mercredi, 06 juillet 2005
Cimetière et histoire coloniale, suite
En réponse à Livy, je poursuis ma description du cimetière, et précise un point. La précipitation (et, si, il faut le croire, l’épuisement) a provoqué un certain flou : il ne s’agit pas d’un cimetière colonial, mais d’un immense cimetière civil qui comprend un assez petit carré de tombes militaires ; c’est dans ce carré de tombes militaires que l’on trouve une douzaine de tombes de soldats issus de l’Empire. Je doute donc qu’il y ait une vraie réflexion locale autour de ces tombes, puisque 99% des visiteurs du cimetière doivent y venir pour se recueillir sur les sépultures de leurs proches. La plupart même doivent ignorer l’existence d’un secteur militaire entre ces quatre murailles.
Toutefois, je me suis interrogé, moi aussi, sur la raison de ces quelques tombes : pourquoi ici, à Tours, et pas ailleurs ? Pourquoi le tirailleur sénégalais ARI est-il inhumé à Tours, of all places ? J’essaierai de trouver plus d’informations sur la question…
09:45 Publié dans Sites et lieux d'Indre-et-Loire | Lien permanent | Commentaires (1)
Images
Je ne mets aucune image en ligne. Pour l’instant. Quand j’aurai le temps de régler la question du transfert des fichiers vers l’hébergeur à partir de mon ordinateur portable, qui le refuse, je pourrai publier régulièrement de petites notes-images.
Je fais des provisions pour les longs soirs d’hiver, et vous aurez bientôt les yeux écarquillés !
09:10 Publié dans Ex abrupto | Lien permanent | Commentaires (0)
mardi, 05 juillet 2005
Marcilly-sur-Maulne
J'écrivais, il y a dix jours, que, passant à Marcilly-sur-Maulne, nous n'avions pas vu le château. Je propose donc, dans cette note, quelques liens vers le site de la commune, le jeu consistant à trouver les liens, qui sont constitués de lettrines, autrement dit: certaines lettres de cette note sont des liens hypertextuels. Il y en a quatre.
Je rappelle par ailleurs à tous les lecteurs qu'ils peuvent participer au grand jeu de l'été, Traquons les épitrochasmes.
23:10 Publié dans Sites et lieux d'Indre-et-Loire | Lien permanent | Commentaires (1)
Cimetière de La Salle (TOURS-NORD)
Lu, au retour de l’université, les prénoms Omerine et Athénaïse, sur deux tombes du cimetière de La Salle. J’ai aperçu aussi le patronyme Bourdaloue ; il faudra vérifier si le célèbre sermonneur était de la région. (Contributions bienvenues.) Enfin, le mausolée de Victor Laloux se trouve aussi dans ce cimetière de Tours-Nord, que je compte prendre l’habitude de traverser à chacun des voyages pédestres de mon domicile à mon lieu de travail, puisque les trottoirs de la rue qui descend vers le quartier Paul-Bert sont quasi inexistants, et non en raison d’un quelconque goût morbide.
J’ai pris plusieurs photos, le matin, à l’aller (et donc sous un soleil radieux et un ciel céruléen (cet après-midi, il faisait sombre, et la pluie menaçait)), de tombes militaires. Un panneau indiquant, en bilingue, des tombes de guerre de soldats issus du Commonwealth, avait depuis longtemps attisé ma curiosité ; mais je n’ai pas su trouver de tombes américaines ou britanniques dans le cimetière. En revanche, toutes les sépultures militaires que j’ai observées datent de la guerre de 1914-18.
Les photographies que j’ai prises sont très émouvantes, car les tombes sont celles de soldats venus de l’Empire colonial français. Imaginez-vous, pour n’en citer que quatre, les destins de Tchan Hou San, travailleur chinois «mort pour la France» le 25 janvier 1919, de Dalmane ben Amar ben Ismael, travailleur colonial «mort pour la France» le 6 mai 1918, d’Amerrou Aoumallah, tirailleur algérien «mort pour la France» le 16 août 1918, ou enfin du soldat Ari, tirailleur sénégalais «mort pour la France» le 24 octobre 1917, et dont l’identité se trouve réduite à trois lettres ? Figurez-vous que, si ces tombes s’égarent dans l’alignement et la litanie des nombreux «Français de souche» (comme il ne faut pas dire et comme on ne saurait plus dire), elles sont toutefois rassemblées, séparées, de fait, des autres, ce qui montre à quel point, même en servant le colonisateur et en mourant pour lui, ces hommes ne pouvaient prétendre à une quelconque égalité…
Dire qu’une récente loi votée par le Parlement veut encourager professeurs d’histoire et auteurs de manuel à se concentrer sur l’enseignement de l’héritage positif du colonialisme ! Quel charlatanisme ! Quelle mascarade ! Quelle ignominie ! Pourquoi n’a-t-on jamais eu un vrai débat de fond, dans ce pays, sur l’héritage du colonialisme, qu’il soit bon, mauvais, pendable, que sais-je… ?
L’indignation qui parcourt ces lignes était plus mesurée, en mon for, tandis que je «visitais» le cimetière, car je n’ai pas besoin de me convaincre de ce que j’ai écrit ci-dessus. L’émotion, le sentiment toujours ambigu que j’éprouve, dans un cimetière, à ressentir la douceur de l’air, la chaleur de la vie, au milieu de tant de cadavres… voilà ce qui l’emportait.
