mercredi, 05 mars 2025
05032025
J’ai une crève plutôt modérée depuis avant-hier soir : gorge en feu, nez guère plus bouché qu’habituellement, pas de fièvre. Cette nuit, j’ai dormi d’une traite. Je dois mettre à jour les deux fichiers Répertoire (livres et films), puis je me remets à Empreintes de crabe.
Tout se croise en tous sens.
Hier, j’ai pris mes billets de train et réservé une chambre d’hôtel pour les deux nuits à Nantes. À la médiathèque des bords de Loire j’ai emprunté le roman de Lisette Lombé, que je n’avais pas lu quand il est sorti. Normalement, je vais pouvoir déjeuner avec Pierre Barrault, que je n’ai pas vu depuis trois ans et demi : ça me fait très très plaisir.
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mardi, 04 mars 2025
04032025
Hier, c’est parti dans tous les sens, et je n’ai ni fini de saisir les quelques citations ou idées glanées dans Chartier, ni poursuivi le dépouillement de ce que j’avais trouvé en commençant de relire Empreintes, et au point même d’avoir interrompu depuis 48 heures cette relecture ; ça ne va pas du tout. Je dois avoir fini de relire Empreintes dimanche prochain, et comme, de façon imprévue, je vais aller de jeudi à samedi à Nantes pour le festival Atlantide, ça signifie un gros coup de collier aujourd’hui et demain.
Cela fait plusieurs semaines que je n’ai relancé personne pour Amma Darko. Mais qui relancer ? J’en viens à me dire que mon essai pourrait être aussi intéressant à partir du texte allemand de Cobwebs et Stray Heart, c’est-à-dire à partir de cette absence du texte anglais. Peut-être, mais toute la partie où je me voyais procéder à une critique traductologique, pour ne rien dire de l’espoir qui commençait à naître de rendre ces deux textes introuvables – une fois trouvés – disponibles pour le lectorat anglophone, tout ça tombe aux oubliettes.
10:20 Publié dans 2025, Affres extatiques, WAW | Lien permanent | Commentaires (0)
lundi, 03 mars 2025
03032025
Ce matin, je me suis levé à 4 h 30 pour lire, parcourir et “extraire” (comme dit Bergounioux) un ouvrage assez maussade sur la traduction. Je me suis aperçu dans l'après-midi qu'une partie des passages qui m'avaient intéressé ont été plagiés éhontément, en 2012, par cette universitaire renommée, presque tous dans des articles d'un même numéro de revue de 1994.
Pour me changer les idées (ou pas), j’écoute le 44e épisode du podcast de Clara Joubert, Lost in Translation, que j’ai découvert il y a deux ou trois mois seulement. Cet épisode s’intitule “Une écrivaine sans langue. Rencontre avec Alta Ifland”. La discussion va tourner autour de choses déjà explorées (mais toujours passionnantes à explorer encore), ce qu’Elsa Triolet a écrit dans La mise en mots : « Ainsi, moi, je suis bilingue. Je peux traduire ma pensée également en deux langues. Comme conséquence, j'ai un bi-destin. Ou un demi-destin. Un destin traduit. » Ce qui est intéressant, c'est qu'Alta Ifland écrit dans deux langues dont aucune des deux n'est sa langue maternelle, l'anglais et le français.
Elle s'autotraduit et déclare d'ailleurs : « Quand je m’auto-traduis, c’est une nouvelle œuvre. »
Elle dit aussi :
« En passant d’une langue à l’autre je découvre des choses de mon identité que j’ai dans une langue et pas dans l’autre, et c’est comme si je me reconstruisais de manière intégrale. Quand je m’autotraduis je mets ensemble toutes ces parties de moi-même, en ces trois identités. Chaque identité est un peu partielle et par l’autotraduction je deviens entière. »
Elle a également commenté la pratique créatrice du jeu entre les langues, de l'interlinguisme : « Parfois je traduis littéralement des expressions roumaines idiomatiques et ça fait un effet comique je crois. Eugène Ionesco faisait ça aussi. » —— Je sais que je ressasse mes vieilles marottes, mais cela me rappelle un des livres qui m'a le plus marqués, lu en bibliothèque à Beauvais (et comme je regrette de ne pas l'avoir acheté, il est difficilement trouvable), Quant à je (kantaje) de Katalin Molnar. (Je ne ressasse pas trop, apparemment, vu que je n'ai cité ce livre majeur qu'une seule fois en vingt ans dans ce blog, et en passant, l'année dernière.)
18:42 Publié dans 2025, Translatology Snippets | Lien permanent | Commentaires (0)
dimanche, 02 mars 2025
02032025
Lu le « Que sais-je » de Michaël Oustinoff sur la traduction, que j’avais récupéré à la B.U. qui l’envoyait au pilon : il s’agit de la 6e édition, de 2018, mais rien n’a été changé, je pense, au texte de 2003. C’est globalement médiocre, même si ça rafraîchit un peu les idées. Le problème que je me pose, par rapport à mon projet, c’est de savoir si ça a une quelconque utilité de montrer en quoi certaines des grandes théories (Steiner, Ricoeur, Cassin) n’ont aucun intérêt pour mon sujet car elles réfléchissent à partir du champ des langues européennes et de rapports interlinguistiques non coloniaux, donc à côté de la plaque. Perte de temps ? peut-être pas, mais ça m’entraînerait dans un autre livre : ce qu’il faut, en fait, c’est que je trouve ou retrouve les articles et les livres qui ont déjà fait ça, une approche décolonisant la traductologie en quelque sorte.
Cela posé, je continue de trouver que la théorie de la traduction/hospitalité de Ricoeur est une gigantesque connerie, même dans son champ.
19:17 Publié dans 2025, Autoportraiture, WAW | Lien permanent | Commentaires (0)
samedi, 01 mars 2025
01032025
Beaucoup avancé dans Empreintes de crabe, et donc écrit un peu (beaucoup) dans le fichier de travail. Donc pas trop ici.
Rien d’autre à signaler que le fait que j’ai pu mettre en ligne, hier, le podcast de la quatrième émission de I Love Mes Cheveux. C’était avec mon ancien collègue et toujours ami Eric Rambeau, et on a parlé d’otaries et de phalènes, du joycien comme langue, de la traduction à la chaîne d’ouvrages de vulgarisation, de Lo’Jo, des recherches de vocabulaire scientifique avant l’avènement du Web etc. Bref, c’était bien cool.
19:22 Publié dans 2025, ILMC | Lien permanent | Commentaires (0)
vendredi, 28 février 2025
28022025 (double codicille)
Sur le sujet dont je parlais hier – l’impensé colonial du MAAOA – voici ce qu’a écrit, en réaction au partage de mon billet sur Facebook, mon collègue et ami Louis-Georges Tin :
Quand un musée ou une université détient des restes humains qui ont été acquis sans le consentement des personnes, des restes humains entreposés dans un placard, souvent après des massacres, des crimes de guerre, voire des crimes contre l’humanité, techniquement, selon le droit international, ces lieux sont ce qu’on appelle des charniers. De charniers jolis, mais des charniers tout de même. On pourrait et devrait demander la fermeture immédiate de ces établissements, en vertu du droit, tant que la restitution n’a pas été mise en œuvre.
Sur Bluesky, Luc-André Biarnais m’a signalé un article publié le 14 septembre dernier dans le journal La Croix et intitulé “Des Guyanais réclament à Paris les ossements de leurs ancêtres, exposés dans des zoos humains”.
Voici ce qu'on peut y lire :
Au niveau national, la route promet d'être sinueuse, tant le dossier semble éloigné des priorités gouvernementales. Si Rima Abdul-Malak, ancienne ministre de la culture, s'était dite ouverte à l'idée que ces ossements reviennent en Guyane tout en restant propriété de l'État, le dossier n'a plus connu d'avancées depuis janvier 2024 et l'arrivée Rue de Valois de Rachida Dati. Quant à la loi du 26 décembre 2023, qui facilite la restitution de restes humains en créant une dérogation au principe d'inaliénabilité des biens appartenant au domaine public, elle se contente de le faire pour les pays étrangers, et ne concerne donc pas les territoires ultramarins.
10:38 Publié dans 2025, Affres extatiques, Chèvre, aucun risque | Lien permanent | Commentaires (0)
jeudi, 27 février 2025
27022025 — le MAAOA, une décolonialité de façade
Avant-hier, à Marseille, j’ai visité notamment le MAAOA (Musée d’Arts Africains, Océaniens et Amérindiens). Il se répartit sur trois très grandes salles, dans le Centre de la Vieille-Charité.
J’ai commencé par les collections d’objets et d’œuvres africain·es, avant de me rendre dans la salle consacrée à l’Océanie (dans laquelle sont surtout exposées des œuvres de Polynésie — je suis passé plus vite dans la partie consacrée au Mexique). Dans la salle consacrée aux objets d'Océanie, il y a une vitrine dans laquelle est exposé un non-objet : dans une cage de verre tapissée de bleu, on ne voit rien, ou plutôt on voit qu’il n’y a aucun objet. Un cartouche indique sobrement que l’objet qu’on ne voit pas est une tête humaine tatouée toi moko, d’origine maorie.
À droite de la vitrine vide, un long texte intitulé « Restitution de patrimoine aux peuples d’origine » explique doctement, sur cinq paragraphes, que i) l’objet qui n’est pas exposé a une valeur sacrée pour les Maori ; ii) il appartient à une catégorie qui fit l’objet d’un « ignoble trafic jusqu’à son interdiction en 1831 » ; iii) « le MAAOA n’a jamais exposé ni reproduit la tête humaine toi moko présente dans la collection Gastaut » ; enfin, iv) « suite à la loi du 18 mai 2010 visant à autoriser la restitution par la France des têtes Maori à la Nouvelle-Zélande, la tête […] fut restituée en 2012… ».
Il va de soi que cette mise en évidence de l’histoire du pillage colonial et de la restitution d’objets est tout à fait capitale dans un musée, et qu’on ne peut que déplorer que cela soit souvent moins explicite. Pourtant, sans que le remède soit tout à fait pire que le mal, j’ai été en proie à un profond malaise après avoir lu ce texte.
En effet, qu’avais-je vu jusque-là ? Eh bien, pour commencer par les objets exposés tout près de cette spectaculaire vitrine vide, il y a des têtes réduites Shuar, des crânes surmodelés du Vanuatu etc. Donc des restes humains, des objets tout aussi incompatibles avec l’exhibition muséale, et même avec l’exposition en-dehors d’un cercle communautaire restreint. C’est d’ailleurs, à en croire plusieurs sites, le point commun de tous les objets de cette fameuse collection Gastaut : les 88 objets sont « des crânes, des têtes et des objets liés au crâne humain, sculptés, peints, surmodelés, gravés ». Le profond malaise qui s’est emparé de moi vient de l’hypocrisie que constitue la vitrine vide : pour 87 objets qui furent aussi l’objet de pillages et de trafics, au point de se retrouver dans la collection privée d’un neurologue français de la seconde moitié du 20e siècle (comment ne pas penser au livre génial de Delphine Peiretti-Courtis, Corps noirs et médecins blancs ?), le fait d’en restituer un seul vaut-il exemption générale ? En quoi les cultures du Vanuatu ou d’Amérique du Sud dont le MAAOA expose encore les objets rituels sont-elles plus désacralisables que la culture des Maori ? À ce niveau de foutage de gueule, je m’attends à ce que d’autres affirmations du fameux texte soient tout aussi fantaisistes : si on cherche, se rendra-t-on compte, par exemple, que le MAAOA a, en fait, « exposé et reproduit la tête humaine toi moko » à un moment de son histoire ?
Je l’ai dit, j’avais visité la salle des œuvres africaines avant, et j’y avais pris de nombreuses notes, car en dépit d’une muséographie « moderne » et de phrases soucieuses de montrer qu’on en avait fini du regard ethnocentrique colonial, tout reste à faire. Pour le dire clairement : les textes de cadrage proclament qu’on en a fini de la vision suprémaciste, tandis qu’affleure, presque à chaque objet, un impensé colonial généralisé.
Prenons quelques exemples parmi tant d’autres.
1/ Il est indiqué que la pipe d’apparat Bamum exposée a « vraisemblablement appartenu au sultan Njoya ». Il se trouve que je connais bien le contexte historique et architectural, car le sultan Njoya est, entre autres, le protagoniste principal de Mont-Plaisant, un des quatre romans de Patrice Nganang autour duquel tourne mon gros projet de recherche actuel. Ibrahim Njoya a-t-il donné une de ses pipes ? à qui ? dans quelles circonstances ?
2/ Le MAAOA expose une autre pipe, ayant appartenu, celle-là, au roi Glélé, dixième roi d’Abomey et père du célèbre Béhanzin, dont on sait comment les Français le chassèrent de son royaume et le condamnèrent à l’exil. Tout cela n’est absolument pas dit, d’ailleurs : pour le visiteur lambda, c’est la pipe du roi Glélé, dont on nous donne juste les dates de règne et l’origine géographique (« Fon, Bénin »). Il ne faudrait pas que qui que ce soit fasse un rapprochement avec les pillages massifs perpétrés contre ce royaume, au point que le « trésor de Behanzin » a été restitué récemment au Bénin. Rappelons que la France a rendu 27 œuvres emblématiques, mais continue de s’accaparer plusieurs milliers d’objets que réclame le Bénin.
Au hasard, y aurait-il la pipe de Glélé parmi ces objets ? Autant dire qu’avec ce genre de muséographie, je n’étais, avant même d’avoir lu le très solennel texte « Restitution de patrimoine aux peuples d’origine », pas trop prêt à me laisser embobiner…
3/ Les panneaux d’information restent peu diserts sur les conditions dans lesquelles le principal collectionneur privé, Léonce-Pierre Guerre (“grand collectionneur d'art africain et fasciné par ce continent depuis l'âge de douze ans”, c'est-y-pas chou ça), a acquis les objets avant d’en faire don à la ville de Marseille.
4/ Trois citations viennent clore le panneau d’information principal qui tente de contextualiser – en expliquant que toute cette époque est révolue – la façon dont les musées européens ont longtemps exposé ces objets en les inscrivant dans « l’art primitif ». Ces trois citations sont respectivement : deux phrases de Ludwig Wittgenstein (non sourcées) ; un proverbe africain ; deux phrases de Victor Segalen (non sourcées).
Je n’ai pas précisé que le proverbe africain n’était pas sourcé, car c’est ici, bien entendu, l’expression « proverbe africain » elle-même qui est significative. Expliquer d’un côté qu’on reconnaît désormais la valeur pleine et entière des œuvres exposées dans la salle au même plan que les chefs-d’œuvre de l’art « occidental », puis citer un « proverbe africain », ça revient, pour un défenseur de foot, à détourner un ballon en corner puis à marquer deux fois contre son camp : difficile de dire si c’est plus ridicule qu’abject. De fait, ce que signifie ce panneau, c’est que les productions culturelles européennes sont individualisables et spécifiques, mais que i) la culture du continent africain se réduit à des proverbes – ce trope même est déjà raciste – ; ii) bien que chaque cartouche assigne une origine ethnique et géographique à chaque objet, il reste possible de citer un proverbe « africain » comme si l’Afrique était un tout homogène.
Par conséquent, il devient urgent que les personnes qui s'occupent de telles collections comprennent qu'il ne peut suffire de « déplier l'histoire coloniale à partir des collections muséales », mais qu'il faut, avec courage et profondeur scientifique, déconstruire (et évacuer) les impensés coloniaux de la muséographie contemporaine.
17:14 Publié dans 2025, Affres extatiques, Hors Touraine, Indignations, WAW | Lien permanent | Commentaires (0)
mercredi, 26 février 2025
26022025 (La Montespan et les hippocampes)
Au cours de ces quarante-quatre heures passées à Marseille, j’ai, quoique je ne me sois pas tant promené que cela, entendu deux conversations téléphoniques différentes, dont je vous livre ci-après verbatim deux extraits :
« C’est un sociologue italien qui a étudié les pêcheurs d’hippocampes. »
« C’était l’époux de la Montespan, ce qui lui a valu quelques déboires. »
Je n’avais jamais entendu de bribes de conversations téléphoniques aussi érudites, de sorte que je me demande si cela signifie que Marseille regorge d’échanges intellectuels de très haute volée, ou si, hypothèse plus intéressante, il y a des gens qui se promènent dans Marseille en faisant mine de tenir ce genre de conversation. Voire que ces personnes seraient payées par la municipalité.
Mais après tout, moi qui vous parle, je suis en train de dicter ce texte sur le Vieux-Port, de sorte que quelqu’un qui m’aura entendu pensera que c’est moi qui parle de pêcheurs d’hippocampes et de la Montespan.
12:30 Publié dans 2025, Chèvre, aucun risque, Hors Touraine | Lien permanent | Commentaires (0)
mardi, 25 février 2025
25022025
Tout à l’heure, je vais donc animer à l’EHESS, à la suite d’une autre intervenante tout de même (Edith Mvondo Ekodo, je me réjouis d’entendre et de rencontrer), la dernière séance du séminaire dirigé par Christelle Rabier. Le titre de mon intervention, qui porte sur mes deux traductions récentes de deux essais historiques, est « Décentrer, documenter, traduire ».
