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mercredi, 07 septembre 2011

Le gris, le palimpseste


« Produit de sept ou huit couches de peinture blanche sur une couche de peinture blanc et noir, mon fond actuel a l’épaisseur grasse que je lui souhaitais, et sa clarté grise, conquise de haute lutte, se souvient très bien du noir qu’elle a eu tant de mal à recouvrir. Or c’est exactement ce que j’aime, dans les tableaux (et dans les phrases) : que chaque couleur se souvienne de toutes celles dont elle a triomphé. Il faut viser au palimpseste. » (Renaud Camus. Parti pris, p. 49)

5729 Couverte-Boîte n° 6 (12.VI.2011, YHWH 16), huile sur toile, 40x40x8

 

« Il me semble qu’il n’y a rien de plus désirable pour un peintre que d’être sacré le maître des gris. Sur les sept heures du soir j’étais enchanté de mon gris, mais à huit heures et demie il m’a semblé parfaitement plat. Nous verrons ce qu’il en est demain. » (p. 200)

 

Cinq ultimes limericks basques

Ascain / Azkaine, Pyrénées Atlantiques: l'église

Un teuton passant à Azkaine
S'exclama "Na, da gibt es Keine !"
Il cherchait une Basque
à qui tâter le masque,
Ce Teuton frivole d'Azkaine.

 

Ainhoa, Pyrénées Atlantiques: plumbago et balcon fleuri

Sur un balcon, un plumbago,
Se plaignait d'un fort lumbago.
"Que serait-ce, aïtzatzernu !
Si j'étais planté les pieds nus ? "
Interjeta-t-il tout de go.

 

 

Ainhoa, Pyrénées Atlantiques: cadran solaire de l'hôtel Ithurria

Le dessinateur Iturria
A la manie, lorsqu'un mur y a,
D'y poser un cadran solaire
Dont l'aiguille est une molaire.
(Dans la féria, c'est la furia.)

 

 

Saint Jean de Luz,  Pyrénées Atlantiques

L'ex-maire de Saint-Jean-de-Luz
Travaille moins pour gagner pluz
Et passe le pays au Pliz
Sans dépoussiérer les nantiz.
(Oh, ces rimes, n'en jetez pluz !)

 

 

Ascain / Azkaine, Pyrénées Atlantiques: herriko etxea / la mairie

Un Landais, passant à Ascain,
Eut le désir un peu coquin
De tâter de la semelle
Une marche un peu margelle
Lorsque survint un Basque. (Un.)

mardi, 06 septembre 2011

Quatre autres limericks basques

Iholdy / Iholdi, Pyrénées Atlantiques: chemin de croix dans l'église

Un jouvenceau d'Iholdy
Pensait "Je n'ai pas de bol, dis :
Les demoiselles du village
Ont toutes plus de cent ans d'âge,
Même à l'église d'Iholdy."

 

 

Ainhoa, Pyrénées Atlantiques

Un habitant d'Ainhoa
Détestait Yannick Noah.
"A-t-on idée, gatzaïenu*,
De chanter toujours les pieds nus ?"
Faut pas désespérer accabler Ainhoa.

 

 

Orègue / Oragarre, Pyrénées Atlantiques: cimetière à côté de l'église Saint Jean Baptiste

Un étudiant d'Oragarre
Hurlait, tout comme un égaré :
"Je ne comprends que dalle
Aux stèles discoïdales -
Même pas à Oragarre."

 

 

Ainhoa, Pyrénées Atlantiques: l'église Notre Dame de l'Assomption (XIII°), vierge à l'enfant (Notre Dame de l'Aubépine / Arantzetako Ama Birjina)

Notre-Dame de l'Aubépine
Cache, de Jésus, la........ nuque.
Si autre chose vous pensez,
Vous avez idées mal placées --
Tout ne cède pas à la rime.

 

 

* gatzaïenu : interjection basque, inventée pour trouver une rime avec "pieds nus".

Cinq limericks basques des 4 et 5 septembre

 

St Palais / Donapaleu , Pyrénées Atlantiques: la Bidouze en amont du pont

De certain vieux gâteux de Donapaleu,
Sa famille se plaint : "Il est où ? il est où ?"
Je vous secours, allez :
Il est à Saint-Palais,
Ce vieux gâteux grincheux de Donapaleu.