Mais j’ai pris ces photos, car je veux témoigner.
21:10 Publié dans Sites et lieux d'Indre-et-Loire | Lien permanent | Commentaires (1)
Contrainte ?
Je me contrains, en dépit d’un féroce mal aux yeux et d’un épuisement chaque jour plus marqué, à écrire quelques lignes dans ce carnet de toile, afin de mettre fin aux complaintes de mes lecteurs et aux emportements enthousiastes de mes détracteurs (ces deux catégories ayant, d’ailleurs, une intersection que j’imagine, en mon nombrilisme masochiste, vaste).
Non, cher lecteur, adorable lectrice, vous qui êtes allés chercher sur je ne sais quel blog un illusoire produit de substitution, tel l’héroïnomane perdu que console et désintoxique la méthadone, je ne vous ai pas abandonnés. Non, toi qui ricanes, là-bas, dans le coin, te drapant dans ta cape à l’instar de Judas, je ne te ferai pas ce plaisir, et tu ne diras pas, alexandrinement : « Et au trentième jour, Guillaume se taisit. » (Je signale, d’ailleurs, aux amateurs de poésie et de langue française, que l’on pourrait préférer le décasyllabe de type taratantara : « Au trentième jour, Guillaume se tut. » Mais mes détracteurs sont ainsi : ils ne connaissent pas, les pauvres, l’usage du passé simple.)
Well, after this delirious bout of self-induced megalomania, je vous invite à vous reconnecter prochainement sur ce carnétoile, où vous accueilleront des notes tourangelles.
20:10 Publié dans Ex abrupto | Lien permanent | Commentaires (2)
lundi, 04 juillet 2005
Veigné
Nous avons passé hier, en cette jolie commune résidentielle située au sud de Tours, une fort agréable journée chez G*** et P***, dont le fils aîné, J., a le même âge que le nôtre, et dont nous n’avions pas encore rencontré le dernier-né, F., qui doit avoir dans les cinq semaines.
Promenade en forêt, avec le landau, et A., qui s’intéressait à toutes les espèces d’arbre, à mon grand désarroi, le plus souvent.
Se rendre à Veigné, en soi, suffirait à me décourager de m’y installer. Ce n’est, entre Tours et Veigné, qu’une longue accumulation de hangars commerciaux, de zones d’activité « à la française », c’est-à-dire le summum de l’immonde, panneaux publicitaires hideux. Surtout, les matins et soirs de semaine, cette voie déjà laide doit se garnir d’embouteillages, et c’est assez pour hésiter à acheter, par exemple, une maison même la plus somptueuse dans ces parages.
Nos amis louent une petite maison à l’extrêmité d’un cul-de-sac, aux abords d’une forêt fort agréable. Il se construit toutefois, à peu d’encablures de là, je ne sais quelle bretelle d’autoroute, ce qui risque de rendre moindres leur isolement et leur tranquillité !
21:00 Publié dans Sites et lieux d'Indre-et-Loire | Lien permanent | Commentaires (1)
Trente-cinq ans
J’aurais pu écrire une note relative à la fête de l’indépendance américaine, à mes souvenirs du 14 Juillet dans le Michigan (mais si !), ou encore à l’étudiant tourangeau (Cyprian Drapeau), inscrit en licence, qui, pourtant férocement américanophile, et fraîchement revenu d’une année d’études dans la prestigieuse Rutgers University, n’a pas été capable, lors de l’oral, de donner l’année d’indépendance de la République américaine ni la signification du 4 juillet.
Non !
Je veux saluer, exalter, glorifier ici les 35 ans de mariage de mes parents, qu’ils fêtent aujourd’hui. Mes chers parents, puissiez-vous en fêter encore autant et plus ensemble !
Mon père vient de fêter sa retraite de l’Education nationale. Ma mère a encore, en théorie, trois ans « à tirer ». Mais le plus actif des deux risque fort d’être, encore et toujours, et ce malgré nos objurgations, mon père, farouchement engagé dans la lutte associative pour la protection de l’environnement, au niveau landais, aquitain, français et européen.
19:00 | Lien permanent | Commentaires (3)
Tours de France, Cimetière, Paul-Bert
Bon, je ne vais pas y couper. Bâclons, alors.
Le Tour de France passe ces jours-ci à Tours, ce qui provoque un ramdam, un tintouin, un charivari, un tourneboulis sans nom. Outre les innombrables formules ineptes jouant sur l’homophonie Tour/Tours, que nous subissons depuis des mois, c’est désormais la cohue, la débâcle. (Et d’ailleurs, il suffit de lire les nombreux avis de Londoniens ou Madrilènes, ces temps-ci, pour savoir que, à l’aune des Jeux Olympiques, tout événement sportif est vécu, à juste titre, comme une malédiction par les indigènes. Les Parisiens semblent moins sceptiques, ou la presse s’est-elle censurée sur ce chapitre ?)
L’arrivée doit se juger plus ou moins à la minute où j’écris ces lignes.
Le tintouin cycliste m’a tout de même contraint à une chose que je ne fais pas assez souvent, qui est d’aller à pied à l’université et d’en rentrer pareillement, fort fourbu d’ailleurs, parce qu’une bonne partie de la demi-heure de trajet de retour (encore un triple génitif ! ça devient maniaque !) est sur une pente fort raide, une fois passé le Pont de Fil, entre le quai Paul-Bert et le cimetière de La Salle, puis même entre le cimetière et notre maison.