Hier soir, j’ai tenté de faire un tour du Vieux-Port, mais dans la nuit déjà, ne voyant pas la mer, longeant des bâtiments froids le long de trottoirs entièrement déserts (à sept heures du soir !), j’ai interrompu la promenade. Aujourd’hui j’espère au moins visiter le Mucem, et demain matin aller à pied jusqu’à la Bonne Mère, histoire de dire que j’aurai un peu « vu » Marseille.
Je suis malheureusement réveillé depuis 4 h 50, avec le nez totalement bouché et une migraine forte qui a fini par me contraindre à prendre un doliprane (ni les mouchages ni le café n’ont aidé, et d’ailleurs le doliprane n’a pas l’air d’aider non plus). Comme cette sinusite chronique, liée à des polypes « gênants mais pas assez nombreux pour qu’on vous opère » (sic), a débarqué progressivement dans ma vie, je me demande si j’en serai débarrassé un jour, et surtout comment je me sentirai revivre, de ne pas passer au moins la première heure de chaque journée à essayer de me désaccabler. Dans la journée, la sinusite me laisse globalement tranquille, mais elle est un peu là tout le temps quand même.
Pas sûr d’être très en forme pour le Mucem – il va falloir se bourrer de café.
Extrait ceci, ce matin, d'un entretien entre Ilan Stavans et Richard Wilbur (traduction Sylvie Kleiman-Lafon) : « En tant que composition, il [l'original] arrive toujours en premier dans l'ordre chronologique. Mais pour le lecteur, la traduction peut arriver d'abord, suivie ensuite par l'original dont il consulte le contenu par curiosité. » (Sur l'auto-traduction, p. 165).
06:31 Publié dans 2025, Hors Touraine | Lien permanent | Commentaires (0)
lundi, 24 février 2025
24022025 - quinze notules en lisant Ilan Stavans
Dans le train qui va bientôt partir de la gare de Saint-Pierre-des-Corps, j’ai posé, derrière l’écran de cet ordinateur portable, le livre que j’ai commencé à lire, la traduction française (par Sylvie Kleiman-Lafon) du livre d’Ilan Stavans, Sur l’auto-traduction (Hermann, 2022). Selon ma manie, mais plus encore ici vu que cette lecture est en lien direct avec mes recherches du moment, j’ai commencé à griffonner des bouts de citation et des numéros de page sur une feuille volante. Comme le billet que j’ai pondu hier soir à la va-vite est vraiment très foutraque, et comme je l’ai publié tel quel en connaissance de cause, c’est-à-dire parce que, si j’avais voulu revenir au roman de Belcourt après mon retour de Marseille, il m’aurait fallu dix fois plus de travail qu’à chaud, voici ce que j’ai à écrire sous forme de faits et de notations numérotées :
(1) Je me suis procuré ce livre car il m’a été conseillé par Louis Pichot dans les commentaires de la troisième émission de radio I Love Mes Cheveux enregistrée le 3 février avec Bayan Ramdani.
(2) Je me le suis procuré en français, et non en anglais, car :
(2a) sans l’avoir rencontrée, j’échange depuis plusieurs années avec la traductrice (SKL) sur les réseaux sociaux ;
(2b) lire dans une cinquième langue un essai sur la traduction et le plurilinguisme écrit par quelqu’un qui dit naviguer entre quatre langues est séduisant en soi.
(3) On ne fait jamais assez de promotion pour son propre travail. Ainsi, je suis sûr que je suivais déjà attentivement les publications de SKL en 2022, mais ce livre m’avait échappé. Je ne dis pas qu’elle n’en a pas parlé et qu’elle n’en a pas signalé la parution. Je dis qu’elle aurait dû matraquer
(4) En conséquence de quoi je rappelle que je me trouve dans un train pour Marseille car je vais donner une séance de séminaire demain à l’E.H.E.S.S. au sujet de mes deux traductions, Une histoire des Noirs d’Europe d’Olivette Otele (Albin Michel, 2022) et Noires origines de Howard French (Calmann-Lévy, 2024). Lisez-les, faites-les connaître !
(5) Trêve de plaisanterie, l’ouvrage de Stavans est en fait un recueil d’articles. Il y reprend un certain nombre de ses chroniques, préfaces, billets etc. Seul le premier chapitre, de moins de dix pages, porte spécifiquement sur l’auto-traduction. Bonne nouvelle : je vais pouvoir m’en servir.
(6) En écrivant ce billet, j’ai commis deux fautes de frappe lors de mes saisies du mot auto-traduction: autor-traduction et aito-traduction. Je vois comment je peux faire jouer et signifier le premier néologisme, mais le second m’interloque.
(7) Dès la première page du premier chapitre, j’ai aimé que la traductrice ait marqué le texte de son empreinte avec un passé surcomposé. Ce temps, qui me rappelle toujours mon grand-père maternel, est sous-employé par les traducteurices.
(8) Dans le premier essai de la troisième partie, qui reprend notamment le texte d’une conférence sur la traduction prononcée par Stavans en Chine, il y a une proposition avec laquelle je suis plutôt d’accord (et que je trouve, à cet égard, stimulante) et une proposition, placée immédiatement après la précédente, et avec laquelle je suis radicalement en désaccord (et qui pourrait constituer, de façon plus stimulante encore, le point de départ de toute une partie de ma réflexion sur la tritralogie de Nganang).
(9) Dans la chronique consacrée aux erreurs résultant du logiciel d’autocorrection des téléphones, qui n’a pas en soi grand intérêt (et qui est déjà très obsolète), il y a probablement une prouesse de traduction de SKL : à la page 49, elle propose une chaîne parler / panier / parier / planer dont je n’imagine pas du tout à quoi elle correspond dans le texte anglais.
(10) Dans l’essai qui donne son titre au livre, Stavans (enfin, Stavans traduit par SKL) dit ceci :
« Le principal bénéfice du multilinguisme est un sentiment de libertés, de possibilités infinies. Le principal inconvénient est un sentiment de vivre comme en suspension, de n’appartenir à aucun endroit en particulier. » (p. 17)
(11) En notant cette phrase, je me suis dit qu’il allait falloir que je fasse des recherches sur les différences entre plurilinguisme et multilinguisme.
(12) Les deux dernières phrases de ce même essai (que je recopierai plutôt dans mon fichier de recherche) parlent d’une « traduction dépourvue de texte original » (p. 19). Mutatis (multe) mutandis, on ne saurait mieux décrire mon « extatique tourment » en relisant et travaillant le texte allemand des deux romans d’Amma Darko.
(13) Suite à ma notation n° 8, d’aucun-es doivent ici se demander quelles sont les deux propositions que j’approuve et réprouve respectivement. Les voici donc :
(13a) « un traducteur ne s’épanouit pas dans la contradiction, même si la contradiction est au cœur de l’acte de traduire » (p. 54)
(13b) « Traduire, c’est lancer un pont entre deux habitats linguistiques représentant chacun une culture différente. » (id.)
(14) Pour expliquer ce qui ne va pas dans la seconde proposition, il y a une version longue, qui sera peut-être un livre, ou plutôt un chapitre du livre que je projette d’écrire sur Aidoo, Darko et Nganang. Et une version brève, qui consiste à contredire l’idée d’homogénéité culturelle au sein d’une langue. Chaque habitat linguistique (et même là, l’homogénéité n’est pas juste) représente plusieurs cultures différentes, et, souvent un faisceau indémêlable de plusieurs acceptions culturelles au sein d’un idiome pluriel.
(15) Le chef de bord vient de dire qu’il restait 135 kilomètres avant Paris, ce qui signifie qu’à la vitesse du TGV il me reste à peine le temps d’achever ce billet, de me connecter au WiFi du train et de publier ces 15 notules.
13:07 Publié dans 2025, ILMC, WAW | Lien permanent | Commentaires (0)
dimanche, 23 février 2025
23022025 (Chœur infime - Billy-Ray-Belcourt, Dépaysage 2025)
Les éditions Dépaysage viennent de publier la traduction du premier roman d’un poète et professeur de creative writing appartenant à la nation crie d’Alberta, Billy-Ray Belcourt. Je n’avais pas entendu parler auparavant de cet écrivain, dont j’ai donc découvert l’œuvre en français canadien, grâce à la traduction de Mishka Lavigne et sous le titre français Chœur infime (2025) [A Minor Chorus (2022) – chœur en do mineur / chœur mineur].
J’ai énormément aimé ce livre, qui rejoint un certain nombre de mes préoccupations en matière de décolonialité, mais pas seulement. En effet, le roman prend la forme d’une enquête et d’un retour au pays pour un jeune doctorant qui interrompt sa thèse pour aller interroger et même, plutôt, écouter ses proches qui ont grandi dans la même réserve que lui : en ce sens, il s’agit d’un témoignage sur les discriminations et sur l’histoire complexe des communautés et des individus autochtones dans le Canada contemporain, mais, plus encore, il s’agit d’un journal de création tout au long duquel le narrateur tente d’inventer une forme et d’aborder, avec lucidité et espérance, le deuil de sa jeunesse et d’un certain nombre d’illusions. Une seule de mes attentes a été un peu déçue, car, si la quatrième de couverture présente l’auteur comme un « poète bispirituel de la Première Nation crie de Driftpile, en Alberta », sa réflexion porte plutôt conventionnellement sur l’homosexualité : même le terme de queer, plus eurocentré, est employé dans un sens assez restrictif. Il se trouve que la notion de two-spirit, qui est très particulière, permet habituellement de penser (et surtout de concevoir esthétiquement – c’est tout le propos de Billy-Ray Belcourt) la rupture avec l’hétéronormativité de façon novatrice : ici, à l'inverse d'un poème de 2018 très riche sur ce point, c’est sans doute codé ou implicite, et je pense même que c’est un choix de refuser l’anthropologisation d’un vécu intime personnel. [Intime : c’est l’importance politique de cette dimension qui rend si précieux le choix de l’adjectif infime dans le titre français.]
Si je commence par le dernier (onzième) chapitre, dans lequel le narrateur rend visite à son cousin Jack en prison, on y trouve ce qui est un des points d’aboutissement du genre de roman qu’il souhaite conceptualiser : « C’est notre devoir, ai-je pensé, de nous rebeller contre l’embellissement de la violence. J’ai tout de suite reconnu en cela la raison d’être du roman de la contre-culture. » (p. 183).
Ce qui m’intéresse, ici, c’est que cette notation intervient au terme d’une réflexion qui s’amorce par l’analogie « bizarre » entre roman et espace carcéral : « Bizarrement, je me suis mis à penser à la façon dont les romans présentaient parfois l’existence et les sentiments humains avec tant de précision qu’un personnage pouvait sembler emprisonné dans une structure sans agentivité. Ce n’était analogue à une prison d’aucune façon, mais dans mon esprit, on aurait dit que ça soulignait à quel point les gens normaux, les auteurices en fait, jouaient le rôle de gardiens de sécurité ou d’agents correctionnels sous les couverts de la littérature. » (pp. 181-2 – je vais aller piocher le texte anglais de la première phrase pour l’ajouter à ma réflexion sur Amma Darko). Il y a, dans cette esquisse d’analogie, la possibilité de structures romanesques normatives auxquelles s’opposent de contre-structures laissant les personnages libres de leur agentivité, sans doute un prolongement (inattendu, vu la figure que je m’apprête à convoquer) de l’opposition que faisait Ford Madox Ford entre nuvvle et novel. De fait, ça devient une conviction forte pour moi que les modernistes, même trèèès européens, ont aussi ouvert l’espace romanesque aux expérimentations de décentrement qui permettent aux personnages de dialoguer/dialogiser dans une structure réellement démocratique, voire anarchique. Justement, ce qui se passe dans les premiers romans de Darko relève assez de cela.
C’est là une réponse possible à la piste proposée dans le chapitre II : « Et si l’acte d’écrire un roman, me suis-je demandé, permettait de pratiquer un mode de vie qui réfutait les brutalités de la race, du genre, de l’hétéro et de l’homonormativité, du capital et de la propriété ? » (p. 39). Mieux, même, le texte même du livre met en pratique, de façon continuelle et discontinue, l’idée, énoncée plus tôt encore, au chapitre I, selon laquelle la prose (romanesque) et la théorie sont semblables en ce que « les deux nous demandent de refuser le romantisme du présent » (p. 23). L’ambivalence constante de la fonction du roman rejaillit sur l’écrivain : après sa rencontre avec sa grand-tante, la kokum de Jack, il remarque qu’il est « devenu l’écrivain de la famille, et, par le fait même, son historien, son coroner » (p. 69). Comme le confirme le glossaire, le coroner n’est pas n’importe quel enquêteur : c’est, dans la gradation ascendante que propose la phrase de Belcourt, un policier constitué historien de faits tragiques ou macabres. La tragédie, bien sûr, c’est celle de la racisation, c’est-à-dire tout d’abord l’histoire du vol des terres et du pouvoir même d’agir, puis la longue litanie des exactions, comme dans les tristement célèbres « pensionnats autochtones », qui font l’objet du magnifique chapitre VII. Cependant, l’invention d’un roman qui refuse d’embellir la violence implique aussi de frayer avec la langue coloniale qu’est l’anglais :
Mes propres angoisses au sujet du roman avaient à voir avec mon soupçon que l’anglais était une langue trop compromise pour engendrer un portrait de la vie autochtone qui ne fût pas imprégné des fantasmes coloniaux de notre délabrement. Peu de choses dans mon arsenal m’apparaissaient assez vastes pour combattre des siècles de lectures qui faisaient des peuples autochtones des bombes. Comment plutôt faire d’un roman une bombe ? Comment planter un roman dans l’infrastructure morale d’une nation corrompue ? Comment écrire des phrases qui font tic-tac, tic-tac ? (pp. 40-1 — et en recopiant ces phrases, je pense cette fois-ci à Patrice Nganang, tout m’y ramène).
En dépit d’un parti pris esthétique et narratif très différent, j’ai beaucoup pensé à ma lecture récente de Debra Dank (We Come with This Place, 2022 – texte fondamental des littératures aborigènes contemporaines), notamment au détour de ce propos que le narrateur attribue à sa tante Lena :
« Hmm, surtout pour nous, les Autochtones. Si n’importe quel·le Autochtone consignait sur papier les circonstances de sa vie, de l’enfance à la vieillesse, ça ferait un meilleur roman que n’importe quoi écrit par un gars blanc. Nous avons ri. Une femme s’est penchée vers nous comme pour participer à l’allégresse. » (p. 160)
Je clos ces notes en vrac sous deux aspects :
-
- en « cochant » les pages 116-122 et le très beau développement sur « la notion queer de la maternité », qui voit dans la « fonction maternelle » la capacité à faire émerger un nous collectif et à « s’en occuper comme un jardin
- en indiquant le motif de la terre et l’impératif de « se déterrer de soi » (p. 161 – reprenant p. 91, p. 112), que je développerai si j’ai le temps d’aller creuser dans le texte anglais
21:44 Publié dans 2025, Lect(o)ures, WAW | Lien permanent | Commentaires (0)
samedi, 22 février 2025
22022025 (une phrase de Pessoa ?)
Suite à une publication de l’écrivain camerounais Timba Bema, qui faisait remarquer le caractère incompréhensible d’une phrase lue dans un livre de Pessoa, j’ai mené une petite enquête sur cette étrangeté, tout en admettant que l’étrangeté est familière, avec Pessoa. Ne connaissant pas ce texte de Pessoa publié chez Cambourakis, et titillé par les remarques de Timba Bema, j’ai voulu aller vérifier le texte original.
Il se trouve que le texte ici traduit fait partie de ceux que Pessoa a écrits en anglais, sous l’hétéronyme Alexander Search, en 1907. Le texte original a donc pour titre A Very Original Dinner, comme le confirme ce site :
Clearly under the influence of Edgar Allen Poe and the nascent field of degenerate psychology, "A Very Original Dinner" was written in English by Fernando Pessoa under his proto-heteronym Alexander Search in June of 1907. It was never published during his lifetime, and only came to light in 1978 when photocopies of the typescript were reproduced in Maria Leonor Machado de Sousa’s book Fernando Pessoa e a Literatura de Ficção.
D’ailleurs, c’est cette information que donne également le SUDOC. Vérification faite, la nouvelle dont est extraite la phrase en question, “The Door”, est également référencée comme écrite en anglais par Pessoa sous l’hétéronyme Alexander Search. Oui... mais Dominique Nédellec est connu pour être traducteur du portugais vers le français (je le connais surtout via les nombreux romans de Lobo Antunes lus dans ses traductions).
De plus, le site de l’éditeur précise donc que la traduction a été faite du portugais vers le français. L’article de la Wikipédia lusophone ne mentionne nulle part ce texte, ni d’ailleurs l’hétéronyme Alexander Search. Le texte anglais est impossible à trouver, du moins pour le moment, en version “rippable”...
