jeudi, 16 février 2012
Des sonnets romains de Belli
J’ai lu l’été dernier – et ne m’avise qu’aujourd’hui d’en dire quelques mots – un roman d’Anthony Burgess qui s’intitule ABBA ABBA. Il n’y est pas question de l’insupportable groupe scandinave aux mélodies dégoulinantes de nullité, mais de la forme conventionnelle de notation des rimes embrassées dans les quatrains du sonnet dit pétrarquiste. Il se trouve que je me rappelle très mal l’intrigue, les péripéties, etc. Autant dire que ce n’est pas un texte inoubliable. Roman qui brode sur l’improbable rencontre, à Rome, entre Keats et Giuseppte Gioacchino Belli, il vaut surtout pour la découverte du dénommé Belli, donc, auteur d’une œuvre monumentale, une somme de sonnets (2279 si l’on en croit le répertoire exhaustif) en dialecte romain. Savoureux et d’une grande violence, je n’ai pris le temps de les découvrir – par l’intermédiaire d’une édition bilingue qui en propose un florilège et s’intitule Rome, unique objet…– ou Les Sonnets clandestins – que récemment. Or, Burgess propose, dans la deuxième partie de son livre, la traduction anglaise de quelque 71 de ces sonnets aussi truculents que rabelaisiens sur des sujets religieux. L’été dernier, j’avais dû faire des recherches sur Internet, car, en lisant ABBA ABBA, on peut tout à fait s’imaginer que Burgess invente de toutes pièces ce Belli (qu'un des sites qui lui sont consacrés qualifie de "plus grand poète italien de tous les temps", ce qui est de tout de même bien exagéré).
Afin de donner un exemple, j’ai choisi de reproduire ci-après la traduction du sonnet 330 (329 d’après l’édition des Belles Lettres), « La Nunziata ». Il est assez évident que le traducteur français, Francis Darbousset, est beaucoup plus proche de l’original que Burgess, qui a choisi une métrique, une syntaxe et un lexique beaucoup plus « nobles », ou – en tout cas – moins abrupts. Dans ce poème, Burgess restitue très astucieusement, en revanche, le jeu de mots oiselet/sexe. Plus curieux, Burgess respecte le schéma CDECDE des tercets (fidèle en cela au titre même de son livre, qui met l'accent sur les contraintes spécifiques du sonnet italien), alors que Darbousset, lui, est beaucoup plus libre dans le choix des rimes, jusqu’à traduire le concetto final au moyen d’un distique de rimes plates, structure caractéristique du sonnet… shakespearien ! Pour être assez paradoxal d'un point de vue formel, ce choix, comme on le verra, est très efficace.
La Nunziata
Ner mentre che la Verginemmaria
se magnava un piattino de minestra,
l’Angiolo Grabbiello via via
vieniva com’un zasso de bbalestra.
Per un vetro sfasciato de finestra
j’entrò in casa er curiero der Messia;
e co ’na rama immano de gginestra
prima je rescitò ’na Vemmaria.
Poi disse a la Madonna: «Sora spósa,
sete gravida lei senza sapello
pe ppremission de ddio da pascua-rosa».
Lei allora arispose ar Grabbiello:
«Come pò esse mai sta simir cosa
s’io nun zo mmanco cosa sia l’uscello?».
L’Annonciation
Pendant que la Vierge Marie
s’envoyait une assiette de soupe,
l’Ange Gabriel accourait
comme carreau d’arbalète.
Par la vitre cassée d’une fenêtre
le courrier du Messie entra chez elle ;
et lis en main, à sa droite, d’abord
il lui récite un Ave Maria.
Ensuite, il dit à la Madone : « Vous êtes
ma chère dame, enceinte sans le savoir,
par permission de Dieu depuis la Pentecôte. »
Et elle alors à Gabriel de répondre :
« Mais comment diantre ça a pu se faire, dites,
si je sais même pas ce que c’est qu’une bite ? »
Annunciation
You know the day, the month, even the year.
While Mary ate her noonday plate of soup,
The Angel Gabriel, like a heaven-hurled hoop,
Was bowling towards her through the atmosphere.
She watched him crash the window without fear
And enter through the hole in one swift swoop.
A lily in his fist, his wings adroop,
“Ave,” he said, and after that, “Maria.
Rejoice, because the Lord’s eternal love
Has made you pregnant–not by orthodox
Methods, of course. The Pentecostal Dove
Came when you slept and nested in your box.”