Je n’ai toujours pas fait l’effort de me détourner de ma course, au niveau du cimetière, pour jeter un œil aux tombes des soldats du Commonwealth. Il faudra y passer quelques moments, un prochain jour.
Contrairement à C., qui n’aime pas du tout le quartier Paul-Bert (qu’elle dit trouver arrougnous), j’ai un petit faible pour la rue qui descend vers la Loire, avec ses maisons populaires pas toujours en excellent état, il est vrai ; mais il est certain que je suis, d’avoir parcouru le quartier plusieurs fois à pied, plus sensible à ses charmes et moins à la vue d’ensemble, assurément guère attirante. (Et le double adverbe, tu sors ça d’où ?)
17:00 Publié dans Moments de Tours | Lien permanent | Commentaires (1)
Propos de garçonnet, 6
"Non, ce soir, on est des plantes piquantes. Moi je suis une ronce, toi tu es une ortie, et Maman c'est un ajonc."
07:20 Publié dans ... de mon fils | Lien permanent | Commentaires (1)
dimanche, 03 juillet 2005
Dolmens de Touraine
2 juillet. Quatre heures et demie.
Mon fils, qui, à quatre ans, sait fort bien nous priver du divertissement pascalien et nous ramener dans le droit chemin de l’épicurisme (et oncques nous affranchir de nos tentations hédonistes), n’a pas voulu aller faire un petit tour cet après-midi, préférant cultiver son jardin, ou, à tout le moins, s’activer dans le nôtre.
J’avais dans l’idée, pourtant, de lui montrer quelques dolmens aperçus sur la carte routière. L’origine d’une telle idée, qui peut sembler saugrenue, vient de l’achat, ce matin, de l’Imagier de la préhistoire, qu’il a fallu lui lire en entier déjà (il est fort détaillé et fait pas moins de cent quarante pages), et où se trouvent moult explications relatives aux différents habitats préhistoriques, dont les dolmens, pour lesquels je dispose, depuis quelques mois, d’un dépliant fort bien fait, intitulé Préhistoire en Sud Touraine. Tous les sites indiqués se situent, toutefois, du côté de Descartes, soit un peu loin pour une promenade qui ne saurait excéder deux heures (entre le « réveil » de la sieste à trois heures et le retour impératif pour cinq heures et demie, avec le bain, puis dîner et coucher). J’ai donc consulté la carte routière Michelin, qui indique les monolithes et dolmens, afin d’en trouver dans la périphérie immédiate de Tours.
J’en dresse ici la liste, ou le répertoire, pour mémoire en vue d’une prochaine virée.
Il y en a un juste au nord de Mettray, le long de la Choisille ; un à l’ouest de Beaumont-la-Ronce, près du château de Montifray ( ?), le long de la D766 ; un tout près du bourg de Nouzilly, près de la D4.
Tout aussi loin que ceux de l’aire méridionale située entre Draché et Charnizay, mais au nord, dans la Sarthe, il semble y avoir une concaténation de traces archéologiques du côté de Sarcé, sur la Gravelle, non loin du site archéologique de Cherré.
En écoute : Radiance de Keith Jarrett (EMI, 2005).
18:00 Publié dans Sites et lieux d'Indre-et-Loire | Lien permanent | Commentaires (0)
Propos de garçonnet, 5
Des dolmens, je sais où il y en a. Mais c’est très loin, on ne peut pas y aller. C’est en Inde ! C’est un dolmen très grand, on y élève des chevaux.
Il s’appelle Le Dolmen Bleu.
06:50 Publié dans ... de mon fils | Lien permanent | Commentaires (1)
samedi, 02 juillet 2005
Illustrations III
Je lis Illustrations III de Michel Butor, acheté ce matin au bouquiniste de la rue Nationale (édition originale en SP, 1973) [ajout du 26 juin 2011 : appris depuis (2007 ?) que le bouquiniste en question se nomme Les Amours jaunes, en hommage à Corbière I guess].
Je suis très admiratif, et un grand admirateur de Butor. La série des Illustrations, que je ne connaissais que de nom, appartient aux textes « par intervalles », mes préférés. (Le must absolu, en la matière, est le tome 3 du Génie du lieu, Boomerang, que j’ai lu en 1998 dans l’exemplaire emprunté à la médiathèque de Beauvais, et que j’ai cherché à acheter depuis, pour apprendre qu’il était épuisé et, dans les éditions d’occasion, vu l’ouvrage (imprimé en plusieurs couleurs, au tirage sans doute limité dès le principe) hors de prix, bien évidemment. Je possède toutefois les tomes 4 et 5, cadeau de C. pour nos onze ans, en 2003.)
Illustrations III propose, selon les termes mêmes du rabat de deuxième de couverture (voilà un triple génitif que je laisserai passer), « ce dont me parle la peinture ». A moi qui ai beaucoup travaillé sur les croisements entre littérature et arts plastiques, c’est déjà une source d’intérêt, par-delà mon affection pour Butor. Je ne connais aucun des peintres dont l’œuvre sert d’origine à ces textes, à l’exception de Jean-Luc Parant et de Soulages, bien entendu (les textes inspirés par Soulages, composant la « Méditation explosée », sont les seuls numérotés). Du coup, le livre se lit, comme souvent en l’espèce, comme une suite d’échos à des images absentes. L’ekphrasis se situe, comme souvent, à la croisée, de la représentation en mots et de l’éloignement des images. Textes impossibles, irréductibles.