Une première trouvaille, tout de même : une traduction intégrale, en portugais, de la nouvelle “The Door”. Cette traduction (richement commentée et contextualisée) est l’œuvre de Maria de Lurdes Sampaio et de Marta Mascarenhas, ce qui confirme que Dominique Nédellec n’a pas pu traduire un texte portugais de Pessoa pour ces deux nouvelles ; on doit en conclure, a priori, à une erreur des éditions Cambourakis sur leur site Web (et que D. Nédellec est également traducteur de l’anglais vers le français). Dans cette traduction en portugais, la phrase qui avait fait tiquer Timba Bema (“À peine eut-elle achevé sa question que je sentis la folie gagner mon cerveau”) est ainsi formulée : “Mal ela me fez esta questão senti-me enlouquecer.” — Certes, nous comparons ici deux traductions, vu que le texte original anglais est introuvable, mais en tout cas le texte portugais est nettement moins étrange que le texte français (enlouquecer est un verbe qui signifie devenir fou, avec une préfixation fonctionnant, d’un point de vue morphologique, comme le verbe s’affoler en français). On imagine assez aisément, comme je le suggérais hier matin sur le mur de Timba Bema, que la tournure étrange est due au traducteur français, pas au texte anglais de Pessoa (qui doit donner quelques chose comme “I felt myself becoming crazy” ou, plus littéraire, “I felt myself maddening”).
L’enquête devra donc se poursuivre. Ce qu’il faudrait, c’est pouvoir mettre la main sur le livre de 1978 dans lequel Maria Leonor Machado de Sousa publia pour la première fois le texte anglais inédit des deux nouvelles. Et au passage, je tiens à signaler que dans l’édition Penguin de 2002 du Livre de l’intranquillité [The Book of Disquiet, traduction Richard Zenith (ça ne s’invente pas)], il y a très précisément 63 occurrences du lexème “door”.
Comme le disaient les ordinateurs dans les années 80 : still Search-ing...
10:27 Publié dans 2025, Nathantipastoral (Z.), Questions, parenthèses, omissions, Translatology Snippets | Lien permanent | Commentaires (0)
vendredi, 21 février 2025
Hommage à Frankétienne (1936-2025)
10:13 Publié dans 2025, Affres extatiques, Autoportraiture, Zestes photographiques | Lien permanent | Commentaires (0)
jeudi, 20 février 2025
20022025 (Bétharram)
Toute la polémique – totalement justifiée – autour de la responsabilité de l’immonde Bayrou dans la silenciation des victimes et le soutien à un établissement catholique récidiviste dans les violences sexuelles et les brimades à l’encontre des adolescents qui y étaient scolarisés trouve, pour toute personne qui, comme moi, a été scolarisée dans les Landes dans les années 80, un écho particulier. En effet, l’établissement privé de Bétharram était tout à fait connu, ce en dépit du fait qu’il y avait facilement deux heures de route à l’époque : les parents y envoyaient les enfants qui commençaient à devenir « difficilement gérables », à moins même que le choix de cet internat ne vienne d’une simple défiance à l’encontre du collège public de secteur.
En en reparlant avec ma mère, la semaine dernière, je me rappelais qu’un camarade d’école primaire, Claude D., y avait été envoyé, je dirais à partir de la cinquième, car il « faisait n’importe quoi », et aussi – sans doute – car ses parents ne faisaient pas confiance aux équipes pédagogiques du collège public (le seul de Dax) où nous étions scolarisés. Ma mère m’a soutenu qu’un autre camarade de primaire, Gonzague R., y avait été envoyé (on en parlait vraiment un peu comme d’un truc hors du temps, un peu comme on parle d’envoyer quelqu’un au bagne). Ma mère se rappelle clairement avoir croisé la mère de Gonzague un jour, et que cette dernière lui avait dit qu’elle mettait fin à l’expérience, sans indiquer de raison.
Pour Gonzague, il est vrai que je ne me rappelais pas du tout qu'il y était passé mais ça devait être pendant les années de collège où nous n'étions plus du tout amis, encore moins camarades. Pour tout dire, au début du collège, ce garçon était devenu un vrai harceleur : après pas mal de petits sévices, il m’avait collé un jour du chewing-gum dans les cheveux ; je me revois en larmes pendant le cours d’allemand, réduit finalement à couper les mèches en question avec des ciseaux ; ni le prof ni la CPE que j’avais alertée le jour même n’avaient rien fait. C’était comme ça : les enfants faisaient des bêtises… on n’allait pas donner suite aux pleurnicheries d’un gamin un peu intello qui s’était retrouvé avec du chewing-gum dans les cheveux hein…
Rétrospectivement j’interprète très différemment des choses qu’il m’avait racontées quand nous étions en CM1 ou CM2, au sujet des deux fils plus âgés de la seconde épouse de son père. Je pense qu'il a vu, ou participé à, ou subi des choses qu'un enfant de dix ans ne devrait pas voir ou subir, ce en étant contraint de partager la vie de deux adolescents de 13 ou 14 ans. Il s’est mis à vriller juste après, à l’entrée en sixième. De mémoire, l’incident du chewing-gum date de l’année de sixième ou de cinquième. Quand je me suis retrouvé à nouveau en classe avec lui, uniquement pour le sport, en troisième, il avait déjà dû faire ce séjour à Bétharram et il était plus que jamais totalement obsédé sexuel. L’hypothèse forte est donc que les fils de sa belle-mère avaient dû, au minimum, l’initier un peu trop tôt à des pratiques sexuelles d’adolescent, voire, au pire, lui faire subir des violences sexuelles ; de là, possiblement, ce comportement de harceleur qui a fini par conduire ses parents, tout divorcés qu’ils fussent, à le placer d’un commun accord dans un établissement explicitement vanté pour redresser les cas difficiles. À l’époque, on ne parlait pas du tout des violences familiales, encore moins des violences sexuelles à l'intérieur des familles ou des établissements scolaires, sinon j'aurais peut-être fait 1+1=2.
Ce que je retiens, c’est qu’il m’arrive encore d’entendre des parents dire : on a décidé de le mettre au Christ-Roi (ou à Notre-Dame de Machinchose (ce sont tout le temps de établissements catholiques)) pour le mater… là, il/elle va prendre du plomb dans la cervelle… je peux vous dire que là-bas il va comprendre la musique… Je pourrais multiplier les métaphores extrêmement graves, au fond, et qui disent qu’un parent admet que son enfant mérite de subir des sévices ; je suis certain que toustes nous avons entendu des parents tenir des propos de cet ordre. Ce qui est évident, c’est que tout le monde savait ce qui se passait à Bétharram : personne n’y envoyait ses enfants pour qu’ils y soient violés, bien entendu, mais les mauvais traitements faisaient partie du plan pédagogique.
12:42 Publié dans 2025 | Lien permanent | Commentaires (0)
mercredi, 19 février 2025
19022025
Aujourd’hui je me suis levé très tôt pour être à l’appartement d’O* dès huit heures. Le menuisier qui est passé a constaté que l’agence lui avait confié des travaux qui étaient déjà faits et donc que nous nous étions déplacés pour rien… enfin, moi, pas tout à fait pour rien, vu que j’ai passé l’aspirateur, défait les draps et changé le filtre de la carafe. Mais enfin…
Cet après-midi, j’ai bien avancé dans Verirrtes Herz et écrit trois bonnes pages dans mon fichier Chantier CRCT.
J’ai aussi publié sur Mastodon (on ne se refait pas) le mème ci-contre (on peut le visualiser en grand en cliquant dessus).
19:13 Publié dans 2025, Autoportraiture | Lien permanent | Commentaires (0)
mardi, 18 février 2025
18022025
Tandis qu’on vaque, tandis que je me préoccupe de mes sujets de prédilection ou de spécialité, tandis qu’on continue de plaisanter et de rire (et il le faut), grandit le sentiment de dissonance, car la catastrophe est désormais certaine : guerre de la Russie en Europe accompagnée du triomphe des fascismes partout, ou effondrement de tout le système capitaliste sous les coups du désastre climatique — on ne sait ce qui va nous tomber sur la gueule en premier. On réussit quand même à parler de choses qui paraîtraient dérisoires si on n’arrivait pas à mettre la conscience du désastre en suspens (et il le faut, sans quoi on devient immédiatement fou), à organiser de futures vacances… D’ailleurs, après avoir écrit ce paragraphe même pas cathartique, je vais ouvrir le fichier Chantier CRCT et y noter mes remarques sur les 8 premiers chapitres de Verirrtes Herz, en cours de relecture.
07:13 Publié dans 2025 | Lien permanent | Commentaires (0)
lundi, 17 février 2025
17022025
Retour en Touraine hier après-midi. Ce matin, en ouvrant les volets de la cuisine pour préparer mon premier café, je me suis rendu compte que quelque chose me semblait inhabituel ; il m’a fallu quelques secondes avant de me rendre compte que la rue était sèche. Cela faisait très longtemps que la rue, le jardin, les arbres, les toits des maisons avaient eu le temps de sécher entre deux averses.
Speaking of drying and showers, je viens de lancer la cinquième lessive : quatre hier, deux à suivre. Cela fera sept. Et dire que je m’étais débrouillé pour laisser un panier à linge vide avant notre départ…
Passionnant.
Pas écrit de billet ces trois derniers jours ; comme il faut aussi que je me remette au travail sérieusement, je risque d’aller piocher dans les photos du week-end à Oléron, solution de facilité. En tout cas, les posts du 14 au 16 sont rétrospectifs.
07:27 Publié dans 2025 | Lien permanent | Commentaires (0)
dimanche, 16 février 2025
16022025
Autoportrait en homme à qui son épouse raconte l'intrigue d'un roman de Joyce Carol Oates.
19:33 Publié dans 2025, Autoportraiture, Chèvre, aucun risque | Lien permanent | Commentaires (0)
samedi, 15 février 2025
15022025
H. nous a racontés qu'à chaque fois qu'elle revient à Oléron, sur la pointe près du phare de Chassiron, le chemin côtier a changé car la côte avance de quelques mètres chaque année. Elle pense que d'ici quelques années la route bituminée aura cédé face à l'océan. Sur la plage de Saint-Denis, ce blockhaus, lui, s'affaisse chaque année davantage et glisse vers la mer.
18:00 Publié dans 2025, Hors Touraine, Zestes photographiques | Lien permanent | Commentaires (0)
jeudi, 13 février 2025
13022025
Hier, j'ai écrit ceci sur Facebook :
Allez, c'est parti... les gens qui lisent 10 livres par an et qui connaissent trois écrivain•es vivant•es vont nous bassiner pendant 1 mois avec Pierre Michon... qu'est-ce que ça sera quand il mourra...
À ma relative surprise, j'ai récolté une dizaine de likes, et ne semble avoir été défriendé par personne.
18:38 Publié dans 2025, Aphorismes (Ex-exabrupto) | Lien permanent | Commentaires (0)
mercredi, 12 février 2025
12022025 (The Looming Fog)
J’avance dans The Looming Fog. C’est tout de même un texte étrange. Il est dommage qu’il soit aussi peu maîtrisé par certains aspects, ce qui explique sans doute – autant que sa publication au Nigéria, sans aucune diffusion en-dehors du pays – qu’il reste méconnu : même des spécialistes chevronnés n’en avaient pas entendu parler.
Il m’arrive de me demander si telle partie de chapitre est vraiment « à la bonne place » car il y a des sauts narratifs déstabilisants : analepses, si on veut, mais très abruptes. De même, je suis parvenu à un point (au milieu du chapitre 4, à peu près à la moitié du roman) où la temporalité se précise : l’action a bel et bien lieu à l’époque coloniale, dans la mesure où il est dit que des cultivateurs de caoutchouc viennent en récolter à Hidaya car ce matériau dont les villageois pensent qu’il n'a aucune valeur en a en fait « dans le monde extérieur », en particulier pour fabriquer des pneus de bicyclette. Jusque-là, l’histoire semblait se dérouler en-dehors de toute référence à la colonisation, d’autant plus que le village de Hidaya (et le village de Hida, où sont bannis les membres de la caste honnie, les unknowns) paraît tout à fait isolé, également sur un plan météorologique : les calamités climatiques qui s’abattent sur la communauté ne touchent aucun des territoires avoisinants.
J’ai créé près de cent annotations dans le document de la liseuse, ce qui montre que beaucoup de choses m’intriguent ou me paraissent dignes d’intérêt. Bien sûr, l’élément le plus significatif – et qui explique que N*, qui prépare une thèse sur le sujet, ait repéré ce texte qu’elle sera sans doute la seule à étudier – est le/la protagoniste intersexe, dont l’identité narrative même est indéfinie, à l’instar de son statut social. Parmi les personnages qui permettent de problématiser la question des codes traditionnels et de la marginalisation, Ele, dont tous les enfants meurent en bas âge l’un après l’autre, est soupçonnée d’être ọgbanje ou de donner naissance à un enfant ọgbanje ; or, même cette hypothèse est invalidée.
On ne sait pas trop comment le récit va se poursuivre, car – tout en partant dans des digressions narratives sur d’autres personnages – le/la protagoniste finit par atteindre l’âge adulte sans que personne dans le village ne semble avoir compris qu’iel est l’enfant intersexe dont la seule vue a tué sa mère, et qui a été abandonné-e par son père au sortir de la petite enfance. Il y a aussi ce brouillard récurrent, et d'ordre probablement divin, qui donne son titre au roman.
À suivre...
10:00 Publié dans 2025, Affres extatiques, Lect(o)ures | Lien permanent | Commentaires (0)
mardi, 11 février 2025
11022025
Il fait encore beau, même si ça a mis du temps à « se lever » : grande douceur tout l’après-midi. Promenade dans Peyrehorade, en attendant que ma mère ait fini au laboratoire d’imagerie médicale : le village reste joli par endroits, mais entièrement dévasté par les bagnoles et avec beaucoup de bâtisses et de maisons en voie de délabrement. Je crois qu’il n’y a pas moyen de se promener le long du gave.
Hier soir, excellent film, Chroniques de Téhéran d’Ali Asgari et Alireza Khatami – apparemment, le titre en farsi se traduirait plutôt comme « versets terrestres ». Or, en effet, une des neuf scènes du film représente un ouvrier qui, lors de son entretien d’embauche, se voit poser un certain nombre de questions sur le dogme chiite, et demander de réciter des versets de la 99e sourate al-Zalzala (« La secousse » – traduit par tremblement de terre dans les sous-titres du film) ; la scène finale, dans laquelle un vieil homme délabré, cadavérique, mutique et presque immobile, assis à un bureau recouvert de différents accessoires figurant dans les scènes précédentes (représentation du metteur en scène ? de Dieu ? de la dictature des mollahs ?), se tient devant une fenêtre par laquelle on voit Téhéran détruite par un séisme, confirme que les neuf scènes du film sont simultanées et que le grondement presque explosif qu’on entend à une ou deux minutes de la fin de chacune est le début d’un tremblement de terre.
Toutes les saynètes sont filmées en plan fixe, avec un cadrage extrêmement riche : un personnage, face caméra, échange avec une ou deux personnes hors champ. Il s’agit presque systématiquement d’un échange avec un-e fonctionnaire d’une administration, sauf dans le cas de la petite fille qui danse pendant que sa mère et la vendeuse du magasin de vêtements choisissent son uniforme scolaire. Par ces vignettes brutes, factuelles, les cinéastes dessinent avec précision, et sans s’épargner la possibilité d’un absurde plus montypythonesque que kafkaïen, les contours de l’oppression sociale et politique sous ses diverses formes (confiscation des chiens errants, censure des artistes, sanction des foulards pas assez couvrants, choix du prénom des enfants, tenues vestimentaires ou tatouages, mais aussi « promotion canapé » dans un contexte occidentalisé faussement libératoire). À la surprise générale, un des deux cinéastes s’est vu, de retour d’Europe, confisquer son passeport et interdire de continuer à faire des films.
19:50 Publié dans 2025, Tographe | Lien permanent | Commentaires (0)
lundi, 10 février 2025
10022025
En lisant Death of the Author de Nnedi Okorafor, j’ai appris que les tissus plus communément appelés wax (et dont on sait que, tout en passant pour « typiquement africains », ils sont une production de l’industrie textile hollandaise à partir de modèles observés dans les territoires indonésiens colonisés par les Pays-Bas) se nommaient aussi Ankara, et que ce mot, sans rapport avec la ville turque, est le nom haoussa pour la capitale du Ghana, Accra. Tout cela dans un roman écrit par une Naijaméricaine de culture igbo, contenant un certain nombre d’éléments culturels igbo et yoruba... mais pas grand-chose de haoussa…
À propos d’écrivaines igbo : j’ai enfin commencé The Looming Fog de Rosemary Esehagu, avec la version PDF envoyée par l’autrice elle-même et qui correspond, m’a-t-elle dit, au texte de 2006 en partie remanié, et avec une fin différente. Il y a quelques coquilles, un mot manquant de loin en loin, mais le document est précieux. J’ai lu à peu près un cinquième du roman, qui est, de fait, tout à fait passionnant quant à la mise en récit de l’identité intersexe et quant à sa mise en perspective dans le contexte igbo, justement. Dans un passage de la fin du chapitre 1, la narratrice comprend qu’il serait possible que son statut de paria, entièrement dû à l’observation de ses parties génitales, puisse évoluer comme a pris fin la condamnation à mort des jumeaux à leur naissance, pratique rituelle sur laquelle je n’ai pas lu grand-chose, mais qui est de fait présentée comme allant de soi (à la fin du dix-neuvième siècle) dans la communauté d’Umuofia décrite par Chinua Achebe dans Things Fall Apart. La différence fondamentale avec An Ordinary Wonder est que l'enfant intersexe est immédiatement admis comme tel, et rejeté comme presque inhumain, alors que dans le roman de Buki Papillon Otolorin est assigné·e garçon jusqu'à l'adolescence et à la mise en avant des caractères sexuels « féminins ».