“A hen?” she blushed, “for I know nothing of–”
The Angel nodded, knowing she meant cocks.
10:35 Publié dans Lect(o)ures, Sonnets de janvier et d'après | Lien permanent | Commentaires (0)
mercredi, 15 février 2012
Ali Ferzat, Egon Schiele, la "dégénérescence"
Les auteurs de l'article n'ont pas compris que le dessin est aussi une référence au tableau (pourtant archi-célèbre) d'Egon Schiele, l'Autoportrait aux doigts écartés. L'image des doigts cassés relie ainsi le caricaturiste opprimé par le pouvoir syrien à certaines formes de l'art moderne européen que les nazis devaient qualifier de dégénérées (entartet).
Autant dire : Télérama n'a rien compris. (Une fois de plus.)
14:08 Publié dans BoozArtz | Lien permanent | Commentaires (0)
La Folie Baudelaire
Contrairement au Rose Tiepolo, qui m'avait enchanté - peut-être parce que je connaissais moins le sujet - , La Folie Baudelaire, aussi de Calasso, me laisse un peu sur ma faim * . Il me semble que l'équilibre entre éléments biographiques et analyse esthétique est nettement moins réussi, et que Calasso s'embourbe un peu trop dans les premiers, au détriment de la seconde. Cela confirme, si besoin était, que le génie n'existe pas, et les miracles non plus. Il y a des livres réussis, à force de travail... et des livres moins achevés. Cela étant, je n'en suis qu'au tiers ; ça va peut-être se réveiller.
* La Faim, je le signale, est une des figures, un des personnages - même - de Mathématiques congolaises.
10:55 Publié dans Lect(o)ures | Lien permanent | Commentaires (0)
lundi, 13 février 2012
Dans le noir, et le blanc
Arrivé à 6 h 50 à l'Université, ce qui est plus tôt – et plus ridicule – que jamais. Mais j'étais réveillé tôt, courbatures.
Il est tombé encore deux ou trois centimètres de poudreuse, pour saluer le redoux. J'ai dû déneiger la pente avant de sortir la Clio, par anticipation. La plupart des rues, des routes, sont noires, au moins sur une voie. Les saleuses seraient-elles passées, alors qu'on n'a pas vu le facteur pendant cinq jours, et que les éboueurs ne sont pas passés dans le quartier depuis une semaine et demie ?
Je n'arrive à me tenir à rien, me sens très profondément fatigué, de ne pas foutre grand-chose, pourtant. Le café percole, bureau 44. Tous les couloirs et escaliers étaient éclairés, dès 6 h 50, et sans doute avant – pour moi seul, presque, on eût dit. Le café percole bruyamment, et je me sens épuisé.
Ce matin, bien équipé, pour ne pas avoir encore ces curieuses douleurs articulatoires que j'impute aux refroidissements, même lorsque je vais au sous-sol (où il faisait 4° ces jours-ci), j'avais enfilé mes gants en même temps que ma parka, dans le couloir du rez-de-chaussée. Mais il faut bien que l'homme noue ses lacets.
Puis qu'il démarre une Prius noire de neige.
Lundi matin, 7 h 20. Quatre heures et demie de cours, puis quelques menues broutilles. Fatigué.
07:20 Publié dans Moments de Tours, Questions, parenthèses, omissions | Lien permanent | Commentaires (0)
dimanche, 12 février 2012
W.M. 31 : Non de Dalmatie
Un pauvre bougre, Donatien,
Aimait Les 101 Dalmatiens.
« Mais enfin, c'est idiot ! »
Lui disaient ses poteaux.
Lui : « Pas plus qu'un film de Martiens. »
07:33 Publié dans Wikimericks | Lien permanent | Commentaires (0)
samedi, 11 février 2012
Ah, l'ouette, gentille, etc.
There once was an Upland Goose
Who met a cruel and fierce mongoose.
Said the goose : "Goéland
Does rhyme with Magellan !"
At which the mongoose bit the goose.
12:15 Publié dans Mirlitonneries métaphotographiques, Old-School Limericks | Lien permanent | Commentaires (0)
vendredi, 10 février 2012
Trafic de prise en glace passive
Deux jours de suite, deux innovations linguistiques et conceptuelles frappantes :
1) Avant-hier, un responsable de centrale nucléaire (ce qui n'est pas du tout rassurant, soit dit au passage) : "nous avons mis en place les trois niveaux d'action pour empêcher la prise en glace au niveau des réacteurs et des bassins".
