la fac faire cours de neuf heures du soir à minuit !

J’ai déjà fait remarquer à plusieurs collègues qu’un ou deux verres de vin au déjeuner me mettaient dans les conditions idéales pour enseigner l’après-midi. Hypothèse non confirmée par mes interlocuteurs qui doivent voir en moi, du coup, un véritable alcoolique, alors que, chez moi, j’ouvre une bouteille de vin tous les quinze jours en moyenne, je ne prends jamais ni apéritif ni digestif, parfois une bière, mais généralement en compagnie. Donc, ce dont j’ai besoin, c’est du verre d’alcool (vin ou bière) du déjeuner avant de faire cours. Je ne suis donc pas guetté par la cirrhose !

Château du Rivau

Dimanche, après un tour au vide-greniers de Saint-Etienne de Chigny (où, en guise de marché gourmand, il n’y avait qu’une pauvre marchande de gaufres et une charcutière spécialisée dans les saucissons divers), nous avons voulu visiter la vieille église de Cravant, très belle, mais qui est fermée pour cause de travaux, puis la Sainte-Chapelle et les communs en U de Champigny-sur-Veude, qui laissent deviner combien le château du XVIème devait être grandiose. Mais ce site également était fermé, celui-là pour cause de fermeture annuelle du 1er octobre au 30 avril… Nous attendrons donc mai.

 

En revanche, le très beau et méconnu château du Rivau, au sud de Chinon, nous a ouvert ses portes. Le mieux est de citer le prospectus, fort concis et précis :

La récente réunification des communs (pédiluve, pressoir, écuries Renaissance, fontaine à bec de canette et grange dîmière) au château permet à cet ensemble architectural unique du XVe et du XVIe siècle de revivre. Les jardins du château, re-créés d’après les documents recueillis dans les archives du Rivau, évoquent les gravures du Moyen Âge et les contes de fées qui s’en sont inspirés.

 

Comme la veille, pour le château de Cinq-Mars la Pile, nous avons été bien inspirés, car le tour des jardins constitue, par un temps doux et ensoleillé, un but idéal de promenade. Toutefois, l’inspiration soi-disant médiévale signifie que les propriétaires, aidés en cela, à ce que j’ai compris, par la DRAC et le Ministère de la Culture, ont fait appel à des artistes ou artisans qui ont mis en place des installations plus ou moins astucieuses, plus ou moins jolies aussi, et dont l’une consiste en une série de nains de jardin… Tout n’est pas très beau, autant dire, quoique l’échiquier avec la famille des pots de fleurs soit assez réussi, et quoique le labyrinthe d’Alice reste fort sobre. Mais l’essentiel, sans doute, est que cela plaise aux enfants, ce qui s’est vérifié avec notre fils.

 

Sinon, la visite du château se restreint à quatre grandes salles dans le corps de logis principal. Outre les trophées, inévitables dans cette région où la tradition de la chasse à courre ne se dément pas, il y a un très bel autel en bois du XVIIème siècle. Le plafond peint de la salle dite « du festin de Balthazar » est très beau. La salle des dames est également d’une belle unité, et restaurée avec goût et finesse historique.

Beaux vers… : de deux décasyllabes de Dominique Fourcade, et de l’obsession métrique

Jeudi dernier, André Markowicz parlait, dans sa conférence inaugurale à deux voix, de métrique (sa compagne, Françoise Morvan, disait qu’il est difficile de vivre avec un obsédé de la métrique, ce que je sais fort bien car je dois moi-même vivre avec un obsédé de la métrique, qui porte mon nom), et a notamment livré un développement point trop original sur le malentendu qui consiste, pour de nombreux traducteurs, à transposer les pentamètres iambiques en alexandrins, alors que, selon lui, ce vers est le décasyllabe que l’on retrouve dans la poésie de Dante, ou l’endécasyllabe du siècle d’or espagnol, etc. Il a fait remarquer que le vrai décasyllabe classique avait pour structure classique l’hémistiche après la quatrième syllabe (4-6) et non au milieu, sur quoi j’ai glissé à l’oreille de ma voisine « il n’aime pas le tarantatara » (c’est le nom péjoratif donné aux décasyllabes de forme 5-5).