Grâce à la fonction surlignement/annotation de la liseuse, j’ai noté un certain nombre de phrases du Prologue qui poseront un problème de traduction, avec désignation de l’enfant intersexe au moyen du pronom « it » et sans marque de genre. Dans le chapitre 1, narré par l’enfant intersexe (sans nom), je n’ai pas particulièrement été vigilant, mais il y a forcément un certain nombre de difficultés sur ce plan-là. Cela me rappelle quand j’avais invité, avec Laurent Vannini, la traductrice de Freshwater, Marguerite Capelle, à venir parler de la manière dont elle avait traduit tout ce qui relève des identités non binaires.
22:10 Publié dans 2025, Affres extatiques, Translatology Snippets | Lien permanent | Commentaires (1)
dimanche, 09 février 2025
09022025
J’extrais ce qui suit des deux pleines pages que je viens d’écrire dans le fichier Chantier CRCT :
Demain, nous partons pour une semaine : quatre jours dans les Landes, deux ou trois jours dans l’île d’Oléron (que nous ne connaissons pas). J’emporte seulement la liseuse (avec le roman d’Esehagu) et Verirrtes Herz.
Hier, j’ai fini de lire Spinnweben.
Il faudrait que je reprenne méthodiquement la vingtaine de feuillets sur lesquels j’ai griffonnés des remarques et des citations au fur et à mesure, mais déjà : je ne suis pas sûr de comprendre le titre. (En anglais, c’est identique : Cobwebs. (Enfin, c’est identique, sauf à considérer que le nom composé en allemand indique explicitement l’animal, alors que dans le nom cobweb, l’araignée reste implicite.))
[…]
Je pourrais pondre dix pages de plus en élaborant à partir de mes pattes-de-mouche, mais tout cela n’aura de pertinence que si je mets la main sur les manuscrits en anglais. Et ça n’en prend guère le chemin. Par contre, mon séjour d’études dans l’état de New York prend forme, Patrice m’ayant enfin répondu cette nuit.
12:20 Publié dans 2025 | Lien permanent | Commentaires (0)
samedi, 08 février 2025
08022025
Les rares fois où – n’ayant pas de café à réchauffer ou ayant la flemme de préparer une cafetière pour moi seul quasiment au cœur de la nuit – je fais chauffer un peu d’eau avec la bouilloire pour me faire une tasse de café soluble, je pense systématiquement à Jacques Roubaud, qui raconte dans ‘le grand incendie de Londres’ sa routine matinale, qui consiste à se préparer une tasse de nescafé avec de l’eau chaude directement puisée au robinet (ignoble, hein ?). Ce matin, c’est la première fois que je pense à cette scène tout en pensant aussi que Roubaud est mort, mort le 5 décembre dernier, le jour de ses 92 ans.
Qui d’autre a remarqué que, dans les grands livres qui nous marquent pour de nombreuses autres raisons, il y a toujours une anecdote qui reste associée aussi au livre, comme les crachats qui gèlent en vol dans les Récits de la Kolyma de Chalamov ?
Aujourd’hui, c’est le dix-neuvième anniversaire du blog anthracite, que j’avais créé au départ car, ayant été harcelé par une petite troupe de fachos sur Touraine sereine, j’avais pensé devoir le fermer, mais qui est devenu, très vite, le site des véritables expérimentations textuelles, de l’écriture au sens le plus profond du terme, avec parfois de très longues interruptions. Il n’est d’ailleurs pas étonnant que ce soit lui que j’ai choisi cette année pour y composer/déposer mes 365 neuvains.
05:19 Publié dans 2025 | Lien permanent | Commentaires (0)
vendredi, 07 février 2025
07022025
Pour tenir le rythme de publication d’un billet par jour ici, j’ai un peu triché hier en publiant uniquement ma revue de presse. J’ai bien avancé dans Spinnweben – qui montre décidément qu’Amma Darko est une des écrivaines qui écrit le plus explicitement et surtout le plus matter-of-factly du monde sur la sexualité et surtout le plaisir féminin – et aussi dans Death of the Author, qui s’effiloche au fur et à mesure de la lecture. J’attends de voir ce que vont donner les 150 et quelques pages qu’il me reste à lire mais je crains que Lagoon ne reste, et de loin, son livre le plus abouti : après tout, ce n’est pas très grave – beaucoup d’écrivain·es donneraient tout pour avoir écrit ne serait-ce qu’un seul livre comme Lagoon. L’ironie, avec Okorafor, est qu’elle est surtout célébrée et connue pour Binti, Who Fears Death… et peut-être pour ce nouvel opus, qui a fait l’objet d’une campagne médiatique assez énorme.
Mon problème est que je voudrais passer mes journées à lire, traduire et faire des recherches sur les textes qui le méritent (ainsi, d’exhumer ou de tenter d’exhumer les deux manuscrits inédits de Darko), mais que chacune de ces trois activités serait, normalement, à temps plein. (Et je n'évoque même pas l'enseignement, que j'adore même si cette activité est en suspens pour moi ce semestre.)
Le soir, nous sommes allés écouter l’orchestre Francis-Poulenc, qui donnait plusieurs pièces en décomposant les différentes phalanges de l’orchestre : une pièce pour 13 percussions (Ionisation de Varèse), deux suites pour cuivres (dont trois extraits des Brass Cats de Chris Hazell), trois pièces brèves pour cordes et enfin la Sérénade de Strauss pour bois et vents (dans laquelle jouait Odilon).
10:46 Publié dans 2025, Affres extatiques, Autres gammes, Lect(o)ures, WAW | Lien permanent | Commentaires (0)
jeudi, 06 février 2025
Revue de presse du 06022025
1/ Congo-B : une conférence pour établir un diagnostic sur l’assainissement urbain dans les grandes villes (RFI)
2/ De Panama à Gaza, la stratégie de communication de Donald Trump déroute le monde (France Inter)
3/ ‘It’s not just a few ships doing it’: how the world’s plastic ends up on a Guernsey beach (Guardian)
4/ Decathlon accusé de bénéficier du travail forcé des Ouïghours en Chine, l’enseigne dément (Sud-Ouest)
09:53 Publié dans Revue de presse | Lien permanent | Commentaires (0)
mercredi, 05 février 2025
05022025
Matinée de travail intense, mais pas une seconde pour Amma Darko.
Déjeuner à Lion & papillon, puis cinéma. En arrivant dans la file d’attente, nous avons constaté que nous allions nous placer juste derrière nos amis E*** et F. ; en approchant, j’ai salué E***, avec qui j’échange souvent (on s’était téléphonés hier), et j’ai vu qu’il ne me calculait pas, comme on dit désormais. Il s’avère qu’avec un bonnet, c’est-à-dire autre chose que la piste d’atterrissage à mouches qui caractérise ma tronche, même mes bons amis ne me reconnaissent pas.
Le film iranien, Mon gâteau préféré, est excellent. Il s’agit d’un conte assez paradoxal sur l’amour, et même plus précisément le coup de foudre, entre deux septuagénaires, mais bien davantage que cela. On ne sait si l’action se situe avant la révolution Femme Vie Liberté, ou dans son sillage, et cette ambivalence même est très judicieuse. La façon dont la maison de la protagoniste est filmée, du jardin à l’appartement spacieux, les deux scènes en taxi (décidément un topos récurrent du cinéma iranien), la scène de confrontation dans le parc, tout est marqué d’une véritable ambiguïté. J’ai trouvé que l’élément le plus faible était la soirée entre les deux nouveaux amoureux, qui semble cocher au fur et à mesure toutes les cases attendues, mais qui est sauvée par l’interprétation, d’une finesse remarquable.
Entraînement de ping-pong avec les adultes “loisir” : l'horaire est plus commode, mais le niveau vraiment faible. À voir...
19:27 Publié dans 2025, Tographe | Lien permanent | Commentaires (0)
mardi, 04 février 2025
04022025
Je me suis sérieusement remis au travail sur mon projet, en recommençant notamment la lecture de Spinnweben. Je veux avoir fini toutes les lectures primaires dans un mois, et bien entamé les lectures théoriques d’ici fin mars. Entre les trois projets de traduction plus ou moins en suspens, le séminaire à Marseille, la journée d’études le 27 mars et enfin ma foutue émission de radio, pas de quoi chômer.
Concernant les projets de traduction, celui d’Ama Ata Aidoo est le plus défini, et je dois m’entretenir avec ma co-traductrice le 18 : cela tombe bien, car c’est le texte qui résonne le plus étroitement avec ce que je veux explorer dans les trois premiers romans de Darko et dans sa trajectoire allemande. (Tiens, trajectoire allemande, ça ferait un bon titre de chapitre, pour prolonger l’idée de triangulation impossible.)
Repris l’entraînement de ping-pong ce soir, avec Amandine à la manœuvre : il n’y a pas à dire, c’est autre chose avec elle.
22:20 Publié dans 2025 | Lien permanent | Commentaires (0)
lundi, 03 février 2025
03022025
Ce matin, enregistrement en direct de la troisième émission d’I LOVE MES CHEVEUX, avec Bayan Ramdani, qui, comme Marie-Aude Ravet il y a deux semaines, est un « bon client » : prolixe, intelligent, capable de dérouler une anecdote de manière vivante et de la prêter à d’éventuelles généralisations. C’était vraiment sympathique, et je m’éclate de plus en plus en faisant cette émission. (Par contre, on a encore débordé de vingt minutes ; il faudrait que je me discipline.)
Entre le moment où j’ai fermé la porte du garage et l’arrivée du tram à la faculté de droit, il s’est écoulé trente-neuf minutes : je pense avoir établi une sorte de record, mais il faut dire que le bus est arrivé à l’arrêt Torricelli au moment où j’y arrivais.
Bientôt fini Les blattes orgueilleuses de Lynda Chouiten, son troisième roman, qu’elle m’a gentiment envoyé (publiés en Algérie, ses livres sont hélas impossibles à commander en libraire en France) ; j’ai écrit sur Bluesky que je n’étais pas loin de penser que c’était son meilleur.
Il faut dire que le sujet est casse-gueule, et que le genre auquel il appartient (le campus novel) me laisse habituellement froid : par contrecoup, le fait que ça monte en puissance, d’un point de vue narratif et stylistique, est d’autant plus magistral. Je suis persuadé que ce roman sera un jalon important dans le cadre des récits de la révolution de 2019 (Hirak / ⴰⵎⵓⵙⵙⵓ), d’autant qu’il permet de penser l’identité kabyle de façon complexe.
16:52 Publié dans 2025, ILMC, Lect(o)ures | Lien permanent | Commentaires (1)
dimanche, 02 février 2025
02022025
Il en va de Lovecraft comme de Tolkien : l’œuvre m’a plutôt rebuté ou ennuyé ; puis, les personnes qui m’en disaient monts et merveilles l’ont fait d’une façon qui m’a peu convaincu ; enfin, les problèmes idéologiques (plus nets du côté du suprémaciste et raciste H.P.L) ont achevé de m’en détourner. Samedi matin, une fois encore, j’ai pu constater que des personnes qui évoquaient l’exposition de je ne sais plus quel mangaka autour de l’œuvre de Lovecraft étaient éberluées quand je leur disais « ah non, Lovecraft, c’était quasiment un nazi, je laisse ça de côté ».
16:34 Publié dans 2025 | Lien permanent | Commentaires (0)
samedi, 01 février 2025
0102205 (Angoulême)
Aujourd’hui, Claire m’a traîné au festival de la B.D. d’Angoulême, où elle est allée pour la première fois l’an dernier.
Cette année, le programme était moins riche, moins intéressant, mais j’étais quand même content de découvrir cela avec elle : deux expositions très intéressantes (rétrospective Posy Simmonds et neuf dessinatrices espagnoles de la nouvelle génération), tour pas exhaustif mais appuyé – c’est-à-dire avec quelques achats – au pavillon Nouveau Monde, table ronde autour de la traduction en Espagne, tour rapide au grand pavillon des mangas (il ne fallait pas rater le train de retour).
Comme nous n’avons pas pu assister à la table ronde sur le female gaze (il y avait 160 places et nous étions trop loin dans la file d’attente), nous nous sommes rabattus sur la présentation des 44 fanzines nominés pour le prix de la bande dessinée alternative 2025. L’organisateur, visiblement très fin connaisseur du domaine, était aussi un espèce de boomer totalement décomplexé, qui a réussi à tenir des propos xénophobes tour à tour au sujet de la Colombie (« c’est un pays qui exporte autre chose que de la drogue »), les Philippines (qu’il a situées géographiquement « au carrefour de l’Asie et de l’Europe de l’Est », wtf) et la Chine (en précisant qu’à sa grande surprise la BD chinoise n’avait aucun rapport avec le manga japonais (!!)) : un vrai bingo. Nous n’étions pas seuls, Claire et moi, à grincer des dents : les cinq personnes derrière nous, qui faisaient partie de l’équipe de deux fanzines différents ai-je cru comprendre, soupiraient et souffraient autant que nous. En y réfléchissant, je regrette de ne pas m’être levé pour dire que ces propos étaient inadmissibles. C’est toujours comme ça : on est estomaqué, on se rassure en échangeant des regards ou de brèves paroles de connivence avec d’autres personnes dans le public, et on laisse les racistes déblatérer.
Vérification faite, ce monsieur, qui ne s’est pas du tout présenté tellement il pensait être connu de tout le monde, se nomme Philippe Morin : architecte de profession, il est aussi cofondateur et coéditeur des éditions PLG, et donc président du jury du Prix de la BD alternative. Il y a une certaine satisfaction à voir ce soir que les deux fanzines qui ont obtenu le Prix ex aequo, Hairspray et Fanatic Female Frustration, sont à l’opposé des visions frelatées et imbues de ce paltoquet. In fine, le female gaze a retriomphé.
20:44 Publié dans 2025, Gertrude oder Wilhelm, Hors Touraine | Lien permanent | Commentaires (0)
vendredi, 31 janvier 2025
31012025
C’était l’anniversaire d’E° aujourd’hui (j’ai trois amis dont le prénom commence par E et je ne sais plus comment je m’en suis sorti pour les initiales dans ces carnets – bon, ce qui compte est que moi, je m’y retrouve) et nous avons renoué avec notre sempiternel déjeuner italien. Je lui ai rendu le livre de Gueorguieva qu’il m’avait prêté, je lui ai donné un livre de Chauvier acheté en 2006 à sa sortie chez Allia et que je m’étais retenu à l’époque de balancer contre le mur (le marque-pages atteste que je me suis arrêté à la page 38). Nous lui avons aussi fait un vrai cadeau : un livre choisi (qu’il a déballé une fois chez lui, selon sa coutume, en me demandant aussitôt par message si je souhaitais « redéclencher [s]on hyperfixation ornithologique ») et deux livres qu’il a choisis au Livre (dont un de l’économiste Karl Polanyi, qui n’était pas même un nom pour moi, tant est grande mon inculture en la matière).
Il a fait très beau aujourd’hui : froid, mais beau. Les bords de Loire étaient superbes sous la lumière d’hiver.
16:55 Publié dans 2025 | Lien permanent | Commentaires (0)
jeudi, 30 janvier 2025
Revue de presse du 30012025
1/ République démocratique du Congo : le groupe armé M23 ouvre un nouveau front (NR)
2/ Kumbh Mela stampede: A look back at deadly crowd disasters in India (Independent)
3/ Suspension de l’expulsion de l’influenceur algérien «Doualemn» : Retailleau a appliqué «à tort la procédure d’expulsion en urgence absolue» (Libé)
4/ Algorithm study 90% accurate predicting bowel cancer (BBC)
5/ Olaf Scholz warnt davor, Friedrich Merz zu vertrauen (Die Zeit) — en résumé, très très résumé, la droite et le centre allemands commencent à faire alliance avec les néonazis
6/ Does vulnerability to natural disasters make people more open to sustainable consumption? (Anthropocene Magazine)
18:21 Publié dans Revue de presse | Lien permanent | Commentaires (0)
30012025
Il faut vraiment m’y remettre. Je ne peux pas laisser filer le mois de février comme les dix derniers jours. De la discipline. Certes, je lis beaucoup, et je ne « glande » pas, techniquement, mais je dois absolument tout recentrer autour de mon chantier de recherche, laissé en suspens depuis trois semaines, à peu près. Ni l’émission de radio, ni les traductions, ni le vlog, ni mes satanées revues de presse (il ne manquait plus que ça !) ni un prochain déplacement professionnel à Marseille (ville où je n’ai jamais mis les pieds) ne doivent me déprendre. Les cinq mois qui viennent vont fondre comme neige au soleil. Hier, j’avais envie d’écrire un texte, qui aurait vite débordé du cadre, sur la concomitance tragique entre les images – partout diffusées – des inondations, notamment en Ille-et-Vilaine, et le discours fantasmatique et fascisant de Bayrou sur la « submersion migratoire » : sans doute suis-je sous l’influence de Klemperer (dont j’ai trouvé quelques chapitres plus faibles), mais mon rôle n’est pas celui d’un sémioticien ; il y a évidemment un article, et même un essai à écrire sur cette ironie involontaire détachant le sens figuré, qui fantasme une menace, du sens littéral, qui manifeste la vraie urgence (climatique).