En français, on dit "gel", ça suffit. "Prise en glace", je vous demande un peu !!!
2) Hier matin, on nous annonce partout que Woerth est mis en examen pour "trafic d'influence passif". Je comprends "trafic d'influence" et "complicité de trafic d'influence", mais là, ça m'échappe. Comment peut-on se livrer à un ACTE de corruption de façon PASSIVE ?
En lisant l'article 432-11 (modifié en 2011, comme c'est curieux) du Code pénal, on a surtout l'impression que les coupages de cheveux en quatre sont là pour minimiser la responsabilité éventuelle de personnes reconnues coupables de corruption.
10:54 Publié dans Chèvre, aucun risque, Words Words Words | Lien permanent | Commentaires (1)
jeudi, 09 février 2012
A garden in garbage garb
Frightful is the longnose gar
Whom, to observe, I'd go quite far.
Despite its beak,
It's sober and meek :
I've never seen one in a bar !
12:14 Publié dans Old-School Limericks | Lien permanent | Commentaires (0)
mercredi, 08 février 2012
Un mercredi de rien
Voir seulement le soleil percer la blancheur.
Un regard vert
s'étend jusqu'aux rayons. L'ennui
n'a rien à faire là-dedans. Voir le soleil
juste poindre, puis
éclater sur les étendues froides et cotonneuses,
apaise, rameute
les souvenirs. Voir juste percer
poindre. Le soleil
.
11:37 Publié dans Ecrit(o)ures | Lien permanent | Commentaires (0)
mardi, 07 février 2012
Hake mail
A fishmonger called Confucius
Was praising his stock of Merluccius.
His wife : "For pete's sake
Just call it a hake !
Won't make the fish less deluccius."
12:07 Publié dans Old-School Limericks | Lien permanent | Commentaires (0)
lundi, 06 février 2012
Battre briquet, tracer cercles dans l'air, recouvrir son calme
"Novels," she repeated. "Why do you write novels? You ought to write music. Music, you see"—she shifted her eyes, and became less desirable as her brain began to work, inflicting a certain change upon her face—"music goes straight for things. It says all there is to say at once. With writing it seems to me there's so much"—she paused for an expression, and rubbed her fingers in the earth—"scratching on the matchbox. Most of the time when I was reading Gibbon this afternoon I was horribly, oh infernally, damnably bored!" She gave a shake of laughter, looking at Hewet, who laughed too.
"I shan't lend you books," he remarked.
"Why is it," Rachel continued, "that I can laugh at Mr. Hirst to you, but not to his face? At tea I was completely overwhelmed, not by his ugliness—by his mind." She enclosed a circle in the air with her hands. She realised with a great sense of comfort how easily she could talk to Hewet, those thorns or ragged corners which tear the surface of some relationships being smoothed away.
"So I observed," said Hewet. "That's a thing that never ceases to amaze me." He had recovered his composure to such an extent that he could light and smoke a cigarette, and feeling her ease, became happy and easy himself.
Virginia Woolf. The Voyage Out [1915], Hogarth Press, 1971, ch. XVI, pp. 251-2.
14:19 Publié dans Lect(o)ures | Lien permanent | Commentaires (0)
dimanche, 05 février 2012
4 vues
18:18 Publié dans Moments de Tours, Zestes photographiques | Lien permanent | Commentaires (2)
samedi, 04 février 2012
Not bitty now, bitty later
- Bonne nuit. Tu as une oreille rouge, la gauche.
- Bah, ce n'est pas grave. Je préfère ça que d'avoir le nez gelé, ou les doigts de pied qui tombent comme les Néandertaliens... qui les bouffaient d'ailleurs. Bonne nuit !
Tout ça pour une oreille rouge.
21:36 Publié dans ... de mon fils | Lien permanent | Commentaires (0)
Alternance de rimes en milieu non tempéré
Je ne sais pas pourquoi la pluie. Le délai pour le premier tiers. Je me demande si le vent. La facture du peintre. Je ne sais pas si la tempête. Tire, tire vers le haut. Je ne comprends pas le brouillard. Pousse, pousse vers la tombe.
