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lundi, 30 avril 2007

Méandres

(Finalement, c'est entre la page 912 et la page 925 que les méandres sont plus frappants encore.) ................ Je parviens à l'orée de l'automne 1976, dans le Journal de Travers, juste comme j'achève la lecture de L'Amour l'Automne (par le (difficile) dernier chapitre)..............

medium_Quartier_promenade_023.jpg

 

 

La dernière promenade par là, c'était le 21 janvier : que le temps passe vite, à pleines saisons ! Tous nos mots, tous nos moments, tous nos émois passent aussi. (C'était la platitude du jour.)

dimanche, 29 avril 2007

Le temps des échéances

Dans la chambre obscure l'étendoir vide étend son quadrillage d'ombres ; il y a aussi les franges sombres que trace l'auvent en se balançant à la brise du soir, et le quadrillage des barreaux du balcon. Une chambre dans la pénombre, parcourue de traits...

Aujourd'hui, G. m'a offert, sans raison (ou si, bien sûr : par amitié), trois livres dont La Mise en mots d'Elsa Triolet, que je ne connaissais pas et dont j'ai parcouru les premières pages ce soir. Elle y parle de sa maladie, du terme prochain de son existence : "j'arrive au temps des échéances". Cela résonne aussi, pour moi, de la lecture, fraîche encore, des pages du Journal de Travers dans lesquelles Renaud Camus évoque ses rencontres avec Aragon, qui lui parle des dernières années d'Elsa.

Sans avoir rien perçu encore de ce fil ténu comme il en est tant, je leur ai offert, en retour et impulsivement, à tous les deux (G. et sa femme, P. (parce que ses parents à elle habitent dans le Gers)) mon exemplaire du Département du Gers.

22:40 Publié dans Lect(o)ures | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : Littérature

Embarras

Quelle ne fut pas ma surprise, en parcourant ce matin l'exemplaire de Libra de Don DeLillo emprunté au cours de la semaine à la bibliothèque d'anglais des Tanneurs, d'y trouver, scotchée sur la troisième de couverture, la photographie d'un ancien étudiant (que je croise encore fréquemment dans les couloirs) et d'une ancienne étudiante (qui suivait, l'an dernier, les cours de L3, dont mon cours d'analyse de textes littéraires, en parallèle de ses cours au conservatoire d'art dramatique), très évidemment en couple face à l'objectif, comme naguère dans les couloirs, quand je les y croisai, et, si je suis, bien sûr, tenté de "rendre" cette image à l'étudiant en question lors de notre prochaine rencontre (pas par moquerie ni persiflage, mais seulement pour lui rendre un bien privé dont je suis devenu par erreur (et temporairement) dépositaire), ce qui m'arrête, c'est aussi qu'il ne semble plus côtoyer la jeune fille en question, et même qu'il semble en côtoyer d'autres (et même, qu'il n'est pas certain qu'il s'intéresse réellement (ou prioritairement) aux jeunes filles). Tout cela est bien embarrassant...

Une hypothèse a été écartée d'emblée, je le signale avant que de mauvais esprits n'en réclament l'application : publier la photographie dans ce carnétoile.

« Le vrai personnage, c’est l’île »

 medium_II_Verteuil_4.JPG« J’ai entrepris des recherches et mon éditrice m’a incité à mettre davantage l’accent sur le vrai personnage de Robinson/Selkirk. Mais pour moi, le vrai personnage, c’est l’île ! Elle a été un sanctuaire de la flibuste puis, après l’indépendance du Chili, la Bastille du Pacifique. »

 

(Ricardo Uztarroz, au sujet de son roman La véritable histoire de Robinson Crusoë,

in Atlantica, n° 143, octobre 2006, p.24)

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Ce pont rend un son roman. Le panneau d'interdiction se retrouve dans son roman.

samedi, 28 avril 2007

88

Il est, à Ferrière-Larçon,

Un fort singulier garçon,

Qui, aux fillettes de Ferrière

Toujours exhibe son derrière

Aussi gros qu'un cheval d'arçon.

 

vendredi, 27 avril 2007

87

Un godelureau de Luré

Etait tout à fait déluré.

À une fille de Larçon

Il offrit son caleçon :

Pauvre imbécile de Luré !

 

jeudi, 26 avril 2007

Le MJS fait campagne pour Sarkozy

À l'instant, ailleurs sur le Web :  

Hold your clicks a moment please...

Flickr has the hiccups. We're looking into the problem right now, so please check back later.

 

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Sinon, j'ai vu aujourd'hui, à plusieurs arrêts de bus, des autocollants Les jeunes avec Ségolène posés par des militants du MJS, toujours plus intelligents et fins stratèges, sur les horaires. Message subliminal : nous, les militants socialistes, nous sommes de petits bourges qui ne prenons jamais le bus, et nous n'en avons rien à secouer des gens du peuple : qu'ils aient besoin de connaître leurs horaires de bus, ces vils manants, qu'importe ! 

Autre message subliminal : nous, militants socialistes, bafouons les règles les plus élémentaires de la vie en société et de la civilité, mais nous allons quand même donner des leçons de civisme et de morale à ceux de l'autre camp.

Ah, il faut de la bonne volonté pour fermer les écoutilles et persister à voter blanc au second tour.

18:30 Publié dans Indignations | Lien permanent | Commentaires (23) | Tags : Ligérienne

Euphorisme (à la manière de...)