Moins puriste que Markowicz, dois-je l’avouer, il m’arrive de trouver fort beaux des décasyllabes de structure symétrique 5-5. Ainsi, dans Le Sujet monotype de Dominique Fourcade, que j’ai lu le mois dernier, il y a, dans le poème intitulé “Un string, et la sorbetière”, un très beau décasyllabe de ce type :

intense besoin d’ombre sur le Net (p. 141)

Ce vers me semble beau en raison de sa structure métrique, mais aussi en raison du redoublement de la dentale [t] entre le début (intense) et la fin du vers (net) en passant par le [d] qui ouvre le second hémistiche, du jeu sur le sens français du mot net, adjectif qui perce sous le néologisme de dérivation anglaise (le net s’oppose à l’ombre, et l’“insecte net” de Valéry se glisse, du coup, sous l’“intense besoin”), enfin en raison du sens même du vers, évidemment, qui ne peut que réjouir et inquiéter d’un même mouvement l’auteur frénétique ou forcené de ce carnet de toile.

Qu’est-ce qu’un beau vers ? ne cessé-je de me demander. L’analyse que je viens de proposer de ce beau taratantara donne pour réponse : un beau vers est beau par le chatoiement des sons, la complexité des sens, l’allusion à d’autres vers, d’autres mots, et enfin par l’appel à un lecteur censé s’approprier le vers.

Un autre taratantara ouvre la section intitulée “Gingivite” :

d’énormes flocons saisissent l’espace

 

Celui-là me rappelle, par la métrique et la forme même de la description métaphorique, le vers de Saint-Pol Roux

                        Les coups de ciseaux gravissent l’air

dans lequel il décrit le vol vertical des alouettes, qu’elles accompagnent de leur chant bref et métallique.

Plus bas, à la même page (Le Sujet monotype, P.O.L., 1997, p. 123), on trouve le vers suivant :

je ne peux relier ces flocons à aucune saison

qui pose, justement, de redoutables difficultés métriques, et donc de diction. En effet, s’il y a synérèse au verbe relier, ce vers compte 14 syllabes avec une structure de type 8-6. (Le vers de quatorze syllabes, très couru par les poètes de la seconde moitié du XXème siècle, en particulier Philippe Jaccottet ou Jacques Réda, implique souvent le retour à des unités plus classiques : 10-4, 12-2, 6-8 – ou, sur le mode impair mais plus rarement, me semble-t-il : 7-7, 9-5). Mais si l’on choisit de prononcer relier en trois syllabes, la tentation est grande de distinguer tout d’abord un hexamètre (je ne peux relier) puis l’objet (ces flocons), et enfin l’objet indirect (à aucune saison), ce qui donne une structure ternaire et symétrique 6-3-6, très séduisante également, et plus conforme peut-être à la structure grammaticale de la langue française.

La sous-littérature ? Une non-réponse.

Irène m’a demandé, sur ce blog, se jetant à l’eau, ce qu’était la sous-littérature. Elle relevait ainsi une formule pas très heureuse que j’avais employée dans mes réponses à l’un des questionnaires de Livy. J’ai beaucoup tourné, dans ma caboche, cette formule et ce que je pourrais répondre pour défendre un point de vue, qui est, d’une certaine manière, indéfendable, car il est déjà si difficile de définir la littérature que la sous-littérature semble vouloir échapper toute tentative de rationalisation objective.

Ce qui m’attriste le plus, c’est qu’Irène a enfin pris, timidement, la parole, que cela m’a fait grand plaisir, et que justement c’est à son commentaire que je peine à répondre. Bref, les lecteurs de ce carnétoile auront compris que j’ai des goûts littéraires, sinon exigeants, du moins très particuliers, ou très prononcés. Par exemple, et ce n’est pas un secret, je n’aime pas la littérature que l’on nomme « de genre » (roman policier, science-fiction, etc.). Mais ce n’est pas cela que je nomme sous-littérature.

Ce que j’ai voulu dire, c’est qu’il y a des livres, des auteurs, etc., qui ne créent rien de nouveau, qui se contentent de répéter les mêmes vieilles recettes, sans s’interroger ni sur la langue employée, ni sur la tradition dans laquelle ils s’inscrivent (ou dont ils se démarquent). C’est surtout cet aspect-là : il y a les créateurs et les épigones. Cela n’équivaut pas, stricto sensu, à mes goûts, d’ailleurs. Ainsi, je peux ne pas aimer une œuvre qui émane d’un vrai créateur et qui relève, à l’aune de ma définition, de la littérature, alors que je pourrais prendre du plaisir et lire jusqu’au bout un texte qui n’invente rien de fondamental. C’est aussi qu’il y a toute une variété de degrés, d’échelons, il n’y a évidemment pas la littérature et la sous-littérature, mais tout un entrelacs, une longue théorie d’œuvres qui peuvent, suivant le contexte, l’habileté de l’écrivain, l’intérêt du lecteur pour le sujet du livre, se situer plutôt de l’un ou de l’autre côté.