18:02 Publié dans Aphorismes (Ex-exabrupto) | Lien permanent | Commentaires (0)
vendredi, 03 février 2012
À la vie à la mort (ARFI / Petit Faucheux)
Hier, pour la Chandeleur, par le jour le plus froid – pour l’instant ? – de l’hiver tourangeau, c’était, pour moi, la reprise de l’année au Petit Faucheux. Il s’agissait d’un spectacle déjà créé il y a deux ou trois ans en partenariat avec le Petit Faucheux, mais que je n’avais pas eu l’occasion de voir à l’époque : À la vie à la mort, par un quatuor composé de Jean Aussanaire (saxes), Jean Méreu (trompette), Laurence Bourdin (vielle à roue) et Bernard Santacruz (contrebasse), compositions sur le tableau de Bruegel l'Ancien, Le Triomphe de la mort, que j’ai pu (re)voir au Prado l’été dernier.
Les compositions sont très belles, les musiciens à la fois très inventifs et très attentifs, mais je ne devais pas être très en forme (ou très in the mood), car j’ai trouvé toute la première demi-heure trop homogène, tirant toujours un peu du côté de la lamentation ou de la mélopée. Le dernier quart d’heure était, pour moi, ce qu’il y avait de plus fort, à partir d’un duo frotté très sourd entre la vielle et la contrebasse.
Après le concert, autour d’une Grim, mon collègue Eric R. et moi avons parlé, de manière assez prévisible (à ceci près que lui ne connaissait le musicien que depuis deux semaines, et moi depuis six mois !), de Valentin Clastrier, dont je ne retrouve pas, ce matin, dans mon fatras, l’album que j’avais acheté totalement par hasard l’été dernier en pays cathare (décidément, le concert d'hier dressait un pont entre l’hiver et le dernier été), mais aussi de Leonard Cohen et de musique baroque.
En bonus : lien vers la page consacrée au spectacle sur le site de l’ARFI, avec un extrait.
08:39 Publié dans BoozArtz, Jazeur méridional | Lien permanent | Commentaires (0)
jeudi, 02 février 2012
W.M. 30 : Sappho in Chew Stoke
There was a fair lass in Chew Stoke
Who loved a girl and not a bloke.
When told, in a wrath,
They sent her to Bath —
— The sophistic sapphist-haters from Chew Stoke.
11:27 Publié dans Old-School Limericks, Wikimericks | Lien permanent | Commentaires (0)
mercredi, 01 février 2012
Poème pour saluer l'avènement du mois de février (poème dont le titre est plus long que le texte)
Février et son soleil
son grésil léger qui mouille
et vous traverse à l'orteil
-- Aussi sa bise gèle-couilles.
14:44 Publié dans Nomades | Lien permanent | Commentaires (0)
mardi, 31 janvier 2012
W.M. 29 : Spa-Francorchamps
Un coureur de Spa-Francorchamps
Disait « Putain, je suis hors-champ ! »
La prude Mireille
Se boucha l’oreille,
Pour n’ouïr point d’autres mots torchants.
14:40 Publié dans Wikimericks | Lien permanent | Commentaires (0)
Construire français, ha ha !
Nicolas Sarkozy n'a cessé, dimanche soir lors de son entretien télévisé avec quelques serveurs de potage, de répéter qu'il fallait déréglementer en matière de construction immobilière, ce au mépris de l'environnement et de la santé publique. (Ces termes ont-ils même été prononcés ? Qui se rappelle que Sarkozy avait annoncé que l'environnement serait une des priorités de son quinquennat et nommé Alain Juppé Ministre d'Etat chargé de ces questions ? Or, le bilan de son quinquennat est désastreux, aussi à cet égard.)
Un des arguments économiques de Nicolas Sarkozy, outre l'habituelle et diaphane antienne "ça va faire baisser les prix", est que le bâtiment est un secteur qui fait forcément travailler les artisans français. "Le bâtiment, comment croyez-vous que je vous dise Madame Chazal que est-ce que ça va faire des délocalisations ? non, soyons clairs." (pas texto, mais enfin, pas loin)
Donc, le secteur du bâtiment permet la relance de l'emploi hexagonal.
Ce midi, à Tours, j'ai photographié, au feu rouge à la va-vite (d'où la piètre qualité de l'image - cliquer dessus pour agrandir), un des trois camions de l'entreprise allemande Finstral, entreprise qui a, de toute évidence obtenu le marché de rénovation de la façade et des fenestrages d'un immeuble entier sur le quai André Malraux.
13:55 Publié dans Questions, parenthèses, omissions, Zestes photographiques | Lien permanent | Commentaires (0)
lundi, 30 janvier 2012
Quatuor Ebène, à La Pléiade (La Riche)
Ce soir, c'était l'ouverture, très avancée, du Printemps musical de Saint-Cosme, avec les habitués du Quatuor Ebène.