 

Orègue / Oragarre, Pyrénées Atlantiques:  l'église Saint Jean Baptiste (1670 ou 1760?)

Une dame pieuse d'Orègue
Etait, je l'avoue, un peu brègue,
Au point que le curé
Préféra se murer
Dans le mutisme et l'église d'Orègue.

 

Arbouet-Sussaute / Arboti-Zohota, Pyrénées Atlantiques: fronton place libre

Un jouvenceau d'Arbouet-Sussaute
Aimait beaucoup le Grand Soussotte,
Dargelos et l'Armagnacaise -
Mais chez lui, rien, sinon basquaise,
Fromage de brebis, pelote.

 

Armendarits / Armendaritze, Pyrénées Atlantiques

Un villageois d'Armendarits
Prenait sa maison pour le Ritz,
Son canasson pour Crin Blanc
Et sa meuf pour Fanny Ardant.
(Ils picolent, à Armendarits.)

 

Méharin/Mehaine, Pyrénées Atlantiques: le nouveau fronton place libre

C'est au fronton de Méharin
(Rose, ô, plus rose qu'un tarin)
Que le duo basque Orgambide
A la pala a pris un bide :
Txitzagantxa (Trente à rin.)

3 notules du 10 juillet

10 juillet 2011.

 

Coursayre, 1

 

Le 9 juillet, nous avons vu les deux premières courses de l’année.

Audignon, très au-dessous du médiocre (Deyris) : placement très lent de plusieurs vaches (dont Majesté et la vache de l’avenir en 1ère partie), figures globalement moyennes, plusieurs méchantes tumades. Confirmation que Thomas Marty n’est pas du tout en forme cette année. (Plassin à l'escalot.)

Le soir, Castelnau-Tursan (Dargelos). Mieux, mais pas transcendant. Belle place – arènes donnant sur l’église au curieux clocher, et la belle maison à sa gauche. Lendresse à l’escalot.

 

 

 

Météo, 1

Il y a aussi qu’il ne fait pas beau. Il ne fait pas chaud, depuis deux jours – pas froid, bien sûr, mais pas du tout un temps estival. Nuages, grisaille, et même pas de lourdeur. À Audignon, du soleil par intermittences nous bronzait, mais aujourd’hui dimanche rien n’a percé entre les voûtes grises.

 

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Insecte ascendant [2]

 

Je ne vois plus le minuscule hypoforficule qui trottinait entre mes lettres ce matin. M’étant aperçu que le moteur de cet ordinateur portable (de plus en plus vieux) ne commence à vrombir de façon désagréable qu’au bout d’un gros quart d’heure, j’ai décidé de m’efforcer de limiter mes passages sur ce clavier et cet écran à des périodes de vingt minutes au maximum, ce qui aura le triple mérite de concentrer mes efforts d’écriture, de préserver mes oreilles… et de garantir de longues heures véritablement en famille. (Ainsi, je viens de passer une heure au salon à passer des puzzles d’Oméga aux pages d’Indignation, back and forth, to and fro.)

 

jeudi, 01 septembre 2011

Rectificatifs (= c'est l'écriture)

J'ai passé un moment assis dehors, sur la terrasse, à profiter d'une des dernières soirées, peut-être, de lecture vespérale, entre les 244 étourneaux perchés sur l'immense grue Potain du chantier voisin, la tourterelle sur l'antenne télé et la pie (qui se trouvait, ce soir, dans la gouttière des Huppenoire), et à aller d'un livre à l'autre -- le livre à couverture parme (Max Aub) et le livre à couverture orange (Elsa Morante) -- tout en essayant de rendre hommage, par la pensée, à la chaise défoncée sur laquelle j'étais assis et qui achève de rendre l'âme sous mes fesses : cette chaise, que, comme ses trois congénères, nous avons achetée (très d'occasion, à la Trocante) lors de notre installation dans l'appartement de la rue du 51ème R.I., à Beauvais, pourrait témoigner, avant d'aller à la benne à laquelle je finirai bien par la condamner, de bien des moments de notre vie au cours des quatorze dernières années. Cela mérite sûrement, pour ouvrir le mois de septembre, une double citation.