À chaque fois qu'Internet Explorer me propose de fermer tous les onglets, j'ai les crocs (de boucher).

mercredi, 25 avril 2007

Dires ignorés

Je mets en lien l'enregistrement sous format .doc d'un article du Monde daté de demain et intitulé "Sud-Ouest diffuse des propos off de M. Bayrou". Il s'agit d'un texte très édifiant d'un point de vue politique, bien entendu, mais qui me permet aussi d'entonner une de mes bonnes vieilles antiennes sur la déliquescence de la grammaire française dans la presse dite "de qualité".

En effet, vous noterez, vers la fin de l'article, la phrase suivante : Il a dit ignoré ce que les deux hommes s'étaient dit. Outre la répétition assez maladroite du participe passé dit, on observe une belle faute à trois points (comme dirait Michael Jordan) : la forme correcte, bien sûr, c'est "il a dit ignorer". En cas d'inculture grammaticale, il suffit pourtant, pour s'assurer contre le péril, d'avoir recours à un verbe du deuxième ou du troisième groupe : "Il a dit finir son travail vers trois heures." "Le journaliste de l'AFP a dit mettre un grand soin à ses articles." Etc.

"Des senteurs et des poisons"

Près du quad de verdure, au rez-de-chaussée du site Tanneurs, ça ne sent pas le cuir : herbe coupée. Temps de saison (et d'avant même).

Place Anatole-France, tout à l'heure, un employé de la Ville de Tours aspergeait de quelque poison (engrais ?) le carré de verdure côté Loire avec un masque à gaz comme on n'en voyait pas même dans les bandes dessinées futuristes des années 1970. Son collègue, appuyé sur une brouette, le regarde faire, sans masque, le nez au ras de la sulfateuse. Dans quelques minutes, ils s'en iront, et un petit enfant, peut-être, viendra jouer dans l'herbe et s'y empoisonner.

Dans la file de droite, une mère parle à son fils, assis sagement à l'arrière. Il y a, accroché au rétroviseur intérieur, un de ces sapins fluorescents et déodorants qui émettent des substances fortement cancérigènes. Ah, ça doit sentir bon la mort, dans l'habitacle de la 206.

J'entends le bruit de l'aspirateur, près de la machine à café.

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Souvenir de l'automne 2003. La voisine portugaise, qui nous avait invités dans son jardin pour qu'A. y joue avec son petit-fils, nous explique pourquoi il y a tant de cadavres d'escargots entre les rosiers : Je leur donne du médicament, pour qu'ils crèvent...

10:30 Publié dans WAW | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : Ligérienne

Itinéraire d’un enfant bâté

« Du bout du pied, je chassais la neige qui s’épaississait quand, tout à coup, je dus cracher. Ce fut mon premier crachement de sang. Sur la neige blanche un large rond rouge rappelait le drapeau japonais. »

Dazaï Osamu. La déchéance d’un homme. Traduction de Georges Renondeau (1962). Paris : Gallimard, « Connaissance de l’Orient », 1998, p. 160

 

 

medium_17_avril_2007_012.jpgCe n’est pourtant pas le modèle de l’âne : on a suivi le fil de ce texte bouleversant en ralentissant un peu chaque jour, en s’arrêtant sur chaque péripétie, en savourant l’amertume. Texte magnifique, grand récit qui à chaque ligne soulève des lézards. Il y a une semaine, je le commençais, attablé au Trio. Hier soir, je le terminai, à la triple bougie de la table de chevet.

 

La déchéance d’un homme est pareil à ces pierres écrites que pose l’œuvre poétique de Bonnefoy : inscriptions dans le dur, promesses au goût âcre face au vent. Qu’il évoque ses « portraits du bouffon » (perdus et forcément géniaux) ou qu’il se voie soudainement en crapaud, au détour d’une parenthèse (p. 124), le narrateur de La déchéance d’un homme prétend à la clairvoyance mais n’est pas lucide, puisqu’il change tout le temps d’avis tout en démontrant son « exceptionnelle capacité à s’enfoncer » (pour citer Vila-Matas (ça faisait longtemps)).

Le mal de lucidité, pour le nommer de manière ambiguë, c’est aussi la vision juste, celle de photographies froides mais tendres, que devait aimer Dazaï Osamu : l’auteur de la Préface et de l’Épilogue, qui, selon la fiction, s’est vu remettre les carnets du fou avant de les retranscrire, insiste sur les trois photographies qu’il reste du narrateur principal, et il le fait avec une concision, une puissance de suggestion effarante.

Il y a aussi l’un des motifs récurrents de l’œuvre de Dazaï, à forte teneur biographique mais toujours vu sous un angle différent, par d’autres facettes encore : le double suicide manqué. Le narrateur incite sa compagne du moment à se noyer avec lui, et elle seule meurt (« Moi seul fut sauvé », comme l’écrit le traducteur, sans que l’on puisse déterminer s’il s’agit d’une faute de français ou de libertés prises délibérément, en japonais, avec la grammaire (dans le style Je est un autre)). L’eau ici, précipite et dénoue : « nous nous précipitâmes » ; « Tsune-ko dénoua sa ceinture, la plia et la posa sur un rocher » (p. 88) Ce triple battement part de travers, et c’est l’aventure de la mort en goguette. Drapeau ou pas, une tache de sang craché se laisse emporter dans le tourbillon : l’eau précipite et dénoue.