L’extrait que je veux en donner correspond à mon humeur du moment, tendre et sentimentale :
Sur le sable je dessine une maison complexe et retirée, une chambre pour mon amie, notre projet de société, des ailes pour nous emporter, une forêt pour nous cacher, un rocher pour nous instruire, une rampe pour nous diriger, une terrasse pour nous y bercer, une cave pour nous désaltérer, un jardin pour nous enivrer, ses regards pour me décider, sa poitrine pour me transporter, son ventre pour m’y enfoncer, ses lèvres pour me secourir, ses paumes pour me guérir, ses ongles pour me labourer, son silence pour m’ensemencer, ses paroles pour me moissonner, son calme pour m’y rajeunir.
Michel Butor. Illustrations III. Paris : Gallimard, “Le Chemin”, 1973, p. 18
23:00 Publié dans Lect(o)ures | Lien permanent | Commentaires (0)
Bourdon
Quatre heures. J’écris, assis dans un fauteuil du jardin, à l’ombre du cerisier et non loin de la haie de thuyas. Nous avons sauvé, tout à l’heure, un bourdon qui se noyait dans la petite piscine en plastique. Comme il fait un peu frais pour se baigner, et comme l’eau avait été versée mercredi matin dans la piscine, A. s’est proposé d’arroser les fleurs, le gazon, parfois le gravier aussi je crois, ce qui l’occupe, même si l’heure quasi zénithale et le soleil actif rendent cet arrosage tout à fait inutile.
Le sauvetage du bourdon aurait pu donner lieu à un texte de tonalité épique (et donc, certainement héroï-comique, quelque grands fussent mes efforts pour ne point sombrer dans la dérision), car il a fallu le repêcher au seau, le laisser marcher dans l’herbe, au soleil, le temps que ses ailes sèchent, prendre garde de ne pas lui marcher dessus, car il se cachait sous des feuilles d’herbe moins minuscules et pouvait aisément passer inaperçu ; lorsqu’il a réussi à s’envoler, nous l’avons salué.
Ce texte ne sera pas. On ne peut pas tout écrire, tout de même.
22:00 Publié dans Moments de Tours | Lien permanent | Commentaires (1)
Sieste
Des nuées de mouche d’orage sillonnent le salon où, assis dans le canapé, j’écris quelques notes, pendant la «sieste» de mon fils. Il ne fait plus la sieste depuis belle lurette ; il a cessé de s’adonner à ses trois heures de sommeil post meridiem vers octobre ou novembre, mais il accepte de se coucher et de rester au repos une petite heure ; parfois même, fort infréquemment, il s’endort.
L’un des plus jolis villages des Landes, tout près du village où j’ai passé mon enfance, s’appelle Siest. Comme nous allons passer une infime partie de l’été en Touraine, j’ai songé à créer un autre carnétoile, qui serait une sorte de mirror weblog de celui-ci et qui s’appellerait Chalosse véloce. Je continuerais toutefois à publier des notes dans Touraine sereine, peut-être un choix de correspondance, ou des poèmes ; une autre possibilité consisterait à se concentrer sur celui-ci et à essayer d’écrire des notes sur telle rue de Tours, tel monument, tel village de Touraine, à partir de mes souvenirs, ce justement pendant que je suis éloigné de la région. Ce serait certainement plus honnête vis-à-vis des lecteurs qui réclament plus d’adéquation entre le titre du carnétoile et son contenu.
Entre autres projets pharaoniques, j’aimerais créer un index, mis à jour régulièrement, des notes. Ce que je ne saisis pas très bien, et qui m’inquiète quelque peu, c’est que l’espace disque que j’ai employé jusqu’à présent n’est, selon mon hébergeur, que de 24 KO, ce qui correspond aux deux misérables images qui figurent dans mes fichiers. Dois-je en inférer que la sauvegarde des notes et des commentaires est secondaire (hypothèse pessimiste) ou que HautEtFort, tout en veillant au grain, ne « facture » pas les fichiers texte (hypothèse optimiste)?
21:00 Publié dans Flèche inversée vers les carnétoiles, Hors Touraine, Words Words Words | Lien permanent | Commentaires (0)
Blogosphère (“dérange du globe”, suite)
Reçu aujourd’hui, par la Poste, le n° 14.1 du European English Messenger. Parmi les ouvrages recensés se trouve l’essai, publié en 2004 par le prestigieux éditeur néerlandais Rodopi, d’une certaine Viviane Serfaty. Le titre, je vous le donne en mille, en est The Mirror and the Veil : An Overview of American Online Diaries and Blogs.
Le parti pris de Viviane Serfaty semble être délibérément socio-psychanalytique, ce qui, déjà, me paraît une sauce bien risquée, ou, à tout le moins, d’un hétéroclite propre au brouillage plus qu’à l’éclaircissement. L’auteur de la recension, une certaine Dorota Smyk-Bhattacharjee (de Zürich, mais il semblerait que ce soit, à lire son nom, une Hongroise, ou peut-être une Tchèque mariée à un Indien), reproche d’ailleurs à Serfaty, une fois prononcés les différents éloges d’usage et proposé le résumé du plan de l’ouvrage, de noyer le poisson en citant inégalement ses sources, les dates de publication des différents carnétoiles consultés.