Il lui semblait voir Venise, comme une mer tranquille, sur laquelle d'énormes anges de marbre marchaient sans toucher l'eau, les pieds nus, avec de longues robes tombantes. *

Ils rectifient. Ils ont des visions. **

 

Tous les anges, dans leurs robes (étourneaux criards, pies volages), ont des visions, et nous, nous rectifions.

 

 

* Elsa Morante. "Le voyage", traduction de Sophie Royère - in Récits oubliés (Verdier, 2009, p. 136)

** Max Aub. Campo del Moro (1963). Traduction de Claude de Frayssinet. Les Fondeurs de brique, 2011, p. 26. [Il s'agit du tome 5 du Labyrinthe magique.]

mardi, 30 août 2011

À bâtons rompus

(10 juillet)

Bien entendu, j’ai emporté, pour ces six semaines surtout landaises, beaucoup trop de livres, ou de travail, ou de livres pour le travail. J’ai aménagé le bureau de la maison hagetmautienne de manière à avoir cet ordinateur portable branché, et installé près du vieil ordinateur qui ne sert quasiment plus jamais (et qu’on ne garde qu’en cas de panne, au cas où, ou par un inexplicable conservatisme) ; j’ai rangé sur deux étagères distinctes les affaires de C. et les miennes (livres à lire, livres de Roth lus et dont je veux tirer des fiches). C’est en regardant cette étagère, et d’autant que trois livres en cours de lecture sont à la chambre ou au salon, que je me dis qu’à coup sûr j’ai emporté, pour ces six semaines (dont une, au moins, aura lieu ailleurs, dans l’Aude), trop de lecture. À côté de moi, c’est-à-dire à côté (à gauche) du clavier de l’ordinateur portable, sont posés American Pastoral, avec la bibliographie officielle établie par Paule Lévy, et Parti pris.

Avant-hier soir, avant le samedi sans lecture (nettoyage, installation d’une boîte à lettre sur piquet métallique, ébranchage, courses landaises), j’ai commencé Indignation, un des très brefs et récents romans de Roth. Quoique je n’aie pas encore compris le choix du titre, je n’ai pu m’empêcher de repenser à la rubrique Indignations, que j’avais « doublonnée » plus tard, dans mes autres carnets, au moyen de la rubrique Narines enfarinées : ce mot même d’indignation, qui signifie que l’on s’insurge contre quelque chose d’indigne, n’est-il pas quelque peu ambigu ? ne pourrait-on supposer que celui qui s’indigne se rend lui-même coupable d’intempérance, et qu’il est, par là même, indigne de ce qu’il devrait être ? Le récent succès de librairie, tout à fait grotesque, d’un Hessel a marqué de manière claire que, si l’indignation pouvait être présentée comme une vertu, elle n’en était pas moins fortement imprégnée d’indécence, voire d’indignité en tant que stratégie systémique.

(Un des côtés les plus reposants, mais également – c’est tout à fait logique – les moins propices au travail ou à l’élaboration de réflexions écrites, ici, c’est l’absence de connexion Internet. Bien que je persiste à y trouver le principe fondamental d’un ressourcement, ou d’un repos forcé, souvent, il n’en demeure pas moins que, dès que j’essaie de mettre quelque chose au propre, pour mon travail ou en vue d’une publication ultérieure dans un carnétoile, je me retrouve coincé. Ainsi, pour le travail, il faudrait ici que je puisse creuser le sens du titre de Roth, même sans avoir achevé la lecture du roman dont tout me laisse penser, au demeurant, qu’il ne va pas casser trois pattes à un canard ; pour l’écriture, je devrais pouvoir aller farfouiller du côté de l’OED, ou m’enquérir de toponymie – la ville de Digne ?)

Cela s’est déjà produit : un minuscule insecte se promène sous l’écran, entre les lettres du texte qui s’écrit. Tandis que j’écrivais la phrase qui précède, il est passé du v de ville au r d’écriture. (Insecte ascendant.)

