dimanche, 15 avril 2012
Intermittences : sur quelques phrases d’Anthony Powell
Jeudi soir, tard, j’ai terminé la lecture de The Soldier’s Art, huitième volet de la dodécalogie d’Anthony Powell. Je crois avoir lu les 6 premiers tomes vers 2007-2008, avant de devenir directeur du département d’anglais en tout cas. J’y suis donc revenu, avec la trilogie militaire, dont seul le dernier tome – The Military Philosophers – me reste à découvrir.
J’y suis revenu, avec des sentiments mitigés. La lecture en est tout à fait plaisante, stimulante, même s’il me semble que le travail stylistique s’y émousse. Le côté « Proust de second rayon » est moins présent, ce qui, finalement et sans paradoxe, diminue le charme, voire la qualité d'écriture. On le retrouve toutefois par intermittences. Qu’on en juge :
The potential biographies of those who die young possess the mystic dignity of a headless statue, the poetry of enigmatic passages in an unfinished or mutilated manuscript, unburdened with contrived or banal ending. (The Valley of Bones, p. 197)
Il s’agit plus d’influence proustienne que de décalques jamesiens, comme lors de la description d’un bombardement aérien à l’époque du Blitz :
Out of this resplendent firmament – which, transcendentally speaking, seemed to threaten imminent revelation from on high – slowly descended, like Japanese lanterns at a fête, a score or more of flares released by the raiding planes. Clustered together in twos and threes, they drifted at first aimlessly in the breeze, after a time scarcely losing height, only swaying a little this way and that, metamorphosed into all but stationary lamps, apparently suspended by immensely elongated wires attached to an invisible ceiling. (The Soldier’s Art, p. 11) *
La semaine dernière, je citais un extrait de The Valley of Bones (tome VII, et 1er volet de la trilogie militaire). Sur la même page se trouve, toujours dans la bouche de Dick Umfraville, un jugement général, misogyne et galvaudé sur les femmes (“The answer was always no. Then one day she changed her mind, the way women do.”), ce qui m’a fait sourire. (Stratégie narrative difficile à démêler ici.)
Je n’ai pas vérifié si les douze romans de Powell qui composent ce cycle intitulé A Dance to the Music of Time, et que je lis dans l’édition Heinemann cartonnée que possède la B.U. de Tours, ont été traduits. Il me semble que traduire et publier ces romans maintenant aurait quelque chose de terriblement délicat, ainsi que d’éminemment suranné. Par exemple, toujours dans The Valley of Bones (p. 117) :
We were squadded by a stagey cluster of glengarry-capped staff-sergeants left over from the Matabele campaign, with Harry Lauder accents and eyes like poached eggs.
Comment, dans une traduction, saisir sans l’effriter le mille-feuilles culturel que constitue une seule phrase ?
Un autre passage qui m’a beaucoup amusé, dans The Soldier’s Art cette fois, et notamment en raison d’associations montypythoniennes ** qui relèvent ici de la coïncidence, ou – mieux – du plagiat par anticipation, donnerait, à la traduction, quelque fil à retordre :
‘How went the battle, Derrick ?’ he asked. […] ***
‘Pretty bloody, Eric,’ he said. ‘Pretty bloody. If you want to know about it, read the sit-rep.’
‘I’ve read it, Derrick.’
The assonance of the two colonels’ forenames always imparted a certain whimsicality to their duologues****.
‘Read it again, Eric, read it again. I’d like you to. There are several points I want to bring up later.’
‘Where is it, Derrick?’ (The Soldier’s Art, pp. 35-6)
Dans un registre moins satirique, il me semble important de clore ces quelques remarques éparses en citant un paragraphe où se mêle trois métaphores essentielles du cycle dans son entier – le jeu, la musique, la stratégie militaire :
This was an unexpected trump card for Stevens to play. Moreland, always modest about his own works, showed permissible signs of pleasure at this sudden hearty praise from such an unexpected source. Music was an entirely new line from Stevens, so far as I knew him, until this moment. Obviously it constituted a weapon in his armoury, perhaps a formidable one. He had certainly opened up operations on an extended front since our weeks together at Aldershot. (The Soldier’s Art, p. 135)
* Je dois à la vérité de préciser que j’écris ce billet, recopie ces citations, tout en écoutant un très beau duo d’Evan Parker et Urs Leimgruber, ce qui, par crépitements, démontre assez combien je mets en pratique le principe fondamental d’un de mes maîtres, Isidore Isou, et donc ce procédé – la discrépance – consiste ici à recopier des phrases à l’architecture ample et mesurée tout en étant profondément imbibé de sonorités que même le qualificatif de free ne suffit plus à décrire. Qu’il soit dit, au passage, que ce principe même est au centre d’une série de textes sur l’autre blog (Unissons).
** En l’espèce, que cette séquence animée, toute en nonsense et cochons tirelires, me soit immédiatement venue à l’esprit n’a rien de fortuit : le modèle commun des deux textes (Python & Powell) n’est-il pas le duo Tweedledum&Tweedledee du brave révérend Dodgson ? Ou l'auteur du bref sketch animé (Gilliam lui-même ?) aurait-il lu The Soldier's Art (publié en 1966, soit trois ou quatre ans avant la saison 2 du Flying Circus) ?
*** Le passage que j’omets de citer est tout à fait long, je dois le signaler, et très savoureux. À un universitaire, les deux colonels sont susceptibles d’évoquer quelques infernaux mandarins, par exemple Jean-Jacques Tatin et Elisabeth Gavoille.
**** Toujours j’écoute Evan Parker et Urs Leimgruber. Le terme de duologue leur siérait à merveille. Ce sont à la fois les nymphes de Mallarmé/Debussy et les camelots de la foire. Quelle merveille !