Outre le Divertimento K.138 de Mozart, ils ont joué un très beau quatuor de Tchaïkovski, le n°1, et ce n'est pas la première fois que je me dis qu'il faudrait vaincre mes préventions à l'encontre du Russe. Un couple pas tout jeune, derrière moi, tout à fait l'allure des habitués du classique, s'étonnait, entre deux mouvements, qu'il n'y eût pas d'orchestre, ce avant que le mari ne précise à sa femme, d'un ton mi-malassuré mi-docte (ah, la supériorité masculine !), que "ce ne sont pas tous des violons, le plus grand s'appelle autrement". J'ose espérer qu'il parlait de l'alto de Mathieu Herzog... pas du violoncelle de Raphaël Merlin tout de même !!!
En bis, après leur désormais traditionnel arrangement de Come Together des Beatles (que je mets en streaming ci-dessous - tout le monde peut ainsi réviser les noms des instruments en fonction de leur taille), ils ont joué un arrangement de Nature Boy, que je connais surtout, pour ma part, par le quartet de Coltrane.
22:25 Publié dans Autres gammes | Lien permanent | Commentaires (3)
dimanche, 29 janvier 2012
W.M. 28 : Babylone
Une catin de Babylone
Faisait la grue contre un pylône.
C'est anachronique,
Mais que le gros nique,
Ou le petit, c'est Babylone.
13:49 Publié dans Wikimericks | Lien permanent | Commentaires (0)
La Fleur de barbe
Ce matin, après un réveil plutôt moins matinal que d'ordinaire (le jour filtrait déjà à travers les persiennes, pour ne rien dire des Velux™), le baliverneur quelconque qui ne s'est pas encore lassé, depuis six ans et demi, de tenir ces carnets avec une régularité variable, s'est rendu, dans sa guimbarde hybride, certes, mais aussi beugnée en trois endroits sur le flanc droit, au marché de l'Europe que, dans un élan de créativité désignatoire (que seules, peut-être, les paroles de la chanson de Bob Dylan Man gave names to all the animals sont susceptibles d'égaler), il a décidé de rebaptiser marché aux huîtres. (Pour ce billet, dont le titre a été choisi dans les minutes qui ont suivi le tapuscritement (la typographisation ? le tapage ? la rédaction ?) de l'expression marché aux huîtres, le baliverneur semi-barbu a hésité entre Le Désistement et Langage des caves XI. He'll save them for later, hell.) Sur les quelques étals épars, sur la placette, on compte pas moins de deux ostréiculteurs, ou vendeurs d'huîtres, ce qui n'est pas la même chose : faut-il les nommer mareyeurs ? Pas l'ombre de la queue d'un poissonnier, en revanche. Le mot huître toujours me rappelle Ponge, Dickens et Dolores O' Riordan. On n'ira pas encore, de sitôt ni aujourd'hui, cueillir les fleurs dans le terrain vague.
Deux fois tu as omis de dire.
Deux fois tu omis le verbe dire.
Deux fois tu promis de maudire. Incantation aux fleurs, ce qui n'empêche pas de retordre plus souvent, à bouche de mâchefer, à doigts de licorne, la prose que le poème. L'inverse n'est-il pas, le plus souvent, tenu pour acquis ? Je ne suis pas le plus souvent. Je ne suis pas le Mâchefer. Je hante le marché aux huîtres, où j'achète poires Conférence et chipolatas.
13:44 Publié dans Moments de Tours, Un fouillis de vieilles vieilleries | Lien permanent | Commentaires (0)
samedi, 28 janvier 2012
Haïku photo
16:33 Publié dans Autoportraiture, Kleptomanies überurbaines, Mirlitonneries métaphotographiques | Lien permanent | Commentaires (2)
De l’importance de la syntaxe (épisode n° 451). Trierweiler, Dukan, le mentir-vrai. Essai ébauché d’analyse sémantaxique.
Hier soir, dans l’émission Le Grand Journal, sur Canal + (rubrique « La Boîte à questions »), Valérie Trierweiler, dont plus grand monde n’ignore, je suppose, qu’elle est la compagne de François Hollande – mais peut-être l’écris-je ici à l’intention de quelque Hibernatus prégiscardien ou des générations futures qui tomberaient sur ce blog quand j’aurai moi-même « dépassé les six vingts » –, s’étant vu poser la question «Quel est le secret de François Hollande pour perdre 30 kilos ?», a répondu : «Ce n’est pas le régime Dukan, contrairement à ce qu’il veut faire croire.»