Les textes que j’accumule (et encore : pas toujours) lors des séjours landais pourraient être regroupés dans une nouvelle rubrique : À bâtons rompus. Les textes, devenus rares (je m’échinais ou ferraillais plus souvent en 2005 – non que je me sois tout à fait calmé depuis, comme l’affaire Asensio a pu le démontrer, mais j’ai aussi eu ma part de batailles dans le domaine professionnel), de la rubrique Indignations pourraient, eux, porter le titre collectif : À lances rompues. (Ne dit-on pas, pourtant, briser des lances ?)

... ou son blog.

Il n'est pas très agréable, en rentrant chez soi après de longues semaines de repos estival (...), de constater que les chardons, les mauvaises herbes et les roses trémières ont poussé, que l'ampoule extérieure qui normalement ne s'allume qu'en réagissant aux mouvements dans un proche périmètre s'est bloquée (depuis quand ?) et qu'il n'y a pas d'autre solution que de l'enlever, mais encore qu'une voisine que vous ne voyez jamais, qui promène son caniche et à qui vous n'avez rien dit, sauf bonjour, prend soudainement la mouche et se met à vous reprocher tous les maux de la terre.

Il est agréable, en revanche, de prendre le temps, avant le soir, de jouer avec Oméga, et de regarder, en soirée, un film (Los Abrazos rotos), au lieu de se précipiter sur les nombreux paquets à défaire, les mille mails en retard, ou son blog.

lundi, 22 août 2011

13

        Treize, comme le nombre de pétales du rüdbeckia (à l'exception de celui, mangé par un insecte, qui m'a donné envie de composer de nouveaux types de sonnets (avec la lecture en cours, hier, et achevée aujourd'hui, d'ABBA ABBA, rien d'étonnant), et comme le nombre de pas japonais dans le petit parterre créé par mes parents au printemps 2006 -- et comme le nombre de jours de vacances, encore, pour les enfants.

lundi, 15 août 2011

Usé bâti [L'Anémie, I]

Ce que je voulais dire, sans y parvenir, c'est combien l'air me semblait anémié, assorti au matériau usé dans lequel Paris semblait bâti.

(Pierre Bergounioux. Le premier mot. Gallimard, 2001, p. 62)

 

Le moral miné, tout autant qu'intellectuellement exalté, j'ai toujours compris que je ne serais, dans la capitale, qu'un oiseau de passage. Paris, pour moi, fut toujours irrespirable.

lundi, 08 août 2011

Dédain, ou au Quercy (...)

Un charme objectif, intemporel s'attache au pays quercynois où tout m'appelle. Des esprits libres, ennemis déclarés du prosaïsme, des immobilités, ne dédaignèrent pas de s'y établir. C'est ainsi qu'André Breton descendait passer les beaux jours à Saint-Cirq-Lapopie.

(Pierre Bergounioux. Le premier mot. Gallimard, 2001, p. 59)

 

Collégiale de Souillac

 

 

"Charme objectif" : cette formule mériterait tout un long et complexe développement. J'en prends note (hé hé) et préfère :

¤ rappeler que c'est à Saint-Cirq-Lapopie que nous avons fait connaissance de l'œuvre d'Alain Prillard ;

¤ ne pas dédaigner de n'est pas daigner ;

¤ signaler que, si Sant-Cirq-Lapopie nous a semblé charmant, et assez peu "village à touristes", c'est que l'art y était très supérieur aux artisanats de dixième zone qui s'affichent habituellement dans ce que Renaud Camus nomme les beaux villages professionnels, mais aussi qu'après Cordes-sur-Ciel, tout aurait paru délicieusement posé.

samedi, 06 août 2011

Proust en pelisse

Il y a à peine plus de deux ans, lors d'un séjour en Normandie, j'écrivais ceci :

 

Quand on évoque Proust à Cabourg, on ne cesse de dire qu'il était neurasthénique, voire demi-fou, de s'y rendre même l'été en pelisse : en fait, c'était le seul sain d'esprit de toute la côte...!

mercredi, 03 août 2011

Bon Marché, IV

Fallait-il, à tout prix, éviter les impairs ?