mardi, 24 avril 2007

Dialoguer

Il y a ces moments où, pour trois fois rien, le texte vacille et le lecteur chavire. C’est souvent, bien sûr. Ça arrive d’autant plus souvent qu’on lit de plus en plus. Imaginez le décrochage vers quatorze ans ; avant, lisant beaucoup, je ne savais pas du tout lire ; à présent, je continue d’apprendre. Lors d’une conversation sur un tout autre sujet – et bien sûr je n’ai pas eu le temps de suivre les conseils de mon interlocuteur – il a été question de la lecture de Pynchon (Against the Day, bien entendu (interrompu vers la page 600 il y a trois mois (mais on reprendra (l’été approche (Aurélie m’a écrit qu’elle aimait beaucoup les parenthèses alors je ne vais pas me priver, hein… (quitte à oublier d’en refermer une (voir première phrase des Géorgiques de Claude Simon))))))) et notamment de la première lecture au ras, à essayer déjà de suivre sans chercher à démêler, relier, analyser, etc. C’est d’une lecture (au raz, peut-être) que je me réclamais dans mes (à peine esquissées) Pynchoniana.

medium_Actes_Sud_Serge_Blanco.JPGLe lecteur chavire, pour peu qu’un détail soudain le sidère. Il faut que le détail soit tout à fait trivial, inattendu, sinon pas de cristallisation possible ; il faut que le lecteur puisse s’agripper à ce détail comme à quelque chose d’incertain – non, c’est moi qui en fais tout un plat, ça ne peut pas être si important… Lors d’un colloque qui, dans ma formation de chercheur, reste essentiel (Lire le détail / What’s in a detail ? (Reims, mars 2000)), j’avais argumenté, au sujet de Memory of Snow and of Dust de Breyten Breytenbach, qu’on ne pouvait échapper à la dialectique du détail-monade et du détail inclassable : dans l’attention portée au détail, le lecteur ne cesse d’aller et venir entre ce qui, du détail, éclaire des pans entiers de l’œuvre, voire fait l’objet d’une mise en abyme (avec un y (why !), c’est toujours plus classe), et ce qui, dans ce détail, ne colle pas, dépasse.

Pour l’anecdote, le détail dont il était alors question était un trait sémiotique : le lien, dans le roman, entre l’oiseau noir (black bird, syntagme nominal formé d’un adjectif et d’un substantif) et le merle (blackbird, substantif composé). (En simplifiant : l’oiseau noir est le sexe de l’amant, Mano ; pour la mère en devenir, Meheret, le merle est le fœtus.)

 

Ce soir, le détail qui me sidère, et dont je ne sais que faire (c’est le propre du détail), est une phrase apparemment anodine : « Il joue au tennis quelquefois, mais le plus souvent contre un mur. » ( Renaud Camus . Journal de Travers. Fayard, p. 724).

Le diariste évoque ici un amant de passage, avec qui il vient de passer une nuit d’amour particulièrement intense, dans la voiture de l’amant, en bord de voie ferrée. Cet événement, qui est relaté au début de l’entrée du 18 juillet, est écrit a posteriori, avec un retard de cinq jours. Or, la phrase en question se situe aussitôt après une interruption entre crochets et en italiques : Renaud Camus indique ainsi qu’il interrompt le récit des événements du 18 pour évoquer une situation immédiatement contemporaine de l’écriture du journal. Le passage entre crochets, long d’une vingtaine de lignes, est la retranscription d’un dialogue extrêmement tendu entre Renaud Camus et W., son ami, avec qui il se trouve, depuis plusieurs semaines et de façon tout à fait dramatique, au bord de la rupture.

La reprise, au moyen d’une phrase au rythme équilibré (double octosyllabe) et discrètement chiasmatique, fait l’effet, pour la lecture au ras, d’un simple retour au récit principal ; l’incise, qui constitue une sorte de dialogue enchâssé, servait à noter un incident qui, pour le lecteur, à ce moment-là, est considéré comme provisoirement clos (provisoirement, car il y aura bien sûr (ou du moins, on s’y attend) retour à l’incident dans l’entrée du 23 juillet). Pourtant, au moment même où je m’apprêtais à passer à la phrase suivante – et sans doute l’avais-je même déjà lue – , je me suis aperçu que la clausule, quoiqu’elle n’eût l’air de rien, était un peu, et même pas qu’un peu : en termes métaphoriques, se retrouver contre un mur, c’est être dans une impasse (autre métaphore), dans une situation bloquée (autre métaphore), etc. Surtout, dans la mesure où l’incise entre crochets et en italiques est une retranscription d’un dialogue qui montre, une fois encore, que le narrateur a l’impression de parler à un mur (d’avoir un mur en face de lui), la phrase de reprise peut être interprétée comme une phrase de transition, et même de commentaire indirect : l’amant d’une nuit joue réellement au tennis contre un mur (ce qui, pour ne pas être une métaphore, connote tout de même une forte solitude), mais le narrateur se trouve, dans son couple, face à un mur.

D’autre part – et là, la machine interprétative s’emballe toujours – le tennis est l’un des réseaux sémiotiques/sémantiques essentiels des Églogues (pour l’écriture desquelles le Journal de Travers devait servir et sert de matière première), etc. (Beaucoup de sous-entendus dans cet etc.-là.)