Il me semble aussi que le journal intime en ligne et le blog sont deux pratiques foncièrement différentes, et que, s’il est certainement productif de les mêler dans un essai, il ne faudrait pas pour autant les mélanger ou les confondre. Je prétends en savoir quelque chose, moi qui ai tenu, fort brièvement, deux journaux en ligne, en 2001 et fin 2004, avant de me rallier à la cause du blogos.
20:00 Publié dans Flèche inversée vers les carnétoiles | Lien permanent | Commentaires (0)
« Your frankly vulgar red pullover »
Ce matin, nous avons écouté plusieurs fois de suite Our Frank de Morrissey, car A. voulait danser dessus ; il se trouve que c’est, par un heureux hasard, l’une des meilleures chansons de l’album Kill Uncle (1991), que je n’avais pas écouté depuis des années. Je n’aime pas tellement la Britpop (litote), mais j’ai un léger faible pour les Smiths et la carrière solo de Morrissey.
J’ai découvert The Smiths à Oxford, en 1996. Mon affection est toute relative, car je ne possède aucun album du groupe, et un unique album de Morrissey.
La première chanson de Kill Uncle, bien écrite et subtilement composée, s’achève d’ailleurs par l’expression du désir de décérébration, ce qui n’a toutefois pas grand chose à voir avec les idiotes professions de «dionysisme» de certains «musiciens» techno. Morrissey se déclare lassé par les conversations profondes qui n’aboutissent à rien (“our frank and open / Deep conversations”) et en vient à se plaindre de sa propre intelligence (“Will somebody please stop me / From thinking all the time ?”).
C’est assez troublant.
18:00 Publié dans Autres gammes | Lien permanent | Commentaires (0)
"You spin me round"
Record de fréquentation du blog pour le 1er juillet, avec 134 visiteurs et 720 pages vues, chiffre sans doute gonflé artificiellement par mes propres visites, publications de notes, lecture des commentaires, etc.
Dans l'édition du Monde daté d'aujourd'hui, intéressant article consacré à un portrait de Tristan Egolf.
On y lit, notamment le paragraphe suivant, que j'inclus car je crois savoir que, passé quelque temps, les articles ne sont plus consultables gratuitement:
Un soir d'hiver 1995, Patrick Modiano entre dans la chambre de l'hôte pour y fermer une fenêtre. "J'ai été un peu indiscret , confesse-t-il. Il y avait sur la table une masse de feuilles hallucinante. Rien qu'à voir le manuscrit, j'ai eu une intuition." Modiano comprend mal l'anglais mais ne résiste pas à la tentation de s'attarder sur cette écriture microscopique avec ses mots serrés, ses ratures et ses rajouts. Il pense aux manuscrits du Suisse alémanique Robert Walser. "C'est horrible à dire , raconte-t-il, mais je n'avais pas besoin de lire son roman. Je savais. Peut-être parce que je suis du métier ? Rien qu'en voyant cette masse, et ce type qui passait ses journées à écrire... c'est difficile à expliquer. Ça m'a semblé bizarre que ce type de 23 ans, à la fin du XXe siècle, écrive encore à la main avec des ratures."
08:55 Publié dans Lect(o)ures | Lien permanent | Commentaires (0)
Vêtements
V-ue m'a écrit ce matin un courriel dont je vous livre un extrait, car il répond à une note précédente sur la tenue des professeurs:
Je lis ton blog, souvent voire plusieurs fois par jour et il y a toujours de nouvelles notes, certaines me font bien sourire. Raconte-moi Guillaume, quelle tenue faut il adopter pour enseigner ou plutôt "Do you think teachers should wear a uniform?"et le costume cravate quand on est une fille, ça donne quoi?
En quoi les fringues, oui les fringues font elles partie de la conscience professionnelle? Tu comprends, en ce moment c'est les soldes alors j'aimerais profiter de tes conseils parce que je suis loin d'être experte en décoration corporelle. C'est bien décousu tout ça...
J'adore ce mail, et la dernière phrase plus encore. Encore un effort, my dearest, l'adresse électronique n'apparaît pas quand tu postes un commentaire!
******
Voici un fragment de ma réponse:
Il me semble que, si la société dans son ensemble (et pas seulement les collégiens, les lycéens, les étudiants) ne respecte plus véritablement les professeurs, c’est qu’ils ne se respectent pas eux-mêmes, qu’ils n’ont pas le moindre égard, en général, pour la fonction qu’ils occupent, qui n’est pas uniquement un métier. C’est vrai également des médecins, pour élargir le propos. La représentation, la distance entre le moi privé et le moi social, l’apparence, tout cela me semble de plus en plus évacué, depuis mai 68 peut-être, dans notre société, et dans notre milieu professionnel aussi, à mon grand regret. Cela semble sans doute réac, mais j’assume volontiers mon côté réac.
Il y avait des exemples qui ponctuaient mon argumentation, mais enfin, j'aurais scrupule à divulguer une partie significative de ma correspondance privée...
05:55 Publié dans Flèche inversée vers les carnétoiles | Lien permanent | Commentaires (0)
vendredi, 01 juillet 2005
1er JUILLET (10ème note du jour ?)