 

Jean DUBUFFET, "Bon Marché, IV"

Florine donnait de charmants dîners, des concerts et des soirées très-suivis : on y jouait un jeu d'enfer. Ses amies étaient toutes belles. Jamais une vieille femme n'avait paru chez elle : elle ignorait la jalousie, elle y trouvait d'ailleurs l'aveu d'une infériorité. /... /

C'était des yeux étincelants comme des onyx ou des turquoises bordées de velours noir ou de franges blondes ; des coupes de figures variées qui rappelaient les types les plus gracieux des différents pays, des fronts sublimes et majestueux, ou doucement bombés comme si la pensée y abondait, ou plats comme si la résistance y siégeait invaincue ; puis ce qui donne tant d'attrait à ces fêtes préparées pour le regard, des gorges repliées comme les aimait Georges IV, ou séparées à la mode du dix-huitième siècle, ou tendant à se rapprocher, comme les voulait Louis XV ; mais montrées avec audace, sans voiles, ou sous ces jolies gorgerettes froncées des portraits de Raphaël, le triomphe de ses patients élèves. /... /

Au milieu du souper, Rastignac et Blondet conseillèrent à leur ennemi postiche de ne pas négliger une bonne fortune aussi capitale que celle qui s'offrait à lui. Ces deux roués firent d'un style moqueur l'histoire de la comtesse Marie de Vandenesse ; ils portèrent le scalpel de l'épigramme et la pointe aiguë du bon mot dans cette enfance candide, dans cet heureux mariage. 

lundi, 01 août 2011

"Une rêverie née du souffle émollient de l'été"

Les jeux étaient faits depuis que les sables avaient déposé, durci, dans la lagune permo-carbonifère où Brive, deux cents millions d'années plus tard, serait bâtie. Alors, le grand voyage auquel je rêvais, tourné vers la fenêtre, m'apparaissait pour ce qu'il était, une rêverie née du souffle émollient de l'été, l'oubli persistant de la réalité. Ça ne m'a pas empêché de repenser à Paris, de m'imaginer en possession des mots qui avaient cours là-haut, qui nous intéressaient, mal gré que nous en ayons.

(Pierre Bergounioux. Le premier mot. Gallimard, 2001, p. 45)

 

J'ai lu gangue; j'ai tapé langue; c'était lagune.

Regrets de ne pas avoir écrit au moment de notre semaine en Corrèze (juillet 2006). Souvenirs vifs – est-il trop tard?

Le mot lagune est de ceux qui me poursuivent doucement. (Depuis avant Sylvie Kandé.)

vendredi, 29 juillet 2011

Désunissons

Heureuses sont les natures qui sont sensibles à tout ce qui lie, à tout ce qui est partagé, à tout ce qui permet aux échanges de s'accomplir harmonieusement. La malchance a voulu que, pour ma part, je sois exagérément (et douloureusement) sensible, au contraire, à tout ce qui crée du malentendu, à tout ce qui ne sera pas compris, à tout ce qui ne peut s'échanger. Je vois deux êtres, et tout ce que j'entends, immédiatement, c'est qui va se perdre de sens entre l'un et l'autre, tout ce qui sera reçu de travers, tout ce qui ne se rejoindra jamais dans leurs propos.

(Renaud Camus. Parti pris, journal 2010, Fayard, p. 370)

Un guingois dominical : la cathédrale, la Bibliothèque municipale, deux marcheurs.

mercredi, 27 juillet 2011

Le chasseur idiot (pléonasme)

Le président de la fédération de chasse des Côtes d'Armor a un sens assez spécial du raisonnement. Voici ce que, selon Libération, il a déclaré au sujet des morts de sangliers dans l'estuaire de Gouessant :

«C'est là le fond du problème. Les marcassins n'ont rien à faire sur les plages. Ils sont censés vivre dans les bois et les forêts ! Mais comme la baie de Saint-Brieuc est classée “réserve naturelle”, on n'a plus le droit de chasser. Du coup, les sangliers s'adaptent et occupent les plages. Et voilà le résultat!»

 

Je suis débile, j'ai un flingue, tout va bien...

Dulcis amara

Il a fini par comprendre qu'il devait enregistrer le texte de son billet en le publiant s'il ne voulait pas qu'il soit enregistré à la date de rédaction, mais à la date anticipée de publication. Pas simple, quand même.