12:12 Publié dans BoozArtz, Lect(o)ures | Lien permanent | Commentaires (0)
samedi, 14 avril 2012
Triple haïku potager
16:26 Publié dans Chèvre, aucun risque, Mirlitonneries métaphotographiques | Lien permanent | Commentaires (0)
vendredi, 13 avril 2012
Sell and tell
Après avoir passé une nouvelle nuit en pointillés en raison de sa rhinopharyngite, pris ses drogues et son petit déjeuner, la marquise, dépitée d'être presque aphone, se connecta à Facebook avant de corriger un travail de M1 Recherche sous .docx.
Elle enlève sa perruque car elle a peur que le travail de M1 ne la défrise. (Elle s'interrompt - déjà - dans son travail pour aller étendre une lessive.) Pourquoi ai-je lu "la maquerelle" au lieu de "la marquise" ?
The imp is no pimp.
Ma querelle ? ta querelle ! j'ai jamais cherché querelle !
Après qu'elle eut constaté que le lave-linge s'était convenablement mis sur la position "Arrêt", la marquise, ayant humé l'atmosphère fraîchement printanière et constaté qu'il s'agissait encore d'une de ces journées - trop nombreuses à son goût - où les militaires de la base aérienne avaient décidé d'empester et de polluer tout le quartier à grands renforts de kérosène, décida d'étendre le linge propre mais humide à la buanderie et, au moyen de cintres et de pinces, au-dessus des radiateurs, et non sur la terrasse où, plutôt que de sécher, chemisiers, pantalons, mouchoirs et caleçons risquaient plus évidemment d'être salis derechef par la manne noire tombée du ciel, et qu'envoient, sur les pauvres mortels de Tours-Nord, ces salopards de dieux modernes que sont les aviateurs et leurs acolytes.
(Puis Rembrandt s'aperçoit qu'il ne sait pas photographier l'odeur des lilas qui bordent la cour de récréation.)
Interlude non strictement narratif
Occup... qu'il était à se bidonn... en lisant le livre de Corinne, Guillaume a laiss... cram... les steaks hach...
Le récit reprit. Accaparée qu'elle était par de complexes réflexions administratives, la marquise mit une bonne minute à s'apercevoir qu'elle cherchait à recharger le téléphone portable avec le câble d'alimentation de l'appareil photographique. Avant d'aller se pochtronner puis s'éclater au Petit Faucheux, la marquise devait encore écrire deux mails professionnels et trouver quelque chose à grignoter. Au retour, tard le soir, à Mégara, dans les faubourgs de Carthage, son carrosse ayant obstinément refusé de se muer en citrouille, la marquise rentra chez elle après un exceptionnel double set au Petit Faucheux, expérience qu'elle prolongea par l'écoute de ALBEIT au casque.
(Interlude. Nuit.)
(Fin provisoire.) En raison du rhume persistant qui lui défrisait la cafetière depuis déjà trois jours, la marquise passa derechef une nuit fort courte, et de merde.
22:29 Publié dans Chèvre, aucun risque, Ecrit(o)ures | Lien permanent | Commentaires (0)
jeudi, 12 avril 2012
Jour de soif, dies illa
& les tours d'horloge / me serrent la gorge / chaque seconde me tue
Nicolas Hulot est fâché avec les prépositions.
Racine feat. La Belette, ras-le-bol. Pardon. Rotrou feat. L'Hermine. Try again. Molière feat. Le Glouton. Mairet feat. Le Furet ? Et Samantha St Jean ? Elle a chanté avec La Fontaine feat. Le Putois ? Non, c'est juste le clip suivant sur W9. Je vous croyais devant... Non, de loin. (Le cadet a une otite.)
----------- Je tiens à rassurer les nombreux fans d'Oméga, que je garde car il a une otite : il est en pleine forme (lui...) et joue présentement au nain jaune avec son lapin en peluche blanc. ----------
J'ai entendu la pub de l'office de tourisme du Jura, matraquée sur France Info. N'en reviens pas.
"Viens randonner sur moi" <== a une tête d'oeuf.
Il calamite. Et ignomine. Et passe les gnomes à la calamine.
"le chat aussi / couci-couci"
Et à la page 31, l'appel de note de bas de page est un ♥.
Après avoir passé la tête-de-loup puis l'aspirateur dans son Versailles pavillonnaire de province, puis perdu au nain jaune tout en ayant fait deux fois "grand opéra", la marquise, les mains rompues par les vaisselles et les naseaux comblés par le fumet de la flamiche aux poireaux, se connecta à Facebook.
Grand concours de syntaxe postmoderne et de sémantique déconstructionniste dans le journal Sud-Ouest.
22:23 Publié dans Chèvre, aucun risque, Le Livre des mines, Moments de Tours | Lien permanent | Commentaires (0)
mercredi, 11 avril 2012
W.M. 41 : John Henry Newman
Le brave cardinal Newman
Disait très rarement "Yo man !"
C'est très anachronique,
Tout comme "Je te nique !"
(Que ne disait pas non plus John Henry Newman.)
10:54 Publié dans Wikimericks | Lien permanent | Commentaires (0)
mardi, 10 avril 2012
Autre sizain en -pha
Pour rimer avec Diarapha,
On me propose Mustapha
– Ou d'orthographier kalipha
"Califat". Dans le Nord, à Pha-
Lempin, ou en Moselle, à Pha-
Lsbourg, qu'irait faire Diarapha ?
10:38 Publié dans Ecrit(o)ures | Lien permanent | Commentaires (0)
Poème en -pha
J'ai promis un poème de circonstance à une amie.
Le voici, en attendant mieux.
Si tu vas à Saint-Rapha-
Ël, sans oublier l'ordre alpha-
Bétique, dis à Diarapha
Que la rime est problématique.
10:22 Publié dans Nomades | Lien permanent | Commentaires (0)
samedi, 07 avril 2012
W.M. 40 : Chrysiridia rhipheus
Is not a creature of sloth.
It's much less lazy
Than shiny or blazy
Save when pinned on a piece of cloth.