Côté lectures, j’ai achevé hier The Sum of All Things, le dernier roman de Seb Doubinsky, et, il me semble – mais la fin est très ouverte, quand même –, de son cycle dystopique des City-States. J’ai commencé un manga, Pline, de Mari Yamazaki et Miki Tori, deux manga-ka très connu·es apparemment (mais mon inculture en la matière est totale).
Ces deux derniers jours, j’ai aussi lu les deux brefs recueils narratifs et voyageurs de Béatrice Commengé et d’Olivier Rolin, dans l’optique de la rencontre à la librairie Le Livre, mais avant de m’apercevoir que je ne serai pas là ce jour-là.
Il faut que je commence le nouveau roman de Nnedi Okorafor, qui fait l’objet d’un vrai battage et que j’ai enfin reçu hier par la poste, et que je voie si la vieille liseuse de Claire peut encore marcher, même vaguement, même branchée, afin d’y transférer quelques romans que je n’ai qu’en format numérique et qu’il m’est impossible de lire sur ordinateur : le dernier de Chinelo Okparanta, et celui – totalement introuvable – de Rosemary Esehagu, que l’écrivaine m’a envoyé en format .doc (ça ne s’invente pas, et ça a été un sacré parcours du combattant – si je pouvais avoir autant de chance avec Amma Darko…).
_________________
Addendum de 6 h 22 : je viens de partager ce billet sur trois réseaux sociaux différents (Mastodon, Bluesky, Facebook), avec à chaque fois une phrase d'accroche différente, une phrase extraite de ce billet. Je viens d'ajouter la photo d'illustration, qui provient d'un autre réseau social. Petit test : si vous êtes arrivé·es jusqu'à cette phrase, pourriez-vous juste indiquer en commentaire si vous débarquez d'un des trois réseaux ?
06:10 Publié dans 2025, Lect(o)ures | Lien permanent | Commentaires (7)
mercredi, 29 janvier 2025
Revue de presse du 29012025
1/ Climate change made LA fires worse, scientists say (BBC)
2/ "Emilia Pérez" nommé aux César : pourquoi la communauté transgenre juge le film de Jacques Audiard "caricatural" (France Info)
3/ « Submersion » migratoire : le naufrage de François Bayrou (Ilyes Ramdani, Mediapart)
4/ Indiana man pardoned by Trump for Jan. 6 riot is shot and killed by deputy during arrest (Detroit Free Press)
5/ Zimbabwe cholera outbreak spreads to eight districts (Mail & Guardian)
6/ Baobab is a superfood with growing global demand – that’s bad news for the sacred African tree (Mail & Guardian)
19:25 Publié dans Revue de presse | Lien permanent | Commentaires (0)
29012025
Il y a une semaine, nous étions, en comité familial restreint, au crématorium de Mont-de-Marsan, pour un dernier salut à ma grand-mère. Depuis, les liens se font par la pensée, par la mémoire.
Hier après-midi, toujours dans un retour au coffret Debussy, j’écoutais des pièces pour piano que je connais mal, et étais particulièrement ému par le 2e mouvement d’En blanc et noir, ainsi que par l’épigraphe intitulée Pour un tombeau sans nom. — Qu’en penserait mon ami E*, lui qui a dit une fois en ma présence (mais m’a laissé comprendre cela x fois) : « Tu connais Guillaume, il a toujours eu des goûts musicaux pourris. »
Mercredi dernier, dès le début de la cérémonie, j’étais en larmes en écoutant Casta diva chantée par Angela Gheorghiu (c’était un des choix de ma grand-mère elle-même).
10:26 Publié dans 2025, Autres gammes, Blême mêmoire | Lien permanent | Commentaires (0)
mardi, 28 janvier 2025
28012025
Aujourd’hui, vu la magnifique exposition de la photographe sicilienne, ou faut-il même dire palermitaine, Letizia Battaglia (1935-2022), avec le regret, léger, que son travail de photojournaliste au sens le plus concret du terme, et aussi son travail d’éditrice ne soient qu’esquissés. En tout, c’est une découverte majeure.
La conférence de mon collègue Laurent Gerbier, hier soir, dans le cadre du séminaire 19e siècle, m’a notamment poussé à relire Montaigne, et en particulier “De la modération” (I, XXX), où je trouve cette pépite, qui m’amuse car Claire déteste la rhubarbe sous toutes ses formes (et en particulier l’odeur à la cuisson) et je l’adore, de sorte que l’apophtegme de Montaigne est parfaitement applicable à elle, non à moi :
Le naturel qui accepteroit la rubarbe comme familiere, en corromproit l’usage : il faut que ce soit chose qui blesse nostre estomac pour le guerir ; et icy faut la regle commune, que les choses se guerissent par leurs contraires, car le mal y guerit le mal.
Depuis quelques jours, j’ai l’impression de repartir en permanence « dans le décor », de faire des embardées, comme à la grande époque polygraphe, circa 2006-2008, comme en lisant Commengé et son parcours de la route 87 sur les traces de Nietzsche j’ai à l’esprit immédiatement mes très anciennes pondaisons (Onagre 87).
18:30 Publié dans 2025 | Lien permanent | Commentaires (0)
Revue de presse du 28012025
1/ Mémoire de la Shoah : les jeunes se sentent-ils capables de la transmettre ? (RFI)
2/ DeepSeek : un "avertissement" pour l'IA américaine selon Trump, des droits de douanes en perspective (France 24)
3/ Éducation, fin de vie, immigration… Ce qu’il faut retenir de l’interview de François Bayrou (La Croix) *
4/ Misogyny identified as breeding ground for extremism in UK, says leaked report (Guardian)
5/ RDC : les échanges de tirs ont repris à Goma ce mardi matin (RFI)
6/ En France, championne d'Europe des OQTF, plus de 93% de ces mesures d'éloignement concernent des étrangers sans histoire (France info)
7/ 36 examples of anachronyms (Heddwen Newton, blog English in Progress)
* Absolument rien sur l'urgence climatique et la transition écologique - ce n'est pas comme si on était en plein milieu d'un “épisode” de graves inondations... Bayrou est un homme du passé, c'est-à-dire du capitalocène, pieds et poings liés aux lobbies des énergies fossiles et de l'agroproductivisme.
08:16 Publié dans Revue de presse | Lien permanent | Commentaires (0)
lundi, 27 janvier 2025
Revue de presse du 27012025
1/ Tempête Herminia : Rennes subit les crues les plus importantes depuis plus de quarante ans (Le Monde)
2/ Protests by fruit pickers and farmers put spotlight on price of cheap food in UK (Guardian)
3/ Paradoxe de l’interdisciplinarité (recension de l'ouvrage collectif Servitudes et grandeurs des disciplines - in En Attendant Nadeau)
4/ Pyrénées : des chiens renifleurs formés à rechercher l’insaisissable desman (Sud-Ouest) *
5/ « L’organisme des enfants est particulièrement vulnérable » : un élève sur sept dans le monde victime du dérèglement climatique en 2024, alerte l’Unicef (L'Humanité)
6/ Pourquoi avoir attendu 80 ans pour compter les « Nomades » persécutés en France pendant la Seconde Guerre mondiale ? (Lise Foisneau - The Conversation)
* Oui, c'est un article d'août 2024, et derrière un paywall (mais regardez l'alt-text sur Bluesky).
17:17 Publié dans Revue de presse | Lien permanent | Commentaires (0)
27012025 — L'histoire de Souleymane
Hier, lu L’eau du bain de Rim Battal.
Dont j’extrais cette phrase : « La maternité, c’est la peau poursuivant le serpent pour lui demander des comptes, de la gratitude et de ne pas oublier son écharpe. » (p. 40)
Au cinéma enfin nous avons vu L’histoire de Souleymane de Boris Lojkine. Il s’est confirmé ce que j’avais entendu dire en octobre : pendant le générique (sans musique) et même après que les lumières se sont rallumées, personne ne parlait. Pas un mot. Il faut dire que le film, excellemment mis en scène et interprété, est très puissant, intense, et que la longue dernière scène, avec l’agente de l’OFPRA, est particulièrement forte. Les adjectifs manquent, ou le temps manque pour mieux tourner les phrases.
Le problème que j’entrevois (et qui m’a titillé même pendant la projection) est que ce film, qui s’appuie certes sur une foultitude de témoignages, dont l’histoire personnelle de l’acteur lui-même, sert parfaitement le narratif de la droite et de l’extrême-droite. Je n’avais lu aucun article, seulement des recommandations d’ami·es ou de simples connaissances sur les réseaux sociaux, et n’ai pas encore pris le temps d’aller regarder si je suis seul à être gêné aux entournures, non pas par le film lui-même (qui est magnifique, aucune rétractation) mais par le contexte dans lequel il a été conçu, et surtout reçu : en effet, le scénario choisit de se concentrer sur un migrant économique qui se fait passer pour un réfugié avec un dossier entièrement bidon, et qui ne cesse d’être la victime d’intermédiaires dont aucun n’est blanc (les tortionnaires libyens, les passeurs, le Camerounais qui sous-traite l’accès à l’application de livraison). Même si la scène avec les policiers donne une impression de chats qui jouent avec la souris de façon assez abjecte, les policiers se contentent in fine de dire à Souleymane qu’ils ont compris qu’il était dans l’illégalité et qu’ils auraient pu le verbaliser pour l’absence de lumière à l’avant de son vélo : je ne nie pas le réalisme de cette scène, mais enfin, dans ce film qui multiplie les vignettes au cours des 36 heures que dure l’histoire, pas un agent de sécurité violent ? pas un contrôle « au faciès » ? pas la moindre chausse-trape administrative ? les témoignages, sur ce plan-là, ne manquent pas, et je ne peux m’empêcher de penser que Lojkine, à trop chercher la subtilité et l’ambivalence (à vouloir éviter de faire un énième film sur les pauvres migrants racisés ?) se retrouve surtout à ne pas trop contrarier les suprémacistes et les partisans de la « remigration ». (J’entoure ce mot de guillemets, car il est ignoble. Étant donné ma lecture de Klemperer, je suis particulièrement sensible à tout cela.)
Un dernier mot, pour ne pas laisser l’aspect socio-politique recouvrir ce billet (mais cet aspect est consubstantiel d’un tel film, de son sujet même) : après avoir regardé, vendredi, un des films les plus globalement mal joués de l’histoire du cinéma (Louise Michel de Solveig Anspach), il faut souligner que, même si la mise en scène, les cadrages, l’image sont de très grande qualité, un film comme L’histoire de Souleymane se grave dans la mémoire grâce à ses acteurices, en particulier Abou Sangaré bien entendu, dont le jeu, extrêmement varié, est parfait, vraisemblable de bout en bout. Difficile de retenir une scène : les deux scènes où il appelle Kadiatou, la femme qu’il a laissée derrière lui en Guinée ; sa tendresse toute en retenue avec le vieil homme à qui il livre une pizza au sixième étage ; sa métamorphose au cours de la scène finale ; ses échanges très brefs avec les autres livreurs… il est à chaque fois d’une justesse impressionnante, chaque plan semblant couler de source.
En fait, ce qui précède n’était pas le dernier mot. Je n’ai jamais commandé via Deliveroo, Uber-Eats ou autre : outre que le take-away était déjà une pratique très marginale pour nous, il a été immédiatement évident que ces applications de livraison de repas à domicile mettaient en place un système d’exploitation übercapitaliste. J’ai beaucoup lu sur le sujet, et ce n’est pas pour rien qu’on parle d’überisation du travail : ces différentes plateformes, qui sont rien moins qu’esclavagistes, doivent être boycottées. Il faudrait que toutes les personnes qui passent leur temps à « commander un Uber » regardent ce film… mais ça les laisserait de marbre, ou elles ne verraient pas le rapport…
08:45 Publié dans 2025, Tographe | Lien permanent | Commentaires (0)
dimanche, 26 janvier 2025
26012025 (LTI / revue de presse)
Hier après-midi, avec les giboulées de janvier et deux courses qui se sont ajoutées, nous n’avons pas eu le temps d’aller au château de Tours.
J’ai commencé hier soir la lecture – longtemps différée – de l’ouvrage souvent cité de Klemperer, LTI Lingua Tertii Imperii, dont les premiers chapitres m’évoquent, quasiment à chaque paragraphe, ce que nous voyons advenir, par glissements progressifs, en Europe (en France, avec la fascisation des centristes et macronistes) ; il y a aussi toutes les analogies possibles entre le discours nazi et le trumpisme. Depuis une semaine, on le voit en pleine lumière.
Je continue d’espérer – en me voilant la face, sans doute – que nous n’aurons pas à affronter cela dans les mêmes proportions qu’il y a un siècle, mais dans tous les cas la catastrophe climatique va s’abattre sur nous. Le négationnisme, l’euphémisation et la substitution d’un concept pour un autre gagnent chaque jour du terrain, sur ces deux fronts. Je le lisais encore hier matin, dans un entretien avec Marlène Laruelle (n° 66 de la revue XXI) et dans le n° 2 de la revue Fracas. Klemperer écrit ceci, au sujet de la république de Weimar :
La république libéra la parole et l’écrit d’une manière tout bonnement suicidaire ; les nationaux-socialistes se gaussaient, disant qu’ils ne faisaient que reprendre à leur compte les droits que leur accordait la Constitution, quand, dans leurs livres et leurs journaux, ils attaquaient violemment l’État dans toutes ses institutions et ses idées directrices, au moyen de la satire et du sermon enflammé. [LTI La langue du IIIe Reich. Traduction d’Élisabeth Guillot, 1996, rééd. Espaces libres, 2023, p. 55]
C’est, au mot près, ce que nous voyons avec les réticences de l’Union Européenne à interdire purement et simplement le réseau X du néonazi Musk sur le territoire. C’est la stratégie du milliardaire christofasciste Bolloré et de ses relais médiatiques nombreux (et je n’oublie pas, comme je l’ai précisé jeudi soir lors de la rencontre aux Temps sauvages, que Calmann-Lévy publie aussi ma traduction de Born in Blackness, ouvrage “woke” s’il en est).
À l’occasion de ma migration vers Bluesky et Mastodon, je veux m’astreindre, à partir d’aujourd’hui, à publier une revue de presse qui ne prétend en rien à l’exhaustivité, mais que je tenterai de « doublonner » ici, quand j’en aurai le temps :
1/ Le retrait américain de l’OMS impacterait “grandement” l’Afrique, selon l’UA (Afrique Média)
2/ Trump again demands to buy Greenland in ‘horrendous’ call with Danish PM (Guardian)
3/ Le coup de pouce de la mairie de Toulouse au collectif d'extrême droite Némésis (StreetPress)
4/ Une bonne synthèse explicative des premiers décrets pris par Trump lundi/mardi (en anglais - The Irish Times, 21 janvier 2025)
5/ La Martinique retrouve son leader de la lutte contre la vie chère (Mediapart - réservé aux abonné·es - abonnez-vous ou demandez-moi l'article - c'est possible d'en offrir un par jour je crois)
6/ Australie : les défenseurs des droits des autochtones manifestent pendant la fête nationale (TV5 Monde)
7/ Investiture de Donald Trump : Spotify fait cadeau de 150 000 dollars pour la cérémonie (Les Inrocks) - c'est le moment de se désabonner, je pense (je le dis à l'attention des personnes concernées)
10:40 Publié dans 2025, Indignations, Lect(o)ures, Revue de presse | Lien permanent | Commentaires (0)
samedi, 25 janvier 2025
25012025
Ce matin, plutôt que de m’installer à l’ordinateur, j’ai tenté une nouvelle routine : lectures (d’un œil finalement) dans le canapé en regardant deux vidéos directement sur le téléviseur, notamment la dernière de la chaîne Un grain de lettres, avec Clémentine Labrosse, sur la revue Censored et l’autoédition féministe.
Pourquoi ne pas tenter une nouvelle routine, au moins pour le week-end ?
J’ai lu — en diagonale ou plus exactement, en ne lisant que certains articles — le n° 44 de la Revue dessinée et le n° 66 de XXI. Beaucoup de pistes de réflexion et de nouvelles lectures à aller pêcher / piocher. Et toute la journée s’est muée en grisaille dégoulinante, averses, plafond cendreux de nuages effroyablement bas, temps à spleen XXL. Nous allons peut-être aller en ville quand même, car il y a une ou deux courses à faire, et l’exposition Letizia Battaglia au Château de Tours.
15:18 Publié dans 2025 | Lien permanent | Commentaires (0)
vendredi, 24 janvier 2025
24012025
Ma grand-mère est morte à 97 ans et 200 jours, cinquante-sept ans au jour près après son père (mort le 17 janvier 1968, et que je n’ai pas connu), et donc il y a une semaine.