23:30 Publié dans Lect(o)ures | Lien permanent | Commentaires (20) | Tags : Littérature

Azay, pour composer chastement mes églogues

Dimanche en moins huit (?), nous avons visité, une nouvelle fois, le château d'Azay-le-Rideau.

medium_Azay_15_avril_2007_010.jpgC’était la pleine saison des glycines, qui fleurissent partout, et même dans les recoins urbains les moins ragoûtants. Il y avait, à l’accueil, une étudiante très gentille, Marianne, que je connais un peu quoique je ne l’ai jamais eue dans un de mes cours : très active au théâtre universitaire, elle a également suivi l’atelier de traduction des Merry Wives of Windsor qu’animait Markowicz l’an dernier et que j’encadrais (avec Lucile Arnoux-Farnoux).

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Le château d’Azay est toujours aussi beau, planté fièrement mais avec tendresse au milieu de son carré de douves remplies.

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Le château recèle de nombreuses richesses, et notamment un mobilier impressionnant, dont, curieusement, il n’est que rarement fait mention sur les cartouches des diverses salles. De même, pas trace d’un quelconque intérêt bibliographique pour ce mobilier dans la librairie du château.

 

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Après la visite, nous nous sommes désaltérés dans l’un des cafés bordant la ruelle qui conduit du château au bourg, et il se trouve que C. attrape le virus de l’autoportrait à bout de bras, qui pourtant me vaut de nombreux sarcasmes. Allons, il me reste (outre les tasses qu'aime tant certain cuistre post-artaldien) les photographies de verres de Coca vus de haut.

 

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Enfin, tant que je n'en suis pas réduit à montrer mes fesses... (Je pense qu'une telle exhibition ne serait pas vue d'un très bon oeil par ma hiérarchie de l'Université François-Rabelais. Pourtant, la flûte de Pan urge !)

 

 

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Achevons ce parcours dominical quelque peu échevelé par une énigme pour rinaldo-camusiens (ou pas) : buis cloqué n'est pas le siège.

lundi, 23 avril 2007

Varia

Il est assis sur l'une des marches de l'escalier qui permet d'accéder à la Poste de la place René-Coty. Je ne l'y ai jamais vu. Très sobrement mis, presque élégant, avec son gilet à carreaux, sa casquette, ses souliers marron impeccablement vernis, ce Noir qui a peut-être dans quarante-cinq ans a posé sa sébile sur la marche du haut, à droite, soit assez loin de lui, ce qui faut qu'on ne voit pas en lui un mendiant, mais avant tout un homme, peut-être fatigué, peut-être en train d'attendre l'ouverture du bureau de poste. Sa dignité ne signifie en rien qu'il n'a pas besoin de votre aide : la sébile, petit gobelet de plastique rigide transparent où traînent plus qu'elles ne trônent quelques pièces rouges ou jaunes minuscules, suffit à vous persuader que cet homme bien habillé se drape de ses (seuls ?) plus beaux atours par déférence à votre égard, et pour garder intacte l'estime qu'il a de soi. Il remercie chaleureusement celui qui place une pièce dans le gobelet, mais comme d'un homme qu'un autre viendrait d'aider à dégivrer sa voiture ou de laisser passer devant lui à la queue d'une caisse de supermarché : d'égal à égal.

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Je lance une recherche sur l'abbaye de Bois-Aubry, dont C. me dit qu'elle est ouverte toute l'année, et le premier site cité par le moteur binoclard, c'est encore un album de photographies de Tinou.

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À l'université, quasi déserte, où je discutai un petit moment avec une bibliothécaire de retour du Pays basque où il a fait, dit-elle, un temps pourri, je fus surpris, en montant les escaliers qui mènent du second sous-sol au premier étage, de découvrir, à chaque palier (je ne crois que l'on puisse dire ici entresol), l'une des larges toiles que Nico Nu a consacrées à l'île Simon. J'aimerais croire que cette cage grise, qui ne voit qu'à peine la lumière du jour, s'en trouve considérablement illuminée ; une chose est sûre, en tout cas : ça met de la couleur (comme je crois qu'on dit).

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Avoir vu Bernard Tapie, multirécidiviste affairiste et vulgairissime embagouzé, défendre aussi éhontément, hier soir à la télévision, Sarkozy, ce serait presque assez pour décider quelqu'un d'honnête à voter pour Ségolène Royal. Seulement, en face, ce sont les disciples du cynique et manipulateur Mitterrand, qui a créé de toutes pièces le Tapie politique. Alors, quoi ?

Par le petit bout de la lorgnette

On dira qu'il fait bon vivre à Tours : 6,84% pour Le Pen et 0,38% pour Frédéric Nihous. (On se raccroche à ce qu'on peut.)

En revanche, juste avant d'aller voter, j'ai aperçu, sur les panneaux électoraux de mon bureau de vote, quelque chose d'édifiant : les visages de tous les candidats (hormis Ségolène Royal) avaient été recouverts de petits autocollants du MJS, Les jeunes avec Ségolène. Je suis prêt à parier que cet acte de vandalisme illégal et antidémocratique aura suffi à faire pencher ne serait-ce que deux ou trois indécis d'un autre bord avant d'entrer dans l'isoloir. La stupidité des militants du MJS, même d'un point de vue purement stratégique, ne connaîtra-t-elle donc pas de bornes...?

dimanche, 22 avril 2007

Vi/sites

Midi. Je viens de passer deux heures à écrire et publier, sur le blog privé familial (l'un de mes cinq ou six blogs), des récits de visites récentes et des photographies en grand nombre. Peut-être expurgerai-je certains de ces billets des références privées et en donnerai-je ici, pour la rubrique Sites & lieux d’Indre-et-Loire, une version plus documentaire (ou topographique). À cette occasion, j’ai découvert (car je cherchais des sites qui parleraient du prieuré Saint-Cosme) que Tinou a mis en ligne tout un album dédié au site du grand Ronsard.