09:42 Publié dans Wikimericks | Lien permanent | Commentaires (0)
Domaine public
/ Lucenzo, au poteau. Shakira, dans la fosse à rats. Magic System à la benne. --------- Il n'est pas beau, mon slogan pour les présidentielles ? /
Cure de sublimes cuivres
pour défriser les
tubes de W9
C'est l'élite de la nation (et de l'Université - oui, tous ces types qui nous regardent tous, nous littéraires & sciences humaines, comme de la merde - n'est-ce pas Loïc V. ???), et ça joue à Tarzan avec du matos à 10.000 euros.
Ouhlala, le Projet Gutenberg ne se contente plus de publier
Η φιλοσοφία του Σωκράτους κατά A. Fouillée de Vrailas-Armenis,
mais commence à numériser les traductions néerlandaises de Selma Lagerlöf.
il noue ses lacets en passant la troisième #grosblaireaudanssaclio ---- j'écoute Egge au début du w-e pascal #olibriusdanssaprius
des grondements sourds
l'attente, dans le bureau,
d'un ouragan féroce
Cela dit, Sylvain, être chauve ne m'empêche absolument pas de montrer mon cul. "He spits out the lemon strips off his raccoon coat and stands naked with a hard-on" (Burroughs devant l'école élémentaire) / En fait, c'est la faute de LCP. Mon fils et mon épouse attendaient l'émission du gros & exaspérantissime Moati, qui ne commence qu'à neuf heures, et, zappant, tombèrent sur la chose en question.
à l'heure où les chats
tarabustent l'épagneul
-- elle rentre de Choiseul
09:33 Publié dans Chèvre, aucun risque | Lien permanent | Commentaires (0)
vendredi, 06 avril 2012
L’Œuvre dard
Dans le reportage sur l'incendie de Lunéville, à la télévision, on vit sortir à dos de pompier (il aurait été enchanté) un portrait du maréchal Lyautey (Clemenceau : « Parmi tous mes ministres, il n’y en a qu’un qui ait des couilles au cul, c’est Lyautey – et encore ce ne sont pas les siennes ! ») Mais beaucoup d’œuvres d’art ont péri, sans doute autrement précieuses.
(Renaud Camus. Rannoch Moor. Fayard, 2006, p. 14)
'That was it,' said Umfraville. 'I expect you've heard of a French marshal called Lyautey. Pacified North Africa and all that. Do you know what Lyautey said was the first essential of an officer? Gaiety. That was what Lyautey thought, and he knew his business. His own ideas of gaiety may not have included the charms of the fair sex, but that's another matter. Well, how much gaiety do you find among the palsied crackpots you serve under? Precious little, you can take it from me. It was my intention to master a military career by taking a leaf out of Lyautey's book - not as regards neglecting the ladies, but in other respects.
(Anthony Powell. The Valley of Bones. Heinemann, 1964, p. 152)
10:14 Publié dans Corps, elle absente, Lect(o)ures | Lien permanent | Commentaires (0)
jeudi, 05 avril 2012
Bribes de la chèvre, mercredi
(et le gamin qui te montre des photos de hamster courant sur un piano ou couinant dans un suppositoire en liège géant)
tirture un monde d'étnicelles
et prned l'avrese
sur la gueuel
Wack wack wacky wacky women
Wack wack wacky wacky women
Wack wack wacky wacky women (ça y est le 33 tours est terminé)
Ce matin l'album Panini a surtout occupé le paterfamilias, occupé à faire des demandes d'échanges sur le forum Panini. Je dois être d'extrême-gauche, si l'on en croit l'enquête Hot Vidéo, car je suis à fond dans l'échangisme.
"Cela laisse le zébrillon pantois." (National Geographic, tu m'auras pas.)
y a une pie sur la dalle
& même sur la fenêtre
y a une pie sur la dalle
& moi j'écris que dalle
Voilà, je voudrais vous faire écouter le Quatuor n°3 de Kvandal, dont je suis fou, qui me hante -- ou découvrir les autres. Et rien nulle part sur la Toile.
Si tu chanj les 5 letteurs de mardi é si tu lé ramplace par d'ôtres sa fé mercredi. Ko1sidonssse ? jkroapamoa
04:40 Publié dans Chèvre, aucun risque | Lien permanent | Commentaires (0)
mercredi, 04 avril 2012
Algorithme & communisme
Pendant qu'Oméga construisait "un algorithme" en Kapla (d'où le dialogue suivant : "- Comment tu connais le mot algorithme ? - On en a fait à l'école." - NDLR : Oméga est en moyenne section de maternelle),
Alpha croisait deux de ses passions, les animaux et la vie politique française (avec une pointe de dérision anti-Lutte Ouvrière).
(Cliquer sur les images pour agrandir.)
11:05 Publié dans ... de mon fils | Lien permanent | Commentaires (0)
lundi, 02 avril 2012
W.M. 39 : Sepultura
Les gueulards de Sepultura
À savoir qui la poul' touera *
S'égosillent en metalcore
Heavy thrash et que sais-je encore --
-- Je préfère L'Avventura.
* Résurgence de la vieille blague ("qu'est-ce qui est au fond du garage et qui roucoule ?").
10:22 Publié dans Wikimericks | Lien permanent | Commentaires (2)
dimanche, 01 avril 2012
Version d'Agrégation externe 2012 (Sinclair Lewis, Babbitt, ch. XVII)
Ayant découvert le sujet de version de l'agrégation externe d'anglais 2012 vendredi soir, après la fin de l'épreuve, et ayant été pas mal pris depuis, je viens de terminer le premier jet, qui a été fait en 50 minutes environ (en deux fois). J'ai vérifié quatre ou cinq mots, soit de l'original, soit pour des recherches de synonymie. [Je n'ai pas vérifié les termes qui ne feront pas la différence entre les candidats, car personne ne les connaîtra précisément, ainsi hooptedoodle. Il convient de traduire ce genre de mots le plus précisément possible en fonction de ce que le contexte permet d'en saisir. * ] --- Je ne suis pas membre du jury, mais j'enseigne la version depuis 12 ans et ai eu, en 1997, des notes plus qu'honorables à l'agrégation dans cette matière (si vous me soudoyez, je vous les donnerai !).