Cet après-midi, je suis resté au bureau, à faire des bricoles, à lire divers documents, « traiter les mails pro » selon l’expression que j’emploie, échanger, scroller sur Mastodon et Bluesky – peut-être que je pose quelques jalons quand même. Notre amie E* qui a fait un passage express, venue exprès pour la rencontre d’hier soir (la pauvre) et repartie ce matin tôt (elle avait cours à 11 h dans son collège charentais), était fascinée par toute l’histoire autour d’Amma Darko : si je n’en tire rien côté recherche, traduction et/ou publication, je pourrai toujours écrire un opuscule en mode polar pour intellos…
En écoutant ce matin la rediffusion de l’émission La Méridienne de 2023 avec mon collègue Florent Kohler, je réfléchissais à la façon dont je pourrais consacrer un peu de temps, en marge de mon projet de recherche principal, pour la tétralogie de Heathcote Williams. (Florent dit qu’il s’était tourné vers l’anthropologie car il en avait eu assez de la littérature autour des questions animales. Textuellement, qu'il en avait “assez de l'abstraction”. Dans l’émission, il dit des choses passionnantes sur l’écologie de la réconciliation.)
17:56 Publié dans 2025, Flèche inversée vers les carnétoiles | Lien permanent | Commentaires (0)
jeudi, 23 janvier 2025
23012025
Retour à Tours. Il faisait très beau et très doux à Dax comme à Bordeaux.
La rencontre aux Temps sauvages autour de ma traduction de Born in Blackness ne s’est pas très bien passée. J’étais plutôt déçu car je n’ai pas été à la hauteur du tout, usurpant la confiance que m’a fait le libraire, Nicolas, qui est un jeune homme charmant, très cordial et très fin. Surtout je n'avais pas assez préparé, ou pas ce qu'il fallait. J'avais bien rédigé quelque chose de synthétique, mais le livre traite d'énormément de périodes et de lieux, et il y avait dans la salle des personnes qui ne connaissaient absolument rien – je pense – au sujet, et qui ont dû être complètement perdues...
Lors des questions, je me suis un peu rattrapé (j’espère). La librairie était pleine, en tout cas (environ 25 personnes), et j'espère ne pas avoir totalement embrouillé l'esprit de (ni avoir trop fait perdre de temps à) ces personnes
23:50 Publié dans 2025, WAW | Lien permanent | Commentaires (0)
mercredi, 22 janvier 2025
22012025
Longue journée à Saint-Pierre et Mont-de-Marsan, entre le crématorium, la pose de l’urne au cimetière (l’urne cinéraire de ma grand-mère est nettement plus grande que celle de mon grand-père, hasard ô combien significatif – et grise, face à noire), les rendez-vous de ma mère et de ma tante ici et là pour les formalités (qui n’en sont pas), le déjeuner en famille. Heureux de voir ma cousine, que je vois rarement.
Vraiment secoué. La cérémonie a été très difficile. Ma tante a lu la lettre que ma grand-mère avait préparée, qui lui ressemble tant, tout calculé au mot près. Ma cousine l’a très bien évoquée ; c’était juste et d’une grande tendresse.
Pas eu l’envie ni la force de faire de petites vidéos de la maison et du jardin, comme je voulais le faire. Abel et moi avons fait un tour à Mont-de-Marsan, et traînaillé dans deux librairies, dont la librairie Masset, où j'avais acheté quelques livres en juillet dernier et où je n'avais pas vu le rayon “franc-maçonnerie” (!). C'est Abel qui me l'a montré.
C’est mon père qui a conduit au retour également alors que j’aurais dû m’y coller ; je suis en-dessous de tout.
23:35 Publié dans 2025 | Lien permanent | Commentaires (0)
mardi, 21 janvier 2025
21012025
Deux promenades, une le matin sous le soleil, et une l’après-midi en faisant demi-tour fissa à cause de la pluie qui forçait.
Demain, obsèques de ma grand-mère.
Je suis vraiment secoué ; ça m’épuise.
18:10 Publié dans 2025, Hors Touraine | Lien permanent | Commentaires (0)
lundi, 20 janvier 2025
20012025
Aujourd’hui, avant de prendre le train, dans le coton grisâtre et brumeux qui enveloppe la Touraine, à de rares exceptions près, depuis trois mois, le froid en surplus depuis quelques jours, j’ai enregistré la deuxième émission de radio I Love Mes Cheveux avec Marie-Aude Ravet.
Après, lors du trajet et de l’assez longue correspondance à Bordeaux Saint-Jean qui m’a fait constater que « la forme d’une ville gare / Change plus vite hélas que le cœur des mortels », j’ai écouté en boucle le nouvel album de Mathieu Boogaerts, en continuant de lire Séverin et Brautigan, et en scrollant aussi, fatigué, m’effondrant bêtement en sanglots au sud d’Angoulême.
Notre train a eu une demi-heure de retard, car le train précédent avait percuté un animal.
19:00 Publié dans 2025, Blême mêmoire, ILMC | Lien permanent | Commentaires (0)
dimanche, 19 janvier 2025
19012025 — Les GAFA et l'eurocentrisme
Depuis quelque temps (je ne saurais dire combien), YouTube génère automatiquement une sorte de tag visuel permettant d'identifier des figures connues citées dans une vidéo. Dans celle que j'ai postée hier, je parle de Marechera (très important poète du Zimbabwe, mais peu connu en Europe, de fait) et de Derek Walcott, immense dramaturge et poète, prix Nobel en 1992, excusez du peu. Eh bien, YouTube a identifié Valentine Boué ép. Penrose (tant mieux, je la pensais nettement plus invisibilisée) mais ni Marechera ni Walcott.
Les algorithmes des GAFA (et donc les humains qui sont derrière ces choix) confortent et accentuent l'eurocentrisme, et même, je le dis sans ambages, le suprémacisme blanc.
15:47 Publié dans 2025, Chèvre, aucun risque, Indignations | Lien permanent | Commentaires (0)
samedi, 18 janvier 2025
18012025
Ma grand-mère maternelle est morte hier.
(Je n’aime pas l’adjectif décédé·e ; je l’évite comme la peste.)
Ma grand-mère maternelle est morte hier. Je l’ai appris après une réunion de recherche.
Je passe sur l’intime.
Une de mes collègues m’a écrit ceci : « Perdre ses grands-parents c'est faire le deuil de tout un pan de l'enfance. » Cela peut sembler une évidence, un poncif, mais c’est une très belle phrase, au fond, très juste. J’ai eu la grande chance de connaître mes quatre grands-parents jusqu’à une période assez avancée dans ma vie d’adulte : mon grand-père maternel est mort en 2012, et mes grands-parents paternels en 2015 et 2018 respectivement. J’ai donc aussi, avec eux, des souvenirs de l’enfance de mes fils. Mais ce qui remonte, dans ces moments-là, c’est surtout des épisodes ou des images de mon enfance.
Une autre collègue m’a écrit : « quand on ne cesse pas de parler d'eux, ils ne meurent pas ». Vieille vérité, mais qu’on oublie peut-être. Aujourd’hui, en regardant (d’un œil agacé) un court métrage documentaire des « scotcheuses », je regardais aussi le ballet des moineaux et des mésanges autour des mangeoires, et je rêvassais à un film que je pourrais fomenter pour parler d’eux.
Commentant la photographie que j’ai choisie pour saluer sa mémoire sur Facebook, l’écrivaine Monique Séverin (que j’ai rencontrée une fois, en 2023) a écrit : « Oh, ce sourire ! Et cette symbiose avec son environnement... »
J’étais très touché car c’est la seule qui a exprimé ce que j’avais voulu montrer avec cette image. Ma grand-mère n’était pas très amoureuse des grands espaces sauvages — quoi qu’elle ait beaucoup pratiqué la randonnée dans les Pyrénées et nagé, jusqu’à un âge avancé, dans les flots peu commodes et les rouleaux de l’océan Atlantique, à Contis notamment —, mais c’était quelqu’un qui aimait les jardins, les fleurs, le vert que l’on a sous les yeux. J’ai choisi cette photo pour tout cela, et pour le regard un peu mélancolique mais surtout très vif, méditatif, prêt peut-être à ne pas être d’accord ; elle était aisément sceptique, et souvent un peu trop sûre d’avoir raison.
Je suis d’autant plus touché par la remarque de Monique Séverin que j’avais commencé, deux jours avant la mort de ma grand-mère, la lecture du roman de l’écrivaine réunionnaise La bâtarde du Rhin, et que les secrets de famille qui traversent ce roman font un peu écho à une partie de l’histoire de cette partie-là de ma famille : mon arrière-grand-mère, la mère de ma grand-mère que vous voyez ici assise dans l’herbe, était une enfant de l’Assistance publique, et avait souffert d’avoir été marquée toute son enfance et toute sa jeunesse du mot d’infamie, la bastarde en français légèrement gasconnisé. Cela n’avait rien d’un secret de famille, et j’ai souvent discuté avec mon arrière-grand-mère de son enfance, mais des secrets il y en a : ce n’est pas le lieu d’en parler là, aujourd’hui, et je ne saurais comment le faire, là aujourd’hui, mais je ne veux pas oublier que les secrets de famille ne m’ont jamais passionné en soi, que je pense – ce n’est pas faute pourtant d’avoir beaucoup lu ce que Nicolas Abraham et Maria Török ont écrit sur les cryptes – que ces secrets ont tendance à occulter, rétrospectivement et paradoxalement, tout ce qui n’est pas caché et qui compte bien davantage dans la vie et dans la mémoire des humain·es. Si je fais un film (pour moi) ce sera en évoquant les (faux) secrets, mais surtout pour qu'ils prennent place au milieu de tout ce qui n'a jamais été celé ni scellé.
10:05 Publié dans 2025 | Lien permanent | Commentaires (1)
vendredi, 17 janvier 2025
17012025 (Lynch et l'archive)
C’est de saison : tout le monde parle de se barrer de X anciennement Twitter et de Meta à cause des dernières déclarations de Zuckerberg libérant toutes les paroles fascistes et antidémocratiques au nom de la « liberté d’expression » (pour contrer cette idée fallacieuse et criminelle, se pencher sur le paradoxe de Popper).
Concernant Facebook, je me suis exprimé à ce sujet sur le réseau lui-même et je prévois de continuer à y écrire, publier et travailler ; la position d’Eva Doumbia m’a également convaincu. Concernant Twitter, dont le cas est différent car Musk se démène activement en faveur des partis fascistes partout en Europe, j’ai demandé une archive, qui est quasiment illisible/inutilisable, et surtout très partielle malgré ses deux gigaoctets : je vais sans doute supprimer mon compte en passant par pertes et profits tout ce qui s’y trouve et que je n’ai pas archivé au fur et à mesure (beaucoup de choses).
En tout cas, ce n’est pas ce dont il était question quand j’ai écrit « c’est de saison » ; je voulais simplement expliquer pourquoi j’étais allé repêcher, dans mes archives Facebook, deux posts de juillet 2020, écrits juste après avoir revu Mulholland Drive. J’ai eu beau faire beaucoup de sauvegardes de Facebook ici et là, il en manque…
06:20 Publié dans 2025, Flèche inversée vers les carnétoiles, Tographe | Lien permanent | Commentaires (0)
jeudi, 16 janvier 2025
16012025
C’est le milieu du mois. Il fait toujours froid, moins dixit le thermomètre, mais ça ne paraît guère, vu que la grisaille est retombée sur le monde. Après un bon bout de matinée à régler des bricoles chronophages, je me suis enfin mis à mes copies de L3, dont j’ai éclusé une bonne moitié, mais en devant faire deux pauses pour m’aérer l’esprit : en fin de matinée pour aller acheter de nouveaux chaussons, et en milieu d’après-midi pour refaire le stock de boules de graisse pour les mangeoires. (Le jour de novembre où il a neigé, j’avais acheté un sac de 12 kilos de graines de tournesol, dont les oiseaux ne sont pas encore venus à bout.)
Enfin pris le temps, après l’heure du thé, de lire plus en détail le catalogue de l’exposition Tarsila do Amaral vue à l’automne. Malgré quelques timides tentatives, le fait que l’œuvre de la peintre révèle, ça et là, ses préjugés et la culture post-esclavagiste reste très sous-analysée. De même pour le concept d’anthropophagie, dont je sais – sans jamais avoir très bien compris, d’ailleurs – que Maryse Condé l’a reprise à son compte sous la formule du cannibalisme culturel, il y a tout un impensé culturel que les formules à l’emporte-pièce du Manifeste d’Oswald de Andrade en 1928 ne rendent pas moins dérangeant.
Soir : on poursuit dans le cinéma coréen, avec Decision to leave de Park Chan-wook (2022). Il y a d’excellentes idées, mais toute la dernière partie traîne en longueur. Récompensé pour la mise en scène à Cannes, d’accord, mais alors, pas pour le montage… Dommage…
Juste avant le coucher, on apprenait la mort de David Lynch. Mon fil Facebook s'était couvert de bourgeonnants hommages, ou de titres de presse citant tous Twin Peaks (vraiment pas son meilleur) et Mulholland Drive (excellent, même si je préfère Lost Highway).
21:30 Publié dans 2025 | Lien permanent | Commentaires (0)
mercredi, 15 janvier 2025
15012025 (ILMC & NdT)
La première de mon émission de radio, I LOVE MES CHEVEUX, est donc enfin en ligne. Elle a été enregistrée en direct avant-hier, lundi. Pour la petite histoire, on entend mal la musique de générique au début, mais je compte améliorer cela la prochaine fois ; de même, il y a un blanc étrange vers 4'50" : j'étais perturbé de voir Mélissa modifier des réglages sur les manettes car on entendait mal le retour dans les casques, apparemment...
L’idée est d’en enregistrer deux ou trois par mois ; normalement, j’ai mon programme d’invité·es jusqu’en mars. Il est essentiel pour moi que cette émission ne se résume pas à inviter des traducteurices et à parler de leurs traductions : d’excellentes émissions et podcasts existent déjà avec cette ligne éditoriale. Mon souhait, depuis que j’ai conçu le projet, est de tout articuler autour du territoire, donc de l’université bien sûr (c’est Radio Campus Tours) et plus généralement de la métropole tourangelle. Je ne penserai avoir atteint mon but que lorsque des représentant·es de toutes les catégories de personnel et des étudiant·es de toutes les filières seront venu·es parler au micro.
Une des questions presque marginales qui s’est posée, lors d’un échange avec Louison Millet autour de la traduction d’un mot coréen que je ne saurais ni restituer en hangeul ni donner en transcription, et dont elle disait qu’il n’était pas traduisible en français, en particulier en raison de ses connotations historiques, est celle des notes du traducteur ou de la traductrice. C’est un vaste sujet, et une question à laquelle, comme toute personne qui traduit ou qui lit des traductions, je réfléchis depuis longtemps.
Il est impossible de faire le tour de cette question dans un billet de blog, mais disons qu’il y a grosso modo deux écoles, et, au sein de ces écoles, cinquante nuances, bien sûr. D’une part, l’idée que la NdT est un aveu d’échec, une scorie à éviter à tout prix, et c’est souvent le cas des éditeurices, qui préfèrent, le cas échéant, ouvrir un espace à læ traducteurice, par exemple une postface permettant d’expliquer et de justifier certains choix ; cette idée a notamment une certaine pertinence pour la traduction de textes littéraires, dans la mesure où les idées (et donc les référents des mots) ne sont pas le seul, voire pas le principal objet/objectif du texte. D’autre part, il y a l’idée que la traduction est une opération intellectuelle et linguistique nécessaire, mais qu’elle est vouée en soi à ne pas permettre une nette et équivalente compréhension de tel mot ou de tel passage, contexte etc. : dans cette optique, la NdT se comprend comme un prolongement du texte traduit, qui donne un élément de compréhension primordial. Comme je le disais, ces deux positions admettent des nuances multiples : ainsi, Claire, avec qui j’en ai longuement parlé lundi soir, déplore que certaines traductions de textes issus de cultures non européennes finissent par anthropologiser le texte littéraire en le surchargeant de notes sans lesquelles le récit resterait en fait entièrement compréhensible en tant que récit, fût-ce au prix d’une certaine étrangeté/étrangèreté constitutive de sa lecture.
En quelque sorte, ces questionnements recoupent en partie le vieux débat (en partie stérile ou vicié) des « sourcistes » et des « ciblistes », ainsi que la question post-coloniale de l’inscription des mots ou phrases en langues non européennes dans des textes écrits en langues européennes (ce que Ngũgĩ wa Thiong’o nomme les littératures afro-européennes, cf Decolonising the Mind, pp. 26-7) : quel sens donner aux glossaires, aux équivalences intégrées, à ces différents dispositifs de mise à disposition du sens, et donc d’homogénéisation partielle ou total d’un texte hétérogène car profondément plurivocal (au sens bakhtinien) ? On touche là à mes obsessions de plusieurs années déjà, explorées dans plusieurs séminaires, et qui, au fond, trouvent à se réexprimer dans le gros projet de recherche dans lequel je m’embarque pour mon sabbatique.
Pour en revenir à la question des NdT, il faudra que je fouille un peu afin de voir si ça n’a pas été déjà fait, mais il y aurait certainement un colloque à organiser autour de ces questions, car, au-delà des questions essentielles de la transmission, de l’opacité, du « reste après traduction », ou des genres différents (la NdT est évidemment valorisée dans le cas des textes philosophiques, par ex.), la NdT, très entre autres, peut servir désormais de signal anti-IA, autrement dit la preuve qu’un·e traducteurice humain·e est à la manœuvre.