Lu à l’instant, et terriblement d’actualité :
«They called it the rentrée, which meant that the lemmings were rushing home from the coast. This was a nation that claimed to represent the soul of European culture, the seat of her intellect, yet they all chose the same month for their annual vacation, set off in a bunch as if a gun had been fired for the start of a mammoth marathon amphibian race, for the cars that clogged the traffic nearly all dragged or carried on their roofs yachts, sailing boats, catamarans and other floating craft, and that was the way they re-entered Paris […] setting off as if by arrangement so that they arrived at the same time in Paris, honking, cursing and gesticulating more from ritual instinct than from purpose or realistic expectation of any change in the snail’s pace of their repossession of a city they had abandoned to a much despised but lucrative season of tourism.» (Wole Soyinka. Ibadan. London: Minerva, 1995, p. 58)
23:30 | Lien permanent | Commentaires (0)
Juditha triumphans
J’écoute de nouveau la Juditha triumphans de Vivaldi (RV 644). Quel opéra oratorio somptueux, d’une diversité et d’une beauté à couper le souffle (mais pas les oreilles, fort heureusement). Comme il s’agit d’un opéra oratorio découvert récemment, je pense qu’il n’en existe pas d’autre version (Naïve 2001 : OP 30314) : l’Academia Montis Regalis est placée sous la direction d’Alessandro De Marchi, le Chœur des Jeunes de l’Académie Sainte Cécile sous la maîtrise de Martino Faggiani. Les cinq voix sont Magdalena Kozena (Judith), Anke Herrmann (Abra), Maria José Trullu (Holopherne), Marina Comparato (Vagaus), Tiziana Carraro (Ozias).
Ecoutant attentivement le premier acte, et notamment, dans l’ordre des plages 7, 9 et 11 (sur le premier CD), l’air de Vagaus, Matrona inimica, l’un de mes préférés, l’air de Judith, Quocum Patriae me ducit amore, et l’air d’Abra, Vultus tui vago splendori, je remarquais que je trouvais le chant de la dernière voix très inférieur, non techniquement car je n’y connais rien : s’agit-il d’une moindre qualité de la chanteuse jouant le rôle d’Abra (Anke Herrmann) ou, plus profondément, d’un goût moindrement marqué, de ma part, pour les soprano colorature ? Le choix de confier la partition d’Abra à une colorature est, d’ailleurs, à en croire le livret et les notes d’Alessandro De Marchi, un choix audacieux, qui n’allait pas de soi. Je ne peux que regretter, à titre personnel et non point pour l’équilibre général de l’opéra (qui se satisfait sans doute grandement de la structure en quinconce des voix), que le chef n’ait pas choisi, pour Abra, une voix plus proche de celle de Marina Comparato (qui est, toujours dixit De Marchi, «un mezzo-soprano aigu et léger »)
Je ne suis pas certain de m’exprimer fort clairement dans le paragraphe qui précède. Mais c’est un point qui me tient à cœur. J’ai écrit cette note en écoutant l’air de Judith, Veni, me sequere fida, qui se trouve sur le deuxième CD. Les longs maintiens, entrecoupés de soudains trilles, font parcourir, en moi, le frisson de la merveille.
20:40 Publié dans Autres gammes | Lien permanent | Commentaires (9)
Montaigne dans le texte
En recopiant, à partir de l’édition Garnier jaune (en deux volumes, texte édité par Maurice Rat en 1962, exemplaire paternel), la citation de Montaigne qui me sert à illustrer, à mon échelle, le projet quelque peu fourre-tout de ce carnet de toile, je me suis rappelé une discussion avec F***, dans sa turne du 46, rue d’Ulm, vers février ou mars 1995. Il venait de s’acheter une édition des Essais. Assez sottement, ou snobinardement (mais c’était moins grave, car F*** est cent fois plus snob que moi), je lui fis remarquer que le texte était en français modernisé. Il se choqua de ma remarque, disant que, de toute manière, il ne parviendrait jamais à lire le texte original.
Or, je maintiens que c’est simple affaire d’entraînement, d’habitude, de se jeter à l’eau, comme lire, dirons-nous, des nouvelles contemporaines en anglais pour qui s’est contenté de suivre des cours d’anglais au lycée. Et le gain en est grand.
Ainsi, dans le passage que je citais, cela ne changerait pas grand chose de lire de quoi au lieu de dequoy. Ni le sens ni la prosodie n’en seraient changés. On pourrait même arguer que peu gagnerait à être éclairci en son moderne équivalent pu.
D’un point de vue sémiotique, en revanche, fantasie n’est pas le moderne fantaisie ; il se rapproche d’imaginations, voire d’élucubrations ; de plus, à qui est versé en la langue angloyse (et en la germanicque aussi), cette belle phrase rappelle d’autres beaux textes, contemporains des Essais, sur l’imaginaire, ou, pour le romantisme allemand, sur la Phantasie. Du point de vue des effets poétiques, comment « rendre » la première phrase en français modernisé sans perdre l’allitération en [s] ? Qui cherche ici de la science, qu’il la pêche où elle se loge. C’est là ma propre traduction, à la va-vite, et je ne doute pas que les éditeurs savants des éditions modernisées auront fait mieux ; mais sans perdre beaucoup de la poésie de ces phrases, j’en doute. Fortement.