Si je cherche d’autres formules, d’autres manières d’exprimer mon point de vue, je pourrais faire remarquer que je suis à l’opposé extrême des lecteurs qui disent lire pour se divertir, ne plus réfléchir, pour s’oublier ou oublier le monde. Voilà aussi peut-être ce qui me pousse à dire que je ne veux pas perdre mon temps à lire de la sous-littérature : si je me rends compte que le livre que je lis ne m’apporte rien, ne change pas ma vision du monde, ne me fait réfléchir ni à l’art ni à la langue, alors oui, je serai tenté, sottement sans doute, de classer ce livre dans la sous-littérature…

La Pléiade de La Riche & Coco Texèdre aux Bons-Enfants

Sous un soleil toujours magnifique, je me suis rendu, pour la première fois, en ce début d’après-midi radieux, à la Pléiade, la salle de concerts de La Riche, qui est très mal fléchée et devant laquelle, sans être pourtant aveugle ni inattentif, je suis passé deux fois sans la voir : au troisième passage, ayant été renseigné par un piéton, le seul indice fut l’arrêt de bus, qui porte la mention « La Pléiade ».

Revenu à Tours, je me suis arrêté près de la place de Châteauneuf, et j’ai visité, rue des Bons-Enfants, l’exposition Coco Texèdre, dont j’avais annoncé, en fin de semaine dernière, le vernissage. C’est, de fait, une artiste digne d’intérêt. Je n’aime pas tellement les petits formats et les livres accordéons, mais les séries de tableaux de dimensions plus larges sont très convaincantes. J’ai surtout en tête les trois 38 x 58 qui se trouvent sur le pilier de gauche en entrant, les deux 38 x 108 tout à droite près de la fenêtre, la série des huit 26,2 x 75 sur le mur de gauche en allant vers le fond de la salle d’exposition, et enfin, last but not least, les trois remarquables compositions en 26,2 x 75 qui se trouvent sur le mur à droite en face de l’entrée. Je trouve que les plus grands formats offrent à l’artiste un espace plus créatif, une page plus étendue, une plage d’expression qui la contraint à des compositions plus astucieuses, plus complexes, et de cette belle hétérogénéité naît un effet visuel piquant. Ainsi, une seule de ces grandes toiles se subdivise en un cadre empli de calligraphies creusées, une barre de couleur noire, une inscription peinte deux autres cadres plus petits, etc.

Les formats moindres, plus homogènes, donnent une idée plus simpliste du projet esthétique de Coco Texèdre. Le galeriste, très gentil, avec qui j’avais déjà conversé il y a fort longtemps et qui se souvenait très bien de moi (faible fréquentation de la galerie ou excellente mémoire ? les deux, disons), m’a montré le petit catalogue qu’avait édité, lors de son inauguration, la médiathèque de La Riche autour des œuvres de l’artiste.

Il y a aussi une petite commode en bois, avec seize tiroirs cubiques en carton blanc ; chaque tiroir est affecté d’un numéro imprimé à la façon des meubles d’internat de jadis (de naguère ? de maintenant ?) et d’un bouton original (pierres, galets, morceau de bois, etc.). Il s’agit, m’a expliqué le galeriste, d’une variation autour du cabinet de curiosités. De près, pourtant, l’effet du carton blanc n’est pas terrible…

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En écoute : « Keyornew » (Mathieu Boogaerts. Michel, 2005)

mardi, 11 octobre 2005

Les tomates sont 128

En cherchant ce qui avait bien pu se passer il y a cent-vingt-huit ans, je suis tombé sur ceci, qui me plonge dans la stupeur et le désarroi.

Marché fermier de Chaveignes

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N'oubliez pas, quoi que l'on feigne

En ce prochain dominical

Le marché fermier de Chaveignes

Illustré d'un quatrain bancal.

lundi, 10 octobre 2005

Ironie des images

Tandis que je photographiais, samedi, au château de Cinq-Mars la Pile, cette inscription dans les douves, le Cameroun était éliminé de la participation à la Coupe du Monde de football.

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Bonne chance quand même au Togo et à l'Angola!

Gardez la parole

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Vu à Saint-Etienne de Chigny, sur la rive nord de la Loire, ce conteneur destiné au recyclage du verre semble appeler des remarques sarcastiques sur l'adéquation entre le message des affiches politiques et le support choisi. Non?