Il y a cinq ans, nous nous installions à Chabrignac.

Il y a six ans, je ne saurais dire.

Il y a trois ans, C. et Alpha allaient visiter le château de Brézé, tandis que je suais sur les emplois du temps (c'est l'époque). (Mais publier ce texte le 27 juillet ??!?? ça fausse tout.)

Il y a quatre ans, je ne vois pas, mais à un jour près si : Toscan ou Cagnotte.

Il y a un an (on t'a dit de ne pas faire de fixation sur les années impaires), je passais le dernier jour de l'année universitaire dans mon bureau (il y faisait 33° - ce ne fut pas un été pourri, mais un des rares vrais étés que nous eûmes ces derniers temps) avant de récupérér au débotté un poste de lecteur d'anglais, entre deux portes, au moment de m'échapper.

Il y a deux ans, je lisais Gadda.

Ce n'est pas dans Gadda, toutefois, que j'ai trouvé à admirer la fleur parfaite, au printemps, du prunier, ni la blancheur étoilée de la fleur de prunus. La dague a transpercé la vague de Hokusaï, pour le meilleur et pour tout un empire. Mais, si c'est une figure, une planche, un totem, il ne servira pas d'évoquer Gadda. La blancheur passe seule.

Il y a sept ans, je ne saurais dire. Il y a sept ans, je ne saurais dire.

lundi, 25 juillet 2011

Noirs acolytes

Le premier mot me manquait pour qualifier la seule réalité que j'aie, sinon à proprement parler connue, du moins endurée en personne. Mais il se tenait sans doute quelque part, avec ses maigres, ses noirs acolytes, et il valait la peine, si donc il se pouvait, de mettre la main dessus.

(Pierre Bergounioux. Le premier mot. Gallimard, 2001, p. 45)

 

En novembre, nous entendîmes Vassilis Alexakis, venu parler de son roman Le premier mot. (Tout se dédouble, même la primeur.)

vendredi, 22 juillet 2011

Homecoming

Le Jour ni l'Heure 0538 : Carl Kylberg, 1878-1952, Homecoming, 1938, musée des Beaux-Arts de Gothembourg, Suède, samedi 28 août 2010, 16:55:47 "J'aime mieux le Homecoming de Kylberg, ou son Soleil levant, que n'importe quel Nicolas de Staël." (Parti pris, p. 363)

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mercredi, 20 juillet 2011

Pantalon d'épousaille

Ce n'est pas un été pourri.

Ce n'est pas un été pourri qui vous fera changer d'avis sur les rapiéçages divers d'une année de bonne fortune.

Ce n'est pas un été pourri avec vue sur la montagne.

Ce n'est pas un été pourri dont la trêve sera hivernale. (Juste à côté, elle avait ajouté ^^, mais je n'ai jamais compris ce signe (froncement de sourcils ?).)

Ce n'est pas un été pourri à s'espalaser dans la verdure moite.

(Enlève des adjectifs.) Ce n'est pas un été pourri à s'espalaser dans la verdure. (N'abuse pas de patois.) Ce n'est pas un été pourri à s'étendre nonchalamment dans la verdure. (Pourtant, s'étendre nonchalamment ne dit pas la même chose que s'espalaser, qui n'a pas d'équivalent en langue d'oïl.)

Ce n'est pas un été pourri si tu revois le soleil.

Ce n'est pas un été pourri comme ceux de 2007 ou 2009, et quoique tu penses des nombres impairs.

Ce n'est pas un été pourri qui changera grand chose à mon style.

Ce n'est pas un été pourri à peindre, à rafistoler.

Ce n'est pas un été pourri. (On verra bien.)

lundi, 18 juillet 2011

Âpreté, exubérance(s)

Au voisinage de l'Aquitaine, le tempérament local, qui était âpre et taciturne, contractait une exubérance, une volubilité toutes gasconnes.