18:32 Publié dans 2025, ILMC, Translatology Snippets, WAW | Lien permanent | Commentaires (0)
mardi, 14 janvier 2025
14012025 (Hiver à Sokcho)
Encore une belle journée ensoleillée et froide. Le thermomètre descend autour de -3° / - 4° la nuit et jusqu’au matin : il y a longtemps que ce n’était pas arrivé. Je ne me suis pas encore mis à mes copies de 3e année (récupérées mardi dernier – quel boulet je suis) et je n’ai rien écrit dans les carnets de recherche depuis pas loin d’une semaine également. Au retour des Deux-Lions, lundi, je suis tombé sur un collègue que je vois très rarement et qui va bientôt soutenir son HDR : je lui ai parlé de mon feuilleton avec Amma Darko, qui relève du roman policier. Ce même jour, j’avais eu un mail très sympa de James Woodhouse, qui a republié le premier roman de Darko l’an dernier dans le cadre de la reprise du catalogue des African Writers Series, et qui envisage de contacter la fille d’Ama Ata Aidoo, qui connaît beaucoup de monde dans le milieu littéraire au Ghana. — Je ne sais pas pourquoi je raconte tout ça ici.
L’après-midi, après le déjeuner à Lion & Papillon, très bon petit restaurant libanais « queer et vegan » qui a ouvert il y a un peu moins d’un an, nous sommes allés voir Hiver à Sokcho, d’après le roman d’Elisa Shua Dusapin, que j’avais bien aimé et que je ne retrouve pas sur mes étagères. Comme le roman (dont je me suis aperçu que les détails de l’intrigue ne me sont guère restés en mémoire), c’est un film d’atmosphère. Le réalisateur franco-japonais Koya Kamura a choisi d’adapter le roman en filmant la ville de Sokcho de façon fragmentée, impressionniste, comme pour souligner le caractère subjectif des deux regards principaux, celui de Soo-ha (qui connaît « sa » ville par cœur) et celui de Yan, l’auteur français qui la découvre et dont on ne saura jamais vraiment ce qu’il y a vu. Il s’agit d’un film qui insiste assez nettement sur les injonctions faites aux femmes au sein d’une société conservatrice et patriarcale, et dont le sujet (Soo-ha ne connaît pas son père, Français de passage jamais revenu) fait écho au roman de Monique Séverin dont je viens de commencer la lecture (La bâtarde du Rhin [2006], rééd. éditions Edern, 2024).
Au final, c’est un film contemplatif, comme j’ai le sentiment d’en avoir déjà vu pas mal, sur la rencontre entre deux personnages, un homme d’une cinquantaine d’années et une jeune femme, une rencontre grevée par les non-dits et le poids de leurs passés respectifs. Un des éléments originaux est l’insertion, ex abrupto, de brèves séquences animées, qui semblent parfois mièvres ; l’une d’entre elles, toutefois, celle qui se substitue à la scène d’amour entre Soo-ha et Jun-oh, est très habile, car elle permet de montrer, du point de vue de la jeune femme, que l’acte sexuel est, pour elle, un acte solitaire, et un geste d’adieu à son compagnon autant que de repossession de son corps. Le film est surtout « sauvé » par l’interprétation, notamment des deux actrices principales, la mère (Park Mi-Hyeon) et la fille (Bella Kim), mais aussi du vieux M. Park, propriétaire de l’hôtel et figure douce-amère. Roschdy Zem joue bien, ce que l’on voit dans les deux brèves scènes dans lesquelles il sort du rôle du mec taciturne et bourru dans lequel il est trop souvent cantonné. C’est notamment un acteur qui sait être très drôle, de façon très convaincante : « vous moquez pas, hein, cette moustache a fait des ravages à Dieppe en 1991 ». À bien y réfléchir, la réplique, une fois passé son effet comique immédiat, est à double détente : tout le film tourne autour du trauma des pères absents ou démissionnaires. Le père inconnu de Soo-ha, l’homme de Chateaudun, a lui aussi fait des ravages.
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Donc, blague récurrente, je ne retrouve pas mon exemplaire d’Hiver à Sokcho, que j’aurais volontiers reparcouru à la lumière du film. À qui l’ai-je prêté ? Mystère. En recherchant dans mon vlog, j’ai bien retrouvé la vidéo dans laquelle je parle (entre autres) du deuxième roman de Dusapin, Les billes du Pachinko ; j’y dis clairement que ma lecture de Hiver à Sokcho remonte à la période où je ne faisais pas de vidéos. C’est un rien pénible, mais sans gravité. Pour l’anecdote, au tout début du film, on voit Soo-ha arriver pour la première fois à la réception de l’hôtel dans lequel elle travaille, et elle salue une jeune voyageuse qui quitte le bâtiment : j’ai reconnu Elisa Shua Dusapin elle-même, qui fait donc un petit cameo assez amusant, moins un clin d’œil à Hitchcock qu’une façon de passer le relais au cinéaste (j’étais là, mais je te laisse la place).
18:50 Publié dans 2025, Moments de Tours, Tographe | Lien permanent | Commentaires (0)
lundi, 13 janvier 2025
13012025
Aujourd’hui, belle journée ensoleillée, grand ciel bleu, grand froid. J’ai reçu enfin, cet après-midi, les deux étudiantes sud-africaines qui seront là ce semestre, et dont l’une me dit qu’elle n’avait pas prévu un climat aussi froid : elle avait juste un sweat-shirt à capuche, et même dans mon bureau (très peu chauffé, il faut dire), elle devait se cailler. Établir leur programme d’études va être coton, car il leur faut 30 ECTS pour pouvoir bénéficier de la bourse.
Le matin, j’avais enregistré en direct la première de mon émission de radio, I LOVE MES CHEVEUX. Mélissa Wyckhuyse, la responsable d’antenne, était là pour m’aider à ne pas commettre de bourde technique, et a même posé quelques questions à l’invitée, avec une lucidité très supérieure à la mienne. C’est aussi à elle qu’on doit la photo ci-dessus.
Globalement, ça s’est plutôt bien passé : grâce au compte Instagram j’ai même pu évoquer à l’antenne des remarques/ questions des auditeurices. Par contre j’ai oublié de demander à Louison Millet de citer/recommander quelques-unes des bandes dessinées sur lesquelles elle travaille pour son mémoire de master. Je rattraperai cela quand l’administrateur du site aura créé une page pour l’émission et quand le podcast sera diffusé, mais il faut que je m’améliore… Bien sûr, l’audience est très limitée, mais peut-être que ça peut « prendre ». Nous verrons bien. Pour l’instant, j’ai mon programme prévu jusqu’en mars, à raison de deux ou trois émissions par mois.
Soirée : Pollock de et avec Ed Harris. Pas un mauvais film du tout, car le réalisateur/acteur a eu le souci du détail ; je pense que d’un point de vue technique le travail du peintre est correctement représenté, en particulier les scènes de danse/dripping. Toutefois, je ne peux m’empêcher d’être toujours plus convaincu que le biopic est un genre tiède : il est très rare que les biopics soient de mauvais films, car leur sujet est intéressant, mais il est plus rare encore que ce soit de très bons films. La contrainte narrative implique que ce sont des films qui se laissent regarder voire qui donnent à réfléchir, instruisent etc. Mais des grands films ? presque jamais.
21:19 Publié dans 2025, Flèche inversée vers les carnétoiles, Tographe | Lien permanent | Commentaires (0)
dimanche, 12 janvier 2025
12012025
Matinée : tâches domestiques, deux corrigés de devoir (concours blanc d'agrégation interne).
Après-midi : après un tour à vélo sous le soleil (enfin !) avec O*, thé avec 5 crêpes et un nombre incalculable de dattes, de sorte que j'ai comaté devant un match de rugby, en proie à l'indigestion la plus crasse.
J'ai cinquante ans et je suis un abruti sans jugeote.
18:40 Publié dans 2025 | Lien permanent | Commentaires (0)
samedi, 11 janvier 2025
11012025
Comme j'ai des piles de livres à lire qui traînent un peu partout (trois sur et dans la table à chevet, une au salon, une dans le placard de la chambre et une enfin au bureau), j'essaie d'écluser un peu, et je me suis donc mis en train aujourd'hui de poursuivre/achever la lecture de quelques recueils de poèmes que je lisais par intermittence depuis l'été.
Cela va un peu gonfler la liste des ouvrages lus en 2025, mais très à la marge (et de toute façon je continue de les lire en 2025).
18:40 Publié dans 2025 | Lien permanent | Commentaires (0)
vendredi, 10 janvier 2025
10012025
Matinée : lessive, mails, réunion Teams de l’équipe transnationale Neolaia.
Après-midi : promenade en ville, le temps de déposer quelques provisions chez O* et de passer aux Temps sauvages, afin d’acheter trois livres qui viennent de paraître et de « caler » avec Nicolas, le libraire, le déroulement de la rencontre autour de Noires origines.
Soir : deux films, l’un presque navet (Time Trap) et l’autre, un film mauritanien, Lingui : les liens sacrés, qu’on aimerait aimer, pour son sujet, pour sa photographie, mais ruiné par la présence d’une seule vraie actrice, celle qui joue la mère, Amina. Les autres jouent vraiment trop mal.
Hier, au cinéma, nous avons vu Bird d’Andrea Arnold, qui mêle très habilement les codes de la comédie dramatique sociale à la Ken Loach – il se trouve que j’ai emprunté Kes à la médiathèque pour le revoir prochainement – et du film fantastique avec une esthétique caméra au poing plus proche des frères Dardenne. Malgré quelques éléments scénaristiques un peu convenus, ce qu’on pourrait appeler des « passages obligés », le film traite de manière subtile de la porosité entre le monde des animaux non humains et celui des animaux humains. Un critique qui en parle comme de quelque chose de rebattu ne semble avoir remarqué ni la scène initiale avec le goéland, ni la scène finale avec le renard, ni l’importance des films tournés par Bailey avec son smartphone. Je n’ai pas une très bonne oreille – et c’est presque une litote – pour cela, mais il m’a semblé que la mosaïque d’accents relevait des aspects délibérément non réalistes du film, qui se passe dans le Kent.
Apparemment, Andrea Arnold est une cinéaste reconnue. Tant de films non vus…
23:00 Publié dans 2025, Tographe | Lien permanent | Commentaires (0)
jeudi, 09 janvier 2025
09012025
Il y a trois jours, déjà, j’avais enregistré une vidéo d’une cinquantaine de minutes, dont la fin – pas grand-chose, deux ou trois minutes – avait été coupée faute d’espace de stockage. C’est un problème récurrent car les vidéos du smartphone sont très lourdes, même en modifiant les paramètres. Je vais tenter, prochainement, de reprendre l’enregistrement avec le vieux camescope (oui, celui de 2007), histoire de voir si le son n’est pas trop mauvais.
Ce matin, j’ai enregistré une nouvelle vidéo, tout d’abord pour finir de parler de l’essai de Vanessa Kisuule que m’a offert ma sœur pour mes 50 ans (j’y vois un parallèle avec le livre de Claire Dederer traduit par Carine Chichereau et dont a parlé Azélie Fayolle), puis pour parler un peu en détail de trois livres lus récemment et qui vont me marquer : le tome 1 du PO/CA/HON/TAS de Klaus Theweleit traduit par Christophe Lucchese chez L’Arche ; la sublime œuvre, quasiment inclassable, de Charlotte Salomon au Tripode ; enfin, le premier des grands poèmes animalistes de Heathcote Williams, Whale Nation, car je ne les connaissais que par ouï-lire ou via téléchargements illégaux, et ce Noël ma mère m’en a dégotté un exemplaire. J’ai aussi lu un extrait du roman du franco-irakien Abbas Fahdel Ce que le temps fait à la pierre (Abstractions, 2024) et un extrait, une fois encore, de l’essai de ma collègue Maboula Soumahoro.
14:18 Publié dans 2025, Flèche inversée vers les carnétoiles, Lect(o)ures | Lien permanent | Commentaires (0)
mercredi, 08 janvier 2025
08012025
En fait, j’ai un boulot monstre cette semaine, et surtout plein de choses très différentes : copies de L3, préparation du dernier cours d’agrégation interne avec correction du concours blanc, faire la liste des notes pour le Mobil des étudiants de L2/L3, continuer mon chantier de recherche Nganang / Darko, et préparer la première de mon émission de radio.
Pour le chantier de recherche, j’ai écrit ce matin sur Facebook trois paragraphes pour accompagner le partage du dernier billet de Patrice Nganang, avant de copier-coller tout cela dans le document Word intitulé Chantier CRCT, qui, de carnet de bord, devient quasiment un dépotoir. Je me suis avisé que deux néologismes de ma brève publication, tritralogie et anthrop(aut)obiographie, pourraient requérir chacun un chapitre du très éventuel livre. Pour l’émission de radio, c’est amusant, car le document Word dans lequel je suis allé rechercher le visuel et l’argumentaire afin de créer le compte Instagram dédié (et y rédiger la première publication) s’intitule Proposition d’émission RCT : ainsi, deux sigles sans aucun rapport finissent par rythmer mon début d’année – d’une part, le Congé pour Recherche et Conversion Thématique (le talent de l’administration pour bricoler des intitulés absolument opaques n’a pas de limite), et d’autre part Radio Campus Tours (là, c’est transparent).
Bon, il faut que je me mette aux copies ou au bilan des notes, ou au corrigé du concours blanc, afin de pouvoir dire ce soir que j’ai aussi avancé sur la partie enseignement de mon activité (c’est la queue de comète du premier semestre).
09:12 Publié dans 2025, WAW | Lien permanent | Commentaires (0)
mardi, 07 janvier 2025
07012025 (avec Ernest Cole)
Côté météo, on est passé d’une assez belle journée d’hiver, fraîche mais avec un ciel presque dégagé, à la même bouillie grisâtre et trempée. Côté politique, le dixième anniversaire de la tuerie de Charlie Hebdo a coïncidé avec la mort de l’affreux tortionnaire raciste et fasciste Le Pen, qui n’aura jamais été jugé pour ses crimes et qui laisse une imposante descendance, hélas, biologique ou non. Les fanatiques religieux et l’extrême-droite sont des analogues et alliés de circonstance contre les libertés ; sur ce point, je n’ai pas bougé d’un iota.
Au cinéma : Ernest Cole : Lost & Found de Raoul Peck. Le film retrace assez en détail le parcours de ce grand photographe oublié, en cherchant aussi à comprendre comment ses 60.000 et quelques négatifs retrouvés dans un coffre-fort en Suède avaient pu s’y retrouver. Le film est indispensable, ne serait-ce que parce qu’il donne à voir, par son montage, plusieurs centaines de photos de Cole ; peut-être aussi des films super 8, car on n’arrive pas du tout à comprendre si les films en super 8 de New York dans les années 70 sont aussi de lui. Que Cole ait tourné des films, on le suppose, car on voit bien qu’il y a des bobines 8mm dans les boîtes que Leslie Matlaisane (son neveu et exécuteur testamentaire) ouvre lors de la restitution en Suède ; on le comprend aussi car Leslie Matlaisane déclare peu avant dans le documentaire : « his photographs, his pictures rather, went largely forgotten ». En anglais, la nuance sémantique serait qu’il y aussi des images animées (pictures).
On ne sait pas toujours ce qu’on voit. C’est une des réserves : la narration, par laquelle un Cole imaginaire reconstitué raconte et guide le spectateur, est trop allusive, un peu mélodramatique, grandiloquente, voire chichiteuse (et en plus, chose incompréhensible, il s’agissait de la VF – je ne pensais même pas que le cinéma Studio diffusait des films autrement qu’en VO). De même, tout en prétendant s’en garder, le film fait de la vie de Cole une sorte d’allégorie de l’Afrique du Sud sous l’apartheid.
17:49 Publié dans 2025, Tographe, Zestes photographiques | Lien permanent | Commentaires (0)
lundi, 06 janvier 2025
06012025 (de Walcott à Darko)
Aujourd’hui, c’est la rentrée et l’Épiphanie. O* a deux examens aujourd’hui et demain pour boucler son semestre.
Quasiment fini (enfin !) la monographie de Bruce King sur Walcott, qu’il faudrait que j’extraie (j’ai marqué de nombreuses pages) ; il faut dire aussi qu’elle ouvre de nombreuses pistes de lectures, en poésie comme – plus généralement – en littérature des Caraïbes. Il parle peu de Kincaid ; d’elle, j’ai beau avoir mis le premier livre au programme de mon cours de L2 Double Licence depuis trois ans, je sais que j’ai à peine effleuré son œuvre. Les deux chapitres sur Omeros et le prix Nobel sont passionnants ; il y a notamment 4 pages sur Omeros qui offrent une introduction parfaite à ce livre qui a été, pour moi, il y a bientôt trente ans, un véritable choc esthétique. C.L.R. James, dont j’ai relu – pour traduire Born in Blackness – les Black Jacobins, a écrit des livres semble-t-il fondamentaux pour comprendre Walcott et d’autres, dont un (Beyond Boundaries, je crois – j’écris ceci sans le pavé de King sous les yeux) propose une sorte de sociologie post-coloniale du cricket aux Antilles. Et tout cela, si je poussais l’affaire, me détournerait d’autant plus du chantier qui doit m’occuper presque exclusivement ces prochains mois, à savoir mon chantier de recherche pour lequel j’ai obtenu un congé sabbatique de février à juillet. Voici d’ailleurs ce que je viens d’écrire dans le fichier Word intitulé Chantier CRCT :
Au tout début des vacances, j’avais poursuivi ma lecture de Spinnweben, jusqu’au milieu du chapitre 11, puis Noël est survenu, avec des lectures nouvelles terriblement happantes ; puis excursions à Pau, à Bayonne, à Paris même — autant dire l’entraînement vers autre chose. Comme il était prévisible, le chantier n’a pas avancé depuis le 24.