J’aime aussi, je l’avoue franchement, me trouver aux prises avec une langue qui est la mienne mais dont tout me démontre qu’elle a une histoire, qu’elle est ni tout à fait la même ni tout à fait une autre. Langue autre, qui m’invite à une traversée des siècles, de l’histoire. Lire Montaigne dans un français contemporanéisé, c’est déjà en faire mon contemporain, et, si je comprends tout ce que peut avoir de positif l’idée qu’un écrivain ou un philosophe a su rester actuel (et Montaigne l’est, étonnamment), je n’ai pas envie qu’il soit mon contemporain, je le lui souhaite moins que tout, car j’aime aussi en Montaigne l’auteur ancien, celui qui, débarquant ex nihilo dans notre monde, s’y trouverait moins à sa place et plus effrayé que s’il s’était retrouvé, avec Cyrano, à visiter les états et empires de la Lune. (Je suis sûr cependant, qu’une fois la dextérité nécessaire acquise, Montaigne tiendrait un blog.)
Tout ce qui nous éloigne de la langue de communication, du français des canards ou des conversations de rue, dans une œuvre littéraire, m’est cher. J’ai beaucoup arpenté, la semaine dernière, les terres impeccablement cultivées du Pour un Malherbe de Ponge, et ce n’est pas lui qui va me convaincre du contraire.
18:40 Publié dans Lect(o)ures | Lien permanent | Commentaires (5)
Qu'écris-je?
« Qui sera ici en cherche de science, si la pesche où elle se loge : il n’est rien dequoy je face moins de profession. Ce sont icy mes fantasies, par lesquelles je ne tasche point à donner à connoistre les choses, mais moy : elles me seront à l’adventure connuez un jour, ou l’ont autresfois esté, selon que la fortune m’a peu porter sur les lieux où elles estoient éclaircies. Mais il ne m’en souvient plus. » (Montaigne. Essais, II, X, « Des livres »)
17:40 | Lien permanent | Commentaires (0)
Qui me lit, 2 (Cent-unième note)
V-ue me demandant, dans un courrier électronique, qui peut bien me lire, je n’aurai de réponse que technique : l’étiage régulier des statistiques de ce blog se situe à 120 visiteurs quotidiens pour un nombre de pages consultées plus irrégulier (entre trois cents et 550).
Fort peu laissent des commentaires, et j’imagine que beaucoup s’égarent ici en provenance de la page d’accueil de l’hébergeur (laquelle indique non seulement les derniers blogs mis à jour, au rang desquels le mien se situe fréquemment, mais aussi les dernières communautés mises à jour (or, j’ai la perfidie sans nom de publier certaines de mes notes en les inscrivant dans telle ou telle communauté, afin d’attirer maléfiquement d’innocentes mouches dans ma toile d’opilion)) ou d’un moteur de recherche. En effet, l’une des raisons de mon hyperactivité créatrice sur ce carnet de toile est que j’ai constaté que mes notes étaient fort bien placées (thanks be to HautEtFort! (“loud and clear I make my point, dear!”)) dans les pages de résultat de Google, ce qui ne m’était jamais arrivé avec mes précédents sites personnels.
Comme dirait Marione (de Simon, a priori, et je ne me sens pas du tout concerné), l’égocentrisme ridicule bat son plein. A moins qu’égocentrisme ridicule ne soit un pléonasme ?
L’égotisme ridicule ? L’emphase statistique ?
16:40 | Lien permanent | Commentaires (6)
Du passé faisons paperasse
Je n’ai pas de très hautes références, aujourd’hui :
La vie, la vie, la vie,
Ce qui lui donne du prix
C’est le plaisir gratuit.
(Ricet Barrier)
Comme j’aimerais me convaincre, moi, que ce qui donne du prix aux moments de loisir intellectuel, de passion, d’érotisme, d’oisiveté, ce sont, par contraste, les longues heures passées à des tâches ingrates. Pourquoi faut-il que le gagne-pain soit souvent si vil ? S’il n’était question que de donner des cours, lire, écrire, conseiller des étudiants, même corriger des copies, quel bonheur ce serait ! Mais il est dit que le travail administratif aura ma peau.
15:40 | Lien permanent | Commentaires (3)
Purple Hibiscus de Chimamanda Ngozie Adichie
Hier soir, j’ai commencé la lecture de Ibadan de Wole Soyinka. Après Purple Hibiscus, la semaine dernière, je traverse une phase nigériane, que je ne quitte jamais vraiment, en fait.
J’ai lu deux fois l’avant-propos, qui est d’une richesse presque infinie. Le début du premier chapitre est savoureux, si drôle et si vif, si précis, comme un scalpel.
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Je voulais écrire une note sur Purple Hibiscus, mais ce serait mieux avec le livre sous la main, à portée de clavier, non loin de moi, etc. Il s’agit du premier roman d’une Nigériane qui a trois ans de moins que moi (ça, c’est le genre de détail qui vous donne un bon coup de vieux, comme d’imaginer que vos premiers étudiants ont pu, depuis belle lurette, décrocher des diplômes et, par exemple, devenir professeurs, journalistes titulaires, cinéastes, auteurs de bandes dessinées, etc.). Chimamanda Ngozie Adichie est très influencée par la première trilogie de Chinua Achebe, et en particulier par Arrow of God.