Premier jet, donc modifications à suivre et commentaires bienvenus. Que l'on considère donc ceci comme le brouillon : dans l'hypothèse où je serais candidat face à ma table, il me resterait pas mal de temps pour peaufiner la version au propre.
Autre remarque importante : la traduction "de concours" implique parfois une plus grande littéralité, voire des choix visant à montrer au jury que l'on maîtrise parfaitement les structures de la langue-source. [Ce point est l'objet de nombreux débats : par exemple, les rapports de jurys sont parfois critiqués car les solutions proposées par le jury lui-même peuvent être considérées comme des semi-calques, voire inexactes.]
Le texte était plutôt long, et sa caractéristique principale était l'accumulation, dans une longue première moitié, de phrases nominales abondant en participes présents (V-ing étant, en soi, une des plus éminentes difficultés dans le passage de l'anglais au français). Le vocabulaire de la lumière, souvent très riche en anglais, n'était pas trop problématique ici, dans la mesure où Sinclair Lewis joue beaucoup, en fin de compte, sur la répétition de light/lights.
Il va de soi que je ne sais pas du tout ce que décidera le jury, mais que plusieurs participes présents appelaient une verbalisation au moyen de verbes conjugués. Le temps grammatical du récit qui suit les phrases en V-ing étant le passé, j'ai préféré opter pour des imparfaits, même si je prends le risque de proposer des présents pour les deux premières occurrences. Si l'on se rappelle qu'au moment de publier ce billet, je suis dans la situation fictionnelle du candidat après le premier jet au brouillon, ce choix fait partie des options sur lesquelles je reviendrai(s) peut-être dans un second temps.
Par ailleurs, on peut retrouver ici le texte du chapitre 17 de Babbitt.
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Voici donc ce que je propose, provisoirement. Les nombres entre crochets sont évidemment ajoutés pour permettre la fragmentation en unités de traduction, et surtout les commentaires.
[1] A snow-blanched evening of ringing pavements and eager lights.
>>> Un soir blanchi par la neige, tout en trottoirs qui résonnent et vives lumières.
[2] Great golden lights of trolley-cars sliding along the packed snow of the roadway.
>>> Immenses lumières dorées des trolleys qui passent en glissant sur la neige tassée de la chaussée.
[3] Demure lights of little houses.
>>> Lumières sages des maisons basses.
[4] The belching glare of a distant foundry, wiping out the sharp-edged stars.
>>> Au loin la lumière, aussi criarde qu’un rot, d’une fonderie, et qui effaçait les étoiles aux contours bien nets.
[5] Lights of neighborhood drug stores where friends gossiped, well pleased, after the day’s work.
>>> Lumières des épiceries de quartier, où on potinait entre amis, bien contents, après une longue journée de travail.
[6] The green light of a police-station, and greener radiance on the snow; the drama of a patrol-wagon-gong beating like a terrified heart, headlights scorching the crystal-sparkling street, driver not a chauffeur but a policeman proud in uniform, another policeman perilously dangling on the step at the back, and a glimpse of the prisoner.
>>> La lueur verte d’un commissariat, qui se réfléchissait en éclats plus verts encore sur la neige, l’apparition mouvementée d’un fourgon de police qui passait en faisant sonner son alarme comme un cœur en proie à la terreur, les phares qui balayaient la rue aux scintillements de cristal, le conducteur qui n’était pas un chauffeur mais un policier portant fièrement son uniforme, on voyait un autre policier se tenir de façon précaire sur le marchepied, et on apercevait à peine le prisonnier.
[7] A murderer, a burglar, a coiner cleverly trapped?
>>> Un meurtrier, un cambrioleur ou un faux-monnayeur qui s’est fait pincer habilement ?
[8] An enormous graystone church with a rigid spire; dim light in the Parlors, and cheerful droning of choir-practise.
>>> Une immense église en pierre grise, flèche bien droite, pénombre dans les parloirs, et le babil enjoué du chœur en pleine répétition.
[9] The quivering green mercury-vapor light of a photo-engraver’s loft.
>>> La lumière, vacillante et verte sous l’effet des vapeurs de mercure, d’un atelier de photographie.
[10] Then the storming lights of down-town;
>>> Puis les lumières ardentes du centre ville,
[11] parked cars with ruby tail-lights;
>>> les feux arrière, couleur rubis, des voitures garées,
[12] white arched entrances to movie theaters, like frosty mouths of winter caves;
>>> les entrées des cinémas, aux arcatures blanches, comme l’entrée gelée d’une grotte en hiver,
[13] electric signs—serpents and little dancing men of fire;
>>> les enseignes électriques (des serpents et de petits bonshommes en feu),
[14] pink-shaded globes and scarlet jazz music in a cheap up-stairs dance-hall;
>>> des globes entourés d’un halo rose, et la musique de jazz – écarlate – qui résonne à l’étage, dans un dancing populaire,
[15] lights of Chinese restaurants, lanterns painted with cherry-blossoms and with pagodas, hung against lattices of lustrous gold and black.
>>>les lumières des restaurants chinois, leurs lampes peintes aux motifs de fleurs de cerisier et de pagodes, et accrochées à des paravents noir et jaune vif.
[16] Small dirty lamps in small stinking lunchrooms.
>>> De petites lampes sales dans de petits réfectoires nauséabonds.
[17] The smart shopping-district, with rich and quiet light on crystal pendants and furs and suave surfaces of polished wood in velvet-hung reticent windows.
>>> Le quartier des boutiques chic, dont les lumières opulentes et paisibles coulent de lustres en cristal, et les fourrures, la surface doucereuse du bois poli dans des vitrines discrètes aux rideaux de velours.
[18] High above the street, an unexpected square hanging in the darkness, the window of an office where some one was working late, for a reason unknown and stimulating.