 

En écoute : « Marcello » (Jean-Pierre Como/Trio. Padre. Bleu citron, 1989.) [C’est un album que j’aime beaucoup, pas du tout frénétique, très chantant, hautement mélancolique. Il m’accompagne depuis six ou sept ans. (Après nos débuts dans la vie, je suis devenu père.)]

Minérales, 1

En Allemagne, en 1985, ce qui me surprit le plus, ce fut le goût de la Mineralwasser, qui n’avait rien de commun avec l’eau minérale ni avec l’eau du robinet. Homme déjà âgé, le père de Lenz, l’ancien « correspondant » de mon père – et que nous appellions Opa – nous avait expliqué qu’il ne fallait pas boire l’eau du robinet car elle était pleine de chlore : das ist amerikanisches Wasser, was Ihr müßt trinken ist echtes Wasser. Pour lui, la vraie eau, l’eau-thentique (sataniquement poussé par la Dame au Sablier, je ne résiste pas à ce jeu de mots foireux (minable) pour traduire echtes Wasser), était l’espèce d’Aspirine salée et imbuvable qu’il nous tendait, et que je m’efforçai, par politesse, d’avaler.

Deux étés plus tard, quand, devenu ami du fils de Lenz, Tim, je passai quatre semaines à Francfort sans ma famille, je trouvai toutes les stratégies possibles et imaginables pour ne pas boire de Mineralwasser. Cela m’était d’autant plus difficile que, n’ayant jamais été un enfant difficile quant à la nourriture, je n’avais ni l’habitude de gruger ni celle de refuser : on m’avait appris à ne jamais refuser d’aliments, et à toujours goûter, voire, dans l’idéal, à finir l’assiette, ce que je faisais généralement. Alors, en lieu et place de Mineralwasser, je buvais du lait, du jus d’orange, toutes sortes de jus de fruit et même de l’eau du robinet, au risque de paraître affreusement pro-américain dans cette ville traumatisée par la présence durable d’une base américaine. (C’était l’année, à moins que je ne confonde, du grand conflit politique et citoyen autour de l’installation de missiles Persching en Allemagne de l’Ouest (mais je vous parle d’un temps que les moins de vingt ans, etc.).)

 

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Les palindromophiles apprendront avec plaisir que ce billet est le 1551ème de Touraine sereine, mais aussi le 22ème du Livre des mines.

samedi, 21 avril 2007

Île Simon

Vous ne le croirez peut-être pas, ou vous vous en contrefoutrez royalement, mais, en bientôt quatre ans de vie à Tours, je n'avais jamais laissé traîner mes guêtres ni mes semelles dans le parc de l'île Simon, pourtant voisin de l'université et pas si éloigné que cela de mon humble demeure (my 'umble abode, comme le répète incessamment le fourbe Uriah Heep dans David Champdecuivre (pas le magicien, hein ; le roman de Dickens)). Cet après-midi (je persiste à écrire cet au lieu de cette, malgré des années passées à lire Renaud Camus, qui, le premier, m'a averti du genre plutôt féminin d'après-midi (mais j'ai de bonnes raisons de persister à écrire cet)), nous nous y sommes promenés.

J'avais pris avec moi La Bataille de Pharsale, car il me paraissait impératif, pour le pédant cratylien que je suis, de me promener sur l'île Simon avec un livre de Claude. L'Amour l'Automne m'a donné envie de relire cet opus de Claude Simon, que j'avais lu avec délices en 1993, me fiant non seulement à mon goût marqué pour cet écrivain mais aussi aux recommandations de mon professeur de khâgne, Michel Boisset, qui nous avait appris que le titre était une anagramme de la bataille de la phrase. Comme les jeux sémiotiques qui servent de réseaux structurants à l'écriture des Eglogues de Renaud Camus reposent en grande partie sur des anagrammes et des paronomases, tout se tient, n'est-ce pas. Ouvrant mon vieil exemplaire au hasard, sur un banc, je vis passer un vulcain : rien de plus beau, à cet instant précis.

Après un premier mouvement de recul puis un moment de bouderie, mon fils, A., a joué (et moi aussi) au football avec trois garçons plutôt plus âgés que lui : deux frères très mal élevés, Benjamin et Jonathan (9 et 7 ans), et un ami à eux, Owen (6 ans), remarquablement discret et courtois, vu son entourage direct. Je songeais que le prénom du petit Owen devait avoir été choisi pour rendre hommage à l'attaquant anglais Michael Owen, ou à je ne sais quel héros de série américaine, mais certainement pas à la très belle nouvelle de Henry James, Owen Wingrave. (Je ne demande qu'à me tromper. Il faut noter que l'un des garçons se prénommait Benjamin et que la nouvelle a servi d'inspiration à un opéra, du même nom, de... Britten.) Ce nom d'Owen Wingrave est, en soi, tout un programme : win / grave (gagner la tombe ? l'emporter dans le tombeau ? vaincre quoi ?).