(Pierre Bergounioux. Le premier mot. Gallimard, 2001, p. 39)

 

(J'écris ces lignes le 4 juillet, elles seront publiées quand je serai, non plus en Gascogne – quoique nous aurons fait un crochet par les Landes – mais dans l'Aude.)   Il me semble que ce qui exaspère le plus les gens que j'exaspère, c'est, justement, mon exubérance et ma volubilité – je veux dire : mon exubérance volubile, et ma volubilité exubérante (l'une ne va pas sans l'autre). Défauts, sans doute, ou traits de caractère suffisamment marqués pour qu'ils s'apparentent à des défauts. Or, si je me reconnais volontiers à cette aquitanité du trait, je veux rappeler ici que, si je suis normand pour moitié (du côté paternel), c'est justement de ce côté paternel que provient, me semble-t-il, l'extraversion (et partant, l'aversion des uns ou des autres pour ma volubérance). Le quart ariégeois est taiseux en diable, et je ne (re)tiens rien de ce côté-là. Le quart de sang landais n'a pas grand-chose d'exubérubile pour le recommander, mais la vérité me semble être du côté du terrain, du contexte de l'enfance, d'une forme de droit du sol : j'ai vécu les seize premières années de mon existence dans les Landes. Voilà où j'ai attrapé la parole abondante et la soif du délire.

vendredi, 15 juillet 2011

Minerve

Quand elle est venue me faire signer des papiers, cette après-midi,

elle portait une attelle, non, une... minerve.

Renaud Camus. Parti pris, p. 526.

 

Autour d'un verre de vin rouge charpenté, nous discutions, l'automne de l'agrégation, ma camarade australienne et moi. Plus tard, je croisai de nouveau sa route, longtemps après qu'elle se maria, et au détour d'une sombre histoire de recrutement dans laquelle l'Homme des Collines joua un rôle trouble. Je n'ai jamais su ce que signifiait son nom (son patronyme).

mercredi, 13 juillet 2011

Perles

6 juillet. Ce n’est pas facile, en plus de tout le reste des tâches qu’il faut finir d’accomplir, et des préparatifs, de gribouiller (j’avais écrit grignoter – ?) des bouts de texte afin que ces carnets ne soient pas totalement déserts au cours des mois d’été. Le labeur, n’est-ce pas l’écorce qu’inlassablement je regarde sans y toucher afin de me retenir de la badigeonner ?

(Le vieux Macintosh est très lent, sa blancheur ne m'est d'aucun secours, mais, en furetant sur Word, j'y ai trouvé la police de caractères BigCaslon. Tout arrive.)

lundi, 11 juillet 2011

Pierre, pitance, in-pace

C'était le même édifice en pierre noire ou grise baigné de la même lumière morte où l'on servait la même pitance intemporelle à des jeunes gens transférés de leurs humides oubliettes dans l'in-pace de l'internat.

(Pierre Bergounioux. Le premier mot. Gallimard, 2001, p. 30)

 

N'ayant pas été logé, pour mon hypokhâgne (ni d'ailleurs par la suite), à l'internat, et n'ayant pas non plus quitté l'âpreté de la Corrèze pour la morne Limoges, je n'ai, de mes années de classe préparatoire, que des souvenirs lumineux, éblouissants aussi de sérénité. J'étais sans doute plus décomplexé, et sans attentes, que P.B. Aussi: j'ai pu avoir des professeurs plus enthousiasmants que lui. Néanmoins, néanmoins… Se peut-il que les lieux comptent plus que tout pour donner le ton d'une année, ou pour infléchir ce que l'on comprend d'un cursus ?

vendredi, 08 juillet 2011

Kéké

KEKE (faire le) -- "Nous avons bien entendu oublié à Plieux quelques ouvrages essentiels, comme l'indispensable Histoire des littératures scandinaves, de Régis Boyer, qui me permet de faire le kéké à bon compte, pour les Demeures de l'esprit." (Parti pris, p. 269)

 

À la page 455, Boyce devient "William Boyle" (par analogie dérapante avec William Boyd ou T.C. Boyle ?). "Une ennuyeuse symphonie de William Boyle" : ce ne sera pas, n'aura pas été l'année Boyce ;-))

(Mais l'index a rattrapé la coquille. Alors, qui croire ?)

mercredi, 06 juillet 2011

97

Un vieux cradingue de Saint-Bauld

Avait le pied fouette-sabot.

"Chaque hiver j'époussette

Mon pied fouette-chaussette"

Disait ce vieux beau de Saint-Bauld.