>>> Plus haut dans la rue, une place inattendue, plongée dans l’obscurité, la fenêtre d’un bureau où quelqu’un travaillait tard, pour une raison inconnue, source de questions.
[19] A man meshed in bankruptcy, an ambitious boy, an oil-man suddenly become rich?
>>> Un homme enchevêtré dans une histoire de faillite, un adolescent ambitieux, un spécialiste du pétrole qui vient de faire fortune ?
[20] The air was shrewd, the snow was deep in uncleared alleys, and beyond the city, Babbitt knew, were hillsides of snow-drift among wintry oaks, and the curving ice-enchanted river.
>>> L’air était aux magouilles, la neige épaisse dans les ruelles non dégagées, et, en dehors de la grande ville, Babbitt le savait, il y avait, sur les flancs des collines, des chênes glacés par l’hiver et les congères, et le fleuve sinueux transfiguré par la glace.
[21] He loved his city with passionate wonder.
>>> Il aimait sa ville avec un émerveillement passionné.
[22] He lost the accumulated weariness of business-worry and expansive oratory;
>>> Il sentait se détacher de lui la lassitude accumulée au gré des soucis professionnels et de discours interminables,
[23] he felt young and potential.
>>> il se sentait jeune et Plein de vigueur /prêt à tout casser/.
[24] He was ambitious.
>>> Il était ambitieux.
[25] It was not enough to be a Vergil Gunch, an Orville Jones. No.
>>> Être un Vergil Gunch, un Orville Jones, ce n’était assez, oh non.
[26] “They’re bully fellows, simply lovely, but they haven’t got any finesse.”
>>> « Ce sont des rustres, adorables certes mais dénués de finesse. »
[27] No. He was going to be an Eathorne; delicately rigorous, coldly powerful.
>>> Non. Ce qu’il serait, c’est un Eathorne : rigueur subtile & puissance austère.
[28] “That’s the stuff. The wallop in the velvet mitt. Not let anybody get fresh with you.
>>> « Voilà, c’est ça. La gifle sous le gant de velours. Pas laisser qui que ce soit vous prendre de haut.
[29] Been getting careless about my diction. Slang. Colloquial. Cut it out.
>>> Me suis laissé aller, sur le plan verbal. De l’argot. Des familiarités. Fini, ça.
[30] I was first-rate at rhetoric in college. Themes on— Anyway, not bad.
>>> A la fac, j’étais doué en rhétorique. Des thèmes qui traitaient de… bon, enfin, je me débrouillais.
[31] Had too much of this hooptedoodle and good-fellow stuff.
>>> J’en ai eu ma dose des verbiages et de faire le gentil.
[32] I— Why couldn’t I organize a bank of my own some day?
>>> Pourquoi ne pourrais-je pas fonder ma propre banque, un jour ?
[33] And Ted succeed me!”
>>> Oui, et Ted me succèderait ! »
[34] He drove happily home, and to Mrs. Babbitt he was a William Washington Eathorne, but she did not notice it.
>>> Il rentra chez lui en voiture, parfaitement heureux. Pour sa femme, c'était un autre [un homme de la trempe de ?] William Washington Eathorne, bien qu’elle ne le remarquât pas.
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* Ajout publié sur Facebook à 12 h 20 :
Il m'arrive un truc amusant. Voulant vérifier ma traduction pifométrique de "hooptedoodle", et ce donc dans l'outil lexicographique le plus complet qui soit, j'ai nommé l'OED, voici ce qui se passe :
"No exact results found for hooptedoodle in the dictionary."
Vérification faite, Elmore Leonard aurait prétendu qu'il s'agissait d'un terme forgé par Steinbeck en 1954, alors qu'on le voit apparaître déjà dans Babbitt (1922). L'absence de ce terme dans l'OED, qui répertorie pourtant foultitude d'archaïsmes, argotismes et termes dialectaux est très curieuse.
Ce blog en donne une définition qui fait de ma traduction pifométrique ("verbiages") une des meilleures possibles ;-))
Best possible example of what I always say : if you spot a word you've never come across, well then not having come across it will be the case of at least 90 percent of the other "candidats", so translate it as close as possible, and it'll be fine. So at that level translation (especially from English to French for French native speakers) is not about vocabulary.
11:31 Publié dans WAW | Lien permanent | Commentaires (10)
vendredi, 30 mars 2012
M.Y.C.Y.X.
Que veut dire ce mot, mycyx – ou plutôt : MYCYX –, signifiant formé par les 5 photographies de Mihael Milunovic constituant, pour la pochette de l’album du Bojan Z. Tetraband, Humus, les 5 rabats de verso ? Pourquoi ces textures, froides ou bitumineuses, sang-de-bœuf figé ou peinture semi-effacée sur gravier gris multicolore ?
Pourquoi les textures parlent-elles ? De quoi nous parlent-elles ? De l’informel soudain formé (cf Duns Scot) ? Ou des litanies de questions qui ne cesseront de s’enchaîner, comme autant de souffles de brise, ou d’éclats de verre ?
Le pianiste, plus que jamais, sonne colosse.
Le tromboniste, avec ou sans sourdine, travaille le son jusqu’à l’os.
La basse, avec Ruth Goller, est en ronde-bosse.
Et le batteur a (bonnes peaux) bon dos.
╩ Fuzzlija, Bojan Z., l’a aussi joué, depuis, avec son vieux complice Lourau. ═ Et qu’est devenu, texture sonore aussi archipel, The Joker ? Emporté par l’onde-monde. ╚ Texturologies. Texturologies encore. Pyrrhocores ou pas, graviers ou non – texturologies toujours. ╦
La chèvre chie sur ses petits. Ce n'est pas une allégorie.
La chèvre chie sur les chevreaux. C'est ce qu'on voit sur la photo.