Il faut que j’écrive un mail type pour écrire à toutes les personnes avec qui j’ai échangé autour d’Amma Darko, sous prétexte des vœux, et afin de leur signaler que je suis totalement au point mort. Autre idée, écrire un mail à Amma Darko et tenter de l’envoyer – malgré ce que m’a dit Regina Bouillon – à un certain nombre d’adresses mail hypothétiques. Après tout, cela va me prendre une heure ou deux d’imaginer des mails possibles (gmail, yahoo, opérateurs allemands…), mais j’ai déjà donné des coups d’épée dans l’eau pendant beaucoup plus longtemps que cela.
Il faudrait que je réponde désormais aux personnes qui me disent « ah, mais ton sabbatique, c’est pour une HDR » quelque chose comme : « Non, j’ai quinze ans de retard sur les publications, je ne vais pas boucler une HDR en six mois. » Ma seule réticence serait que mes interlocuteurices croient que j’ai quinze ans de retard pour la recherche, ce qui n’est pas vrai du tout : en effet, depuis quinze ans, j’ai beaucoup lu en traduction / traductologie (en 2010, j’enseignais le cours de L3 depuis trois ans seulement et je n’avais pas encore repris celui d’agrégation interne), j’ai découvert et approfondi – comme presque tout le monde en France – les concepts de décolonialité et de décolonial, les axes intersectionnels, je me suis conscientisé sur l’importance de recentrer mes recherches autour d’écrivaines ; j’ai communiqué, participé à des séminaires, lu des essais et des œuvres en très grand nombre en réorientant sans cesse mon regard de chercheur.
En tout cas, il faut qu’en janvier – malgré les copies qui vont tomber, malgré l’émission de radio, malgré les deux traductions à reprendre, malgré l’inertie des jours qui se suivent – j’achève les deux romans « allemands », je prenne des notes et extraie des essais théoriques sur la traduction, je prépare mon séjour d’études chez P. N. (qui vient de perdre son père et publie chaque jour sur Facebook des billets qui pourraient constituer sa version – nettement plus profonde – des Notes on Grief d’Adichie).
08:04 Publié dans 2025, Affres extatiques, Lect(o)ures, Nathantipastoral (Z.) | Lien permanent | Commentaires (0)
dimanche, 05 janvier 2025
05012025
Dimanche. Réveillé un peu avant 8 h, je dirais, ce qui tendrait à confirmer que je me réveille tous les matins depuis la mi-décembre autour de 5 h à cause d’un·e voisin·e qui part au travail. Avec de nouveaux horaires, donc. Et sans que jamais j’entende consciemment ce qui me réveille. Étrange.
Le temps s’est beaucoup radouci, avec une pluie fine mais ininterrompue ; depuis octobre, ça ne s’arrête guère, de sorte que je ne comprends pas pourquoi la Loire n’a pas encore débordé, et massivement. Étrange.
Hier, j’ai lu le texte de Cendrars, J’ai vu mourir Fernand Léger, dans le tome 15 et dernier de l’édition Denoël. J’avais vu ce livre, sous un autre format, à la librairie du musée Maillol, et, de fait, Claire, la plus cendrarsienne de nous deux, l’a bien retrouvé dans notre édition. Apparemment, ce serait Nadia Léger qui aurait empêché la publication de ce texte, paru sous une forme tronquée même après sa mort à elle. Étrange. Et je ne sais si je dois – mais je vais le faire, je crois – répertorier ce texte d’une trentaine de pages dans les livres lus.
Hier, Claude Allègre est mort. Voici ce que j’ai écrit sur Facebook : « On ne dit pas du mal des morts mais on ne va quand même pas pleurer Claude Allègre, ce fumier climatonégationniste, ce tribun qui a tant fait de mal avec ses fake news sur les profs... » Visiblement, personne, pas même les personnes avec qui j’ai habituellement des désaccords, n’a trouvé que j’exagérais.
Avant-hier, David Lodge est mort. Pour le coup, je me suis gardé de tout commentaire sur les réseaux sociaux, car je suis nettement moins sûr de mon avis (et surtout, j'étais certain de perdre des plombes à m'échiner dans des discussions sans intérêt). Pour autant, je peux l’écrire ici, où personne ne me lit : ayant toujours trouvé fade et superficielle, et pour tout dire rasoir au possible, l’œuvre de Lodge (je n’ai réussi à finir aucun des 3 livres de lui que j’ai tenté de lire), j’ai tendance à penser que ses thuriféraires, celles et ceux qui vont disant qu’il passera à la postérité comme l’un des plus importants écrivains de la seconde moitié blablabla, font surtout l’aveu qu’ils/elles lisent peu, et n’ont pas lu grand-chose. Comment est-il possible de penser que Lodge est autre chose qu’un petit écrivain distrayant quand on voit les dizaines et les centaines d’immenses écrivain·es que produit notre époque, en toutes langues, sur les cinq continents ?
09:55 Publié dans 2025, Indignations, Lect(o)ures, Moments de Tours | Lien permanent | Commentaires (0)
samedi, 04 janvier 2025
04012025
Encore réveillé vers 5 h, levé à 5 h 20 ; seul avantage, j’ai pu lancer une lessive, qui sera donc étendue tôt le matin, quand le chauffage se relance. Cela dit, il fait -2°, apparemment, donc le chauffage va beaucoup tourner aujourd’hui.
Il y a, sur la droite de mon bureau, une grosse pile de livres, et ce depuis avant les vacances, de sorte qu’il faudrait que j’enregistre une vidéo pour le vlog, mais cela fait un moment que je le dis, et que je ne le fais pas.
Hier, Claire et moi étions à Paris, où il faisait très beau (froid, ensoleillé) : expositions Nadia Léger au musée Maillol et Olga de Amaral à la Fondation Cartier. J’étais un peu sceptique au début face aux (au milieu des) œuvres textiles (tissées, composées de lainage ou de fils) d’Olga de Amaral, que je trouvais froides, mais j’ai fini par être très enthousiaste de certaines pièces ; je pense que cette exposition me restera en mémoire plus longtemps que d’autres. Pour les séries, pas très convaincu par les Estelas (peut-être faudrait-il voir la série complète, 70 et quelques, et non ces 13), bien davantage par les Brumas. Claire ayant beaucoup lu sur les tissages amérindiens et notamment sur les khipu* des Incas**, elle avait une sacrée longueur de regard sur moi.
Pour Nadia Léger (il faudrait dire Nadia Petrova Khodiossevitch Léger, car la plupart des toiles ne sont pas signées du nom qu’elle prit à son deuxième époux), son invisibilisation est à nuancer : tout d’abord, elle est en partie le fait de l’artiste elle-même, assistante de Léger (qu’elle n’avait pas épousé encore) dans les années 30-40, puis acharnée à en perpétuer la mémoire et l’œuvre après 1955 ; par ailleurs, tout le versant communiste/propagandiste de son travail est vraiment de seconde zone, à l’exception des portraits de résistance, d’un tableau tardif représentant Gagarine au milieu de formes suprématistes, et – peut-être – des portraits de grands dirigeants communistes en mosaïque (on ne voit, dans l’exposition, que leur version en taille réduite et sur toile, tout guère convaincant).
Il semble que Nadia Petrova Khodiossevitch Léger s’est placée dans le sillage, sinon dans l’ombre, de divers maîtres (Malevitch, Ozenfant, et Léger surtout), et qu’elle n’a jamais été totalement oblitérée non plus. Dans le documentaire diffusé, il est dit qu’elle a donné, lors du legs à l’État du Musée Fernand Léger de Biot, quelque chose comme 300 ou 350 œuvres, sans qu’on sache si ce sont toutes des œuvres de Léger, ou s’il y en a d’elle dans le lot. Il y a donc des toiles très belles, émouvantes même, mais l’exposition donne de cette œuvre un portrait bigarré, voire en demi-teinte (ce qui n’était pas le genre de la peintre elle-même, plutôt radicale et aux choix picturaux très marqués).
Rentrés plus tôt que prévu, suite à la suppression pure et simple, annoncée par SMS deux heures avant, de notre Corail*** dont le départ était prévu à 18 h 30 en gare d’Austerlitz ; ayant seulement prévu de baguenauder une heure de plus, nous avons donc pris un train partant plus tôt de Montparnasse, et plus rapide (et plus cher). Ces suppressions de trains, imputables à la façon dont la SNCF a décidé de tout rentabiliser en supprimant des postes à tour de bras depuis plusieurs années (ici, il manquait un conducteur ou un chef de bord), ne sont possibles que grâce au système de SMS/mails associés aux réservations de billets : on savait que ça supprimerait des guichets en pagaille, mais ça permet même d’annuler tout bonnement des trains.
* Orthographe quechua, préférable au plus habituel quipu.
** Les khipu sont notamment présents dans Les Mystérieuses Cités d’Or, série que je n’ai pas regardée enfant et pas non plus vue avec les garçons quand ils étaient plus jeunes, et dans les Lettres d’une Péruvienne de Françoise de Graffigny (pas lu).
*** Je sais, c’était un Ouigo, mais déjà que je ne me suis jamais habitué aux Aqualys… De même, il m’arrive encore de dire que je vais faire les courses « à ATAC » alors que ça a changé deux fois de nom depuis 2008.
06:33 Publié dans 2025, BoozArtz, Hors Touraine | Lien permanent | Commentaires (0)
vendredi, 03 janvier 2025
03012025
Encore réveillé autour de 5 h, peut-être avant. Avant les vacances, on s’était dit qu’il y avait peut-être quelque chose (sur le rond-point ?) qui faisait du bruit à cette heure-là : un voisin (celui du 4 ?) qui part travailler ? Mais pourquoi si soudain ?
Journée avec les Cessonnais·es hier ; j’ai pu donner à ma sœur « son » exemplaire de Noires origines. C’est drôlement gentil d’avoir fait la route : environ 5 h aller-retour pour passer à peine plus en notre compagnie. L’après-midi, trois parties de Saboteur et une de The Game, avant un bref tour à pied en passant entre les averses. Temps toujours gris, humide, trempé, comme depuis trois mois.
Au supermarché, le matin, tout le monde se souhaitait la bonne année ; c’est assez ridicule.
2025 : vu toutes les possibilités qu’offre ce nombre, il faudrait tenter quelque chose d’un poil oulipien, mais je n’ai pas le temps. Françoise Guichard se lance dans un sonnet par jour ; je risque le simple neuvain de vers libres (pas folle, la guêpe).
06:20 Publié dans 2025 | Lien permanent | Commentaires (0)
jeudi, 02 janvier 2025
02012025
Levé à 5 h. Pluie, et vent assez fort.
Fini de lire la réédition française de 2024 de Leben ? oder Theater ? de Charlotte Salomon (Vie ? ou Théâtre ? traduction Anne-Hélène Hoog et Michel Roubinet, Le Tripode [2015], 2024). Il s’agit d’une œuvre (livre et bien davantage que cela) absolument capitale, majeure, comme on en lit quelques dizaines au cours d’une vie. Il me semble qu’il doit être difficile d’apprécier parfaitement cela en français, car les textes, leur placement sur les feuillets peints (par calque ou directement sur la gouache) est très souvent signifiant. Que le geste pictural de Salomon s’inscrive dans l’histoire de l’expressionnisme, c’est évident, et cela participe beaucoup de la grande beauté des gouaches, mais ce n’est presque qu’un épiphénomène, car le génie est ailleurs : dans le projet, dans sa réalisation, dans la structure même de cette « opérette » tragique, dans la complexité générique, dans la reprise des mêmes événements sous deux ou trois points de vue différents, dans le récit du trauma… Il faudrait relire ce volume colossal, et lire autour. Ce qui m’a frappé, c’est la filiation/parenté entre les gouaches consacrées à l’œuvre et aux discours de Daberlohn et, d’une part Dostoïevski, d’autre part Hans Henny Jahnn : Salomon a-t-elle pu lire Perrudja ? ou y a-t-il, comme avec Musil, une communauté de création propre à l’époque ?
En faisant de rapides recherches, j’ai vu que le modèle d’Amadeus Daberlohn était Alfred Wolfsohn, dont je n’avais jamais entendu parler. Même si la fameuse lettre donnée en annexe et plusieurs gouaches même témoignent du fait qu’amoureuse de Wolfsohn, Charlotte Salomon en avait fait une sorte de modèle existentiel et même esthétique, Vie ? ou Théâtre ? raconte également la façon dont Amadeus Daberlohn abuse de la naïveté de la jeune Charlotte : c’est aussi un récit d’emprise, et les diverses manigances de Daberlohn font de lui un personnage complexe, avec une face toxique. Cela n’est pas même évoqué/envisagé dans la plupart des articles ou notices que j’ai parcourues, comme celle du colloque de 2007 organisé au centre Roy-Hart en 2007 à Malérargues.
Cela n’est qu’un des nombreux points qui font de cette œuvre capitale un ensemble d’une si grande richesse et d’une telle profondeur. Il faut lire Vie ? ou Théâtre ?
Afin d’éviter tout risque d’abandon ou d’effilochement du projet visant à consigner tout ce que j’aurai lu/vu (cf l’échec de Livres 2024 et plus encore de Musiques 2024), j’ai décidé de m’en tenir, pour l’année qui commence, à trois répertoires simples (tous (anti)datés du 1er janvier) : un pour les livres, un pour les films et séries, un pour les disques et œuvres musicales.
Hier soir, une voisine qui s’occupe des courses de notre voisine d’en face (et qui vit au 3 de l’impasse) est venue nous donner des nouvelles : à la clinique, Mme P* n’avait pas encore passé de scanner, était consciente mais incapable de parler. (Pourtant, hier, quand elle était encore étendue par terre, elle a répondu « nulle part » quand je lui ai demandé si elle avait mal.) La télé allumée avec le son à fond, les mules abandonnées en vrac dans le couloir, tout cela donne à penser – en dépit des apparences – qu’elle n’est pas tombée en se levant de son lit : aurait-elle fait un malaise ou un AVC dans sa chambre après s’y être rendue car elle se sentait mal ? Difficile d’envisager des hypothèses pour quelqu’un qui vit dans une telle confusion, et un tel bazar : à titre d’exemple de sa confusion, son lit est aux deux-tiers recouvert de numéros de la NR… La voisine du 3 de l’impasse nous a dit (mais d’où a-t-elle tiré cela ? j’étais là tout le temps de l’intervention des pompiers) que le capitaine des pompiers avait indiqué « logement insalubre » sur la fiche de prise en charge et que, même sans parvenir à contacter des proches, l’hôpital ne la renverrait plus chez elle. En tout cas, j’atteste que « logement insalubre » est un euphémisme.
07:50 Publié dans 2025, BoozArtz, Lect(o)ures, Moments de Tours | Lien permanent | Commentaires (0)
mercredi, 01 janvier 2025
Répertoire des films / séries vu·es en 2025
Documentaires
[5] Ernest Cole: Lost & Found / Raoul Peck / 2024 *** [chroniqué ici]
[13] On fera des films comme on balance des cailloux / Les Scotcheuses / 2015 **
Fiction
[1] Onoda, 10 000 nuits dans la jungle / 万夜を越えて / Arthur Hariri / 2021 ****
[2] Un éléphant, ça trompe énormément / Yves Robert / 1976 ***
[4] Oppenheimer / Christopher Nolan / 2023 ***
[6] Dieu existe, son nom est Petrunya / Господ постои, името ѝ е Петрунија / Teona Strugar Mitevska / 2019 ***
[7] Bird / Andrea Arnold / 2024 **** [brève chronique ici]
[8] Time Trap / Mark Dennis & Ben Foster / 2023 *
[9] Lingui, les liens sacrés / Mahamat Saleh-Haroun / 2021 **
[10] Pollock / Ed Harris / 2000 **
[11] Hiver à Sokcho / Koya Kamura / 2025 *** [chroniqué ici]
[12] Decision to Leave / 헤어질 결심 / Park Chan-wook / 2022 ***
[14] Lost Highway / David Lynch / 1997 *****
[15] Louise Michel la rebelle / Solveig Anspach / 2008 *
[16] L'histoire de Souleymane / Boris Lojkine / 2024 ***** [brève chronique ici]
[18] The Room Next Door / Almodovar / 2024 **
[19] Fish Tank / Andrea Arnold / 2009 / **
[20] Lamb / Yared Zeleke / 2015 / ***
[21] Mon gâteau préféré / کیک محبوب من / Maryam Moqadam & Behtash Sanaeeha / 2023 / ****
[22] Un autre monde / Stéphane Brizé / 2021 / **
[23] Chroniques de Téhéran / آیههای زمینی / Ali Asgari et Alireza Khatami / 2023 / **** [lire chronique ici]
[24] Le tableau volé / Pascal Bonitzer / 2024 / *
[25] The Lesson / Alice Troughton / 2023 /