Je n'avais pas, avec moi dans la jolie île, ma seule famille, mon seul Claude Simon, mes seules pensées de pédant : j'avais aussi mon appareil photographique, afin d'immortaliser certains recoins de l'île Simon que j'ai souvent observés depuis les bords de Loire ou depuis les salles de cours des étages supérieurs du bâtiment des Tanneurs, et notamment ces espèces de lourdes perches multicolores fichées dans le sol à 45°, qui, vues de près, forment une sorte de teepee longitudinal et dont je ne comprends absolument pas la fonction (entrepôt à canoës ? coupe-vent ?). C'est à peine si j'accordai une furtive pensée aux toiles que Nico Nu a consacrées à cette île et qui éclairent, de leurs vives couleurs, les murs de la salle de conférences du cinquième étage de la bibliothèque universitaire.

vendredi, 20 avril 2007

Pire ratage ?

Plusieurs de mes correspondants électroniques habituels ont reçu, en provenance de mon adresse, un message prétendument signé par moi et expliquant pourquoi je voterai Nicolas Sarkozy. Je tiens à préciser (ne pouvant savoir qui a reçu ce courriel) que ce texte n'émane pas de moi et qu'il s'agit d'une usurpation flagrante d'identité.

Vu l'agitation qui règne ces temps-ci sur le Web, j'ai ma petite idée sur le coupable présumé de cette nouvelle malversation, mais, quoi qu'il en soit, je ne soutiens aucunement Nicolas Sarkozy... et il va de soi que je n'envoie pas de courriels appelant à voter pour ni contre qui que ce soit.

Points virgules, élections, traductions estudiantines

Parcourant, pour la première fois depuis 2005, les quelques pages de journal écrites en juin 2002, je tombe sur ces trois entrées, toutes d'actualité : 

 

18 juin, 16 heures.

Sinon, passé une partie de la journée à corriger des versions insensées (adjectif employé littéralement). Texte difficile, certes, d’E. M. Forster, d’autant que s’adressant à des non spécialistes de deuxième année (notamment des lettres modernes), mais je sais, par expérience, que, même avec le texte le plus expurgé, le plus évident, le plus facile, on trouve des pépites sans nombre, des phrases entières dénuées de sens.

L’expression woolly rhinoceros (rhinocéros laineux (ils ont, pour l’examen, un dictionnaire unilingue) a donné lieu aux fictions les plus réjouissantes : ‘les indescriptibles rhinocéros’, ‘les rhinocéros blancs’, ‘les rhinocéros à poil’, ‘les rhinocéros à poils longs’, ‘les rhinocéros des bois’, ‘les rhinocéros poilus’, ‘les rhinocéros velus’, ‘les rhinocéros à laine’, et surtout (la palme !) ‘les rhinocéros angora’… ! La phrase elle-même a donné lieu à deux perles : « les luttes contre les mammouths ou ce qui nous semble être des rhinocéros » ; « fatigués des luttes contre le mammouth et contre la peau de rhinocéros ». Ce doit être fatigant, en effet, et même pour un homme de Néanderthal (dont il est question dans le texte), de se battre contre une peau de rhinocéros !

Mais ce n’est qu’un exemple parmi d’autres, plutôt amusant en l’occurrence. Le plus déprimant, ce sont ces monceaux, ces tombereaux de phrases alignées comme à la parade, où des mots vagues ou approximatifs sont juxtaposés et liés par une syntaxe incohérente, le tout ne signifiant, en fin de compte, absolument rien ! Il n’y a pas si longtemps, je pense, ce supplice était réservé aux professeurs de lettres classiques.

 

18 juin, 21 heures.

Hier, à la mosquée, avec Frédéric : il m’annonce qu’il a décidé de ne plus parler de politique, que cela n’a occupé que trop de ses conversations depuis son retour des Etats-Unis (il y avait passé une quinzaine fin avril, pour le travail, à Providence) et ce fameux second tour, que cela n’avance à rien, ne fait rien avancer, est épuisant finalement et contre-productif. Il n’a pas dit ça comme ça, je remets ça à ma sauce. Mais j’ai trouvé ça assez fort, et un peu agaçant aussi, qui sait…

  

 

20 juin, 8 h 45.

Je remarque que j’utilise beaucoup le point-virgule, dont Renaud Camus signale qu’il n’est pas apprécié des journalistes et des simplificateurs en tout genre ; le point-virgule joue un rôle très particulier aussi dans Le Génie du lieu ; cela mériterait une analyse.

« Puisque vous écrivez de courts paragraphes, à quoi vous sert le point-virgule ? »

Je ne sais.

jeudi, 19 avril 2007

Avènement ou rémanence des nationalismes ?

The Novel and the Politics of Nation Building in East Africa, publié par le critique et essayiste Tirop Peter Simatei il y a déjà quelque six années, trace un parcours rigoureux des littératures post-coloniales est-africaines. Après un premier chapitre, assez classique, qui remet la question du nationalisme et de ses expressions littéraires dans le contexte spécifique des pays étudiés (Kenya, Ouganda) et d’un fanonisme revisité, Tirop Peter Simatei aborde plusieurs auteurs essentiels, en particulier Leonard Kibera, dont le très beau roman Voices in the Dark méritait bien cette réhabilitation. Simatei montre bien comment les désillusions de la génération de l’Indépendance viennent hanter le texte fictionnel : œuvre nourrie de paradoxes, d’oxymores et de multiples messages ironiques ou ambivalents, Voices in the Dark vaut surtout par l’impossible conciliation d’une critique des nouvelles élites nationales et du point de vue élitaire adopté par le romancier : est-il possible de persister à vouloir construire l’identité nationale si l’on livre par ailleurs un portrait subversif de la nation kenyane des années 1960 ?