15:22 Publié dans Jazeur méridional, Un fouillis de vieilles vieilleries | Lien permanent | Commentaires (0)
Du long pourrissement de Mohamed Harinordoquy
Tiens, un énième exemple (sans mériter la une du JT de France 2 comme le collègue du lycée Chaptal) de la nécessité de savoir lire, réfléchir et recouper ses sources quand on fait des recherches sur Internet : l'entrée "Thomas Fersen" sur Wikipedia (très mal fichue, ce qui déjà incite à la prudence*) signale en cours d’article que le chanteur a adopté son nom de scène en 1986, sans jamais donner, toutefois, le « vrai nom » de l’artiste. Intrigué, j’ai fait quelques recherches et découvert que la page WP avait été, à un moment donné, piratée par un plaisantin : pendant quelques jours (quelques semaines ?), on pouvait donc lire dans la WP que Thomas Fersen était de père kurde et de mère basque, et se nommait en fait Mohamed Harinordoquy. Il s’agit évidemment d’un canular total – dont il ne serait d’ailleurs pas surprenant que Fersen ou des amis à lui (le facétieux Pierre Sangra ? le déjanté Alexandre Barcelona ?) l’aient fomenté.
En vertu des processus de vérification constante, il y a belle lurette que l’entrée WP ne mentionne plus ces informations farfelues (erronées). Eh bien ! Essayez de taper « vrai nom de Thomas Fersen » dans Google : vous verrez que cette pseudo-info a été largement reprise et que
- il n’est pas possible de déterminer si Thomas Fersen est un pseudonyme
- la référence à « Mohamed Harinordoquy » fleurit de ça de là
Il y a donc, sur ce détail sans importance, foule d’informations contradictoires, qui découlent d’un petit canular de trois fois rien, et – par conséquent – absence totale d’informations. « Pourrir le Web », comme dirait l’autre, c’est monnaie courante**, c’est d’une facilité consternante… et c’est totalement indigne, en tant que méthode pédagogique, d’un enseignant, fût-il dépressif, hautain et réactionnaire – ou les trois à la fois, comme Loys de Chaptal.
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* Je tiens à préciser/rappeler que, contrairement à ce qu'écrivent un certain nombre d'internautes (dont des enseignants), Wikipedia n'est pas du tout "un nid à conneries". Il y a un certain nombre d'entrées douteuses, ou dont certaines sections n'ont pas été suffisamment vérifiées. Il n'en demeure pas moins, que même la WP francophone (la WP anglophone est encore beaucoup plus documentée et fiable) propose un contenu plus riche que n'importe quelle encyclopédie papier (Universalis et Britannica incluses). Evidemment, dans la masse, beaucoup des "sujets" traités sont dérisoires : par exemple, la WP anglophone consacre un long article (16 sections et 210 notes de bas de page) à la chanson Born This Way. Mais il ne faut pas jeter le bébé avec l'eau du bain ! Quand on sait s'en servir (notamment par le truchement des catégories, des liens internes ou des liens entre les différentes WP (colonne de gauche)), Wikipédia est un irremplaçable outil de connaissance et de langue.
** Concernant le débat autour du pseudo-exploit de Chaptalman, il y a eu de nombreux échanges sur Facebook. Pas le courage de les recopier ici. Sinon, certains commentateurs de Rue89 n'ont pas donné dans le panneau de la démagogie et de la célébration irréfléchie de Loys-le-faussaire.
10:11 Publié dans Autres gammes, Indignations, WAW | Lien permanent | Commentaires (0)
jeudi, 29 mars 2012
2600 - Trois de Sanguësa
10:07 Publié dans Mirlitonneries métaphotographiques | Lien permanent | Commentaires (0)
mercredi, 28 mars 2012
Pétage de plombs en zone diurne
Chaque poème semble s'échanger contre ce qui le consume ou le mine. On dit ça, on dit ça. Et les perroquets, pourquoi ? Oh, ça va vite. C'est ce qu'on dit, dites.
Pourquoi les perroquets, ou plutôt la perruche, plutôt que les furets ou les gerbilles ?
On est à Chinon.
On se prend le chignon.
Les crêpes sont recouvertes d'un mouchoir de linon.
Fais passer le message à ton tonton.
Ce n'était pas Chinon, mais une loge de concierge, dans le quartier Blanqui, à Tours. (Balivernes.) Alors, là, vraiment, c'est le bouquet, ça dépasse l'entendement, c'est la queue de mickey et tout le tremblement, on peut définitivement dire que chaque poème semble s'échanger contre ce qui le consume ou le mine (et des couleurs je m'en bats l'os).
18:53 Publié dans Le Livre des mines | Lien permanent | Commentaires (0)
mardi, 27 mars 2012
Ci-gît Sherlo(c)k Holmes
Ce midi, je dégustais un couscous en excellente compagnie.
Je ne pouvais donc pas, contrairement à hier, contempler ma fruste table à la façon de Morandi, ni lire avant d'être servi la page que Jean Frémon consacre, dans Rue du Regard, à Morandi.
Et avec ces prétéritions, deux liens photographiques en guise de bout de ficelle, et l'idée que je pourrais/devrais écrire un jour une Rue de l'Oreille, je bricole un billet fissa histoire de ne pas laisser passer un mardi en waste land.
╬╬╬ Ci-gît Sherlock Holmes, privé de son C, et massacré dans le bureau, avant le couscous (justement). ╬╬╬
22:09 Publié dans Moments de Tours, Zestes photographiques | Lien permanent | Commentaires (0)
lundi, 26 mars 2012
La marche, Lamarche
(En théorie, c'est un billet jazz qui devait reléguer ce billet-ci, qui figure encore pour quelques minutes au bas de la page d'accueil, dans les pages invisibles.)
Levé à la même heure que d'habitude, arrivé une demi-heure plus tard à l'Université -- parce que j'ai pris le bus, tout simplement. 40 minutes de porte à porte, au lieu d'une dizaine à peine, on s'étonnera que peu de gens choisissent encore les transports en commun. Il se trouve que le seul bus "direct" met 40 minutes à couvrir les 6 kilomètres de la Petite Arche aux Tanneurs, et que je préfère prendre une autre ligne, m'arrêter aux Ursulines, et marcher jusqu'à la fac en remontant la rue Blanqui puis la rue Colbert. Vivement, quand même, le tramway. Vivement, surtout, la fin des travaux du tramway.