(Ce n’est pas un verbatim. Peut-être a-t-elle dit « contrairement à ce qu’il prétend ». Ce dont je suis sûr, c’est la structure de la réponse : ce n’est pas le régime Dukan, contrairement à ce qu’il, etc.)
Sur le coup, je n’ai pas fait attention à cette phrase. Il faut dire que le régime de François Hollande, je m’en bats les flancs… et quant à ce que pense sa compagne (pour ne rien dire du non-sens qui consiste à donner un quelconque temps d'antenne aux conjoints des candidats), je crains qu’il ne faille descendre un peu plus bas que les flancs pour savoir ce que je me bats…
Bref… Ce matin, dans le demi-sommeil de l’aurore, cette phrase m’est revenue, et je me suis dit qu’il était étonnant qu’une compagne de candidat à la présidence de la République, sous couvert sans doute d'exhiber sa liberté de parole, dise dans une émission de télévision que le candidat socialiste à la Présidence mentait. Quelque chose clochait… Je me suis rendu compte que j’étais tout à fait réveillé quand j’ai compris que le pronom personnel, qui, grammaticalement, ne pouvait pas désigner qui que ce soit d’autre que François Hollande, ne renvoyait pas de facto (ou sémantiquement) à celui-ci. Le sens à reconstruire, avec une syntaxe correcte, serait donc (mais j'en suis réduit à un conditionnel, car c'est inverser le sens effectif de la phrase de Mme Trierweiler) :
— Quel est le secret de François Hollande pour perdre 30 kilos ?
— Ce n’est pas le régime Dukan, contrairement à ce que prétend ce dernier / contrairement aux allégations du médecin / même si Dukan prétend que oui / etc.
J’ai proposé plusieurs formulations afin de montrer qu’il n’est pas difficile, sans aller chercher midi à quatorze heures, de construire une phrase qui corresponde, dans sa syntaxe, aux intentions sémantiques du locuteur (de la locutrice, ici). Entre autres possibilités, ne pas faire du nom du diététicien un adjectif, mais avoir recours à un complément du nom, aurait permis, au moins, de signaler la possibilité d’une ambiguïté : ce n’est pas le régime de M. Dukan, contrairement à ce qu’il prétend. Dans une telle phrase, le co-énonciateur est amené à hésiter entre deux hypothèses pour le référent du pronom personnel : « il » désigne-t-il Hollande ou Dukan ? Dans la phrase de Mme Trierweiler, qui est une réponse à une question dont le seul sujet/agent était, sans aucune équivoque, François Hollande, pas l’once d’une ambiguïté.
En effet, le risque de méprise – et de contresens – augmente du fait que la phrase de Valérie Trierweiler a un sens. Si elle avait été incohérente, j’aurais tout de suite entendu que quelque chose clochait. En l’espèce, et même après analyse, rien ne me dit que Valérie Trierweiler n’ait pas voulu dire ce qu’elle a dit, et donc, en paraphrasant : mon compagnon est un menteur qui raconte des bobards quand on lui pose des questions sur son régime.
14:49 Publié dans Indignations, Questions, parenthèses, omissions, Words Words Words | Lien permanent | Commentaires (5)
Haïku finnois
Sauli Niinistö
et Pekka Haavisto
en tête du premier tour
--------- Afin de relancer le projet Versikipédia, je me suis contenté de recopier le titre d'une brève d'actualité de la célèbre encyclopédie, et de la présenter sous forme de haïku. Poésie vite fait bien fait.
10:03 Publié dans Versikipédia | Lien permanent | Commentaires (0)
vendredi, 27 janvier 2012
D'un souffle, Éole hausse
Dans la rue, croisant ce colosse
De son noir clébard affublé,
Et me trouvant trop peu râblé
Pour aller, frôlant le molosse,
Jouer illico le bolosse,
Je passai mon chemin. « Du blé ! »
Me lance, d’un ton accablé,
Le plouc au teint de spéculosse.
Lors, sachez, ce fut féérie
De chevaucher son égérie
– Car le pitbull à l’âme frêle
Lançant sa mâchoire d’ardent
S’entourloupa l’intestin grêle
– Et je m’éloignai, me tordant.
21:19 Publié dans Sonnets de janvier et d'après | Lien permanent | Commentaires (0)