De ce point de vue, le cas de Ngugi wa Thiong’o est exemplaire. Si l’étude des symboles politiques est fouillée, elle n’apporte pas un éclairage très neuf sur le grand romancier. Matigari reste, de fait, l’un des textes qui souligne le mieux la confiscation du pouvoir par des autorités néo-coloniales issues des luttes anti-coloniales. Sans doute le « monologisme » et le manichéisme de Ngugi  – des traits caractéristiques de son esthétique et de son idéologie –  ne correspondent-ils pas tout à fait à la libération esthétique que Tirop Peter Simatei appelle de ses vœux : on sent l’auteur de cet essai plus à l’aise avec des auteurs tels que M. G. Vassanji ou Peter Nazareth, qui constituent des figures intermédiaires.

Le chapitre 4, qui est consacré à Vassanji, « l’Asiatique », et le chapitre 5, intitulé « The Multiracial Project », sont certainement les meilleurs de l’ouvrage. Simatei livre plusieurs analyses d’une grande finesse, en particulier dans sa lecture de The Gunny Sack, le premier roman de Vassanji. Déracinés, sans identité stable, sans « africanité » immédiatement reconnaissable ou indéniable, les Asiatiques furent les oubliés de la décolonisation. En n’évitant pas les sujets sensibles, comme la participation de certains Asiatiques au commerce négrier, Vassanji propose un modèle nécessairement complexe et dynamique de la construction nationale. Il faudrait que les jeunes générations admettent les erreurs du passé sans y revenir incessamment : vœu utopique ?

Si Vassanji s’intéresse aux trajets individuels (ce que confirme partiellement son dernier roman publié, Amriika), Peter Nazareth et David Rubadiri insistent surtout sur la corruption politique des années 1970, ce qui leur permet d’expliquer les violences, les exactions, et même les expulsions prononcées à l’encontre des Asiatiques. Une fois encore, la faute en revient au modèle colonial, qui est resté la référence majeure des nouvelles élites.

Le chapitre 6 s’intéresse (tardivement ?) à la question des revendications féminines et aux problèmes spécifiques d’une vision féministe des constructions identitaires nationales. Simatei se situe dans la lignée idéologique « douce » de théoriciennes telles qu’Obioma Nnaemeka, qui parient sur l’interaction, le dialogue, et une « politisation » modérée. Les trois romans sur lesquels il appuie l’essentiel de ses analyses sont Coming to Birth et The Present Moment d’Oludhe MacGoye, ainsi que The Invisible Weevil de Mary Okurut. Dans ces trois textes, la libération nationale passe par une prise en compte polyphonique de multiples points de vue : le bilan est tout à fait amer, dans la mesure où les conflits de pouvoir de l’époque post-coloniale semblent avoir accru les inégalités et multiplié les fractures psychologiques.

En fin de compte, ce que proposent la plupart des textes étudiés par Simatei, c’est une pluralité d’angles d’approche de l’idée de construction nationale, à rebours des modèles hégémoniques néo-coloniaux des années 1970 et 1980. Il est certainement regrettable que l’auteur ne livre cette piste bakhtinienne qu’en dernier lieu, au détour d’une conclusion sommaire (deux pages !) : les concepts de dialogisme et d’hétérogénéité, si hâtivement lancés, auraient sans nul doute permis d’approfondir encore la réflexion. Autre regret : que la Corne de l’Afrique et la Tanzanie n’aient pas été conviées à cette étude des littératures est-africaines.

 

SIMATEI, Tirop Peter. The Novel and the Politics of Nation Building in East Africa.

Bayreuth: Bayreuth African Studies 55, 2001. 186 pp.

Tête de veau & tripoux

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Tiens, en ce 11 février, si je n'ignorais pas l'existence du pédant Juan Asensio, je n'avais pas encore goûté au brouet saumâtre de sa bile (qu'il prend pour du vitriol) ni à sa totale absence de sens de l'humour (qu'il déguise sous des dehors de sauvageon en croyant qu'il s'agit de sarcasmes)).

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Ajout de 16 h 15 :

Constatant que Juan Asensio avait enfin accepté d'ouvrir son blog aux commentateurs, je me suis permis - très légère moquerie par rapport aux tombereaux d'insultes dont le Basque fourbe m'inonde depuis un mois - d'y ironiser sur l'usage immodéré et infondé qu'il y fait des citations. Ayant reçu pour toute réponse du pseudonyme Ben une explication de texte du modus citandi qui ferait honte à un élève de seconde, j'ai écrit le commentaire suivant, après quoi j'arrêterai de ferrailler contre ces moulins à vent d'outre-Bidassoa :

Bien entendu, citer est faire acte de culture. Croyez-vous franchement que je critiquais le fait de citer en soi ? Avez-vous pu imaginer pareille imbécillité ? Je me contentais de pointer, assez ironiquement, la façon qu'a ce cher Juan Asensio de faire ce qu'il reproche aux autres...

Citer, oui, et plutôt deux fois qu'une... "nous ne faisons que nous entregloser", n'est-ce pas. Un centon peut être extrêmement stimulant, écrit dans un esprit particulier, avec un souci d'analyse particulier.