Outre la satisfaction de polluer un peu moins, j'aime marcher, et suis convaincu que, si je ne me ressens pas parfaitement tourangeau, c'est que mon mode de locomotion habituel est la voiture, justement. Il y a bientôt sept ans, lorsque j'ai commencé de tenir ces carnets (dans l'espoir, à l'origine, d'en faire une sorte de Département du Gers version ligérienne), je me sentais presque plus (ou mieux) tourangeau qu'aujourd'hui, sans doute parce que les trajets sont devenus ordinaires, que les émerveillements du début se sont estompés. Surtout, j'avais passé la première année universitaire (2002-2003), ne vivant à Tours encore que deux jours par semaine, à beaucoup marcher, surtout le lundi soir. Puis, les années suivantes, avec un seul enfant (et une seule bagnole), il y avait des moments de déambulation, qui ont fini par s'évaporer, aussi parce que, à partir de 2007, entre la naissance d'Oméga et l'accroissement des responsabilités administratives, mon agenda s'est beaucoup resserré. Dans cette ville où les boulevards sont des avenues, je sais, pour l'avoir vu, que le boulevard Maeterlinck n'est qu'une ruelle -- mais je ne l'ai vu que depuis ma voiture, en passant -- cela n'a aucune espèce de sens.
Toujours est-il que je me sens , finalement, assez peu autochtone. Le mot autochtone devrait tirer son origine de la marche ; que je sache, ce n'est pas le cas.
07:41 Publié dans Moments de Tours, Questions, parenthèses, omissions | Lien permanent | Commentaires (0)
dimanche, 25 mars 2012
W.M. 38 : Childéric Ier
Un homme d'Ergué-Gabéric
Mélange toujours Childéric
Ier avec l'infime
Autre paronyme,
Ce vieux bâtard de Chilpéric.
11:04 Publié dans Wikimericks | Lien permanent | Commentaires (0)
samedi, 24 mars 2012
W.M. 37 : Comparaison
22:20 Publié dans Wikimericks | Lien permanent | Commentaires (0)
vendredi, 23 mars 2012
Iy-aa
Iynx était la fille d'Io.
J'apprends son existence en lisant Aa.
17:54 Publié dans Aphorismes (Ex-exabrupto) | Lien permanent | Commentaires (0)
Arc-de-linotte
23 mars 2012. — Ab Baars fit ce périple avec nous. Il rentrait de trois semaines affreuses à Astana, et dans cette ville il avait enregistré deux albums, un avec son ami Wolter Wierbos et des musiciens kazakhs, l’autre en duo avec le pianiste Viktor Khomenkov. Tout s’était très mal passé, surtout la bouffe était, disait-il, dégueulasse. Au moins aurait-il aimé ne serait-ce qu’effleurer un peu de ce vaste pays, en dehors de la capitale née de rien, même pas des ruines. Les cuisiniers, là-bas, confondent mardi et vendredi. (Ainsi disait-il – une expression qui nous échappait, mais Ab souvent entassait de telles formules.) Dégoûté, il est. Revient avec des roubles en skaï. Son sax dessine des arcs, il doit tout reprendre à zéro. Il était heureux, disait-il, de nous accompagner un bout de chemin, peut-être pas, tout de même, jusqu’à l’estuaire. It’s now the taming of a shroud. La nature se tape un bol à la santé du rossignol. En 2009, c’était une autre affaire. Mais ce voyage-ci, ce périple (comme nous avons pris pour habitude de l’appeler), est une autre paire de manches. Ab Baars ne connaît pas Saint-Vaast la Hougue. Et alors, cela vous paraît-il anormal ?
Je craque.
Rien n'est résolu, tout se calme. Le texte se fissure.
Je craque, je craque aux entournures.
Il était une dame Tartine. Ça vous apprendra à écrire un premier jet, puis à ajouter à l’infini des phrases au milieu des phrases, même vous, vous n’y comprenez plus goutte, bien fait.
Ah enfin, on respire, on prend un bol d’air, c’est le printemps (un filet de sang qui se répand sur le plan), et Ab Baars sort son ténor, le monte précautionneusement devant nous, on s’est tous installés sur un talus, une levée au-dessus de la Loire, et tous nous l’écoutons, quel plaisir. Ab respire, s’éponge, quel plaisir de l’écouter. Ab aime le mot tocard. Il le prononce un peu à la maghrébine. Il est heureux de jouer, quel plaisir, ce talus, quel plaisir de l’écouter. Lui dit qu’il veut s’envoyer une pleine fricassée de poissons (il confond, je crois, avec le mot friture). Quel plaisir de l’écouter. Il nous joue des airs traditionnels, improvise des fureurs, et termine en rigolant derrière son bec, en se rengorgeant, par de vieilles chansons françaises. C’était en mars. C’était en mars. Il a rendu les armes, déposé son frac, plié sa jaquette. Ab nous enchante, tous nous nous sommes levés. Christelle entonne la vieille chanson. Il était une dame Tartine. La connaît par cœur.
La couverture craque. Craque aux entournures. N’avez-vous pas boutonné, de travers, votre veste ? Le texte, à peine repris par-dessus l’encre séchée (craquelée), se fissure. (Vous confondez, je crois, Sylvain Beuf et Claude Becq. Je craque, craque aux entournures.) Le texte se fissure déjà. — Vous confondez, je crois, avec le mot friture. Vita brevis. On s’aperçoit, dans un pouffement, que Bernard (encore lui ! encore Bernard ! la chatte me griffe, mécontente de voir revenir ce triste sire ! rôdait-il du côté de la salle 67 ??) confond La Teste et Saint-Vaast !!! Comme nous ne sommes pas loin de Saint-Lambert, on pourra le détromper. D’une part, le saxo ; on the other hand, l’aquarelle.