Kambili, la narratrice, est une jeune adolescente élevée par un père qui représente, par ses succès d’entrepreneur qu’il met au service de la libre expression, en finançant notamment un journal d’opposition, la volonté de démocratie et de lutte contre un pouvoir politique corrompu ; mais l’ambiguïté fondamentale du récit repose sur la vraie nature de ce père, fervent catholique, qui est, dans son foyer, un parfait tyran. Pour convaincre ses enfants des voies de Dieu, il ne recule devant aucune règle, et surtout devant aucun châtiment corporel. Un séjour imprévu de la narratrice et de son frère chez une tante croyante mais libérale, professeur d’université, conduit le fils aîné à se rebeller, et à la jeune fille à laisser s’épanouir ses sentiments pour un jeune prêtre particulièrement attrayant.
La structure du roman est fort inventive : Adichie commence in medias res, par raconter l’incident qui marque la rébellion du fils, Jaja, avant de consacrer une longue partie à ce qui s’est passé avant ; la deuxième partie, puis l’épilogue, reprennent le récit après le refus de communier de Jaja. Cela met en lumière l’autre prouesse du roman : la description, sans ambages mais avec force ambiguïtés, des dérives fanatiques du catholicisme. La connaissance (et le tissage, au cœur du récit) de multiples rites ecclésiastiques témoigne, de la part d’Adichie, d’un mélange d’admiration intellectuelle et d’inquiétude métaphysique.
Ce que j’ai moins aimé, c’est le style, très Booker Prize shortlist, avec juste assez de petites inventions pour ne pas paraître trop académique mais suffisamment peu, tout de même, pour ne pas être inventif, et la description des émois de l’adolescente, qui sont sans doute très justes, ou pertinents, mais qui donnent une impression de déjà-lu. L’image éponyme de l’hibiscus pourpre, métaphore de l’éveil des sens mais aussi de l’empreinte du sang, est assez pesamment rabâchée.
Toutefois, l’écriture a l’avantage de son défaut : elle atteint souvent une profonde sensualité, qui touche à la nourriture, à la chair, à l’odorat plus encore peut-être.
Chimamanda Ngozie Adichie est un écrivain à suivre, en tout cas, et c’est là un début fort prometteur. Déjà, son livre tient la route, et la distance. Il a déjà été traduit en français, ce qui, pour un auteur africain anglophone publié en 2004, montre combien le livre a été encensé et porté aux nues outre-Manche et outre-Atlantique.
Pour plus d’informations, je me permets de vous renvoyer à la note écrite par Heileen sur son carnétoile La Muselivre, car elle comprend de nombreux liens, tant en anglais qu’en français. Cette recension est aussi, je le crains, bien plus approfondie que la mienne, mais si j’avais le livre tout auprès, me jouxant, libro aperto, etc., ce serait mieux, juré !
13:10 | Lien permanent | Commentaires (1)
Elisa, de Jacques Chauviré
Qu’ai-je lu récemment ?
Je devrais plutôt commencer par décrire objectivement ma table de chevet (mais je suis à l’université), puis expliquer que j’ai toujours une demi-douzaine de lectures en train simultanément (voilà c’est fait).
Hier soir, j’ai lu Elisa, très bref récit de Jacques Chauviré, que j’ai moyennement aimé dans son ensemble ; mais il est indéniable que le dernier chapitre donne une force particulière à cette histoire, poignante et jamais sirupeuse, qui livre en douce pâture la passion d’un petit garçon de cinq ans, dans l’entre-deux-guerres, pour la jeune domestique de dix-huit ans que sa mère et sa grand-mère avaient employée, quelque temps, avant qu’elle ne finisse par se marier.
J’ai noté quelques belles phrases, que je rapporterai sur ce site une fois chez moi (mais vous pouvez d’ores et déjà en lire un fort bel extrait). Le livre m’avait été offert, fin avril, par un ami, libraire à La Rochelle. Comme il m’a aussi apporté, à l’occasion de sa venue avec H***, sa compagne et l’amie de C. depuis leurs années bordelaises, deux autres livres, et comme je n’en avais encore ouvert aucun, un scrupule m’a saisi et j’ai commencé à lire Elisa en surveillant A. au bain.
Assurément, J*** et moi n’avons pas tellement les mêmes goûts littéraires. Il m’avait dit, d’un ton doux et enthousiaste, que ce bref récit était une pure merveille. Je suis loin de partager son avis. C’est un petit récit, in more than one sense. Ce qui me gene aux entournures, c’est qu’il me semble facile, ou sans risque particulier, d’écrire des textes de ce genre, avec un art de l’épure, une retenue particulière, des phrases le plus souvent fort courtes. Ce genre, la notation elliptique, n’est généralement (et à de notables exceptions) elliptique de rien : peu est dit, car il y a, de fait, peu à dire. Dans tous les cas, je préfère les écrivains qui prennent le risque du baroquisme, du ressassement, de l’outrance, de la phrase éclatée ou étendue, élargie. C’est peut-être une manière de me rallier à ce propos que m’a tenu, il y a longtemps, mon père : on ne peut écrire, en fin de compte, comme si le 20ème siècle n’avait pas existé. D’un point de vue stylistique, Chauviré est un bon petit écrivain de la fin du dix-neuvième siècle, dans une version, comment dire, ramassée ou accourcie.
Lecteurs lassés de mes exigences, vous pouvez lire ici, là ou ailleurs encore, des points de vue plus positifs sur ce texte, dont au demeurant j’admire beaucoup la force et la tendresse.
11:20 Publié dans Lect(o)ures | Lien permanent | Commentaires (0)