Ce n'est malheureusement pas le cas du Stalker, du moins dans ce billet (mais aussi dans de nombreux autres). Sa seule compétence consiste à transformer les hyperliens pointant vers mon blog en hyperliens pointant vers sa petite crotte pseudo-borgésienne : en fait, il a raté sa vocation et aurait dû être ingénieur informaticien. Pour cela, peut-être, il eût été autre chose qu'un imposteur au petit pied.

Puisque, fidèle en cela à son ascension, il continue de bafouer le droit à la libre expression en modifiant les commentaires publiés, je ne répondrai plus... surtout s'il s'agit de répondre à des anonymes dont le surnom, ne dépassant pas trois lettres, est une troncation postérieure sans charme et sans inventivité.

mercredi, 18 avril 2007

Under a Blanket of Blue

La chaleur s'est levée tard ce matin, et, sur le chemin du bus, sur les trottoirs à l'ombre, on supportait la veste. Mon fils voulait revoir l'exposition sur la planète Mars au Muséum ; les étages sont en travaux, mais nous avons pu voir, arrivé hier tout juste et installé aussitôt, haut, impressionnant, l'ours Willy empaillé, qui naguère s'ennuyait à mourir dans la fosse minable du Jardin botanique. Aujourd'hui, seule sa compagne lui survit, plus malheureuse que jamais, triste comme les pierres, et lui a été "naturalisé" (affreux mot mensonger).

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Dans un coffret de Coleman Hawkins que j'écoute rarement (F.B.-S., l'ami fou de jazz des années Beauvais, perdu de vue désormais, aurait dit "ça, c'est du vieux jazz"), il y a de nombreuses gemmes, dont je me demande si certaines pourraient vraiment être jouées par les musiciens de jazz les plus déjantés / avant-gardistes de notre époque. Certains standards se prêtent à des reprises dissonantes, électriques, toutes de stridences et de ruptures de mélodie, mais franchement... Salt Peanuts ? Stompin' at the Savoy (dont j'ai toujours cru qu'il s'agissait d'une composition de Duke Ellington et dont je m'aperçois que l'auteur en est Benny Goodman) ? Just one of those things, de Cole Porter, ou On the Bean, sont, de ce point de vue, plus prometteuses.

mardi, 17 avril 2007

Orbe orange offrande

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Pourquoi noir, à avoir froid, je vois ici un croissant de lune poussant monstrueusement sur le corps décapité d'une... d'une quoi ? d'une sardine ?

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Sûr, vaut mieux recycler.

Mardi craves

À midi tapant, j'ai observé le manège de quatre corbeaux (une corneille, un freux et deux choucas) qui fouaillaient et arpentaient de concert un champ fraîchement retourné le long de l'avenue Daniel-Mayer. Il est rare de voir les trois espèces ainsi réunies, dans un semblant d'harmonie parfaite.

Pendant que je nettoyais les vitres des pièces du premier étage, je voyais, comme dans un cadrage que traversait énergiquement le chiffon vert clair, A. et son ami M., venu pour l'après-midi, vaquer à leurs jeux, dans le jardinet. Les camions benne ne transportent pas tous de la terre ou du gravier. Au déjeuner, on a évoqué les chocards et les craves.

Il y a quinze mois, à vue de mémoire, j'avais publié une série de photographies de l'avenue Maginot. C'était lors de la précédente vidange (j'ai un peu tardé).

Julien Jacob à Jouy-en-Josas

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Ce fut un des jours les plus importants de sa vie. Un public enthousiaste, dans la salle des fêtes, très moderne, de Jouy-en-Josas. Des spectateurs et des spectatrices venus le féliciter de son concert, et de sa démarche musicale.

On ne parlera pas de ‘déclic’, car le déclic avait eu lieu bien longtemps avant, quand, humant, fredonnant, éventuellement hurlant, il s’était dit qu’il pourrait un jour faire un disque dans une langue semi-inventée, faite de sons recherchés et d’apparents borborygmes. Un journaliste malin (était-ce des Inrockuptibles ou de L’Echo des Savanes) avait parlé de ‘borborythmes’. C’était un peu idiot, mais assez vrai.

Donc, ce jour-là, dans la salle des fêtes de Jouy-en-Josas, Julien avait fait le plein. Le plein de spectateurs et le plein d’émotions. Un trop-plein, quasiment. Il avait chanté de sa belle voix, plus assurée que jamais, avec Les Messieurs, ses deux acolytes, à ses côtés.

Ce soir-là, il avait choisi de commencer, comme dans le disque (et contrairement aux quelques autres concerts), par l’incantation

Wol wol Wol métil donmé

Ya wol métil don

Wol métil donmé

 

Il avait commencé sans musique, à voix basse, a capella, dans une quasi obscurité, pour capter l’oreille. Et, de là, tout s’était enchaîné comme par enchantement. La musique avait quelque chose de magique. Il se souvint de son père, qui parlait si bien des rites qu’il avait connus enfant. Jamais pourtant il n’avait trépigné. Pour démentir un peu certains propos exagérés entendus ci et là. Il était resté digne, se cantonnant, pour l’envoûtement, aux seules vibrations, aux seules variations de sa voix.

Il avait pensé au premier cri poussé, il y avait juste trente-six ans de cela.

 

G.C., 21 mars 2001.