Les indices sont suffisants pour qu'on soit certain que quelque chose se passe. D’un côté, Cortazar ; de l’autre, les églises. Ab Baars entasse divers objets dans son havresac, et vogue la galère, on reprend la route, on n’est pas fatigués, il joue du ténor tout en marchant à vive allure. Il lui tarde de s’empiffrer de fricassée. C’était en mars. Continue le périple (comme nous avons pour habitude de le nommer). Nous allons détromper Bernard. Vous confondez, je crois, percaline et porcelaine. Le texte se fissure, tandis que continue le périple, et vous fêterez, dans les crevasses (les craquèlements ?) du texte, vos noces de froment.
16:05 Publié dans Entre Baule et Courbouzon | Lien permanent | Commentaires (0)
Brouillons d'onze heures
Mon ordinateur fait un boucan de Boeing, et je ne cesse de devoir jeter des vieux documents à la corbeille pour faire un peu de place – naviguant sans cesse entre 400 et 800 mégaoctets de mémoire disponible, ce qui est trop peu, bien sûr – mais, autant par souci de ne pas envoyer au recyclage (et encore, est-il bien sûr qu’il y ait recyclage ?) que par radinerie, je ne peux me résoudre à en acheter un nouveau.
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En ce moment, ça pue le kérosène tous les jours. Saloperie d’avions militaires, et de pilotes qui ne servent à rien.
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Facebook sert aussi à s’interroger sur des questions épineuses, ainsi de l’hésitation entre indicatif futur et conditionnel présent pour la structure idiomatique qui se dit plus qu’elle ne s’écrit : « je te ferai dire » ou « je te ferais dire ». Je penche pour la première option (plus grand autoritarisme de l’énonciateur), mais pas eu le temps de faire de véritables recherches
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Si les touffes de poils sont un signe qui ne trompe pas, la chatte a recommencé à passer ses nuits sur sa chaise favorite, la blanche, au sous-sol, à côté des étagères à chaussures. Pendant l’hiver, elle avait dû prendre ses quartiers à la buanderie, entre deux coussins, dans le vieux meuble hi-fi en mélaminé blanc. Là, m’ayant accompagné sur la terrasse où j’étendais un peu de linge (que je crains de devoir rentrer s’il s’avère que les effluves de kérosène sont pour la journée entière), elle y est restée, et lézarde.
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J’écoute The Apple in the Dark, duo du batteur Gerry Hemingway et du pianiste/saxophoniste Ivo Perelman. Disque remisé depuis un bon moment. Et je voudrais écrire quelques phrases sur les deux minces récits traduits du basque que notre ami Cyril nous a envoyés – promotion copinage – avant d’aller faire une course, le plein, puis chercher Alpha à l’école.
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10:49 Publié dans Autres gammes, Moments de Tours, Questions, parenthèses, omissions | Lien permanent | Commentaires (0)
Cock & Bull (Will Self)
Lu il y a déjà deux semaines et demie, dans le train, entre Tours et Bordeaux. En fait, je n’ai lu que le premier des deux récits, Cock : A Novelette. Dans le train, c’était l’idéal, puisque la scène du récit (pas l’histoire, mais l’endroit où elle est racontée et se dénoue – tragicomiquement) est un compartiment de train. Dans la mesure où il s’agit évidemment d’un diptyque, je ne devrais pas rendre ce livre à la B.U. (ah, que deviendrais-je sans la B.U. ? quand je pense aux centaines (peut-être va-t-on jusqu’au millier, en comptant les années oxoniennes et nanterroises) de livres que j’ai lus depuis des années sans les acheter et sans en encombrer mes étagères !) sans avoir également lu Bull : A Farce. Mais si jamais je devais manquer de temps, eh bien, je prends au moins quelques minutes pour noter ici, en vrac (après tout, plus personne ne me lit et je peux mettre le oaï dans mes propres carnets), les bribes manuscrites issues du voyage ferroviaire.
* Le genre de la novelette, inventé par Will Self dans ce qui doit être un geste de titrage parodique, trouve tout son sens dans le sujet de ce récit, l’hermaphrodisme (plus français qu’italien, plus novelette que novella). Autre jeu sur les signifiants : l’épouse de Dan, Carol, est – en tant que narrateur – « the Don ». Outre le côté très « vieille Angleterre » de la dénomination, il y a sans doute un jeu sur le sous-texte mafieux, voire quelque chose à creuser du côté de Cholokhov (dont le pavé a pour titre, en anglais, And Peaceful Flows the Don), ou du boustrophédon Don/Nod (le pays de Nod > refuge et punition de Caïn (l’errance)).
* Le récit consiste en fait en un viol du narrataire (le narrateur est tout autant pro- qu’anta-goniste, hybride aussi en cela). L’antisémitisme de l’hermaphrodite (complexe, ambivalent).
* Le pénis de Carol : « Was it just her imagination, or could she, with her probing digit, actually feel some kind of structure to the frond ; some internal viscosities of its own that suggested that it was not simply a raggle-taggle end of gristle, but something sensate ? » (p. 30)
* Sexualité et quasi-redoublements: «I doubt your ability to endure the trufflings and mufflings beneath the patterned cover. […] He nuzzled and snuffled, little bleatings issued from his lips. » (p. 65)
* La bière mauritanienne: “Black Mambo” (p. 85). (Il semble que ce soit une pure invention de Will Self.)
* Couleurs et allitérations : « Carol did her best to blush, but all it really amounted to was a beige tinge at the edges of her foundation. ‘Oh, oh, that.’ Dan was far better at it, he went puce to the roots. » (p. 102)
* Viol et quasi-redoublement: « Defiled me insofar that as he raped me he screamed and ranted, gibbered and incanted the most awful mish-mash. » (p. 125)
09:59 Publié dans Lect(o)ures, Pynchoniana | Lien permanent | Commentaires (5)